Les adhésifs amélo-dentinaires / Biomatériaux Dentaire

Les adhésifs amélo-dentinaires / Biomatériaux Dentaire

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Introduction

Les adhésifs amélo-dentinaires sont des biomatériaux d’interfaces. Ils contribuent à former un lien idéalement adhérent et étanche entre les tissus dentaires calcifiés et des biomatériaux de restauration ou d’assemblage. Cette efficacité dépend principalement de leur mise en œuvre, car la technique adhésive s’avère très sensible à la manipulation. Bien les employer, bien les exploiter requiert au préalable de bien connaître leurs mécanismes d’action.

Définitions

L’adhésion

L’ensemble des interactions qui contribuent à unir deux surfaces entre elles.

L’adhérence

Correspond à la force ou à l’énergie de séparation d’un assemblage collé.

L’adhésif

C’est une substance qui, appliquée à l’état liquide entre deux corps, contribue à les unir après durcissement. Ce durcissement est généralement obtenu par polymérisation.

Généralités sur l’adhésion aux tissus dentaires calcifiés

Les bases de l’adhésion

Définition d’une surface

  • Une surface représente l’enveloppe d’un matériau.
  • L’ensemble des caractéristiques chimiques, structurales, énergétiques et topographiques de la superficie d’un matériau est regroupé sous le terme d’ “état de surface”.

Énergie libre de surface

L’énergie supplémentaire que possèdent les atomes ou molécules de la surface par rapport à ceux qui sont situés à l’intérieur (J/m²). Dans le cas des liquides, cette énergie s’appelle la tension superficielle.

Le mouillage

C’est le degré d’étalement d’une goutte de liquide à la surface d’un solide. La première condition du collage est l’étalement le plus parfait de l’adhésif sur le substrat. L’amélioration de l’étalement sur une surface lisse est proportionnelle à un indice de rugosité, qui correspond à l’augmentation de l’aire réelle de contact que procure la topographie rugueuse (WENZEL ; 1936). La forte rugosité de surface s’avère donc favorable à l’adhésion : les techniques opératoires devront donc la rechercher et l’optimiser.

  • La rugosité s’avère favorable à l’adhésion.
  • Le contact intime entre l’adhésif et le substrat (le mouillage) améliore l’adhésion.
  • Plus l’énergie superficielle du substrat est supérieure à la tension superficielle de l’adhésif, plus le mouillage sera favorable ; d’où l’importance des traitements de surface visant à augmenter celle-ci.

Adhésion à l’émail

  • L’émail est le tissu le plus dur de l’organisme humain. Il est constitué de prismes et de substance interprismatique.
  • Les valeurs d’adhésion à l’émail sont excellentes grâce au mordançage avec l’acide orthophosphorique. L’acide agit sur une épaisseur d’émail comprise entre 5 et 50 μm, en dissolvant la zone interprismatique, ce qui permet de bien exposer les prismes.
  • Il en résulte la formation d’une surface irrégulière et anfractueuse, qui dispose d’une haute énergie de surface, ce qui permet à la résine adhésive hydrophobe de mouiller les microporosités créées dans l’émail. Une fois qu’elle a été polymérisée, une adhésion micromécanique en résulte, capable de s’opposer aux forces antagonistes de contraction de la résine.

Adhésion à la dentine

  • À l’issue de la préparation mécanique de la cavité, la surface dentinaire est recouverte d’une couche de boue dentinaire. Ce dépôt pénètre les canalicules et forme des bouchons.
  • Cette boue dentinaire est faiblement attachée à la surface de la dentine et, par conséquent, ne peut être utile pour l’adhésion à la résine.
  • Le mordançage élimine la boue dentinaire et les bouchons mais, en même temps, déminéralise la dentine intertubulaire et péritubulaire sur une profondeur de 5 à 15 μm, en exposant les fibres de collagène. Ce réseau de fibres de collagène privé de son soutien naturel formé par les cristaux d’hydroxyapatite, se trouve dans des conditions d’instabilité et de faible mouillabilité.
  • L’application de solutions appelées primaire ou primer est indispensable pour soutenir les fibres de collagène et augmenter la mouillabilité : il contient deux différents groupes : l’un hydrophile (OH) qui se lie chimiquement au substrat dentinaire collagénique ; l’autre hydrophobe (méthacrylate) qui se lie avec la résine liquide (adhésif).
  • La pénétration et la polymérisation de la résine adhésive entre les fibres de collagène conduisent à la formation de ce qu’on appelle la couche hybride ; la résine qui pénètre et polymérise à l’intérieur des tubuli forme les prolongements de résine ou tags de résine ; ces deux mécanismes sont pratiquement les bases de l’adhésion micromécanique et priment sur l’adhésion chimique.

Les adhésifs amélo-dentinaires

Critères requis

Biocompatibilité

Un adhésif ne devrait pas induire de réaction néfaste ni pour son utilisateur, ni pour son destinataire (Degrange, 2007). Idéalement, il ne doit pas être allergisant ni toxique. Il ne doit pas avoir de potentiel mutagène. Sur un plan plus local, un adhésif ne doit pas être cytotoxique pour la pulpe.

Adhésion et étanchéité

La préservation du complexe pulpo-dentinaire est le facteur clé : obtenir une interface étanche !

  • Les systèmes adhésifs doivent permettre :
    • D’obtenir une adhésion immédiate de la restauration aux tissus dentaires.
    • De constituer une barrière étanche, empêchant la percolation de débris, fluides et bactéries afin de protéger la dentine et la pulpe sous-jacente, et d’éviter des sensibilités postopératoires ou le développement de caries secondaires.

Durabilité

Les qualités d’adhérence et d’étanchéité doivent non seulement être immédiates mais durables pour éviter :

  • Les colorations marginales
  • Les caries récurrentes
  • Les sensibilités
  • La perte de la restauration

Une adhésion durable à l’émail est assez bien établie. Cependant, au niveau de la dentine, les adhésifs restent sensibles à l’hydrolyse de la couche hybride.

Simplicité et fiabilité de mise en œuvre

Tout praticien devrait idéalement pouvoir espérer des résultats thérapeutiques fiables et reproductibles. La technique adhésive est très sensible à la manipulation. De petits écarts dans la procédure de mise en œuvre sont susceptibles de compromettre la durabilité du collage.

Classification

Approche historique

1ère génération ou période des pionniers : 1952-1982

Le premier adhésif, déposé en 1951 à base de diméthacrylate de l’acide glycérophosphorique, est commercialisé sous le nom de Sevriton®.

  • L’adhésion dentinaire est de 3 MPa.
  • Avantage : la biocompatibilité pour le tissu dentinaire.
  • Inconvénient : cette classe ne prenait pas en compte le problème de la boue dentinaire.
2ème génération : Les esters méthacryliques de l’acide phosphorique : 1980-1985

À la fin des années 1970, l’utilisation sans cesse croissante des composites rend nécessaire d’optimiser l’adhésion et l’étanchéité à la dentine pour une meilleure longévité. La dentine ne subit aucun traitement préalable à leur application. Le potentiel d’adhérence dentinaire de ces produits s’avère cependant encore faible (5 MPa) et très inférieur à la rétention procurée par l’émail mordancé (15-20 MPa).

3ème génération : Introduction de la notion de système adhésif : 1985-1991
  • Développement du concept du système adhésif.
  • C’est une association de plusieurs produits.
  • La résine adhésive est couplée à une ou plusieurs solutions qui sont appliquées préalablement pour stabiliser les boues dentinaires et faciliter leur mouillage et leur infiltration sur les parois cavitaires.
  • Ces systèmes ont permis d’élever la valeur moyenne de l’adhérence à la dentine, dans une fourchette de 8 à 12 MPa.
4ème génération : Reconnaissance du concept du mordançage total : 1990

C’est le principe d’adhésion micro-mécanique de la couche hybride et des brides décrit par Nakabayashi en 1982. Ces systèmes mettent en jeu plusieurs étapes, généralement trois :

  • La première est un mordançage acide de la surface dentinaire.
  • La seconde consiste à favoriser le mouillage et la pénétration de la surface traitée à l’aide de ce qu’on appelle un primaire.
  • La troisième, c’est l’infiltration d’une résine adhésive qui doit co-polymériser avec le composite.
5ème génération : 1995

Regroupe dans un même flacon : primaire et résine adhésive.

6ème génération : L’auto-mordançage par des monomères : 1995

Le mordançage et le primaire regroupés dans un seul flacon. L’agent de mordançage n’est plus un acide minéral ou organique classique mais des monomères acides, aptes à déminéraliser et infiltrer simultanément les tissus dentaires calcifiés. L’emploi de ces primaires acides n’est pas suivi de rinçage (les monomères qu’ils contiennent vont contribuer à la copolymérisation). Leur application est suivie de celle d’une résine adhésive classique.

7ème génération : Les adhésifs “tout en un” : 2000

Ces produits regroupent en un seul conditionnement ou en un seul mélange les 3 étapes du collage. Ils sont théoriquement susceptibles de mordancer et d’infiltrer émail et dentine tout en formant une couche de résine apte à s’unir au composite par photopolymérisation. Ce sont des mélanges complexes qui contiennent des monomères hydrophiles à caractère acide avec suffisamment d’eau pour permettre leur ionisation. Ils renferment aussi des monomères hydrophobes qui sont indispensables pour obtenir une bonne réaction de polymérisation avec les matrices des composites. Ils ont également des solvants organiques comme autres constituants.

Approche rationnelle

La plus utilisée.

Les systèmes avec mordançage préalable et rinçage (M&R)
Les systèmes M&R III : “etch and rinse in three steps”
  1. Le mordançage
    • Consiste à appliquer une solution ou un gel, généralement d’acide phosphorique.
    • Temps d’application moyen :
      • 30 s ⇒ émail.
      • 15 s ⇒ dentine.
    • La durée varie selon pH et la concentration de l’acide.
    Effet du traitement acide sur l’émail :
    • Créer une surface irrégulière avec des microanfractuosités en déminéralisant différentiellement l’émail intra et interprismatique.
    • Augmenter la surface de collage disponible.
    • Augmenter l’énergie de surface afin de favoriser le mouillage par l’adhésif.
    Effet du traitement acide sur la dentine :
    • Élimination de la grande majorité des boues dentinaires.
    • Ouverture des tubuli dentinaire en leur donnant une forme d’entonnoir.
    • Déminéralisation superficielle des zones péritubulaire.
    • Exposer le réseau collagénique qui va participer à la formation de la couche hybride.
    • Créer des microanfractuosités de surface en ouvrant les tubuli dentinaires.
    Cette zone superficielle de dentine est constituée d’un réseau de fibrilles de : +1/4 collagène entrelacées et dispersées dans presque 3/4 de l’eau du rinçage.
  2. Le primaire (Primer)Il se définit comme une solution de polymères hydrophiles et hydrophobes. Il permet :
    • Soit de maintenir suffisamment poreux le réseau de collagène.
    • Soit de permettre sa ré-expansion s’il a été collapsé lors du séchage.
    L’application d’un primaire s’avère à priori essentielle pour permettre une perméabilité de la dentine déminéralisée après évaporation de l’eau qu’elle contient. Une fois l’eau éliminée, la surface présente un caractère hydrophobe propice à la pénétration de la résine. Les primaires contiennent :
    • Eau
    • Monomères hydrophiles : le plus couramment employé est l’HEMA (hydroxy-éthyl méthacrylate)
    • Solvants organiques : contribuent à faciliter l’évaporation de l’eau après application du primaire.
    • L’élimination quasi complète de l’eau par séchage s’avère nécessaire à la formation d’une interphase adhérente de qualité.
    • La présence d’eau résiduelle conduit à la formation de lacunes et une réduction du taux de conversion des monomères de résine.
  3. La résine adhésive
    • Il s’agit d’une résine à base de BisGMA ou de diméthacrylate-uréthane. Les objectifs de l’application de cette résine sont :
      • Au niveau améliaire : la réalisation des microclavetages au sein des microanfractuosités générées par le mordançage acide.
      • Au niveau dentinaire : la résine imprègne le réseau collagénique mis à nu après déminéralisation. Cela conduit à une zone d’interdiffusion résine-dentine appelée couche hybride. De plus, la résine va former des prolongements intratubulaires (tags) dans les tubuli.
Les systèmes M&R II : “etch and rinse in two steps”

Produits présentés en un seul flacon qui contient les éléments du primaire et de la résine adhésive : c’est-à-dire :

  • Monomères hydrophobes
  • Monomères hydrophiles
  • Solvants
  • Des amorceurs de polymérisation
  • Des charges : parfois
  • La présentation de ces adhésifs permet de supprimer l’étape intermédiaire de l’application du primaire.
  • Leurs solvants organiques (généralement l’éthanol ou acétone) activent la pénétration du produit appliqué et facilitent l’évaporation de l’eau, lors du séchage.
  • Leur mise en œuvre est plus simple que celle des M&R III.
Systèmes auto-mordançants (SAM)

Ils sont constitués d’un mélange d’éléments chimiques où chacun a son propre rôle :

  • Des monomères hydrophiles acides polymérisables : qui vont déminéraliser le substrat dentaire.
  • Monomères hydrophobes : destinés à assurer la ténacité de l’adhésif après polymérisation et la liaison avec la première couche de composite.
  • Eau : nécessaire pour activer le potentiel acide des monomères hydrophiles. Elle est essentielle pour l’ionisation des monomères acides.
  • Amorceurs de polymérisation
  • Agents stabilisateurs

Les monomères acides :

  • Déminéralisent et infiltrent simultanément émail et dentine.
  • Ils participent à la polymérisation.
  • Pas de rinçage après leur application.
  • Ils contiennent de l’eau : nécessaire pour activer le potentiel d’ionisation des monomères fonctionnels acides qu’ils contiennent.

Au niveau de la dentine, ils dissolvent en premier :

  • La phase minérale de la boue dentinaire.
  • La dentine sous-jacente : superficiellement.
  • Les ions calcium et phosphates passent en solution dans l’adhésif liquide.

La boue dentinaire n’est donc pas totalement éliminée mais infiltrée.

  • Charges : parfois.
  • Solvants : activent et optimisent principalement la pénétration du produit.
Les systèmes SAM II : “Self etch two steps”
  1. On applique un primaire acide, le “self-etching primer”.
    • C’est l’alternative à l’attaque à l’acide phosphorique.
    • Il déminéralise et infiltre simultanément les tissus dentaires calcifiés.
    • Pour que sa diffusion en profondeur soit efficace, il doit agir pendant un temps minimum (20 à 30 secondes).
  2. Après évaporation de l’eau qu’il contient par séchage, il est recouvert d’une résine dont la majeure partie des composants est hydrophobe (généralement similaire à celle des M&R III).
    • Cette couche de résine permet d’obtenir une co-polymérisation efficace avec la matrice des composites.
Les systèmes SAM I : “all-in-one”
  • Combinent avec un seul produit les rôles de mordançage, primaire et adhésif.
  • Leur avantage apparent est de simplifier la procédure clinique du collage.
  • Outre cet aspect ergonomique, la réduction des séquences opératoires limite potentiellement le risque d’erreur de manipulation que l’on peut faire à chaque étape du collage.
Les systèmes adhésifs universels

Un adhésif universel peut être utilisé avec un protocole d’adhésifs à mordançage préalable ou un protocole d’auto-mordançage.

Caractéristiques :

  • Il adhère à l’émail, la dentine, la céramique et la zircone.
  • Idéal pour le collage direct et indirect.
  • Facile à appliquer grâce à sa grande viscosité.
  • Offre un collage rapide, fiable et durable.
  • Offre une haute intégrité marginale.

Conclusion

Au-delà des performances strictes des adhésifs, on constate que leur mise en œuvre est encore contraignante et très peu tolérante. C’est pour cela que la connaissance parfaite des procédures associées aux systèmes utilisés par chacun reste indispensable.

Les adhésifs amélo-dentinaires / Biomatériaux Dentaire

  La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.  

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