L’écosystème buccal – Parodontologie
Introduction
La bouche est un milieu humide, à une température d’environ 36,6°C, offrant de nombreuses niches écologiques à la flore qui la peuple. Cette flore est principalement constituée de micro-organismes commensaux (bactéries, protozoaires, virus), dont l’abondance et la virulence varient selon les individus, les conditions locales et l’état général des sujets. La cavité buccale humaine est l’un des écosystèmes les plus peuplés de micro-organismes, avec plus de 1000 types différents de bactéries recensés.
Rappel anatomique
La cavité buccale
La bouche est une cavité de forme grossièrement quadrangulaire, symétrique, située à la partie inférieure de la face. Elle est ouverte vers l’avant et l’arrière, limitée en avant par les lèvres séparées par la fente labiale, latéralement par les joues, en haut par la voûte palatine, en bas par le plancher de la bouche, et en arrière par l’isthme du gosier, qui la fait communiquer avec le pharynx. Elle est principalement occupée par la langue et les arcades dentaires maxillaire et mandibulaire.

Le milieu buccal
Le milieu buccal est un environnement physico-chimique qui influence la cavité buccale. Il représente un compartiment ouvert sur deux côtés : les lèvres et le larynx. Il abrite :
- Des éléments de transit comme l’air et les aliments ;
- Des éléments propres mais provisoires, constants comme la salive, ou inconstants tels que le fluide gingival et une flore buccale plus ou moins spécifique, mobile ou fixée, comme la plaque dentaire.
Tous les constituants fixes bordant ce compartiment, tels que les gencives, les muqueuses, la langue et les dents, sont sensibles aux fluctuations du milieu.
Définition de l’écosystème buccal
L’écosystème buccal est un environnement complexe où cohabitent plus de 700 espèces de bactéries différentes. Il repose sur l’interaction entre des groupes d’organismes et leur milieu physique. Il est composé :
- D’une communauté biotique : les micro-organismes vivants ;
- D’un milieu abiotique : les éléments physiques et biochimiques de l’écosystème (salive, fluide gingival, etc.).
Un déséquilibre de cet écosystème entraîne la prédominance d’une flore pathogène, favorisant la survenue de caries dentaires et de parodontopathies.
Terminologie
Écologie : Science étudiant les interactions des êtres vivants avec leur milieu. L’écologie buccale met en évidence :
- Écosystème buccal abiotique : Comprend la salive, le fluide gingival, les dents et les muqueuses.
- Écosystème bactérien biotique : Englobe les germes bactériens.
Écosystème : Ensemble des éléments dont les effets réciproques forment un système stable.
Niche écologique : Zones exposées au bol alimentaire, à l’auto-nettoyage ou protégées par la salive, susceptibles d’abriter des micro-organismes, comme :
- Le capuchon des dernières molaires, les caries, le dos de la langue ;
- Le sillon gingivo-dentaire, les malpositions dentaires ;
- Les fissures et puits des faces occlusales, la gencive ;
- Les obturations iatrogènes (amalgames, composites, coiffes).
Trio buccal : Salive, fluide gingival, flore buccale.
Population : Groupe d’individus de la même espèce vivant ensemble dans un même habitat.
Communauté : Groupe de populations réunies naturellement, vivant ensemble dans le même habitat.
Habitat : Site où un organisme s’établit dans l’écosystème.
Espèce indigène : Présente habituellement dans la bouche, en grand nombre, facilement détectable par des méthodes classiques d’isolement et de culture (espèce majoritaire).
Espèce minoritaire : Présente en faible quantité (<1 %).
Flore normale commensale : Ensemble des espèces indigènes majoritaires et minoritaires.
Concepts écologiques
Pour caractériser l’écosystème buccal, plusieurs concepts sont essentiels :
- Hôte : Organisme hébergeant un parasite, un partenaire synergique ou commensal, nécessaire à son cycle de vie.
- Commensalisme : Interaction où l’hôte ne tire aucun bénéfice de l’organisme qu’il héberge. Certaines espèces commensales indigènes peuvent être bénéfiques ou pathogènes selon les situations.
- Saprophyte : Organisme se nourrissant de matière organique en décomposition par libération d’enzymes.
- Symbiose : Relation à bénéfice mutuel entre au moins deux types microbiens, comme la croissance des anaérobies favorisée par les aérobies qui consomment l’oxygène.
- Antibiose : Antagonisme entre espèces, dont les substances pourraient stabiliser les communautés.
- Synergisme : Relation bénéfique entre espèces pathogènes qui, isolément, ne provoqueraient pas de pathologie.
- Parasitisme : Développement d’un organisme aux dépens d’un autre, tirant profit à son détriment.
Écosystème buccal abiotique
L’environnement buccal est constitué des muqueuses, des dents et de la salive, qui cohabitent plus ou moins harmonieusement avec la flore buccale.
Les dents
Elles participent à la mastication, la déglutition et la phonation.
La salive
La salive contient en permanence :
- Des produits antibactériens non spécifiques (lysozyme) ;
- Des inhibiteurs de protéases ;
- Des anticorps (IgA-s, IgG) ;
- Des hydrates de carbone ;
- Des cellules desquamées ;
- Des facteurs de croissance tissulaires ;
- Des adhésines, favorisant la colonisation des surfaces buccales par les micro-organismes.
Les cellules desquamées, ainsi que certaines matières minérales ou organiques, parviennent dans la salive via le fluide gingival.
La muqueuse buccale
Elle assure :
- La protection des tissus profonds contre les compressions et abrasions dues aux forces mécaniques ;
- Une barrière contre les nombreux micro-organismes saprophytes ;
- Une fonction sensorielle grâce à de nombreux récepteurs de température.
Le fluide gingival
Il contribue à :
- Débarrasser le sillon gingival des matériaux présents ;
- Renforcer l’adhésion de l’attache épithéliale ;
- Apporter des cellules et des substances antibactériennes au milieu buccal.
Écosystème bactérien
La flore buccale constitue un écosystème complexe riche en bactéries, avec plus de 700 espèces recensées (Roberts, 2005). Cette flore, majoritairement commensale, varie selon l’âge et le site de prélèvement, cohabitant dans un équilibre physico-chimique parfait. Un déséquilibre peut provoquer l’installation de pathogènes (Roberts, 2005). La cavité buccale, avec le côlon, est l’une des parties les plus septiques de l’organisme humain.
- Flore commensale : Ensemble de bactéries en relation stable avec l’hôte, sans conséquence pathologique, compatible avec une bonne santé buccodentaire. Également appelée flore saprophyte ou protectrice.
- Flore pathogène : Bactéries en relation instable avec l’hôte, provoquant des états pathologiques.
Les conditions générales
La relation entre micro-organismes et hôte repose sur le parasitisme. Le microbe vit sur les tissus de l’organisme et devient pathogène selon les circonstances, d’où sa qualification d’agent opportuniste. L’écologie buccale dépend des interrelations entre les composants de la flore et de l’influence de l’environnement buccal.
Apports énergétiques | Hydrates de carbone |
---|---|
Sources de matériaux de structure | Carbone, azote |
Facteurs de croissance | Vitamines, acides aminés, minéraux (fer) |
Ions minéraux activateurs des enzymes | Calcium, magnésium, fer |
Conditions environnementales | Température favorable, pH, gaz carbonique, concentration en oxygène, degré d’humidité |
Acquisition de la flore buccale au cours de la vie
À la naissance : La cavité buccale est stérile. Une première contamination survient lors de l’accouchement par des bactéries de la flore vaginale.
Avant l’éruption dentaire : La contamination se fait via la nourriture et les bactéries de l’air ambiant. Chez le nouveau-né édenté, les espèces dominantes sont Streptococcus mitis et salivarius, avec une affinité pour les cellules épithéliales.
Denture lactéale : Augmentation des anaérobies (Streptococcus mutans, sanguinis, fusiformes, spirochètes) due à l’augmentation des habitats.
Denture mixte : À l’adolescence, la flore buccale se rapproche de celle de l’adulte, influencée par les changements hormonaux. Les bactéries à pigmentation noire (Prevotella intermedia, Capnocytophaga, Treponema denticola) sont élevées, tandis que Actinobacillus actinomycetemcomitans et Porphyromonas gingivalis restent peu présentes.
Denture permanente : L’éruption des dents définitives favorise la colonisation par des bactéries anaérobies des surfaces dentaires et des sillons gingivo-dentaires. À l’âge adulte, la flore est affectée par des pathologies comme les caries et les maladies parodontales.
Les principaux genres retrouvés
Cocci Gram (+) | Cocci Gram (-) |
---|---|
Streptococcus, Peptostreptococcus, Gemella | Veillonella, Neisseria |
Bacilles Gram (+) | Bacilles Gram (-) |
---|---|
Actinomyces, Bifidobacterium, Eubacterium, Lactobacillus, Corynebacterium, Propionibacterium | Actinobacillus, Bacteroides, Campylobacter, Capnocytophaga, Eikenella, Fusobacterium, Haemophilus, Porphyromonas, Prevotella, Selenomonas, Treponema |
- Levures : Candida albicans (prédominant).
- Virus : Présents en faible quantité, isolés.
Les facteurs modifiant la flore buccale
Facteurs liés à l’hôte :
- Alimentation ;
- Mécanismes de défense de l’hôte.
Changements hormonaux :
- Adolescence ;
- Grossesse ;
- Ménopause.
Facteurs génétiques : Influencent les flores intestinales et buccales (vieillissement).
Âge : La flore buccale est plus complexe chez l’adulte que chez l’enfant.
Processus pathologiques :
- Perte des dents ;
- Maladies systémiques.
Facteurs physico-chimiques :
- Température ;
- pH ;
- Présence d’oxygène : La diversité des concentrations en O₂ permet la croissance de bactéries aérobies, anaérobies facultatives et anaérobies strictes.
Rôle du microbiote dans le maintien de la santé orale
Le microbiote buccal s’organise dans des niches écologiques comme la salive, les surfaces des tissus durs (dents) et des tissus mous (muqueuse orale). Chaque site est un écosystème unique avec des conditions spécifiques favorisant la colonisation de certaines espèces. Les espèces résidentes (flore commensale) interagissent pour maintenir un équilibre relativement stable, protégeant les dents, les gencives et les muqueuses contre les agents pathogènes, contribuant ainsi à la santé buccodentaire.
Cependant, un changement brutal des conditions (modification de la croissance de certaines souches, disparition d’espèces, apparition de métabolites) peut déstabiliser cet équilibre, favorisant une flore pathogène et entraînant des pathologies comme les caries dentaires et les maladies parodontales.
Conclusion
La cavité buccale, après le côlon, est la deuxième partie la plus septique de l’organisme. Sa flore, composée de plus de 700 espèces bactériennes majoritairement commensales, coexiste dans un même habitat. Toute rupture de l’équilibre de cet écosystème peut être à l’origine des principales maladies buccales : caries et maladies parodontales.
L’écosystème buccal – Parodontologie
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L’écosystème buccal – Parodontologie

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.