Classification et formes cliniques des maladies parodontales
Introduction :
- Les maladies parodontales sont des pathologies multifactorielles d’origine infectieuse avec de nombreux
facteurs modifiants et aggravants qui rendent le diagnostic difficile.
- Ainsi il est intéressant de se pencher sur l’historique des maladies parodontales et celui de leurs classifications pour comprendre l’évolution dans le temps de notre approche clinique des parodontopathies.
- Définition d’une classification :
Une classification permet de ranger par catégories un ensemble de maladies afin que les mêmes termes englobent tous les signes qui la décrivent.
- Objectifs :
- Réaliser un diagnostic différentiels ;
- Poser un diagnostic positif correcte ;
- Etablir, à partir de ce diagnostic, un plan de traitement et un pronostic adapté à la spécificité de chaque patient.
- Réaliser des définitions standards et universelles des cas pour les études épidémiologiques.
- Critères de classification :
- Processus pathologique responsable :
- Inflammatoire : gingivite, parodontite
- Dégénératif : gingivose, parodontose,
- Néoplasique : tumeurs (bénignes et malignes).
- Lésion élémentaire :
- Érythème : Changement de couleur de la muqueuse(rougeur), qui disparaît à la vitro-pression.
- Œdème : gonflement des tissus mous dû à une augmentation du liquide interstitiel.
- Erosion : Perte de substance superficielle, guérissant sans séquelle cicatricielle.
- Nécrose : mort anormale et non programmée d’une cellule ou d’un tissu.
- Vésicule : Lésion circonscrite de petite taille (1 à 2 mm) , contenant un liquide.
- Bulles : comparable à une vésicule mais sa taille est supérieure à 5 mm.
- Mode évolutif :
- Mode aigu : apparition soudaine, brusque, présence de douleurs, courte durée.
- Mode chronique : D’apparition lente, pas de douleurs, évolue à bas bruit.
- Récidivant: Réapparition après traitement.
- Critères étiologiques : Triade de Weski (1936)
- Facteurs locaux : déclenchant (biofilm ), favorisants (tartre,caries…), facteurs indirects : trauma occlusal
- Facteurs généraux : maladies systémiques, troubles hormonaux.
- Facteurs constitutionnels : Age, Sexe, Hérédité.
- Critères topographiques :
- Etat de la lésion : le processus pathologique peut atteindre le parodonte superficiel: on parle alors de gingivite, et lorsque le parodonte profond est atteint on parle de parodontite.
- Etendue : l’affection pouvant être localisée à une dent, un groupe de dents ou s’étendre à toute une
arcade.
- Les anciennes classifications :
- ARMITAGE détermine trois courants de pensées :
- Classifications basées sur l’observation des caractéristiques cliniques 1870-1920 :
- Les praticiens utilisaient la description et l’interprétation personnelle de ce qu’ils observaient
cliniquement ;
- Classifications basées sur les concepts de la pathologie classique 1920-1970 :
- Basées sur le concept : toute pathologie humaine est soit néoplasique, inflammatoire ou non- inflammatoire ;
- Classifications basées sur le rapport infection – réponse de l’hôte 1970-1999
- les travaux de Loe et coll (1965-1968 : gingivite expérimentale), jouaient un rôle très important dans
l’acceptation du nouveau paradigme (origine bactérienne des maladies parodontales)
- Classification du World Workshop 1989 et ses inconvénients :
- Elle était basée sur : Présence/absence d’inflammation, étendue de la perte d’attache, Age
- Classification de l’International Workshop de l’AAP (1999) :
- Modifications :
- Ne tient plus compte de l’âge ;
- Catégories introduites : maladies gingivales,
- Disparition de la forme clinique séparée de « parodontite réfractaire ».
- Termes remplacés : parodontite de l’adulte par parodontite chronique, parodontite à début précoce par
parodontite agressive
- Apparition de nouvelles entités : « abcès parodontal », « lésions endo-parodontales ».
- Formes cliniques
- Gingivite :
Lésion inflammatoire réversible affectant seulement le parodonte superficiel, sans perte d’attache. On distingue deux grandes classes :
- Gingivite induites par la plaque :
- Induites seulement par la plaque ;
- Modifiées par des facteurs systémiques (Endocrinien – dyscrasies sanguines) ;
- Modifiées des médicaments ;
- Modifiées par la malnutrition.
- Gingivite non induites par la plaque :
- Ce sont des lésions gingivales en réponse à une agression spécifique d’origine locale ou générale :
- Maladies gingivales d’origine bactérienne spécifique (gonorrhée, syphilis, etc.) ;
- Maladies gingivales d’origine virale (infections herpétiques, etc.) ;
- Maladies gingivales d’origine fongique (candidose, gingivitérythémateuse linéaire, etc.);
- Maladies gingivales d’origine parasitaire (toxoplasmose);
- Maladies gingivales d’origine génétique (fibromatose, etc.) ;
- Maladies dermatologiques buccales (lichen plan, pemphigoïde, lupus érythémateux, etc.) ;
- Réactions allergiques (aliments et additifs, matériaux de restauration dentaire ,dentifrices…) ;
- Parodontites :
- Parodontites chroniques :
- Elle se caractérise par :
- Pertes d’attaches et alvéolyses progressives suivies de la formation de poches parodontales et/ou de récessions.
- Le taux de destruction est en relation avec les facteurs locaux (corrélation positive).
- La lyse osseuse est généralement horizontale et régulière .
- De progression lente ou modérée et peut être :
- Généralisée : > 30 % de sites atteints de perte d’attache.
- Localisée : ≤ 30 % de sites atteints.
- Selon la sévérité de la maladie parodontale elle peut être:
- Débutante avec une perte d’attache entre 1 et 2 mm,
- Modérée avec une perte d’attache entre 3 et 4 mm,
- Sévère si la perte d’attache est supérieure ou égale à 5 mm.
- Parodontites agressives :
- Elle se caractérise par :
- Pertes d’attache et alvéolyses sévères et rapides.
- Patients en bonne santé générale.
- Grande susceptibilité familiale.
- Taux de facteurs locaux n’est pas en relation avec le taux de destruction (corrélation négative);
- La lyse osseuse est généralement verticale et irrégulière.
- Elle peut être:
- Localisée : Localisation spécifique au niveau des premières molaires et des incisives, avec présence d’une perte d’attache interproximale sur au moins 2 dents permanentes, dont une première molaire,et intéressant au plus 2 dents supplémentaires autres que les incisives et les premières molaires.
- Généralisée : Présence d’une perte d’attache interproximale généralisée affectant au moins 3 dents permanentes autres que les incisives et les premières molaires .
- Parodontite comme manifestations de maladies systémiques :
- Groupe hétérogène d’affections pathologiques systémiques incluant la parodontite en tant que manifestation :
- Associées aux désordres hématologiques : Neutropénie acquise –Leucémie
- Associées à des troubles génétiques :Neutropénies cycliques et familiales. Syndrome de DOWN. S de
déficience de l’adhésion leucocytaire. S de papillon – Lefèvre. S de CHEDIAK- HIGASHI-
Agranulocytoses infantiles génétiques. Syndrome de COHEN. Syndrome d’EHLERSDANLOS (TYPES
IV et VIII) -Hypophosphatasies.
- Maladies parodontales nécrotiques :
- Atteinte inflammatoire aigue des tissus gingivaux caractérisée par :
- Nécrose et ulcère de la papille interdentaire ;
- Saignements gingivaux ;
- Douleur ;
- Autres symptômes : Pseudomembranes, halitose , Adénopathie, fièvre.
- On distingue :
- La gingivite nécrosante : atteinte gingivale sans perte d’attache ni perte osseuse;
- La parodontite nécrosante : Similaire à la GN avec perte d’attache et perte osseuse.
- Abcès du parodonte:
- Inflammation purulente, aiguë située dans la paroi gingivale d’une poche parodontale /sulcus entrainant
une destruction tissulaire significative et rapide, en fonction de la localisation :
- Abcès gingival ;
- Abcès parodontal ;
- Abcès péricoronaires .
- Lésions endo-parodontales:
Lésion impliquant à la fois la pulpe et les tissus parodontaux .
- Malformations ou déformations et conditions acquises :
- Défauts muco-gingivaux autour des dents,
- Crêtes édentées,
- Trauma occlusal.
- Nouvelle classification des conditions saines et pathologiques des tissus parodontaux et péri- implantaires (CATON ET ALL 2017) :
- Points essentiels :
- Etendre la classification de 1999 aux conditions péri-implantaires ;
- Définition de l’état de santé parodontale ;
- Santé parodontale possible sur parodonte réduit (notion de « parodontite traitée »)
- Le saignement au sondage étant le paramètre principal pour identifier cliniquement les gingivites, avec un seuil à 10 % ;
- La distinction parodontite chronique/parodontite agressive a été remplacée par un modèle reposant sur la sévérité/complexité de la maladie en 4 stades et selon son risque de progression en 3 grades.
- Formes cliniques :
- Santé parodontale :
- Définition :
- Santé parodontale :
- Définie par l’absence d’inflammation ou un niveau faible d’inflammation d’un parodonte intact ou réduit,
et incluant des patients qui ont des antécédents de maladies parodontales traitées avec succès.
- Diagnostic :
- Absence d’érythème, d’œdème, de symptômes décrits par le patient ;
- Saignement au sondage (BOP) < 10 % des sites ;
- Profondeur de sondage ≤ 3 mm.
- Sur un parodonte sain : Pas de perte d’attache, ni d’alvéolyse radiographique.
- Sur un parodonte réduit : présence de perte d’attache et d’alvéolyse radiographique :
- Sans antécédents de parodontite : récession parodontale ou une élongation coronaire ;
- Avec antécédents de parodontite traitée et stabilisée. Profondeur de sondage ≤ 4 mm (en absence de
saignement au sondage).
- Gingivites :
- Elle se caractérise par :
- Présence des signes de l’inflammation : l’érythème, l’œdème, la douleur, la chaleur.
- BOP ≥ 10% des sites ;
- Profondeurs de sondage ≤ 3mm.
- Elle est localisée si BOP est de 10 à 30% des sites;
- Généralisée si BOP > 30 % des sites.
- Peut être observée sur un parodonte intact ou sur parodonte réduit mais stable.
- Elles sont scindées en deux grandes catégories :
- Gingivites induites par la plaque :
- Il existe trois classes majeures:
- Associée au biofilm uniquement : liée à la quantité de dépôts bactériens présents sur les surfaces dentaires.
- Modifiée par les facteurs systémiques ou locaux ;
- Facteurs systémiques (facteurs modifiants) : Tabagisme -hyperglycémie-nutrition- médications – stéroïdes sexuels (puberté -menstruations – grossesse – Contraceptifs oraux) Affections hématologiques.
- Facteurs de risque locaux (facteurs prédisposant) : facteurs de rétention de plaque – Sécheresse buccale
- Accroissement gingival médicamenteux : Médicaments en cause : Antiépileptiques (phénytoïne ) et acide valproïque – Immunosuppresseurs (ciclosporine A ) – Inhibiteurs calciques (nifedipine ).
- Maladies gingivales non-induites par la plaque :
- Ces maladies gingivales peuvent avoir plusieurs étiologies :
- Infections spécifiques : bactérienne, virale,fongique ;
- Génétique : fibromatose gingivale héréditaire;
- Systémique : Ex le lichen plan ou le lupus érythémateux ;
- Lésions traumatiques d’origine thermique, physique ou chimique.
- Processus réactionnels : Epulis.
- Les néoplasmes: lésions précancéreuse, Malins ;
- Pigmentations gingivales : Mélanose tabagique ;
- Parodontites :
- Définition clinique :
« C’est une maladie inflammatoire chronique associée à un biofilm dysbiotique , avec destruction progressive
du système d’attache de la dent. Elle se caractérise par trois facteurs :
- La perte des tissus de support parodontaux, qui se manifeste par la perte d’attache clinique (CAL) et
une perte de l’os alvéolaire radiologique ;
- La présence de poches parodontales ;
- Le saignement gingival.
- Formes cliniques :
- Les parodontites (concept stades / grades) :
- Stades : 4 Stades établis en fonction de la sévérité de la maladie et de la complexité de son traitement
- Stade 1 : parodontites débutantes
- Perte d’attache clinique (CAL) : 1 à 2 mm ;
- Alvéolyse radiographique < 15 % surtout horizontale ;
- Aucune dent perdue pour des raisons parodontales ;
- Profondeur de poche ≤ 4 mm ;
- Atteinte de furcation : non ou Cl 1.
- Stade 2 : parodontites modérées
- PAC : 3 à 4 mm ;
- Alveolyse radiographique 15 à 33 % surtout horizontale ;
- Aucune dent perdue pour des raisons parodontales ;
- Profondeur de poche ≤ 5 mm ;
- Atteinte de furcation : non ou Cl 1.
- Stade 1 : parodontites débutantes
- Stade 3 : Parodontite sévère :
- PAC ≥ 5 mm ;
- Alveolyse radiographique ≥ 50% ;
- Perte de 4 dents ou moins pour des raisons parodontales ;
- Profondeur de poche ≥ 6mm ;
- Pertes osseuses verticales ≥ 3 mm
- Atteintes de furcation : Cl 2 ou 3.
- Stade 4 : Parodontite avancée ;
- PAC ≥ 5 mm ;
- Alveolyse radiographique ≥ 50%
- Perte de 5 dents ou plus pour des raisons parodontales ;
- En plus des caractéristiques du stade 3, des mobilités importantes et des dysfonctions occlusales : < 20 dents résiduelles (10 paires antagonistes).
- Grades :
- Ils vont permettre de classer les risques de progression de la parodontite ainsi la réponse attendue au traitement standard :
- Grade A : progression lente :
- Pas de perte osseuse sur 5 ans ;
- Ratio perte osseuse / âge (R) : < 0,25 ;
- Beaucoup de plaque avec peu de destruction.
- Pas de facteurs modifiants (tabac-diabète).
- Grade B : progression modérée :
- Perte osseuse < 2 mm sur 5 ans ;
- R : compris entre 0,25 et 1 ;
- Adéquation entre quantité de plaque et destruction.
- Fumeur < 10/jour
- Diabète :HbA1c < 7
- Grade C : progression rapide :
- Perte osseuse ≥ 2 mm sur 5 ans;
- Un ratio R > 1 ;
- Destruction importante disproportionné par rapport àà la quantité de plaque ;
- Fumeur > 10/jour ;
- Diabète HbA1c ≥ 7.
- Etendue :
- Localisée : < 30 % des dents atteintes de pertes d’attache ;
- Généralisée ≥ 30% des dents atteintes de PA.
- Maladies parodontales nécrotiques (MPN) :
- On distingue :
- La gingivite nécrosante : atteinte gingivale sans perte d’attache ni perte osseuse
- La parodontite nécrosante : Similaire à la GN avec perte d’attache et perte osseuse.
- La stomatite nécrosante. la nécrose s’étend au-delà de la gencive vers la muqueuse alvéolaire.
- Maladies systémiques affectant les tissus parodontaux :
- Maladies ayant un impact majeur sur la perte des tissus parodontaux :
- Des maladies systémiques rares qui ont des conséquences graves avec la survenue précoce d’une parodontite sévère.
- Ces cas sont définis comme une parodontite en présence de la pathologie.
- Affections génétiques
- Immunodéficiences congénétales :syndrome de Down, S de Papillon-Lefèvre, …) ;
- Atteintes de la muqueuse buccale et de la gencive (ex : Épidermolyses bulleuses…)
- Maladies des tissus conjonctifs (ex : Syndrome d’Ehlers-Danlos types IV et VIII,…) ;
- Troubles métaboliques et endocriniens (ex : Hypophosphatasie, Rachitisme…)
- Immunodéficiences acquises :HIV et neutropénie :
- Maladies inflammatoires : maladies inflammatoires chroniques de l’intestin.
- Maladies et consommations ayant un impact variable sur le parodonte :
- Des maladies systémiques plus courantes qui modifient l’évolution de la parodontite mais qui ne doivent
pas être considérée comme un diagnostic distinct.
- Diabètes, Obésité, Ostéoporose, Arthropathies (polyarthrite rhumatoïde, arthrose), Stress et dépression, Tabagisme (dépendance à la nicotine) et les médicaments sont inclus en tant que facteur descriptif dans le processus de gradation.
- Maladies pouvant entraîner la perte des tissus parodontaux en l’absence de parodontite :
Des maladies rares affectant les tissus de soutien parodontaux indépendamment de l’inflammation induite par le biofilm de la plaque dentaire :
- Tumeurs : primaires des tissus parodontaux (Carcinome épidermoïde oral ,Métastases secondaires ;
- Autres affections intéressant les tissus parodontaux :Histiocytose à cellules de Langerhans, .
- Abcès parodontaux :
Accumulation localisée de pus située dans la paroi gingivale d’une poche parodontale /sulcus entrainant une
destruction tissulaire significative et rapide.
- Lésions endo-parodontales :
Communication pathologique entre la pulpe et les tissus parodontaux au niveau d’une dent et peut se
présenter sous forme aigüe ou chronique.
- Les maladies et états péri-implantaires :
Il existe trois classes :
- La santé péri-implantaire :
- Mucosite péri-implantaire :
- Péri-implantite :
Conclusion
- Les systèmes de classification évoluent sans cesse, tous les modèles qui ont vu le jour ont leurs lots
d’imperfections et de critiques.
- La nouvelle classification, a mis à jour la classification précédente faite en 1999 jugée obsolète, en intégrant les dernières données acquises de la science.
- Elle représente un guide pour la planification du traitement et permet une approche personnalisée des soins aux patients.
Classification et formes cliniques des maladies parodontales
Voici une sélection de livres:
Parodontologie Relié – 1 novembre 2005
Guide pratique de chirurgie parodontale Broché – 19 octobre 2011
Parodontologie Broché – 19 septembre 1996
MEDECINE ORALE ET CHIRURGIE ORALE PARODONTOLOGIE
Parodontologie: Le contrôle du facteur bactérien par le practicien et par le patient
Parodontologie clinique: Dentisterie implantaire, traitements et santé
Parodontologie & Dentisterie implantaire : Volume 1
Endodontie, prothese et parodontologie
La parodontologie tout simplement Broché – Grand livre, 1 juillet 2020
Classification et formes cliniques des maladies parodontales

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.