Le traitement de la classe II division 2

Le traitement de la classe II division 2

Le traitement de la classe II division 2

Le traitement de la classe II division 2

Introduction

Les malocclusions de classe II division 2 sont relativement peu fréquentes, représentant entre 2 à 3 % et 14 % des malocclusions traitées selon les études. Elles sont caractérisées par une arcade mandibulaire en position distale, des incisives maxillaires palatoversées et un recouvrement incisif excessif. Cette classe II division 2 constitue une véritable entité clinique, souvent associée à une hypodivergence mandibulaire, un faible décalage squelettique sagittal et un contexte musculaire hypertonique.

Dans sa forme la plus courante, l’esthétique faciale n’est pas perturbée, mais cette malocclusion présente un risque parodontal important et peut être à l’origine de dysfonctionnements temporomandibulaires.

Spécificités des classes II division 2

Spécificités diagnostiques et esthétiques

Formes cliniques

En fonction du contexte squelettique et de l’axe de l’incisive mandibulaire, on distingue deux types de classes II division 2.

Classe II division 2 primitive

Elle est caractérisée par un décalage squelettique sagittal faible (classe I ou classe II légère, parfois classe III) dans un contexte d’hypodivergence mandibulaire avec une croissance de type rotation antérieure. L’angle interincisif est très ouvert en raison de la birétro-alvéolie. Cette forme est souvent d’origine héréditaire, influencée par la position des germes incisifs, le tonus musculaire et la typologie verticale. Elle peut apparaître précocement, même en denture temporaire.

Le traitement de la classe II division 2
Le traitement de la classe II division 2

Illustration :
Patiente présentant une classe II division 2 primitive.
Photographies exobuccales montrant l’harmonie du profil et les signes caractéristiques. Téléradiographie de profil et valeurs de l’analyse : classe I squelettique, hypodivergence mandibulaire et birétro-alvéolie incisive.

Classe II division 2 secondaire ou acquise

Cette forme résulte d’une compensation alvéolaire d’une classe II squelettique par vestibuloversion de l’incisive mandibulaire, accompagnée d’une incisive maxillaire palatoversée ou normale. Le contexte squelettique vertical est plus variable.

Le traitement de la classe II division 2
Le traitement de la classe II division 2

Illustration :
Patiente présentant une classe II division 2 secondaire.
Photographies exobuccales montrant la convexité du profil et la symphyse pointue. Téléradiographie de profil et valeurs de l’analyse : classe II squelettique, mésodivergence mandibulaire et inclinaison normale de l’incisive mandibulaire.

Séméiologie des classes II division 2

Le tableau clinique, surtout dans les formes primitives, est dominé par les signes d’hypodivergence mandibulaire.

Examen clinique exobuccal

De face :

  • Visage plutôt carré, bien développé transversalement, harmonieux.
  • Diminution de l’étage inférieur.
  • Lèvres jointes.
  • Lèvre supérieure fine et courte.
  • Lèvre inférieure ourlée, légèrement éversée, avec un sillon labiomentonnier marqué.
  • Stomion haut situé.
  • Sourire souvent gingival en raison de l’égression des incisives maxillaires et de la brièveté de la lèvre supérieure.

De profil :

  • Profil sous-nasal plus ou moins concave : nez et menton marqués. L’harmonie esthétique dépend de la position et de la forme de la symphyse, souvent projetée dans les classes II division 2 primitives.
  • Sillon labiomentonnier marqué.
  • Étage inférieur diminué antérieurement, bord basilaire de la mandibule faiblement incliné, angle goniaque fermé.

Examen endobuccal

Il révèle :

  • Une voûte palatine profonde dans sa partie antérieure.
  • Un vestibule également profond.
  • Une arcade maxillaire carrée, large, plutôt courte ; une arcade mandibulaire de forme variable, souvent en discordance avec l’arcade maxillaire ; une courbe de Spee accentuée ou non, pouvant être brisée en distal de la canine.
  • Des relations molaires de classe II, plus ou moins sévères, souvent asymétriques.
  • Des molaires maxillaires parfois en mésioposition suite à des dystopies canines.
  • Un surplomb normal ou diminué : la palatoversion peut intéresser deux, trois ou quatre incisives, voire tout le groupe incisivocanin maxillaire (classification de Bassigny).
  • Un recouvrement très augmenté, en relation avec :
  • Une supraclusion incisive due à l’arcade maxillaire, mandibulaire ou les deux.
  • Parfois une infra-alvéolie molaire.
  • Une occlusion transversale normale avec linguoversion des secteurs latéraux maxillaires pour compenser la discordance des arcades, ou une vestibuloclusion des prémolaires maxillaires.
  • Des dents souvent de petite taille, en particulier les incisives latérales maxillaires, avec des anomalies dentaires de forme et de nombre relativement fréquentes.
  • Une dysharmonie de hauteur des festons gingivaux fréquente.
Le traitement de la classe II division 2
Le traitement de la classe II division 2

Illustrations :

  1. Occlusion de classe II division 2 :
  • Vue latérale : Classe II molaire et canine, diminution du surplomb par palatoversion des incisives maxillaires.
  • Vue frontale : Supraclusion, palatoversion des incisives centrales maxillaires et vestibuloversion des incisives latérales.
  1. Vues occlusales : Modèles maxillaire et mandibulaire montrant la discordance des formes d’arcade.
  2. Courbe de Spee : Importante avec égression des incisives mandibulaires.
Le traitement de la classe II division 2

Le traitement de la classe II division 2

Vues occlusales des modèles maxillaire et mandibulaire montrant la discordance des formes d’arcade.

Le traitement de la classe II division 2

Téléradiographie de profil et céphalométrie

Ces examens montrent :

  • Un décalage squelettique sagittal variable :
  • Faible dans les classes II division 2 primitives, parfois classe III squelettique.
  • Plus marqué dans les formes secondaires.
  • Une hypodivergence mandibulaire et des signes de rotation antérieure dans la dimension verticale.
  • Une palatoversion de l’incisive maxillaire, une version linguale ou vestibulaire de l’incisive mandibulaire, et une ouverture de l’angle interincisif.
  • Visualisation des éventuelles coudures coronoradiculaires des incisives.

Les malocclusions de classe II division 2 se caractérisent par un schéma facial hypodivergent, un menton proéminent, une palatoversion des incisives maxillaires et un recouvrement augmenté.

Spécificités dentaires

  • Dents souvent de petite taille, notamment les incisives latérales maxillaires.
  • La palatoversion des incisives maxillaires dans les formes primitives résulte de la position initiale du germe contre la corticale vestibulaire, contribuant à la formation de coudures coronoradiculaires fréquentes, qui participent au verrouillage antérieur.
  • Absence ou abrasion du cingulum des incisives maxillaires, réduisant le calage vertical.
  • Fréquence élevée d’anomalies dentaires congénitales (incisives latérales maxillaires de petite taille ou agénésiques, inclusions canines, etc.).

Spécificités évolutives des classes II division 2

Croissance en rotation antérieure marquée

  • Forte croissance condylienne orientée en haut et en avant, accompagnée d’une rotation antérieure marquée.
  • Verrouillage de la mandibule par la sangle labiale hypertonique, gênant son allongement, ce qui conduit à un enroulement sur elle-même.
  • La rotation antérieure aggrave la supraclusion incisive et renforce le blocage antérieur.
  • En l’absence de traitement, cette croissance aggrave la malocclusion.
  • La symphyse mandibulaire projetée vers l’avant rend le profil sous-nasal plus concave et accentue l’hypodivergence. Cependant, un décalage sagittal important peut être réduit.

Risques associés à la classe II division 2

La classe II division 2 présente des risques parodontaux, dentaires et articulaires en lien avec la supraclusion incisive et l’environnement musculaire.

Risques parodontaux

  • Excès de recouvrement entraînant un contact entre :
  • Incisives maxillaires et gencive vestibulaire des incisives mandibulaires.
  • Incisives mandibulaires et muqueuse palatine.
  • Destruction du parodonte dans ces régions.
  • Pressions excessives de la sangle labiomentonnière fragilisant le parodonte incisif mandibulaire.

Risques dentaires

  • Forte activité des élévateurs et contact forcé entre incisives maxillaires et mandibulaires, favorisant des usures prématurées des faces palatines au maxillaire et vestibulaires à la mandibule.

Risques articulaires

  • Risques élevés de dysfonctionnement de l’ATM, tant musculaire qu’articulaire.
  • Guide antérieur entraînant une désocclusion verticale rapide.
  • Angle d’ouverture fonctionnel de Slavicek réduit, mandibule en position rétruse forcée, favorisée par la contraction du temporal postérieur et l’hyperactivité de la sangle antérieure.
  • Interférences occlusales antérieures nécessitant des mouvements d’évitement, provoquant fatigue et spasmes musculaires, désorganisant le système musculo-condylo-discal et entraînant déplacement ou déformation du disque.

Approche thérapeutique des classes II division 2

Objectifs thérapeutiques

Les objectifs découlent du tableau clinique :

Intercepter ou supprimer le verrou antérieur et rétablir le guide antérieur

  • Premier objectif du traitement.
  • Permet un repositionnement antérieur et un recentrage de la mandibule, ainsi qu’une libération de la croissance mandibulaire.
  • Obtenu par réduction de la supraclusion incisive et correction de l’axe des incisives maxillaires.

Réduction de la supraclusion incisive

  • Causes possibles :
  • Infra-alvéolie molaire.
  • Supra-alvéolie incisive (maxillaire et/ou mandibulaire).
  • Combinaison des deux.
  • Infra-alvéolie molaire : Corrigée par égression des molaires, favorisée en denture mixte ou par tractions intermaxillaires après suppression de l’interposition linguale. Ouvre la dimension verticale, mais risque de récidive en raison de l’activité des élévateurs. Plus stable en denture mixte.
  • Supra-alvéolie incisive : Due à un excès de développement vertical des procès alvéolaires et à une égression excessive des incisives.
  • Égression excessive des incisives maxillaires : Évaluée par un sourire gingival, corrigée par ingression pour rétablir une harmonie lèvres-dents.
  • Ingression des incisives maxillaires : Souvent associée à leur vestibuloversion. Si palatoversion initiale marquée, correction préalable pour éviter son aggravation.
  • Ingression des incisives mandibulaires : Indiquée si la courbe de Spee participe à la supraclusion, souvent associée à une vestibuloversion.

Correction des axes incisifs maxillaires

  • Obtenue par vestibuloversion ou torque radiculopalatin, souvent combinés.
  • La vestibuloversion ouvre un espace fonctionnel (OJ) favorisant le repositionnement antérieur de la mandibule.
  • Angle interincisif fermé et dynamique mandibulaire normale (excursions latérales et propulsion) pour la stabilité verticale.
  • Hypercorrection des axes incisifs recommandée.

Préserver l’esthétique faciale

  • Profil bilabial rétrusif fréquent dans les formes primitives, accentué par la concavité sous-nasale due à la croissance du nez et du menton.
  • Préserver ou améliorer le soutien labial par les dents.
  • Éviter les extractions pour ne pas reculer les incisives mandibulaires ni aggraver la rotation antérieure.
  • En cas d’extractions nécessaires (encombrement, courbe de Spee sévère), privilégier les extractions postérieures à l’arcade mandibulaire.
  • En cas de dysharmonie dentodentaire ou agénésie, privilégier coronoplasties par addition ou implants pour augmenter le soutien labial.

Assurer la stabilité des résultats

  • Typologie de croissance et contexte musculaire favorisent la récidive.
  • Réduire le risque par :
  • Hypercorrection des axes incisifs.
  • Amélioration de la position du stomion.
  • Rééducation neuromusculaire pour muscler l’orbiculaire supérieur et détendre l’orbiculaire inférieur.

Moment de traitement

  • Denture mixte : Traitement interceptif pour agir sur la croissance mandibulaire et ouvrir la dimension verticale. Préservation des espaces pour éviter les extractions ultérieures.
  • Denture permanente : Rétablissement du guide antérieur par ingression incisive, libération de la croissance mandibulaire, et engrènement. Extractions possibles en cas d’encombrement ou de décalage sagittal résiduel.
  • Fin de croissance : Chirurgie orthognathique en complément si dysmorphose sévère ou préjudice esthétique (rare chez l’adolescent).

Prévention des classes II division 2

  • Limitée par le caractère héréditaire et le contexte musculaire hyperactif.
  • Recommandations :
  • Tétée orthostatique pour favoriser la propulsion mandibulaire.
  • Alimentation non mixée pour établir une mastication unilatérale alternée, contrôlant l’évolution verticale des incisives.
  • Rééducation de la déglutition atypique avec interposition latérale de la langue.

Traitement des classes II division 2 en denture mixte

Instauré en denture mixte stable ou en fin de denture mixte, suivi d’une phase de finition en denture permanente. Réduit les risques parodontaux et articulaires.

Lever les verrous antérieurs et corriger la supraclusion incisive

  • Suppression du blocage antérieur par vestibuloversion des incisives et correction de la supraclusion.
  • En denture temporaire, interception précoce dès la chute des incisives temporaires avec une plaque palatine interincisive (portée 6 mois) pour limiter l’égression des incisives maxillaires.
  • Dispositifs pour corriger la supraclusion :
  • Arc d’ingression des incisives (arc de base de Ricketts).
  • Forces extra-orales hautes sur gouttière ou arc.
  • Plan rétro-incisif.
  • Plaque palatine avec auvents latéraux.
  • Ingression par mini-vis d’ancrage.
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Illustrations :

  1. Arc de base d’ingression de Ricketts.
  2. Force extra-orale sur gouttière.
  3. Mécanique ingressive incisive sous contrôle d’un ancrage vissé non enfoui.
Le traitement de la classe II division 2
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Le traitement de la classe II division 2

Arc de base  d’ingression de Ricketts

Force extra-orale sur gouttière                  

Corriger la classe II squelettique

  • Après levée des blocages occlusaux, la mandibule se recentre spontanément, réduisant la classe II occlusale et squelettique.
  • Croissance mandibulaire libérée, poursuivant la correction.
  • Thérapeutique orthopédique souvent non nécessaire dans les formes primitives (décalage faible).
  • En cas de décalage sévère :
  • Activateur de classe II avec force extra-orale antérieure à traction haute pour éviter la récidive de la supraclusion.
  • Égression molaire favorisée par meulage des surfaces interocclusales.

Traitement en denture permanente

Respecte les mêmes objectifs. Choix sans extractions dépend de :

  • Sévérité de l’encombrement et de la courbe de Spee.
  • Concavité du profil nasolabial.
  • Décalage de classe II occlusale.
  • Croissance résiduelle.

Traitement sans extraction de prémolaires

  • Recommandé dans les formes primitives avec profil labial birétrusif, symphyse marquée, et forte rotation antérieure. Indiqué si :
  • Encombrement faible ou absent.
  • Linguoversion des incisives mandibulaires autorisant leur vestibuloversion.
  • Classe II modérée.
  • Croissance résiduelle favorable.
  • Phase initiale : Lever les verrous occlusaux par vestibuloversion et ingression des incisives maxillaires pour repositionner la mandibule et libérer la croissance.
  • Dispositifs :
  • Tractions intermaxillaires de classe II.
  • Forsus.
  • Appareil de Herbst.

Illustrations :

  1. Appareil de Herbst.
  2. Forsus.

Traitement avec extraction de prémolaires

  • Indiqué en cas d’encombrement ou courbe de Spee sévère.
  • Privilégier les extractions des deuxièmes prémolaires mandibulaires et premières prémolaires maxillaires pour préserver le soutien labial.
  • Extraction des quatre deuxièmes prémolaires possible, mais complique la gestion de l’ancrage maxillaire.
  • Choix 14-24-35-45 indiqué si dimension verticale squelettique non trop réduite et classe II complète.
  • Extractions différées après déverrouillage antérieur pour évaluer la classe II résiduelle.

Traitement chirurgico-orthodontique

  • En fin de croissance, si dysmorphose squelettique sévère ou préjudice esthétique :
  • Hypodivergence mandibulaire marquée avec insuffisance verticale de l’étage inférieur.
  • Classe II squelettique par rétrognathie mandibulaire avec profil rétrusif.
  • Chirurgie : Avancée mandibulaire, souvent complétée par une génioplastie d’harmonisation.

Contention et stabilité

  • Malocclusion très récidivante en raison de l’hyperactivité de la sangle labiale, favorisant la linguoversion des incisives et la récidive de la supraclusion.
  • Rééducation neuromusculaire pour normaliser les fonctions et détendre la sangle labiomentonnière, essentielle pour la stabilité.
  • Anticipation de la récidive par :
  • Hypercorrection des axes et du recouvrement incisifs.
  • Bon positionnement des incisives maxillaires par rapport au stomion.
  • Dynamique mandibulaire normale avec excursions suffisantes.
  • Contention :
  • Arcade mandibulaire : Contention collée pour stabiliser le groupe incisivocanin.
  • Arcade maxillaire :
    • Résine palatine jusqu’au bord incisal.
    • Barrette vestibulaire très gingivale.
    • Butées de composite au niveau cingulaire.

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