Traitement des dents incluses

Traitement des dents incluses

Traitement des dents incluses

Introduction

Les dents incluses représentent un pôle d’intérêt majeur en odontostomatologie, classées par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) comme un des fléaux mondiaux en regard de sa prévalence élevée, fréquemment en rapport avec les dysharmonies dentomaxillaires.

L’appellation générique « dents incluses », au sens large, correspond à une entité à part entière. Elle regroupe différents diagnostics anatomocliniques comme autant de sous-entités, s’appuyant sur une sémiologie variée et dont le cadre nosologique a été résumé par la Classification odonto-stomatologique des dents incluses.

Leurs approches thérapeutiques impliquent généralement une collaboration pluridisciplinaire où le protocole chirurgico-orthodontique se fait en étroite collaboration avec la chirurgie parodontale.

Toutefois, la mise en place d’une dent incluse est rarement un processus simple ; il convient d’avertir le patient de la durée du traitement et des risques encourus. Pour que la décision de traitement soit prise en connaissance de cause, il devra connaître les solutions de remplacement avec leurs avantages et leurs inconvénients afin de s’assurer de sa motivation et de sa coopération tout au long du traitement.

Généralités

Classification anatomo-pathologique des dents incluses

Voir cours Diagnostic des dents incluses.

Épidémiologie des dents incluses selon l’OMS

Voir cours Diagnostic des dents incluses.

Différents volets thérapeutiques des dents incluses

Le traitement des dents incluses peut se décliner en deux grands volets : le premier est dit préventif et regroupe différentes méthodes et moyens pour prévenir la survenue de cette inclusion ; le second volet, curatif, vise à désinclure cette dent non encore sur arcade après sa date d’éruption habituelle.

Ce dernier a recours à trois alternatives de traitement :

  • Les solutions non orthodontiques
  • Les procédés chirurgicaux exclusifs
  • Le traitement orthodontico-chirurgical

Traitement préventif

La suspicion de dents incluses va conduire le praticien à mettre en œuvre une guidance préventive. Le but est de réveiller le potentiel éruptif le plus tôt possible par la levée de ces obstacles pour avoir une éruption spontanée.

L’extraction des dents surnuméraires et odontomes

Les germes surnuméraires et odontomes doivent être diagnostiqués et avulsés précocement afin de prévenir les risques d’inclusions.

Maintenir les espaces

La perte prématurée de la dent temporaire nécessite la mise en place éventuelle d’un mainteneur d’espace pour éviter le mésialage des dents adjacentes rétrécissant ainsi l’espace d’extraction, créant alors un obstacle à l’éruption dentaire de la dent permanente.

L’aménagement d’un couloir d’éruption

Avulsion de la dent temporaire

Dans le but de modifier le trajet d’éruption de la dent permanente, car une dent en évolution se déplace « dans le trajet de moindre résistance ».

Expansion transversale du maxillaire

L’augmentation de l’espace disponible par dispositif orthopédique ou orthodontique (disjoncteur ou Quad helix).

Fermeture thérapeutique d’un diastème inter-incisif

Cette fermeture s’effectue par freinectomie labiale supérieure face à un frein inséré profondément ou avulsion d’un mésiodens qui s’interpose entre deux centrales.

Traitement curatif

Abstention

Les motifs d’abstention peuvent venir du patient qui refuse un traitement orthodontique alors que la dent incluse ne présente, de par sa position, aucune menace pour son environnement. Cette décision peut également être liée à l’impossibilité de mettre en place la dent incluse, du fait de sa position ou de son ankylose et de la volonté d’éviter une avulsion trop délabrante au niveau osseux ou des dents adjacentes. Ou encore devant une contre-indication générale interdisant tout acte sanglant. Dans tous les cas, un contrôle régulier sera nécessaire afin d’intercepter toute pathologie évolutive de la dent laissée en place.

Extraction

Cette décision thérapeutique exceptionnelle nécessite d’évaluer les conséquences complexes d’une extraction précoce sur le plan parodontal. Elle trouve son indication lorsque la dent incluse est associée à des complications nerveuses, infectieuses, mécaniques, tumorales, aussi en cas d’ankylose ou encore une angulation corono-radiculaire importante rendant son éruption impossible dû à un axe horizontal. Tout comme elle peut être indiquée quand elle représente un danger pour une dent adjacente.

Procédés chirurgicaux exclusifs

L’alvéolectomie conductrice

Cette technique a été mise en place par Chatellier en 1957. Elle permet de créer chirurgicalement une voie d’éruption en dégageant tout obstacle osseux et en éliminant le sac péricoronaire. Il est nécessaire que l’espace sur l’arcade soit suffisant ou puisse être créé, et que le dégagement de la couronne soit possible sans léser les dents voisines. Pour que le potentiel d’égression soit maximal, l’alvéolectomie conductrice doit être réalisée avant l’édification du tiers apical. Cette technique présente l’avantage de profiter du potentiel éruptif naturel et physiologique de la dent (dent retenue) ; néanmoins, les risques d’ankylose et/ou de résorption osseuse dus au traumatisme du ligament parodontal lors de la résection osseuse ne sont pas à négliger.

L’ostéotomie directionnelle

Elle permet de corriger la position de la dent sans bouger son apex. Elle est indiquée lorsque la canine est en position haute, avec un apex proche de sa place normale. Un lambeau de l’incisive latérale à la première molaire permet d’exposer la table externe jusqu’aux deux tiers radiculaires, puis une mobilisation au syndesmotome est effectuée avec un déplacement apical minime et donc un risque de mortification secondaire diminué. Mais le risque d’ankylose existe toujours et la position de la canine limite souvent l’indication de ce procédé.

L’autotransplantation

C’est la réimplantation dans un alvéole néoformé au niveau du site d’éruption physiologique de la dent incluse extraite. Cette technique est réservée lorsque le traitement chirurgico-orthodontique est impossible ou quand la dent incluse est une menace pour les racines des dents adjacentes. Elle nécessite une place suffisante sur l’arcade aussi bien mésiodistale que vestibulopalatine et doit être réservée à des dents immatures. Le risque majeur est le processus d’ankylose-rhizalyse qui aboutit à la résorption totale de la racine dans un délai variable de 7 à 10 ans.

Traitement chirurgico-orthodontique

C’est la technique de choix de mise en position fonctionnelle d’une dent incluse ; elle offre les meilleurs résultats et une pérennité de la dent à long terme. Un espace à recréer sur l’arcade est presque toujours indispensable ; cette thérapeutique, souvent longue, est possible à tout âge mais exige une motivation et une hygiène irréprochable de la part du patient.

Contre-indications
Relatives

Patient non motivé est une source d’échec.

Absolues
  • La dent est horizontale dans le processus palatin.
  • La pointe cuspidienne de la dent incluse croise la ligne inter-incisive.
  • Maladie générale.
Phases du traitement
Préparation orthodontique préchirurgicale

Elle a pour but d’assurer un ancrage afin de tracter la dent incluse dès son dégagement chirurgical et d’aménager un site receveur sur l’arcade avec un excès de place de 2 mm. Cette action pourra être obtenue par dispositif fixe multiattaches. Cet ancrage est le plus souvent offert par l’ensemble de l’arcade mais il peut être également assuré par des mini-implants spécifiques.

Phase chirurgicale de désinclusion

La technique chirurgicale utilisée pour aborder une dent sera fonction de sa situation spatiale palatine ou vestibulaire en position basse, moyenne ou haute. Cette phase passe par trois temps :

  • Temps muqueux : consiste en un décollement d’un lambeau de pleine épaisseur si la dent est en intra-osseux ou uniquement un lambeau de semi-épaisseur si elle est sous-muqueuse.
  • Temps osseux : réalisé à l’aide d’une fraise boule diamantée montée sur pièce à main associée à une rugine, cette étape consiste en l’élimination de tout le tissu osseux qui surplombe la dent incluse et qui crée un obstacle à son éruption. On appelle cela le dégagement osseux.
  • Temps dentaire : il décrit les mêmes étapes du collage conventionnel ; à la seule différence que ce collage va se faire sur une surface dentaire appartenant à une dent incluse et en per-opératoire. On suivra les étapes suivantes :
  • Séchage de la surface dentaire.
  • Mordançage à l’acide orthophosphorique 37 % pendant 30 secondes.
  • Rinçage.
  • Séchage.
  • Application du liant.
  • Charger le composite sur le dos du bracket.
  • Collage du bracket sur la surface dentaire dégagée.
  • Polymérisation.
Phase orthodontique post-chirurgicale

Elle a pour but la mise en place sur l’arcade de la dent incluse. Il faut relier les transmetteurs de force aux générateurs de force dans une position idéale afin de guider l’éruption de la dent. Son positionnement final est toujours fastidieux car s’il est facile de placer la couronne dans son site, il n’en est pas de même de son apex.

Transmetteurs de force

Ils représentent l’intermédiaire entre le point d’ancrage sur la dent incluse et le dispositif orthodontique fixe sur lequel on va prendre appui pour tracter cette dent. Sous forme de ligature métallique en toron se terminant par un crochet ou présentant des œillets, ou sous forme de chaînette élastique.

Générateurs de force

Ce sont des dispositifs d’ancrage, qui, par le biais des transmetteurs, vont délivrer des forces permettant la traction de la dent incluse. On pourra utiliser soit des auxiliaires tels que l’arc lingual ou l’arc transpalatin, ou bien des minivis. Une fois que la dent a fait son apparition, il faudra procéder à son alignement dans l’arcade dentaire par la poursuite du traitement orthodontique fixe multi-attache jusqu’à l’obtention d’une occlusion optimale.

Conclusion

Lors de la constitution progressive de la denture adulte, ce processus peut affecter toutes les dents ; cependant, la thérapeutique sera différente selon la dent considérée. C’est pour cela que le diagnostic de toute dent incluse doit se faire le plus précocement possible afin de surveiller son évolution et de mettre en œuvre une thérapeutique adaptée au moment opportun.

De plus, les techniques actuelles de diagnostic et l’accroissement de la précision de la mécanique orthodontique sont une aide précieuse à la décision thérapeutique. En effet, si par le passé la mise en place des dents incluses consistait surtout en un geste chirurgical, l’évolution des techniques de collage et la coopération entre parodontologiste et orthodontiste ont permis d’améliorer les résultats.

Hélas, toutes les dents incluses ne pourront pas être mises en place et c’est à l’orthodontiste de le déterminer afin d’éviter un traitement inutile voire iatrogène.


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