Gingivectomie et Gingivoplastie / Parodontologie

Gingivectomie et Gingivoplastie / Parodontologie

Gingivectomie et Gingivoplastie / Parodontologie

Introduction

La gingivectomie est probablement la technique la plus ancienne en chirurgie parodontale. Dès 1912, Pickerill employa ce terme pour définir l’excision de la paroi molle des poches parodontales. Son objectif est d’éliminer le tissu gingival en excès afin d’obtenir un contour gingival esthétiquement harmonieux et compatible avec les manœuvres d’hygiène individuelles et professionnelles.

Rappels

Historique

  • 1746 : Fauchard note que le tartre qui s’insinue entre la gencive et les dents entraîne le gonflement ainsi que le saignement des gencives, d’où la nécessité de découper ce ruban de gencive sous lequel s’insinue le tartre.
  • 1867 : Riggs se fait connaître par une technique qui se rapproche de la gingivectomie. La discussion qui suit le rapport de Hitchcock en 1869 nous apprend que le praticien utilisait sa chirurgie depuis 25 ans.
  • 1884 : Robicseck utilise le terme de gingivectomie pour désigner l’élimination chirurgicale de la paroi gingivale de la poche parodontale.
  • 1912 : Pickerill emploie également ce terme.
  • 1979 : Pour Karranza, si le terme littéral de gingivectomie signifie excision gingivale, c’est en réalité une opération en deux étapes comprenant l’élimination de la gencive malade suivie du détartrage et du surfaçage radiculaire.
  • 1980 : Ainamo propose les différentes angulations pour les incisions primaires.
  • 1983 : Pour Lindhe, la définition initiale de Pickerill demeure valable.

Maladies parodontales (MPs)

Les maladies parodontales, ou parodontopathies, sont définies comme des maladies infectieuses multifactorielles (ANAS, Mai 2002). Elles sont caractérisées par des symptômes et signes cliniques qui peuvent inclure une inflammation visible ou non, des saignements gingivaux spontanés ou provoqués d’importance variable, la formation de poches en rapport avec des pertes d’attache et d’os alvéolaire, une mobilité dentaire et peuvent conduire à des pertes de dents.

Traitement des maladies parodontales

Le traitement chirurgical peut être considéré comme un complément de la thérapeutique initiale (étiologique) permettant de contribuer au contrôle de la plaque et à la préservation à long terme du parodonte. Les traitements chirurgicaux poursuivent deux grands buts :

  • Faciliter l’élimination des dépôts tartriques et bactériens par l’hygiène bucco-dentaire.
  • Rendre aux tissus leur santé par une anatomie proche de la normale et maintenir cet état à long terme.

Parmi ces traitements chirurgicaux figurent la gingivectomie et la gingivoplastie.

Définitions

Gingivectomie

La gingivectomie est une exérèse chirurgicale par incision suivie d’excision. Selon la direction de l’incision, la technique de gingivectomie sera dite :

  • Gingivectomie à biseau externe (GBE) : La lame du bistouri est inclinée à 45° en direction occlusale.
  • Gingivectomie à biseau interne (GBI) : La lame du bistouri est inclinée à 15° en direction apicale.

Gingivoplastie

La gingivoplastie consiste en un remodelage de la surface gingivale.

Objectifs de la gingivectomie

  • Correction des contours gingivaux et réduction des hypertrophies ou des hyperplasies.
  • Élimination radicale des poches parodontales modérées supérieures à 3 mm.
  • Accès à l’élimination du tartre et des dépôts radiculaires.
  • Amélioration de l’accès aux procédés de restauration.
  • Obtention d’une morphologie favorisant le contrôle de la plaque (Ramfjord, 1979).

Place de la gingivectomie dans le plan de traitement

Comme pour toute chirurgie parodontale, les gingivectomies sont réalisées après une préparation tissulaire soigneuse qui a pour objectif de réduire ou d’éliminer l’inflammation. L’étape de la réévaluation permettra ensuite de vérifier l’efficacité des manœuvres d’hygiène effectuées par le patient et d’apprécier le potentiel de cicatrisation des tissus. Le praticien doit s’assurer de la réduction significative de l’inflammation afin d’envisager le déroulement de la chirurgie dans de bonnes conditions (tissus plus facilement manipulables, hémorragie per-opératoire diminuée, douleur postopératoire moins intense).

Préparation du patient

La gingivectomie sera réalisée après la phase du traitement initial. Cette étape vise à éliminer les causes locales déclenchantes et aggravantes de la maladie et à recréer des conditions optimales de fonction et d’élimination de la plaque bactérienne. Elle comprend :

  • Motivation à l’hygiène bucco-dentaire.
  • Contrôle de la plaque.
  • Détartrage-surfaçage radiculaire.
  • Suppression des causes iatrogènes.
  • Extraction des dents condamnées.
  • Révision des soins endodontiques.
  • Contention.
  • Prothèse provisoire.

Après réévaluation et vérification de l’efficacité des manœuvres d’hygiène, un bilan sanguin est vérifié.

Gingivectomie à biseau externe (GBE)

Définition

On entend par GBE une technique correspondant à l’exérèse gingivale par incision suivie d’excision, la lame du bistouri étant inclinée à 45°.

Indications

Selon les formes cliniques de la maladie parodontale :

  • Fausses poches résultant des hyperplasies et des hypertrophies gingivales inflammatoires.
  • Poches supra-osseuses peu profondes.

Selon la morphologie gingivale :

  • Gencive attachée suffisante pour supporter une réduction sans mettre en danger son rôle de protection.
  • Texture de la gencive marginale, épaisse et fibreuse, permettant une incision franche et un modelage de son contour auparavant inadapté.

Contre-indications

  • Gencive marginale mince.
  • Gencive attachée insuffisante.
  • Poches s’étendant au-delà de la gencive attachée dans la muqueuse.
  • Poches intra-osseuses.
  • Nécessité de modifier l’architecture osseuse.
  • État de santé du patient contre-indiquant tout risque d’hémorragie.
  • Contre-indication absolue : Impossibilité d’obtenir une hygiène rigoureuse et efficace, et en présence de certaines pathologies comme le VIH, la neutropénie, la leucémie aiguë monoblastique, l’infarctus du myocarde, l’angine de poitrine, ou les cardiopathies ischémiques.

Avantages

  • Technique simple avec un bon accès visuel.
  • Élimination complète de la poche.
  • Résultat morphologique prévisible.

Inconvénients

  • Indications très limitées.
  • Plaie importante, douleur postopératoire.
  • Guérison par seconde intention.
  • Risque de mise à nu de l’os.
  • Perte d’attache gingivale.
  • Mise à nu du collet de la dent.
  • Incidence phonétique et esthétique dans la région incisivo-canine.

Instrumentation

Les plateaux de chirurgie parodontale peuvent être arrangés de plusieurs façons. Un plateau standard comporte l’assortiment de base des instruments utilisés en chirurgie buccale, auquel on ajoute quelques instruments de parodontie.

Technique chirurgicale

Incisions

En prenant comme repère les points sanglants :

  • Première incision : De type biseau externe, réalisée légèrement apicalement aux points sanglants.
  • Deuxième incision : Intra-sulculaire.

Remodelage (Gingivoplastie)

Les bords externes de l’incision doivent être adoucis par le ciseau à gencive. On racle la surface, surtout au niveau interdentaire, avec le Kirkland pour guider la cicatrisation et obtenir un contour gingival satisfaisant.

Hémostase

Elle se réalise à l’aide d’une compresse imbibée de sérum physiologique, maintenue fermement sur le site opératoire pendant quelques minutes.

Pansement chirurgical

Un pansement chirurgical de type Coe-pack est mis en place pour protéger la plaie. Il ne doit pas être trop épais et doit s’adapter aux surfaces et aux espaces interproximaux sans recouvrir le bord libre ni les surfaces occlusales. Le pansement doit rester en place pendant une semaine.

Conseils postopératoires

  • Alimentation semi-liquide pendant 48 heures, pas trop chaude ni épicée.
  • Maintien de l’hygiène bucco-dentaire (HBD) sauf au niveau de la zone opérée.
  • Prescription de bains de bouche à commencer dès le lendemain pendant 8 jours.
  • Application de compresses glacées pour éviter l’œdème postopératoire.
  • Revenir pour un autre pansement chirurgical s’il se détache dans les 48 heures.

Cicatrisation

La cicatrisation est de seconde intention (non-fermeture du site opéré, conjonctif exposé).

Épithélium

  • Immédiatement après l’intervention, un caillot fibrino-plaquettaire protège la plaie, rapidement remplacé par du tissu de granulation cicatriciel.
  • L’épithélialisation commence dès la 10e heure à partir des berges de la plaie en direction coronaire.
  • À partir du 2e jour postopératoire, la migration des cellules épithéliales atteint un rythme de 0,5 mm/jour, aboutissant progressivement à la formation d’un épithélium de surface non kératinisé et d’un début de sillon gingival.
  • Dès le 7e jour, la kératinisation a lieu dans la 2e semaine postopératoire. Il faut attendre 4 à 5 semaines pour observer histologiquement une guérison épithéliale externe complète et l’établissement d’un sillon gingival et d’une nouvelle attache épithéliale.

Conjonctif

  • La cicatrisation conjonctive commence dès la formation du caillot par une invasion de cellules inflammatoires, notamment des polynucléaires neutrophiles.
  • Une intense activité fibroblastique prend le relais, atteignant un pic 3 à 4 jours après l’opération.
  • La synthèse des collagènes est marquée entre la 2e et la 3e semaine postopératoire. Leur maturation et l’orientation fonctionnelle des fibres conjonctives sont observées après la 5e semaine.
  • En moyenne, 5 semaines sont nécessaires pour observer histologiquement une cicatrisation épithéliale et conjonctive complète.

Gingivectomie à biseau interne (GBI)

Définition

Grant (1979) définit la gingivectomie à biseau interne, ou gingivectomie inverse, comme l’exérèse de gencive par le biais d’un lambeau. Elle permet en outre le curetage-surfaçage sous-gingival à ciel ouvert sans exposition intentionnelle de la surface osseuse. Schluger (1978) décrit la GBI comme une technique d’exérèse gingivale accomplie à l’aide d’un biseau interne.

Indications

  • Gencive de texture fibreuse.
  • Gencive attachée insuffisante : la GBI économise la quantité de gencive à exciser.
  • Poches supra-osseuses.
  • Hypertrophie tubérositaire.

Contre-indications

  • Mêmes interdits et restrictions que la GBE concernant les contre-indications d’ordre général et l’hygiène bucco-dentaire.
  • Poches infra-osseuses.
  • Défauts osseux nécessitant un remodelage.
  • Gencive fine.

Instrumentation

  • Ciseaux à suture.
  • Pince porte-aiguille.
  • Fil de suture.

Technique chirurgicale

Asepsie

Anesthésie locale

Marquage des fonds des poches

Met en évidence la base des poches parodontales, un préalable nécessaire pour visualiser le futur tracé d’incision.

Incisions

  • Incision primaire : Réalisée avec une lame n°11, commence à 2 mm du rebord gingival, c’est-à-dire coronairement aux points sanglants. Le bistouri pénètre dans le tissu gingival jusqu’à la crête osseuse en faisant un angle de 15° à 30° avec l’axe de la dent. Cette incision suit le contour des dents de la zone opérée. Dans les espaces inter-proximaux, elle préserve au maximum le volume de la papille tout en enlevant l’épithélium infiltré ou malade.
  • Incision secondaire : Sulculaire, réalisée avec une lame n°15, dans le but de sectionner l’attache épithéliale et faciliter l’exérèse des tissus. Elle est parallèle à l’axe de la dent.

Élimination des tissus de granulation et du tartre

Élimination du tissu granulomateux à l’aide de curettes, suivie d’un surfaçage soigneux des surfaces radiculaires pour éliminer le cément infiltré d’endotoxines et permettre la réattache de structures épithélio-conjonctives.

Hémostase

Un des avantages de la GBI est de ne pas laisser de tissu conjonctif exposé. Le saignement per-opératoire est donc moins abondant comparé à la GBE. Une compression du site opéré à l’aide d’une compresse pendant 15 minutes suffit en général pour arrêter l’hémorragie.

Sutures

  • Avec un fil non résorbable de calibre 3/0.
  • Suture discontinue avec des points interdentaires (en 0 ou de matelassier) si la gingivectomie concerne les deux faces d’un secteur.
  • Suture continue en O suspendue si une seule face d’un secteur est opérée.

Conseils postopératoires

  • Alimentation semi-liquide pendant 48 heures, pas trop chaude ni épicée.
  • Maintien de l’informatics bucco-dentaire sauf au niveau de la zone opérée.
  • Prescription de bains de bouche à commencer dès le lendemain pendant 8 jours.
  • Application de compresses glacées pour éviter l’œdème postopératoire.
  • Rendez-vous après une semaine pour l’ablation du fil de suture.

Cicatrisation

La cicatrisation est de première intention (fermeture du site opéré, conjonctif non exposé).

  • Immédiatement après l’intervention : Un caillot se forme entre le tissu gingival et la dent.
  • 2e heure postopératoire : Une nécrose superficielle aux bords de la plaie est observée.
  • 2e jour : La prolifération des cellules épithéliales commence, et une nouvelle attache épithéliale est établie au début de la 2e semaine.
  • Cicatrisation conjonctive : Caractérisée par une réaction inflammatoire dès les premiers jours, un début de synthèse des collagènes dès le 4e jour, une maturation et une orientation fonctionnelle des fibres de collagène entre la 2e et la 3e semaine postopératoire.
  • Cicatrisation totale : Épithéliale et conjonctive, demande 21 jours.

Comparaison entre GBE et GBI

CritèreGBEGBI
Hauteur de la gencive attachéeSuffisanteInsuffisante
Inclinaison de la lame45° coronairement15° à 30° apicalement
Pansement/suturePansement chirurgicalPoints de suture
GingivoplastieNécessaireNon nécessaire
Cicatrisation2e intention, guérison lente1re intention, guérison rapide
HémostaseLenteRapide
Visualisation du contour gingivalRestauration en 3 à 4 semainesVisualisation immédiate

Gingivoplastie

Le remodelage artificiel de la gencive vise à créer des contours gingivaux physiologiques. Appelée gingivoplastie, elle a souvent lieu en tant qu’opération secondaire sur une gencive cicatrisée sur laquelle les anomalies ont persisté malgré un traitement préalable. La gingivoplastie peut être réalisée à l’aide d’un bistouri, d’un scalpel, de fraises diamantées ou de procédés d’électro-chirurgie. On procède à :

  • Un effilage de la gencive marginale.
  • La création d’un contour marginal dentelé.
  • L’amincissement de la gencive attachée.
  • La création de sillons interdentaires verticaux.
  • Le modelage des papilles interdentaires visant à produire des voies de passage pour les aliments.

Autres variétés

Papillectomie

Définition et indications

La papillectomie consiste en l’excision de papilles interdentaires. Elle permet l’allongement de la couronne clinique dans les cas suivants :

  • Caries proximales distantes de la crête osseuse (au moins 2 mm).
  • En prothèse, léger manque de hauteur proximale pour un moignon.

Autres indications :

  • Excision des papilles flottantes ne reposant sur aucune structure osseuse, durant le surfaçage, pour dégager les embrasures et permettre une hygiène parfaite.
  • Ablation des hyperplasies ou hypertrophies papillaires localisées.

Technique

La papillectomie peut se faire à l’aide d’un bistouri d’Orban ou d’une lame fine montée sur un manche classique. La lame s’insère dans le sillon mésial ou distal parallèlement à la surface radiculaire jusqu’à ce qu’elle éprouve une résistance.

Gingivectomie par électro-chirurgie

C’est un moyen d’excision rapide. Le courant délivré par l’appareil sera ajusté sur le réglage le plus bas permettant d’inciser sans ressentir de résistance appréciable à la pointe de l’électrode bistouri. Son avantage est que l’incision entraîne une hémorragie minime. L’instrument permet d’inciser le tissu gingival suivant l’angle souhaitable.

Conclusion

Les gingivectomies sont des techniques simples qui permettent d’obtenir des résultats satisfaisants si elles sont bien maîtrisées. Elles restent toujours d’actualité dans l’arsenal thérapeutique de la chirurgie parodontale, notamment en situation post-orthodontique et préprothétique.

Gingivectomie et Gingivoplastie / Parodontologie

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