Salive, radiation ionisante et rétention Apport de l’implantologie en prothèse maxillo-faciale

Salive, radiation ionisante et rétention Apport de l’implantologie en prothèse maxillo-faciale

Salive, radiation ionisante et rétention Apport de l’implantologie en prothèse maxillo-faciale

Introduction

  • La prothèse maxillo-faciale (PMF) est à la fois l’art et la science de la reconstruction artificielle du massif facial, dans les cas de perte de substance d’origine acquise ou de malformation congénitale.
  • Le principal objectif de cette discipline tend vers une réhabilitation à la fois fonctionnelle, esthétique et psychologique.
  • Redonner au patient une vie relationnelle acceptable et une intégration sociale optimale doit être une de nos priorités.
  • La réhabilitation prothétique ne peut compenser complètement la perte de substance ; les prothèses utilisées, qui peuvent aller des plus simples (une prothèse conjointe) aux plus complexes (épithèse remplaçant l’hémiface), doivent répondre aux mêmes règles de rétention que celles employées en prothèse « conventionnelle ».
  • Cependant, en prothèse maxillo-faciale, l’état général du patient et les conditions locorégionales liées à sa pathologie peuvent compliquer la finalisation de la prothèse, en particulier au niveau de la rétention de celle-ci.

Conséquences locales de la radiothérapie

Sur les muqueuses

La mucite

Les muqueuses de la bouche figurent parmi les tissus les plus sensibles à l’action de la radiothérapie. Les cellules des muqueuses digestives sont parmi celles qui se divisent le plus vite des tissus de l’organisme. La radiothérapie provoque un arrêt des mitoses des cellules de la muqueuse, ce qui entraîne une perte de substance et donc des aphtes. Les réactions apparaissent à partir de la troisième semaine de traitement.

La radiomucite est une lésion de la muqueuse induite par une irradiation et est une source importante de morbidité. On distingue les radiomucites aiguës et chroniques :

  • Les premières sont consécutives à des irradiations délivrées à doses élevées en un temps court.
  • Plus rares, les mucites chroniques sont la conséquence tardive des précédentes ou d’une irradiation chronique à faible dose ou à des périodes prolongées (mois ou années).

Sur les muscles et les articulations temporo-mandibulaires

Le trismus

Ces effets secondaires se présentent lorsque les muscles masticateurs ou l’articulation temporo-mandibulaire (ATM) sont compris dans le champ d’irradiation. C’est souvent le cas pour le traitement des tumeurs nasopharyngiennes, de la région rétromolaire et du palais mou.

Une fibrose et une sclérose graduelle de la capsule articulaire ou des muscles vont entraîner une constriction permanente des mâchoires appelée trismus. Le trismus est donc la contraction constante et involontaire des muscles des mâchoires (masséter), qui diminue voire empêche l’ouverture de la bouche. L’ouverture buccale normale est de 4 à 5 cm. Lors d’un trismus, elle peut être diminuée à un doigt, voire aucun.

Un trismus peut s’installer 3 à 6 mois après la radiothérapie et va avoir des conséquences sur de nombreuses fonctions telles que le langage, la mastication et l’hygiène, qui seront rendues difficiles. Ces complications seront d’autant plus sévères si le traitement par radiothérapie est combiné à un traitement chirurgical. En prothèse dentaire, des difficultés surviennent lors de la prise des empreintes et parfois une impossibilité d’insérer le porte-empreinte.

Sur les glandes salivaires

La xérostomie

L’irradiation de la région cervico-faciale est une cause majeure de xérostomie, qui peut apparaître aussi bien dans la phase aiguë, à savoir pendant et dans les trois mois suivant la fin de la radiothérapie, que dans la phase tardive. Trois ans après une radiothérapie, 64 % des survivants présentent une xérostomie modérée à sévère.

La xérostomie a un impact négatif important sur la qualité de vie des patients atteints d’un cancer de la sphère ORL traités par radiothérapie. Une intolérance au port de prothèses amovibles est également régulièrement décrite, car le film salivaire servant de rétention à la prothèse est alors inexistant.

Définition de la rétention

La rétention est le résultat obtenu par l’ensemble des moyens de liaison unissant l’élément prothétique à la préparation ou à la surface d’appui et s’opposant à sa désinsertion volontaire ou fortuite.

Selon le type de prothèse choisi, elle va s’exprimer par la friction, le mouillage ou l’adjonction d’éléments préparés et adaptés. Elle permet de s’opposer à la désinsertion, d’obtenir une efficacité fonctionnelle, de contribuer à l’esthétique et de favoriser l’intégration psychique de la prothèse.

Rétention en prothèse

Rétention en prothèse fixée : la friction

La rétention, en prothèse fixée, est déterminée par la notion d’opposabilité des parois ; cela se traduit par un quasi-parallélisme des murs de la préparation (notion de dépouille, de hauteur de la préparation, d’état de surface, d’interposition de matériau et d’éléments de rétention secondaires). Par ailleurs, la rétention est liée aux capacités du matériau d’interposition placé entre la préparation et l’intrados prothétique (ciments de scellement et colles).

Rétention en prothèse amovible partielle

La rétention, en prothèse amovible partielle, est obtenue principalement grâce à des éléments fabriqués, assurant la liaison entre la prothèse et les dents bordant l’édentement. Il en existe une grande diversité, allant de la conception la plus simple à la conception la plus complexe. Ils sont divisés en deux familles :

  • Crochets : Ils sont constitués d’une ceinture métallique ouverte, destinée à entourer la dent restante sur plus de 180°. Ils participent à la rétention grâce à l’extrémité du bras vestibulaire et aussi à la stabilisation et à la sustentation.
  • Attachements : Ce sont des dispositifs mécaniques unissant, avec ou sans possibilité de mouvement, deux parties de prothèses entre elles, ou une prothèse amovible aux dents restantes (Batarec).

Rétention en prothèse amovible totale

L’adhésion

En prothèse amovible totale, la rétention est basée sur l’adhésion ; adhésion de la salive à la muqueuse d’une part, et de la salive à la base prothétique d’autre part. Il convient de réaliser un joint périphérique assurant l’étanchéité, s’opposant à une perte d’adhésion, à la pénétration de l’air et à l’accroissement du volume liquidien sous la prothèse.

La salive

Elle possède :

  • Un rôle mécanique de solvant et lubrifiant.
  • Un rôle protecteur par auto-nettoyage buccal et action antibactérienne ; cette activité de protection des muqueuses de la cavité buccale est possible si la salive est suffisante en quantité et en qualité. La protection en surface se fait grâce :
    • À une action mécanique de détersion.
    • À une action chimique du pH salivaire et de l’effet tampon.
    • À une action enzymatique du lysozyme et des inhibines salivaires, action complétée par celle des enzymes bactériennes et endogènes, et des éléments immunologiques.
  • D’autres rôles de digestion, d’élimination de certaines substances.

La sécrétion salivaire peut diminuer et même devenir inexistante (asialie) dans le diabète, le syndrome Gougerot-Sjögren, la ménopause, lors de la prescription de certains médicaments et après des irradiations de la région cervico-buccale.

Facteurs anatomiques favorables à la rétention

La rétention est améliorée avec :

  • Une fibromuqueuse dense très adhérente à l’os sous-jacent.
  • Une profondeur vestibulaire suffisante (au moins 4 mm).
  • Des crêtes larges et hautes.
  • Une voûte palatine en forme de U.
  • Des tubérosités bien formées et sans contre-dépouille.
  • Un voile du palais horizontal permettant une extension postérieure.
  • Une ligne oblique peu saillante.
  • Une région sublinguale permettant la réalisation d’un joint efficace.

À ces éléments, il convient d’ajouter l’équilibre neuromusculaire et les facteurs occlusaux. Enfin, la préparation chirurgicale pré-prothétique :

  • Par la résection des brides muqueuses, d’hypertrophies fibreuses et des crêtes flottantes.
  • Par l’abaissement du plancher buccal.
  • Par l’approfondissement vestibulaire.
  • Par des greffes osseuses.
  • Par des remodelages d’hypertrophie osseuse (tori, tubérosité, ligne oblique interne) qui contribuent, par une amélioration du terrain, à avoir un support favorable.

Applications en prothèse maxillo-faciale : PMF

PMF et prothèse fixée

Les principes de la prothèse fixée s’appliquent en prothèse maxillo-faciale. Nous devons être particulièrement vigilants au niveau des dents restantes vitales ou non, en raison du risque accru de polycaries chez les patients irradiés. Les principales difficultés sont liées à la limitation de l’ouverture buccale, à la latéro-déviation, à l’hyposialie et aux conséquences occlusales des édentements anciens.

Limitation de l’ouverture buccale

La réhabilitation des dents cuspidées devient, dans ces conditions, particulièrement difficile lors de la préparation des dents, la mise en forme pour le parallélisme des dents piliers, la prise d’empreintes et l’enregistrement de l’occlusion. En présence d’une interruption de la mandibule, la latérodéviation qui en découle entraîne des difficultés pour l’enregistrement de l’occlusion. Il faut aussi être très vigilant lors de la pose d’éléments de prothèse scellée afin d’éliminer toutes possibilités de surocclusion ou d’interférences, beaucoup plus difficiles à détecter à cause de la latéro-déviation.

Hyposialie

Parmi les effets secondaires de l’irradiation, l’hyposialie représente un risque important, le patient présentant alors une salive de moins bonne qualité et en moins grande quantité. Il est préférable de positionner, lorsque cela est possible, les limites des préparations en juxta-gingival.

PMF et prothèse amovible totale

Au maxillaire

Que la perte de substance soit d’origine traumatique, congénitale ou pathologique, la prothèse doit remplacer toutes les dents maxillaires, mais également assurer l’obturation de cette perte de substance. Les moyens de rétention de la prothèse conventionnelle que sont le joint périphérique, l’adhésion grâce à la salive et l’investissement maximal des surfaces d’appui sont alors très réduits. En effet, la présence de brides cicatricielles et la limitation d’ouverture buccale sont autant d’obstacles à l’enregistrement d’un bon joint périphérique. La perte de substance réduit la surface d’appui et la xérostomie entraîne la perte de l’adhésion prothétique.

L’exploitation de zones anatomiques résiduelles (dans le sens antéropostérieur ou vestibulo-palatin) est un élément positif qui permet à l’obturateur d’épouser certaines contre-dépouilles, assurant ainsi la rétention de la prothèse. Au niveau occlusal, l’occlusion bilatéralement balancée participe à la stabilisation de la prothèse amovible totale.

À la mandibule

Si la résection est antérieure, la prothèse ne peut s’appuyer sur cette zone présentant une forte dépressibilité tissulaire, la rétention va dépendre de la présence ou non du relief alvéolaire postérieur et de sa qualité (importance de la gencive attachée). Si la résection est latérale, le principe de la prothèse totale consiste à utiliser uniquement le côté sain pour la mastication et à prolonger un bras de stabilisation du côté opéré. La rétention va dépendre, comme pour la résection antérieure, de l’étendue de la zone réséquée et de la qualité de la crête résiduelle.

PMF et prothèse amovible partielle

  • L’importance de la perte de substance et le nombre de dents restantes sont déterminants dans la conception des tracés du châssis.
  • L’obturateur, de par son volume, son poids, sa localisation, va accentuer les déplacements des prothèses amovibles.
  • Taylor ne préconise pas un type de châssis particulier à chaque type de maxillectomie, mais outre le respect de la triade de Housset, il insiste sur l’utilisation d’appuis occlusaux indirects.
  • PARR propose un châssis ayant la particularité de présenter une barre labiale, située dans le vestibule, améliorant la rétention et la stabilisation du châssis.

Apport de l’implantologie en PMF

Ostéo-intégration et radiothérapie

  • Malgré des capacités de cicatrisation diminuées liées à l’irradiation, Jacobson et al. ont démontré que l’ostéo-intégration d’implants de titane est possible dans les tissus osseux irradiés. Brogniez et al. arrivent à la même conclusion après une étude menée sur les chiens. Ils notent un important remaniement osseux, une position d’équilibre entre apposition et résorption après 8 mois.
  • D’après VIGARIOS ET AL. 2011 EMC, concernant les implants dentaires en terrain irradié, le recours à des implants comme dispositifs de rétention complémentaires des PMF doit être envisagé dès que les conditions anatomiques le permettent. Le risque d’ostéoradionécrose doit être évalué en fonction de la dose d’irradiation délivrée et de l’ancienneté de la radiothérapie. Sous couvert d’un protocole précis d’oxygénothérapie hyperbare encadrant la pose d’implants, l’ostéo-intégration de ces derniers se rapproche de celle observée en terrain non irradié.
  • Les risques de la mise en place d’implants peuvent être majorés. Certains auteurs estiment que les risques d’ostéoradionécrose, de fracture ou les problèmes de tissus mous sont trop importants pour justifier les réhabilitations supra-implantaires.
  • La radiothérapie induit de nombreux changements au niveau de l’os, des tissus mous, des muqueuses orales et de la salive. Il convient de prendre en charge tous ces paramètres lors de l’élaboration du plan de traitement, compte tenu de la dose d’irradiation, du délai entre la radiothérapie et l’implantation et de la qualité du tissu osseux. Actuellement, il n’y a pas de consensus en ce qui concerne le taux de réussite des implants après radiothérapie et sur le protocole à adopter. Lorsque la dose dépasse 50 Grays, il devient difficile d’éviter les complications dans la zone à implanter.

Conclusion

Les règles de prothèse fixée, amovible partielle ou amovible totale s’imposent à la prothèse maxillo-faciale. Les traitements chirurgicaux et traitements complémentaires génèrent des séquelles. Celles-ci entraînent des difficultés dans la mise en œuvre des réhabilitations, en particulier en ce qui concerne la rétention. Cela impose une grande rigueur et une parfaite maîtrise de toutes ces règles lors des différentes étapes de la réalisation. Le service rendu au patient, au niveau fonctionnel, esthétique et psychologique, dans un contexte souvent difficile, doit être la principale motivation de l’odontologiste.

Salive, radiation ionisante et rétention Apport de l’implantologie en prothèse maxillo-faciale

  La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.  

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