RESTAURATRICE CHEZ L’ENFANT ET L’ADOLESCENT
Restauratrice chez l’enfant et l’adolescent
La dentisterie restauratrice pédiatrique joue un rôle crucial dans la préservation de l’intégrité des dents temporaires et permanentes immatures, garantissant leur fonctionnalité et leur esthétique tout en favorisant une santé bucco-dentaire optimale. Cette discipline vise à répondre à plusieurs objectifs fondamentaux : assurer les fonctions de mastication, de déglutition et de phonation ; maintenir l’espace pour les dents permanentes ; guider leur éruption ; soutenir la croissance des arcades dentaires ; et répondre aux attentes esthétiques, particulièrement importantes pour le bien-être psychologique des jeunes patients. Le praticien doit également prévenir la douleur, les infections, leur propagation aux germes des dents permanentes sous-jacentes, les caries précoces, ainsi que les malocclusions.
Objectifs de la restauration dentaire pédiatrique
Fonctions essentielles des dents temporaires et permanentes immatures
Les dents temporaires et permanentes immatures jouent des rôles multiples :
- Fonctionnel : elles permettent la mastication, la déglutition et la phonation, essentielles pour la nutrition et la communication.
- Maintien de l’espace : elles préservent l’espace nécessaire à l’éruption des dents permanentes.
- Guide d’éruption : elles orientent correctement les dents permanentes lors de leur mise en place.
- Croissance des arcades : elles contribuent à l’organisation des rapports inter-arcades, influençant le développement harmonieux de la mâchoire.
- Esthétique : elles garantissent un sourire harmonieux, important pour la confiance en soi des enfants et adolescents.
Prévention et gestion des pathologies
Le praticien pédiatrique doit prévenir les complications liées aux caries, telles que la douleur et les infections, qui peuvent affecter les germes des dents permanentes sous-jacentes. Une attention particulière est portée à la promotion de la santé bucco-dentaire, à la prévention des caries précoces et à la réduction du risque de malocclusions. Ces objectifs nécessitent une approche globale, intégrant diagnostic précis, choix thérapeutiques adaptés et éducation des patients et de leurs familles.
Restauration des dents temporaires
Objectifs de la restauration
La restauration des dents temporaires vise à rétablir leur intégrité anatomique pour garantir leur rôle fonctionnel, de maintien de l’espace et de guide pour l’éruption des dents permanentes. Une dent temporaire endommagée peut compromettre l’alignement des dents permanentes, entraînant des problèmes orthodontiques à long terme.
Principes de restauration
Les étapes clés de la restauration incluent :
- Éviction totale du tissu carieux : élimination complète des tissus atteints pour éviter la progression de la carie.
- Protection des tissus sous-jacents : préservation de la pulpe et des structures dentaires saines.
- Préparation de la cavité : création d’une cavité adaptée pour recevoir le matériau d’obturation.
- Reconstitution anatomique : restauration des contours et reliefs naturels de la dent pour rétablir sa fonctionnalité et son esthétique.
Démarche diagnostique
La démarche diagnostique repose sur une évaluation rigoureuse pour guider les choix thérapeutiques. Elle prend en compte :
- Sévérité et localisation de la carie : l’étendue de la lésion influence le type de restauration.
- Risque de récidive : évalué à l’échelle de la dent (état des tissus résiduels) et du patient (risque carieux individuel [RCI] et comportement).
- Facteurs extrinsèques : compétences et expérience du praticien, ainsi que les contraintes techniques.
L’examen clinique, complété par un brossage prophylactique, des aides optiques et des radiographies (rétrocoronaires ou bite-wings), est essentiel. L’utilisation d’outils comme le DIAGNOdent® ou DIAGNOdent Pen® permet une détection précise des lésions par fluorescence laser, améliorant la fiabilité du diagnostic.
Particularités des dents temporaires
Anatomie spécifique
Les dents temporaires se distinguent par :
- Une couche amélaire fine, rendant les lésions plus rapides à progresser.
- Une chambre pulpaire volumineuse avec des cornes pulpaires marquées, particulièrement sur les molaires, augmentant le risque d’atteinte pulpaire.
- Une forme coronaire et des rapports interdentaires complexes, compliquant l’isolation et l’étanchéité lors des restaurations.
- Un stade physiologique qui détermine leur durée de vie résiduelle sur l’arcade (environ 8 à 9 ans pour une molaire temporaire, de son éruption à son exfoliation).
Évolution des lésions
En raison de l’anatomie des dents temporaires, une lésion initiale peut rapidement évoluer vers une atteinte irréversible. Une fois la dentine atteinte, la progression vers la pulpe est rapide, nécessitant souvent une pulpotomie préventive. La rhizalyse, phase de résorption racinaire, dure environ 4 ans et constitue la période la plus longue du cycle de vie de la dent temporaire.
Aspects cliniques de l’odontologie restauratrice
Périodes physiologiques
Les dents temporaires passent par trois périodes physiologiques :
- Maturation : période initiale post-éruption.
- Stabilité : phase de pleine fonctionnalité.
- Résorption : phase de rhizalyse, marquée par la résorption progressive des racines.
L’anatomie radiculaire, plus que l’âge civil, permet d’évaluer le temps résiduel de la dent sur l’arcade.
Classification des lésions carieuses
La classification de Mount et Hume modifiée distingue trois sites (occlusal, proximal, cervical) et trois stades d’évolution :
- Stade 1 : atteinte amélaire ou du tiers externe de la dentine, traitée par reminéralisation ou microdentisterie.
- Stade 2 : atteinte du tiers moyen de la dentine, nécessitant une macrodentisterie sans pulpotomie.
- Stade 3 : atteinte du tiers profond de la dentine, nécessitant une macrodentisterie avec pulpotomie préventive.
Paramètres liés à l’enfant
- Âge et comportement : l’âge influence la coopération de l’enfant, un facteur clé pour les choix thérapeutiques.
- Risque carieux individuel (RCI) : un RCI élevé (présence de lésions actives) oriente vers des matériaux robustes (amalgame, coiffes pédodontiques), tandis qu’un RCI faible (absence de caries récentes, bonnes habitudes) permet l’usage de matériaux adhésifs.
- Nombre de caries : les enfants polycariés nécessitent des solutions rapides et durables, tandis que ceux avec une ou deux caries peuvent bénéficier de composites.
Paramètres liés au praticien
Les compétences du praticien, sa maîtrise des techniques de restauration et sa capacité à gérer le comportement de l’enfant influencent les choix thérapeutiques. Une formation spécifique en odontologie pédiatrique est essentielle pour optimiser les résultats.
Techniques de restauration des dents temporaires
Techniques de Hall et ART
Pour les enfants peu coopérants, deux techniques transitoires sont souvent utilisées :
- Technique de Hall : consiste à poser des coiffes pédodontiques préformées (CPP) sans préparation préalable. Le succès dépend d’un diagnostic précis de l’état pulpaire, difficile chez le jeune enfant.
- Atraumatic Restorative Treatment (ART) : approche minimalement invasive impliquant un curetage manuel de la carie et l’application d’un ciment verre-ionomère (CVI) pour un relargage de fluor. Cette technique est temporaire et nécessite un suivi régulier.
Restaurations sous sédation ou anesthésie générale
Pour les enfants polycariés ou non coopérants, les soins sous sédation consciente ou anesthésie générale sont souvent nécessaires. L’impossibilité de poser un champ opératoire étanche limite l’usage des composites, privilégiant les amalgames ou les CPP. Ces derniers sont particulièrement adaptés aux dents très délabrées.
Microdentisterie vs macrodentisterie
- Microdentisterie (stade 1) : privilégie la conservation des tissus sains, utilisant des techniques comme la sonoabrasion ou l’air-abrasion.
- Macrodentisterie (stades 2 et 3) : implique des préparations plus invasives, souvent avec pulpotomie pour les lésions profondes.
Matériaux de restauration coronaires
Amalgame
Composé d’environ 50 % de mercure, l’amalgame reste un matériau fiable en odontologie pédiatrique, sans toxicité avérée selon la Fédération dentaire internationale (FDI). Il est indiqué pour les restaurations durables, particulièrement chez les enfants polycariés.
Ciments verre-ionomères (CVI)
Les CVI, formés d’une poudre aluminosilicate et d’un liquide polyacrylique, offrent une adhésion chimique à la dent. Leur sensibilité aux échanges hydriques nécessite un vernis protecteur. Les CVI condensables (CVIc) présentent des propriétés mécaniques supérieures grâce à un ratio poudre/liquide accru.
Ciments modifiés par adjonction de résine (CVIMAR)
Les CVIMAR combinent une réaction acide-base et une photopolymérisation, offrant une meilleure adhérence et esthétique que les CVI traditionnels. Les nanoionomères, intégrant des nanocharges, améliorent encore ces propriétés.
Résines composites
Composées d’une matrice polymère et de charges, les résines composites offrent une excellente esthétique et résistance mécanique. Elles nécessitent un système adhésif, avec ou sans mordançage à l’acide phosphorique. Les composites microhybrides, condensables ou fluides s’adaptent à différentes situations cliniques.
Coiffes pédodontiques préformées (CPP)
Les CPP en nickel-chrome sont idéales pour les grands délabrements coronaires. Faciles à ajuster, elles offrent une résistance mécanique élevée et une bonne biocompatibilité. Les CPP en céramique (Nu Smile®) sont plus esthétiques mais moins durables en raison des fractures fréquentes.
Compomères
Dérivés des CVI et composites, les compomères ont des propriétés mécaniques limitées et un relargage de fluor réduit, les rendant moins indiqués aujourd’hui.
Protocole opératoire
Étapes générales
- Anesthésie (contact, locale ou locorégionale).
- Pose du champ opératoire.
- Déplaquage et détartrage.
- Éviction du tissu carieux.
- Mise en place d’un système matriciel (si restauration proximale).
- Obturation avec le biomatériau choisi.
- Scellement des sillons.
- Retrait du système matriciel.
- Polissage et vérification des points de contact.
- Dépose du champ opératoire.
Particularités des dents temporaires
La préparation cavitaire doit tenir compte des cornes pulpaires proéminentes et de la faible épaisseur tissulaire. Les systèmes matriciels (crampon MacKean, matrice métallique ou transparente) sont adaptés à l’anatomie et à la localisation de la lésion.
Restauration des dents antérieures
Interim Therapeutic Restorations (ITR)
L’ITR, à mi-chemin entre dentisterie non invasive et restauratrice, consiste à retirer la dentine cariée superficielle et à obturer avec un CVI, suivi d’un scellement de sillons. Cette technique temporaire nécessite un suivi régulier.
Strip Crown Frasaco®
Pour les lésions avancées des dents antérieures, les moules transparents Strip Crown Frasaco® permettent une restauration esthétique et durable. Le protocole inclut :
- Anesthésie locale et pose du champ opératoire.
- Choix et ajustage du moule.
- Éviction carieuse et préparation dentaire.
- Mordançage, application de l’adhésif et remplissage du moule avec composite.
- Photopolymérisation, retrait du moule, polissage et vérification occlusale.
Restauration des dents postérieures
Site 1 : Caries occlusales
- Stade 1 : restauration composite à minima, photopolymérisée en un temps.
- Stade 2 : photopolymérisation en deux temps pour minimiser le retrait.
- Stade 3 : pose d’un CVI en fond de cavité pour protéger la pulpe, suivie d’un composite.
Site 2 : Caries proximales
La préparation des caries proximales nécessite un accès par la crête marginale, suivi d’un nettoyage à la fraise boule. Les parois doivent converger légèrement, avec un chanfrein pour une meilleure intégration. Un système matriciel est essentiel pour rétablir le point de contact.
Techniques « sandwich »
Pour les lésions profondes, une couche de CVI ou de composite fluide protège la pulpe, suivie d’un composite pour une étanchéité optimale.
Couronnes préformées
Les CPP en nickel-chrome ou céramique sont utilisées pour les molaires très délabrées, avec une préparation homothétique et un scellement au CVI. Les CPP en céramique sont esthétiques mais moins résistantes.
Restauration des dents permanentes immatures
Caries des puits et fissures
Les scellements de sillons, réalisés avec une résine fluide, protègent les surfaces occlusales poreuses des molaires permanentes. Les fissurotomies sont indiquées pour les sillons profonds, suivies d’une obturation au composite fluide.
Caries des dents antérieures
Les caries non cavitaires (stade 0) peuvent être reminéralisées par fluor topique. Les lésions cavitaires nécessitent une éviction à minima et une restauration composite couche par couche pour un résultat esthétique.
Caries des dents postérieures
- Caries occlusales et cachées : les résines composites sont privilégiées, avec une attention particulière aux caries cachées, qui se développent rapidement sous un émail intact.
- Caries proximales : souvent liées à une mauvaise hygiène ou à des caries sur les dents temporaires adjacentes, elles sont traitées par composites à minima.
Hypominéralisations molaires-incisives (MIH)
Les MIH, affectant 15 à 20 % des enfants, se caractérisent par un émail défectueux, favorisant les caries et les hypersensibilités. Les traitements vont de la fluoration à la pose de CPP, en passant par les composites et les scellements de sillons.
Microdentisterie et techniques avancées
Microdentisterie
La microdentisterie privilégie la conservation des tissus sains, utilisant des techniques comme :
- Sonoabrasion : élimination sélective des tissus cariés par ultrasons, préservant les dents adjacentes.
- Air-abrasion : projection d’alumine pour éliminer l’émail déminéralisé, adaptée aux caries occlusales.
- Instruments rotatifs : fraises diamantées pour des préparations précises, bien que moins conservatrices.
Ozone et laser
- Ozone : réduit les bactéries cariogènes, mais son efficacité reste limitée.
- Laser erbium-YAG : élimine sélectivement les tissus cariés avec une action bactéricide, tout en préservant les tissus sains.
Conclusion
Les avancées en odontologie restauratrice pédiatrique ont transformé la prise en charge des caries chez l’enfant et l’adolescent. Grâce à des techniques mini-invasives, des matériaux innovants et une approche centrée sur la préservation des tissus dentaires, les praticiens peuvent garantir des restaurations durables, fonctionnelles et esthétiques. Ces progrès permettent non seulement de maintenir les dents temporaires jusqu’à leur exfoliation naturelle, mais aussi de favoriser une éruption saine des dents permanentes, contribuant ainsi à la santé bucco-dentaire globale des jeunes patients.
RESTAURATRICE CHEZ L’ENFANT ET L’ADOLESCENT
Voici une sélection de livres:
- Odontologie conservatrice et endodontie odontologie prothètique de Kazutoyo Yasukawa (2014) Broché
- Concepts cliniques en odontologie conservatrice
- L’endodontie de A à Z: Traitement et retraitement
- Guide clinique d’odontologie
- Guide d’odontologie pédiatrique, 3e édition: La clinique par la preuve
- La photographie en odontologie: Des bases fondamentales à la clinique : objectifs, matériel et conseils pratique
RESTAURATRICE CHEZ L’ENFANT ET L’ADOLESCENT

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.