PHYSIOLOGIE DE LA DÉGLUTITION (Orthodontie)
Introduction
La sphère oro-faciale constitue le siège de différentes fonctions vitales et sociales dont le déroulement influence l’équilibre et le développement de l’appareil stomatognatique. Parmi elles, la déglutition, qui est la première fonction coordonnée à apparaître dans la vie intra-utérine. Il est donc important en orthopédie dento-faciale d’effectuer une étude approfondie de toute anomalie fonctionnelle rencontrée, qui est à l’origine de nombreuses dysmorphoses osseuses et alvéolo-dentaires, se répercutant inévitablement sur le développement du massif facial et influençant par conséquent l’apparence et l’esthétique des patients.
Définition
Terme issu du latin dèglutio → « J’avale ». La déglutition désigne l’ensemble des mécanismes permettant le transport des aliments de la cavité buccale à l’estomac. Selon CHATEAU, c’est l’acte par lequel le contenu buccal est propulsé de la bouche vers l’estomac.
Rappel Anatomique
La déglutition intéresse trois étages anatomiques : la cavité buccale, le pharynx et l’œsophage.
La Cavité Buccale
La bouche constitue la première partie du tractus digestif. C’est la zone où les aliments sont mastiqués avant d’être avalés. Elle est limitée en haut par le palais, en bas par le plancher buccal, latéralement par les régions géniennes, et en avant par les régions labiales et le menton.
Le Plancher Buccal
Principalement formé par les muscles mylohyoïdiens, véritable sangle sur laquelle repose la langue.
La Voûte Palatine
Le palais dur est recouvert à sa partie antérieure par une muqueuse. Sur la ligne médiane, juste en arrière des incisives supérieures, se situe la papille palatine. La voûte palatine est prolongée par le voile du palais (palais mou), un rideau musculo-aponévrotique comportant une face supérieure rhino-pharyngienne et une face inférieure buccale. Son bord postérieur se termine par la luette. Le tiers antérieur du voile est immobile, tandis que les deux tiers postérieurs sont mobiles et jouent un rôle important lors de la déglutition et de la phonation.
Régions Jugales
Elles comprennent une face externe cutanée et une face interne muqueuse recouvrant une muqueuse musculaire. La couche superficielle est formée par les muscles peauciers : l’élévateur de l’aile du nez, le petit et le grand zygomatique, et le risorius. Dans un plan profond, on trouve : le releveur profond de l’aile du nez, la lèvre supérieure, le buccinateur, le canin, et le carré du menton. En arrière se situent les muscles masticateurs : le masséter, le temporal, le ptérygoïdien interne et externe, ainsi que les lèvres.
Les Arcades Dentaires
Elles divisent la cavité buccale en une partie périphérique (le vestibule) et une partie centrale (la cavité buccale proprement dite).
Effecteurs Musculaires de l’Orifice Buccal
- Orbiculaires des lèvres
- Releveurs profonds et superficiels de l’aile du nez et de la lèvre supérieure
- Canin
- Grand et petit zygomatique
- Risorius
- Buccinateur
- Myrtiforme, triangulaire des lèvres et carré du menton
- Houppe du menton
- Compresseur des lèvres
- Peauciers du cou
Tous ces muscles sont innervés par des branches maxillaires et/ou buccales du nerf facial (VII), de même que le mylohyoïdien et le digastrique, qui participent à la dynamique linguomandibulaire. Le nerf hypoglosse (XII) innerve le styloglosse (SG) et le génioglosse (GH), élévateur de l’os hyoïde, en association avec le nerf glossopharyngien (IX) pour la réalisation du dôme lingual. Le nerf phrénique module la posture linguale.
Effecteurs Musculaires du Voile du Palais
Le voile du palais intervient dans la déglutition grâce à trois muscles :
- Péristaphylin externe
- Péristaphylin interne
- Azygos de la luette
La contraction de ces muscles entraîne un raidissement et une élévation du voile du palais, isolant le rhinopharynx de l’oropharynx (isthme du gosier) pour empêcher tout refoulement alimentaire à travers le nez.
Effecteurs Musculaires de la Mandibule
- Muscles élévateurs (temporal, masséter, ptérygoïdien interne) : interviennent dans la phase buccale lors du contact entre les arcades dentaires.
- Muscles abaisseurs (digastrique, génio-hyoïdien, mylo-hyoïdien) : permettent l’abaissement et le recul mandibulaire au moment de la succion-déglutition.
- Muscle protracteur (ptérygoïdien externe) : favorise l’avancée de la mandibule au moment de la succion.
La Langue
La langue occupe la position centrale de la bouche. C’est le principal organe du goût et elle joue un rôle capital pour la mastication, la déglutition et l’élocution. C’est une masse musculaire occupant au repos presque toute la cavité buccale, avec une base relativement fixe et une pointe très mobile. Elle est constituée d’un squelette ostéo-fibreux formé par :
- Membrane hyo-glossienne : fixée sur le bord supérieur du corps de l’os hyoïde et sur le bord antérieur des petites cornes, elle se prolonge dans l’épaisseur de la langue.
- Septum lingual : lame fibreuse verticale et sagittale, insérée par sa base sur le milieu de la membrane hyo-glossienne, se perdant au niveau de l’apex de la langue.
La langue est composée de 8 muscles pairs (génio-glosse, stylo-glosse, pharyngo-glosse, amygdalo-glosse, palato-glosse, hyo-glosse, transverse, lingual inférieur) et d’un muscle impair (lingual supérieur).
Les Arcades Dentaires
Appelées également système alvéolo-dentaire, elles comprennent :
- Les os maxillaires (os basilaire et os alvéolaire)
- Les procès alvéolaires
- Les dents
Le Pharynx
Le pharynx est un conduit musculo-membraneux, disposé verticalement en avant de la colonne cervicale. Long de 15 cm et d’un diamètre de 2 à 5 cm, il constitue un large vestibule où se croisent :
- La voie respiratoire, allant des fosses nasales au larynx.
- La voie digestive, allant de la bouche à l’œsophage.
On distingue trois étages pharyngés :
- Le cavum ou rhinopharynx
- L’oropharynx
- L’hypopharynx
La paroi du pharynx est constituée de muscles constricteurs, qui diminuent le calibre du pharynx et jouent un rôle important dans le deuxième temps de la déglutition, et de muscles élévateurs, qui déterminent l’ascension du larynx.
L’Œsophage
L’œsophage est un conduit musculo-membraneux reliant le pharynx à l’estomac. Son trajet débute au niveau de la 6e vertèbre cervicale et se termine au niveau de l’estomac, à la 11e vertèbre dorsale.
Physiologie de la Déglutition
Le transit du bol alimentaire nécessite :
- Le rapprochement des lèvres
- L’élévation du voile du palais
- L’abaissement de l’épiglotte
- L’ouverture puis la fermeture du sphincter œsophagien
Les Différents Temps de la Déglutition
Suivant la situation du bol alimentaire, on distingue trois temps :
- Temps buccal (préparatoire et temps buccal proprement dit)
- Temps pharyngien
- Temps œsophagien
Phase de Préparation
- Les aliments sont coupés puis broyés par les dents.
- Les quatre muscles masticateurs assurent la décomposition de la nourriture.
- La nourriture est mêlée à la salive pour former un bol alimentaire correct.
- Le bol est récupéré par la langue et collecté par le buccinateur.
Phase Orale
Le bol alimentaire est rassemblé sur le dos de la langue, qui prend la forme d’une cuillère. L’apex lingual prend appui sur la crête alvéolaire, le corps de la langue se plaque contre le palais dur et réalise un mouvement d’ondulation d’avant en arrière, précédant la propulsion du bol alimentaire vers l’oropharynx. Lorsqu’il parvient à l’isthme du gosier, le voile du palais se contracte et s’accole à la paroi pharyngée, fermant ainsi le rhinopharynx.
Phase Pharyngée
Ce temps, involontaire et réflexe, est le plus important et le plus délicat. Il assure le transport du bolus et la protection des voies respiratoires. Quatre événements ont lieu :
- Occlusion du sphincter vélo-pharyngé
- Occlusion du sphincter laryngé
- Propulsion du bol à travers le pharynx
- Ouverture du sphincter supérieur de l’œsophage
Phase Œsophagienne
C’est le dernier temps, le plus court. Il consiste en le transport du bol alimentaire du sphincter supérieur de l’œsophage (SSO) au sphincter inférieur de l’œsophage (SIO).
Différents Types de Déglutition
Deux types de déglutition sont individualisés :
- Déglutition primaire (fœtale, succion-déglutition du nourrisson et du jeune enfant)
- Déglutition secondaire (« arcade en contact ») de l’adulte
Déglutition Fœtale
C’est une fonction innée, la plus archaïque pendant la vie fœtale. Le fœtus déglutit le liquide amniotique et suce son pouce. On parle de succion-déglutition, où les phénomènes de succion et de déglutition sont étroitement liés.
Succion-Déglutition du Nourrisson et du Jeune Enfant
L’enfant est nourri au biberon ou au sein. La bouche agit comme une pompe aspirante, nécessitant une étanchéité créée par :
- En avant : contraction labiale et compression des gencives autour du mamelon ou de la tétine, la musculature du menton induisant l’élévation de la lèvre inférieure.
- En arrière : fermeture de l’isthme du gosier, le voile s’abaissant et se plaquant contre la paroi pharyngée postérieure.
La langue joue un rôle de moteur de la pompe à vide par un mouvement alterné de protraction et de rétraction rythmique. Les muscles abaisseurs (digastrique, ptérygoïdien latéral, mylohyoïdien, omohyoïdien) propulsent la mandibule. La langue s’interpose entre les deux maxillaires, s’incline en bas et en arrière pour permettre au lait de s’écouler par les gouttières pharyngolaryngées vers l’œsophage.
Au fur et à mesure de l’éruption des dents, de la formation de la boîte à langue, du changement d’alimentation et de la maturation neuromusculaire, de nouvelles sensibilités proprioceptives (ligaments alvéolo-dentaires) incitent l’enfant à abandonner son méta-circuit pour en créer un nouveau au niveau du mésencéphale. Cette transition vers la déglutition adulte ne se fait pas avant l’âge de 6 ans.
Déglutition de l’Adulte
Adaptée aux solides et aux petites quantités de liquides comme la salive, la déglutition adulte implique un bol alimentaire mastiqué et insalivé, rassemblé sur le dos de la langue conformé en gouttière. Les afférences (langue, voile, desmodonte) vérifient la qualité du bol avant le déclenchement de la déglutition. Les lèvres sont en contact sans contraction de l’orbiculaire. Les arcades sont serrées en occlusion d’intercuspidation maximale par l’action des élévateurs, stabilisant la mandibule dans les trois sens de l’espace. Le mylohyoïdien se contracte, la pointe de la langue s’élève et prend un appui palatin antérieur. Une onde de déformation de la masse linguale entraîne le bol vers le pharynx.
Influence de la Dynamique Musculaire lors de la Déglutition
Action sur les Procès Alvéolaires
La langue influence la direction de croissance sagittale et verticale lors des mouvements de pulsion au passage du bol alimentaire de la partie antérieure à la partie postérieure. Selon CAUHEPE et CHATEAU, le couloir d’équilibre doit être stable aussi bien en fonction qu’au repos.
Action sur les Bases Osseuses
- Au maxillaire supérieur : Action morphogénétique de la langue, notamment du muscle stylo-glosse, qui obstrue la cavité buccale et empêche la respiration buccale.
- À la mandibule : Le cartilage de croissance condylien est très actif pendant la déglutition, entraînant une translation mandibulaire stimulante.
La Déglutition Atypique
La déglutition atypique est la persistance d’une déglutition présentant des analogies avec celle du nourrisson (interposition ou pulsion linguale, absence de contacts dentaires, contraction forcée des lèvres et du menton). Elle s’intègre dans un cadre dysfonctionnel oro-facial, impliquant les postures de repos et le tonus de la langue, des lèvres, des muscles masticateurs, ainsi que des anomalies de phonation et de respiration. Cela traduit un retard d’adaptation neuromusculaire à l’apparition des dents et une lenteur dans le développement du schéma corporel, avec un contrôle bulbaire du processus moteur.
Étiologies de la Déglutition Atypique
- Facteurs neurophysiologiques : Troubles de la maturation du système nerveux central pouvant conduire à une immaturation de la déglutition.
- Facteurs occlusaux : Un mauvais calage mandibulaire peut entraîner une activité anormale ou asymétrique des muscles élévateurs.
- Facteurs morphologiques : Des amygdales hypertrophiées forcent la langue à occuper une position basse et en avant pour maintenir la perméabilité du carrefour aéro-pharyngé. Les déformations alvéolaires dues à des habitudes nocives (succion du doigt) peuvent aussi poser problème.
- Grands syndromes : Par exemple, le syndrome de Robin, où la glossoptose maintient la langue en position postérieure, annulant son rôle fonctionnel.
Conséquences de la Déglutition Atypique
Une déglutition infantile persistante entraîne un défaut de stimulation de la croissance des sutures palatine, incisivo-canine et inter-incisive, provoquant un défaut de croissance transversale du maxillaire, observable dans le syndrome de CAUHEPE-FIEUX. L’anomalie fonctionnelle peut induire un désordre de la croissance, affectant le massif facial ou se limitant à la zone alvéolo-dentaire.
Selon Mme MULLER, la rupture de l’équilibre peut être :
- En direction excentrique : Par hyperactivité linguale, inaptitude labiale, ou les deux, entraînant :
- Classe excentrique 1 : Prognathie supérieure, proalvéolie supérieure, béance.
- Classe excentrique 2 : Proalvéolie supérieure, biproalvéolie, béance.
- Classe excentrique 3 : Proglissement mandibulaire, prognathie inférieure, proalvéolie inférieure, latérodéviation, béance.
- En direction concentrique : Par hyperactivité des lèvres et des joues, langue trop postérieure, ou les deux, entraînant :
- Classe concentrique 1 : Rétrognathie supérieure, rétroalvéolie supérieure, rétrognathie mandibulaire, endognathie, endoalvéolie supérieure, mésioposition des premières molaires supérieures.
- Classe concentrique 2 : Endoalvéolie, rétroalvéolie maxillaire, DDM.
- Classe concentrique 3 : Rétroalvéolie.
Intérêt de l’Étude de la Physiologie de la Déglutition en ODF
L’étude de la physiologie de la déglutition est cruciale en orthopédie dento-faciale. Une connaissance des mécanismes anatomo-physiologiques permet de comprendre la physiopathologie des troubles de la déglutition, d’établir un diagnostic étiopathogénique, et d’adopter une attitude thérapeutique visant à corriger et rééduquer la déglutition atypique. Cela assure la stabilité des résultats et prévient les récidives.
Conclusion
Connaître la physiologie des fonctions permet de diagnostiquer les pathologies, leurs répercussions sur le développement et la croissance faciale, ainsi que sur l’esthétique. C’est sur cette base que l’orthodontiste doit fonder sa démarche thérapeutique pour prévenir, intercepter et corriger les anomalies fonctionnelles, garantissant ainsi une meilleure qualité de vie aux patients.
PHYSIOLOGIE DE LA DÉGLUTITION (Orthodontie)
La prévention des caries repose sur une hygiène bucco-dentaire rigoureuse et des visites régulières chez le dentiste. La maîtrise des techniques d’anesthésie locale est essentielle pour assurer le confort du patient lors des soins. L’imagerie dentaire, comme la radiographie panoramique, permet un diagnostic précis des pathologies buccales. Les étudiants doivent comprendre l’importance de la stérilisation pour prévenir les infections croisées en cabinet. La restauration dentaire, comme les composites ou les couronnes, exige une précision technique et un sens esthétique. Les praticiens doivent rester informés des avancées en implantologie pour proposer des solutions modernes aux patients. Une communication claire avec le patient renforce sa confiance et favorise l’adhésion au plan de traitement.
PHYSIOLOGIE DE LA DÉGLUTITION (Orthodontie)

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.
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