PHENOMENE DE CROISSANCE – ORTHOPÉDIE-DENTO-FACIALE
Ostéogenèse
L’ostéogenèse désigne l’ensemble des processus responsables de la construction des pièces osseuses (histogénèse), ainsi que de la croissance et du remodelage du tissu osseux.
Histogénèse
Le tissu osseux dérive du mésenchyme, un tissu embryonnaire issu de la différenciation du mésoblaste. Ce mésenchyme est caractérisé par des cellules indifférenciées. Au sein de ce tissu, une augmentation quantitative de fibres de collagène et une division cellulaire conduisent à la formation d’un blastème mésenchymateux squelettogène. À partir de ce blastème, l’os peut se former de deux manières :
Ossification membraneuse
Dans ce processus, l’os se forme directement à partir du blastème, donnant naissance aux « os de membrane », comme ceux de la voûte du crâne et de la face. Une fois la forme de l’os suffisamment ébauchée, celui-ci est entouré d’une condensation conjonctive, les pièces osseuses restant séparées par des bandes conjonctives étroites appelées « sutures membraneuses » ou « syndesmoses ». Ces sutures sont des sites de croissance ultérieure active, mais elles n’ont pas de potentiel de croissance propre et doivent être sollicitées, ce qui en fait des sites de croissance secondaire adaptative.
Ossification enchondrale
Ici, l’os se forme à partir d’une maquette cartilagineuse issue du blastème mésenchymateux d’origine embryonnaire, donnant naissance aux « os de substitution », comme ceux de la base du crâne. Les pièces osseuses sont unies par des bandes conjonctives appelées « sutures cartilagineuses » ou « synchondroses », capables de croître de manière interstitielle.
Remarque : Les deux modes d’ossification (membraneuse et enchondrale) peuvent coexister au sein d’une même structure, comme la mandibule, qui est principalement un os de membrane, mais présente ultérieurement un cartilage secondaire.
Croissance et modelage osseux
Une fois l’os formé, la pièce osseuse peut augmenter ses dimensions de deux manières principales :
Croissance suturale
Les sutures sont le siège d’une croissance active avant leur synostose (soudure). Pour les os membraneux, les syndesmoses qui les séparent croissent par apposition osseuse (dépôt d’os) de chaque côté de la ligne suturale, ce qui éloigne les pièces squelettiques les unes des autres.
Croissance remodelante
Ce processus, constant, maintient la forme et les proportions de chaque pièce osseuse. Il produit deux résultats : la croissance de la pièce osseuse et son déplacement.
Moyens d’études de la croissance cranio-faciale
Téléradiographie
Cette méthode permet d’étudier la croissance cranio-faciale grâce à :
- Superposition : Des clichés téléradiographiques pris à intervalles de temps dans des conditions identiques (BROADBENT et BRODIE).
- Implants : L’utilisation d’implants au maxillaire ou à la mandibule (BJORK) permet de suivre, via des clichés radiographiques, le déplacement et la forme des structures osseuses.
Technique histo-anatomique
Cette méthode est réalisée sur des cadavres d’âges variés.
Expérimentation animale
Elle inclut des interventions comme des condylectomies chez le singe ou des études histologiques à l’échelle cellulaire (PETROVIC).
Étude de cas pathologiques
L’analyse de malformations cranio-faciales observées en clinique humaine (DELAIRE).
Méthodes statistiques
Ces analyses permettent de définir une « normalité ». Il est important de noter que l’âge est une notion statique, contrairement à la croissance, qui est un phénomène dynamique et évolutif.
Facteurs influençant la croissance
Facteurs génétiques
Les facteurs génétiques sont reconnus comme les déterminants essentiels de la croissance osseuse, influençant fortement les dimensions et les formes des os.
Facteurs endocriniens
L’action hormonale endocrinienne est prédéterminée et s’inscrit dans le cadre génétique. Les hormones sécrétées par l’hypophyse, la thyroïde et les glandes sexuelles agissent directement ou indirectement sur la croissance. Par exemple :
- La somatotropine (STH), sécrétée par l’hypophyse, stimule la croissance indirectement.
- L’hormone thyroïdienne, combinée à la STH, amplifie son action.
- Les hormones sexuelles (mâles et femelles) jouent un rôle de modération ou de décélération sur la croissance.
Facteurs nutritionnels
Un équilibre alimentaire est essentiel. Une sous-alimentation peut retarder la croissance. Les métabolites essentiels (protéines, vitamines A1, B2, D, glucides) jouent un rôle important.
Facteurs fonctionnels
Les os se développent en réponse aux influences mécaniques exercées sur eux. L’activité musculaire a un impact significatif sur la morphogenèse osseuse. Les pressions exercées sur le squelette en formation peuvent modifier la direction de croissance de certaines parties du corps.
Facteurs pathologiques
Les maladies chroniques peuvent retarder la croissance. Certaines affections, comme celles provoquant une inflammation au niveau de l’articulation temporo-mandibulaire (ATM), peuvent entraîner des déformations faciales, par exemple une ankylose due à la rougeole ou à la diphtérie. Les troubles respiratoires sont également reconnus comme des facteurs étiologiques de certaines dysmorphoses.
Facteurs socio-économiques
Les enfants issus de milieux socio-économiques favorisés présentent un développement plus rapide et régulier.
Facteurs affectifs
Une carence affective, notamment maternelle, peut ralentir la croissance en modifiant les comportements alimentaires et en réduisant la sécrétion d’hormones somatotropes.
Facteurs liés au lieu et au temps
Différentes classifications des facteurs influençant la croissance existent :
Classification de VAN LIMBORGH (1970, 1983)
- Facteurs génétiques intrinsèques.
- Facteurs épigénétiques locaux ou généraux.
- Facteurs environnementaux locaux ou généraux.
Classification de BASSIGNY
- Facteurs généraux :
- Intrinsèques : génétiques, endocriniens.
- Extrinsèques : nutritionnels, socio-économiques, affectifs, maladies.
- Facteurs locaux :
- Induction : différenciation du cartilage de Meckel.
- Influence des fonctions : ventilation, déglutition.
- Rapport périoste/muscles.
Classification de LAUTROU (1994)
- Facteurs génétiques intrinsèques : Agissent à l’intérieur de la cellule.
- Facteurs épigénétiques : Génétiquement déterminés, agissant à l’extérieur de la cellule, soit localement (structures adjacentes, comme l’induction embryonnaire) soit généralement (hormones hypophysaires).
- Facteurs environnementaux : Influences locales (ligaments, tendons, muscles, tissus mous, dents, espaces fonctionnels) ou générales (vascularisation).
Théories explicatives de la croissance faciale
Les théories de la croissance guident les concepts thérapeutiques et fournissent des clés pour les stratégies de traitement. La programmation génétique joue un rôle essentiel dans la détermination des formes et des rythmes de croissance, mais l’environnement peut modifier, dans certaines limites, l’expression de ce programme.
Théorie de LAMARK (1809)
Lamark propose un principe phylogénétique selon lequel « la fonction crée l’organe ».
Théorie de ROUX et WOLFF (1882)
Selon eux, l’excitation mécanique fonctionnelle détermine la forme de l’os. Toute modification de l’intensité ou de la direction des forces modifie à la fois la forme externe et l’architecture interne de l’os.
Courant génétique
Ce courant attribue un rôle dominant aux facteurs génétiques dans l’expression de la forme. Les tissus adjacents et l’environnement n’ont qu’une influence limitée et temporaire, excluant un effet durable de l’orthopédie dento-faciale.
- BRODIE (1946) : La croissance faciale est proportionnée, et toute dysmorphie présente avant la naissance ne peut être modifiée par le traitement. Seules les dents et les procès alvéolaires sont susceptibles d’être modifiés.
- WEINMANN et SICHER (1955) : Les sutures faciales adoptent une orientation provoquant une croissance faciale rayonnante et homothétique, contrôlée par des facteurs génétiques intrinsèques. Cependant, des travaux ultérieurs (MULLER, BJORK) ont montré des variations de vitesse et des trajectoires courbes, infirmant l’homothétie.
- KOSKY et SCOTT (1953) : Les synchondroses sont des centres de croissance primaire, tandis que les syndesmoses sont des sites de croissance secondaire, adaptatifs, sans potentiel de croissance indépendant. Pour SCOTT, le cartilage septal nasal agit comme un moteur tractant le maxillaire en avant.
Courant fonctionnel
Initié par MOSS (1968), ce courant met l’accent sur l’environnement non squelettique. Une observation clinique (croissance persistante après une double condylectomie) a contredit l’idée que le condyle est le principal site de croissance mandibulaire. MOSS décrit la tête comme une structure assurant des fonctions indépendantes (intégration nerveuse, vision, respiration, mastication, etc.), chacune soutenue par une matrice fonctionnelle et une unité squelettique.
Courant synthétique
Ce courant, représenté par VAN LIMBORGH et LAUTROU (1994), intègre les aspects génétiques et fonctionnels dans une théorie multifactorielle de la croissance faciale.
Approche descriptive de la croissance faciale
Travaux de BJORK
En 1955, BJORK implante des pointes de tantale dans les mâchoires comme repères fixes, permettant d’observer l’évolution des os (forme, volume, rapports avec la base du crâne) grâce à la méthode des implants.
Travaux de PETROVIC
Depuis 1967, PETROVIC étudie, principalement sur des rats, l’action des forces ou des facteurs biochimiques sur le potentiel de croissance du cartilage condylien.
Conceptions de DELAIRE
À partir d’observations de troubles de la croissance, DELAIRE conclut :
- Le rôle fondamental des sutures membraneuses dans la morphologie cranio-faciale.
- L’importance de la statique.
- La morphologie faciale résulte à la fois de facteurs génétiques (base du crâne, chondrocrâne) et de conditions locales musculo-fonctionnelles (os membraneux).
- Le maxillaire est influencé par la poussée antérieure de la base du crâne, les apophyses ptérygoïdes, le septum nasal, le contenu orbitaire, la langue, les lèvres et les joues.
Conception biomécanique de DESHAYES
Basée sur l’équilibre intra- et extra-crânien, cette conception considère chaque pièce squelettique comme mobile, avec une physiologie suturale spécialisée. La morphologie faciale dépend de la cinétique crânienne et de la flexion de la base du crâne.
Principe de conformation organo-fonctionnelle de COULY (1980)
Les os de membrane subissent deux types de poussées :
- La base du crâne et le squelette cartilagineux branchial positionnent le futur squelette membraneux.
- Les poussées expansives des conformateurs (organes neurosensoriels, mixtes ou splanchniques, comme l’encéphale, le globe oculaire, la langue ou les muscles manducateurs) modèlent l’ostéoarchitecture faciale.
Travaux d’ENLOW (1990)
ENLOW attribue la croissance osseuse à une matrice fonctionnelle, via des champs d’apposition et de résorption sur les surfaces externes et internes, provoquant des déplacements :
- Déplacement primaire : Résulte de la croissance propre de l’os, éloignant celui-ci des pièces adjacentes.
- Déplacement secondaire : Causé par la croissance d’os ou de tissus mous voisins.
- Déplacement total : Somme des déplacements primaire et secondaire.
Conclusion
L’orthopédie dento-faciale (ODF) s’adresse principalement à des enfants en pleine croissance, bien que les traitements s’étendent aujourd’hui aux adultes. La connaissance des mécanismes de croissance est donc essentielle pour comprendre les principes fondamentaux de l’ODF. Les praticiens doivent anticiper les changements faciaux à venir, car un diagnostic posé à un moment donné peut devenir obsolète avec l’évolution de la croissance.
L’ODF est une discipline pédiatrique : le traitement ne se limite pas à une période intense d’appareillage, mais constitue un suivi médical prolongé, couvrant toute la période de croissance de l’enfant. Ce suivi vise à :
- Déterminer le moment optimal pour intervenir, en exploitant ou en neutralisant la croissance.
- Choisir le type de traitement : préventif, abstentionniste, orthopédique, fonctionnel ou fixe.
- Établir la durée du traitement ou de ses étapes.
- Évaluer le pronostic avec ou sans traitement.
- Définir le type de surveillance ou de contention nécessaire.
PHENOMENE DE CROISSANCE – ORTHOPÉDIE-DENTO-FACIALE
La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.
PHENOMENE DE CROISSANCE – ORTHOPÉDIE-DENTO-FACIALE

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.
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