Les urgences en parodontie
Les urgences en parodontie
Introduction :
Le terme « urgence » décrit la survenue d’un phénomène aigüe douloureux nécessitant l’établissement d’un diagnostic précis pour la mise en place d’un traitement rapide et adéquat. Ce dernier point est particulièrement important lorsqu’il s’agit d’une urgence parodontale, où l’algie gingivale est souvent associée à des atteintes tissulaires étendues avec un risque d’aggravation élevé
En effet, nombreux sont les patient qui consultent avec un abcès parodontal, des saignements spontanés ou encore une mobilité importante.
- Abcès gingival aigu :
- Définition :
Un abcès gingival est une réaction inflammatoire aiguë siégeant uniquement au niveau de la gencive marginale et /ou inter-dentaire. Il intervient fréquemment sur un parodonte sain, suite à l’inclusion (ou l’irritation provoquée par un corps étranger) d’un corps étranger tels que poils de brosses à dents, extrémité d’un Cure- dent, épine de poisson, forcé sous la gencive.
- Cliniquement
On observe un gonflement localisé au niveau de la gencive de couleur rouge et d’aspect lisse et brillant, et de consistance fluctuante, la collection purulente peut fistuliser dans quelques cas permettant l’évacuation du pus.
- Le traitement vise à atténuer les symptômes et éliminer l’agent causal :
¬ Anesthésie de contact
¬ Oter le corps étranger en écartant délicatement le mur gingival sulculaire.
¬ Cureter la face interne de la lésion pour induire le drainage.
¬ Si le drainage n’est pas spontané l’incision à l’aide d’un bistouri est indiquée.
¬ Utilisation d’un antiseptique (chlorhexidine, H²O²) en irrigation locale.
¬ Prescription d’un antibiotique et d’un antalgique.
¬ Conseils d’hygiène buccale au patient et apprentissage d’une méthode de brossage adaptée
- Abcès parodontal aigu :
C’est l’une des urgences les plus fréquemment rencontrées en parodontologie, il s’agit d’une inflammation purulente, localisée, située dans les tissus parodontaux profonds. (Meng 1999)
Cet abcès est causé par :
Une agression mécanique entraînant une impossibilité de nettoyage par le patient et une impossibilité de drainage de la lésion
Obturation débordante, atteinte de furcation.
Fermeture de la poche parodontale.
Changement de la flore ou Modification de la réponse de l’hôte.
Fragments de tartre projetés dans les tissus au cours du détartrage, tartre résiduel au fond de la poche et fermeture superficielle de cette dernière.
Suite à un sondage parodontal dans des sites infectés.
- Les signes cliniques sont :
- Une gencive rouge, œdémateuse, lisse, avec parfois la formation d’une fistule de drainage.
- Associée à une douleur aigue à la palpation et à la percussion à cause de la progression de l’inflammation au sein du desmodonte.
- Mobilité dentaire augmentée.
- Les signes généraux sont instables, souvent associés à un épisode de fièvre et à la présence de ganglions sous-angulo-mandibulaires.
- L’examen radiographique montre souvent la présence d’une alvéolyse et l’absence de caries.
Il est très important de faire rapidement le diagnostic différentiel avec l’abcès péri apical. On fera donc un test de vitalité qui sera négatif dans le cas d’un abcès d’origine endodontique et positif dans le cas d’un abcès parodontal.
- Le traitement est un traitement d’urgence compte tenu de la rapidité des destructions tissulaires secondaires à cet épisode infectieux aigu.
Le protocole de prise en charge est simple car l’abcès parodontal est un système ouvert : il se draine directement dans la cavité buccale par la poche parodontale.
¬ Anesthésie péri-apicale à distance de la tuméfaction.
¬ Drainage de la lésion soit à travers la poche et débridement à l’aide de curettes étroites.
¬ Sinon par incision au niveau de la gencive (bistouri lame 15)
¬ Irrigation sous-gingivale de la zone drainée à base d’antiseptique ou de solution saline.
¬ Prescription d’un antalgique et antibiotique par voie générale (ciblé anaérobies GRAM-).
¬ Le traitement étiologique sera le traitement de la poche parodontale dans un 2ème temps (par voie chirurgicale ou à l’aveugle selon l’indication).
- LE SYNDROME DU SEPTUM :
C’est une inflammation aigue due à la compression de la papille inter dentaire, qui atteint secondairement
le septum osseux inter dentaire.
- L’étiologie peut être un tassement alimentaire dans l’espace inter dentaire, une obturation débordante, défaut du point de contact, dents en malposition, caries proximales et destruction coronaire,
D’abord la compression mécanique entraîne la destruction de l’attache épithéliale et favorise secondairement la
prolifération bactérienne. L’épithélium de jonction migre apicalement et l’inflammation se propage dans l’os alvéolaire. Ceci va induire des douleurs spontanées, ressenties le plus souvent au cours des repas lors de la mise en fonction (sensation de compression), mais pouvant aussi être continues, violentes et mal localisables, confondues avec des douleurs de pulpite.
- À l’examen clinique, la papille dentaire apparaît tuméfiée, rouge et saigne facilement au contact. Une pression sur la papille provoque une douleur et signe le diagnostic.
- Le traitement consiste à retirer les éléments irritatifs sous-gingivaux, à cureter la zone inflammatoire (Débridement de la région aux Ultrasons et curettes), et à appliquer un antiseptique topique.
– Dans un deuxième temps le point de contact défectueux devra être reconstitué.
- PERICORONARITE AIGUE :
Inflammation localisée autour du sac péricoronaire qui entoure une dent en éruption (DDS) le transformant en tissu inflammatoire appelé capuchon muqueux.
- Causée par l’accumulation de la plaque bactérienne sous le capuchon muqueux qui génère souvent une
inflammation et un œdème ce qui est à l’origine d’un traumatisme mécanique du capuchon par la dent antagoniste.
- Cliniquement on observe une tuméfaction et rougeur du capuchon muqueux avec parfois une suppuration,
- Douleurs autour du capuchon, pouvant irradier vers l’oreille et la gorge
- Limitation de la mobilité mandibulaire, (trismus) .
- Mauvaise haleine et Mauvais goût,
- Altération de l’état général : Adénopathies, fièvre…
- Le traitement consiste à faire :
¬ Nettoyage à l’aide d’une curette et d’une boulette imbibée d’eau oxygénée.
¬ Éliminer la plaque dentaire par grattage de la dent sous le capuchon muqueux.
¬ L’antibiothérapie est indiquée en cas de suppuration ou s’il y a une extension régionale.
¬ Prescription d’antiseptiques en bain de bouche (ou eau tiède) et d’antalgiques en cas de douleur.
¬ Après refroidissement de la lésion, excision du capuchon muqueux et extraction de la dent si elle génère
des perturbations fonctionnelles.
- LA GINGIVITE ULCERO-NECROTIQUE AIGUE :
C’est une maladie réversible de la gencive qui apparait comme une infection caractérisée par des ulcérations et une nécrose gingivale d’apparition brutale, appelée autrefois stomatite de Vincent.
- D’un point de vue étiologique il est prouvé que la maladie est la conséquence de facteurs bactériens, généraux et psychologiques.
- La flore bactérienne est prédominée par des fusobactéries et des spirochètes
- La mauvaise hygiène bucco-dentaire est souvent responsable de l’aggravation et de la progression des lésions.
- Le stress et le tabac sont des facteurs de risque associés à son apparition
- La symptomatologie est dominée par des douleurs aigües, plus ou moins intenses selon l’étendue de la lésion, qui entravent l’hygiène bucco-dentaire et l’alimentation, Une halitose et un gout métallique sur la langue.
- Cliniquement on note
¬ La gencive, rouge vif, ulcérée, est recouverte de pseudomembranes, sous forme d’un enduit blanc grisâtre (nécrose), bordée d’un érythème linéaire.
¬ L’aspect décapité des papilles est souvent révélateur de la maladie.
¬ Gingivorragies spontanées ou provoquées.
- Sur le plan régional et général, Fièvre, malaise, anorexie sont variables, on note aussi l’apparition d’adénopathies, et parfois l’extension des lésions vers les régions pharyngées.
- Le traitement :
- Dès le 1er RDV
¬ Ecouvillonnage avec de l’eau oxygénée à 10 vol pour éliminer les pseudomembranes.
¬ Prescriptions médicale : ATB (metronidazole), AINS et antalgiques.
¬ Prescrire des bains de bouche au H2O2 à 30 vol.
¬ Brosse à dent ultra souple 7/100ème pour une reprise progressive de l’HBD.
- 2éme séance : (48h)
¬ Écouvillonnage à l’eau oxygénée.
¬ Maintenir les bains de bouche.
- 3éme séance :
¬ Débridement doux et superficiel des lésions, afin de diminuer la charge bactérienne et désorganiser le biofilm bactérien.
¬ Détartrage superficiel aux instruments manuels.
- 4éme séance : (disparition des signes aigus) Détartrage complet aux ultrasons.
¬ Arrêt des bains de bouche.
- Revoir le patient pour une éventuelle gingivoplastie.
- Maladie gingivale d’origine virale : gingivostomatite herpétique
La gingivostomatite herpétique est une maladie gingivale d’origine virale, provoquée par une primo-infection par le virus herpès simplex, en particulier de type 1
- Diagnostic Le tableau clinique de la gingivostomatite herpétique est caractérisé par la présence d’une
gingivite aigüe localisée ou généralisée, douloureuse, hémorragique, associée à de nombreuses éruptions vésiculeuses groupées « en bouquet » qui peuvent atteindre également d’autres zones de la muqueuse buccale comme la langue, la fibromuqueuse palatine et les lèvres. Après une courte période, ces vésicules se rompent facilement et laissent place à des érosions post-vésiculeuses circonscrites par un liséré rouge érythémateux et recouvertes d’une pseudomembrane grise jaunâtre.
- Ces signes cliniques sont accompagnés par de la fièvre, fatigue, halitose, dysphagie, hypersalivation et sensation de brûlure
Chez un sujet immunocompétent, les lésions disparaissent spontanément en 7 à 10 jours.
- Le traitement a donc pour objectif de diminuer plutôt les symptômes cliniques et d’éviter les surinfections locales. Il repose sur :
- La prescription d’un antalgique de palier 1, 2 en fonction de l’intensité de la douleur,
- Bain de bouche à base de chlorhexidine 0,12% 3x/j pendant 7 jours,
- Elugel® en remplacement du dentifrice avec l’utilisation d’une brosse à dent chirurgicale 7/100 et gel anesthésiant (Dinexan® 2%) à appliquer sur les zones douloureuses 3x/j.
- Le traitement antiviral par Aciclovir (200mg x 5/j, pendant 5 jours)
- Maladie gingivale d’origine fungique : stomatite aigüe candidosique (le muguet)
Les mycoses gingivales sont des infections provoquées par des champignons, en particulier, par des levures du genre Candida. « Le Candida albicans »
- Diagnostic
La phase aigüe débute généralement par une sensation de cuisson, de goût métallique ou de sécheresse buccale suivie rapidement par l’apparition de macules ou de plages érythémateuses, aux limites bien marquées, siégeant sur la face interne des joues et des lèvres, sur la muqueuse palatine et gingivale ainsi que sur la muqueuse linguale
En 24 à 48h, on observe la présence de petites efflorescences blanchâtre au centre des macules érythémateuses, plus ou moins nombreuses, isolées ou confluentes, qui peuvent être éliminé au grattage, découvrant une muqueuse sous-jacente inflammatoire parfois légèrement hémorragique
- Dans les cas sévères, le patient se plaint de douleurs, de brûlure et dysphagie
- Traitement de l’urgence
Le traitement repose sur
- L’élimination des facteurs favorisants,
- L’enseignement à l’hygiène orale et la prescription d’un antifongique topique type amphotéricine B (Fungizone® suspension buvable), 2 cuillères à café 2x/j en bain de bouche, .
Les premiers épisodes de candidoses oropharyngées doivent être traités par des antifongiques locaux (nystatine, amphotéricine B, miconazole). La durée du traitement est de 10 à 15 jours dans les formes aiguës.
- Bain de bouche avec un antiseptique (chlorhexidine) ou du bicarbonate de soduim à 14% pour une désinfection régulière de la prothèse dentaire.
- En cas de candidose chez des patients porteurs de prothèses amovibles, il est conseillé de refaire une nouvelle prothèse.
- LES GINGIVORRAGIES :
Se manifestent par un saignement abondant des gencives.
Le patient rapporte souvent un écoulement sanguin sur sa taie d’oreiller.
- Peuvent être causées par :
¬ Blessure traumatique ou par corps étranger
¬ Maladie parodontale en phase d’activité ¬ Brulure gingivale par les produits chimiques
¬ Maladies hématologiques
- Le traitement d’urgence
¬ Nettoyage de la plaie
¬ Compression bi-digitale pendant 3mn
¬ Adjoindre un hémostatique local
¬ En cas de déchirure gingivale suturer pour rapprocher les berges de la plaie
¬ En cas de maladie générale en cause, après le traitement d’urgence orienter le malade vers le service spécialisé.
- MOBILITES DENTAIRES TERMINALES :
C’est l’augmentation pathologique de l’amplitude du mouvement de la couronne dentaire résultant le plus souvent de la diminution de la hauteur des tissus de soutient.
Hormis le retrait parodontal, la mobilité peut être due à une surcharge occlusale, à un traumatisme, à une infection péri apicale ou à un processus tumoral.
- Cliniquement :
- La mobilité est souvent classée en plusieurs degrés (voir classification d’Aguel).
- Douleurs provoquée par la pression ou le contact avec la dent antagoniste.
- Perte d’attache terminale retrouvée lors du sondage.
- L’examen radiologique révèle une image radio-claire englobant la racine concernée
- Le traitement
¬ La contention est indiquée en urgence en cas d’inconfort du patient, d’une fonction masticatrice perturbée ou en prévention d’extrusion des dents, si celles-ci présentent un support osseux suffisant
¬ L’extraction de la dent en cas de support osseux insuffisant
- LE DAM :
Les Dysfonctionnements de l’Appareil Manducateur correspondent aux douleurs et aux troubles de fonctionnement de l’appareil manducateur en rapport avec une anomalie musculo-squelettique.
- Les étiologies sont
¬ Facteurs occlusaux et traumatiques : prématurités, interférences, dysfonctions, parafonctions (Bruxisme), extractions multiples, traitement orthodontique…. Fractures des maxillaires et de la région condylienne, ouverture buccale forcée ou prolongée…
¬ Facteurs psychologiques : le stress, l’anxiété et les chocs émotionnels jouent le rôle d’élément catalyseur majorant es parafonctions.
- Cliniquement :
¬ Douleurs au niveau des muscles masticateurs et des ATM.
¬ Bruits articulaires
¬ Limitation de l’ouverture buccale et latérodéviation mandibulaire.
- Le traitement d’urgence –
- Prescription d’antalgiques et myorelaxants
- Confection de gouttières de libération occlusales
- Physiothérapie (chaleur sèche, cryoanésthésie…)
Conclusion
Les urgences en parodontologie sont peut-être peu fréquentes mais sont souvent associées à des processus inflammatoires sévères avec des destructions tissulaires parfois irréversibles. La prise en charge doit alors être rapide et efficace afin de soulager le patient et d’enrayer l’infection
Les urgences en parodontie
Voici une sélection de livres:
Parodontologie Relié – 1 novembre 2005
Guide pratique de chirurgie parodontale Broché – 19 octobre 2011
Parodontologie Broché – 19 septembre 1996
MEDECINE ORALE ET CHIRURGIE ORALE PARODONTOLOGIE
Parodontologie: Le contrôle du facteur bactérien par le practicien et par le patient
Parodontologie clinique: Dentisterie implantaire, traitements et santé
Parodontologie & Dentisterie implantaire : Volume 1
Endodontie, prothese et parodontologie
La parodontologie tout simplement Broché – Grand livre, 1 juillet 2020
Les urgences en parodontie

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.