Les résines composites

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Les résines composites

Les Résines Composites

Introduction

Le monde des matériaux dentaires a connu une série de révolutions plutôt qu’une simple évolution. La révolution des matériaux après les amalgames dentaires s’est concentrée sur l’esthétique grâce aux résines composites, apparues dans les années 1950. Initialement autopolymérisables, les composites sont devenus photopolymérisables à la fin des années 1970, s’imposant progressivement comme une solution de choix.

L’évolution constante de leurs compositions et propriétés depuis leur introduction est considérable. En améliorant leur composition, les résines composites sont devenues plus faciles à mettre en œuvre, plus esthétiques et plus simples à polir. Elles présentent moins de contraintes de polymérisation et sont plus résistantes aux mécanismes de dégradation. Les composites microhybrides (années 1990) et nanohybrides (années 2000) représentent l’aboutissement des performances de ces matériaux.

Ils existent aujourd’hui sous une multitude de viscosités (fluides ou compactables) pour répondre à une grande variété de situations cliniques. Depuis les années 2010, les composites dits « bulk-fill », plus sensibles à la photopolymérisation, permettent de remplir des cavités de 4 à 5 mm en un seul incrément, avec une contraction de prise mieux maîtrisée, facilitant leur mise en œuvre clinique.

La seconde révolution des composites dentaires concerne l’adhésion. Cette avancée a permis le développement d’une dentisterie plus conservatrice, basée sur le principe de l’économie tissulaire.

Définition

Un composite dentaire est un biomatériau d’obturation organo-minéral constitué d’une matrice résineuse dans laquelle sont dispersées des charges principalement minérales. La liaison entre ces charges et la matrice est assurée par un agent de couplage. Les composites sont fixés aux tissus dentaires via un adhésif.

Composition des Résines Composites

La Phase Organique

La matrice organique, également appelée phase dispersante ou phase continue, représente 24 à 50 % du volume du composite. Elle est composée des éléments suivants :

  • La résine matricielle : Monomère ou oligomère, cette composante est chimiquement active et constitue la base des résines composites. Les monomères utilisés sont des « R-di-méthacrylates », rendant toutes les résines composites compatibles entre elles et avec les adhésifs. La présence de deux fonctions polymérisables sur une même molécule permet de générer un réseau organique à haute densité de réticulation.
    Exemple : La molécule de Bis-GMA se décompose ainsi :
  • Deux cycles aromatiques rigidifiant la molécule.
  • Un cycle phénol réduisant la rétraction de prise mais augmentant la viscosité.
  • Deux radicaux hydroxyles favorisant les liaisons hydrogènes, ce qui entraîne une viscosité importante de la matrice non polymérisée.
  • Deux groupements méthacrylates permettant le développement de la structure polymère.
  • Deux liaisons esters, susceptibles d’hydrolyse.
  • Les polyuréthanes : Leur principal avantage est une faible viscosité, permettant l’incorporation d’un plus grand pourcentage de charges sans ajout de diluants de faible poids moléculaire.

Rôles de la Matrice

  • Confère une consistance plastique avant polymérisation (liquide ou pâteuse).
  • Permet le durcissement par polymérisation, où les polymères s’entrecroisent sur plusieurs millimètres.
  • Garantit la cohésion et la résistance de l’ensemble après polymérisation.
  • Responsable de certains défauts, comme la dépolymérisation.

Diluants ou Contrôleurs de Viscosité

Les monomères de Bis-GMA et de diuréthane diméthacrylate, très visqueux en raison de leur poids moléculaire élevé, nécessitent l’ajout de monomères de faible viscosité (diluants) pour obtenir une consistance adaptée à l’usage clinique. Ces diluants contrebalancent l’épaisseur excessive causée par une forte proportion de charges.

Inhibiteurs de Prise

Aussi appelés conservateurs, les inhibiteurs de prise (dérivés du phénol ou oxygène de l’air ambiant) empêchent la polymérisation spontanée due à la chaleur ou à la lumière ambiante, permettant un stockage stable des composites.

Pigments

Les pigments déterminent la couleur du composite. Pour des raisons esthétiques, ils doivent être stables dans le temps afin que la restauration conserve sa teinte initiale. Un teintier est utilisé pour ajuster la teinte du composite, notamment pour imiter la dentine lors de restaurations de dents postérieures.

Réaction de Prise des Composites

La polymérisation transforme le composite pâteux en un matériau dur. Ce processus implique :

  • La libération de radicaux libres, formés par la transformation d’un initiateur par des activateurs ou catalyseurs.
  • L’ouverture des doubles liaisons carbone des monomères, initiant la formation et l’allongement des polymères.
  • Une réticulation en chaîne, créant des polymères complexes.
Initiation Chimique (Chémo- ou Autopolymérisation)

Les premiers composites autopolymérisables nécessitaient le mélange de deux pâtes : l’une contenant un activateur (amine tertiaire) et l’autre un initiateur (peroxyde de benzoyle).

Avantages :

  • Utilisé dans tous les matériaux actuellement commercialisés.
  • Faible coût.
  • Divers systèmes pour contrôler la cinétique de polymérisation.

Inconvénients :

  • Perte progressive de la puissance de la source lumineuse, nécessitant une surveillance.
  • Échauffement des lampes, rendant les dispositifs lourds et bruyants en raison des ventilateurs de refroidissement.
Photopolymérisation

La photopolymérisation utilise des radiations électromagnétiques (lumière UV à 365 nm ou lumière visible entre 420 et 470 nm) pour activer les photo-initiateurs, générant des radicaux libres.

Avantages :

  • Applicable à tous les matériaux commercialisés.
  • Faible coût.
  • Contrôle de la cinétique de polymérisation.

Inconvénients :

  • Perte progressive de la puissance lumineuse.
  • Échauffement nécessitant un refroidissement par ventilateur.

Les Charges

Les charges, principalement minérales, pallient les insuffisances de la matrice organique (propriétés mécaniques et thermiques médiocres). Elles influent sur la contraction de polymérisation et l’absorption hydrique. Leur composition, taille, distribution et pourcentage définissent les caractéristiques des composites.

Effets de l’Augmentation des Charges

  • Augmentation de la résistance à la compression, à la traction, à la flexion et de la radio-opacité.

Effets de la Diminution de la Taille des Particules

  • Amélioration de l’état de surface, offrant un avantage esthétique et réduisant l’agressivité vis-à-vis des dents antagonistes.
  • Amélioration de la résistance à l’usure.

Nature des Charges

  • Macrocharges : 1 à 50 μm, composées de verre ou de quartz.
  • Microcharges : Environ 0,04 μm (silice, SiO₂).
  • Nanocharges : De 2 à 70 nm, utilisées dans les composites basés sur la nanotechnologie.

Forme des Charges

  • Anguleuse : Obtenue par broyage et attrition.
  • Arrondie : Issue d’un frittage.
  • Sphérique : Produite par un procédé sol-gel.

La Phase Interfaciale

L’agent de couplage, généralement des organo-silanes, lie chimiquement la matrice aux charges. Les évolutions récentes visent à améliorer cette liaison pour réduire la solubilité et prolonger la durée de vie des restaurations.

Classification des Résines Composites

En Fonction de la Taille des Charges

La taille des charges détermine de nombreuses propriétés des composites, rendant cette classification cohérente.

Macrochargés

Premiers composites sur le marché, ils se présentaient sous forme de deux pâtes à mélanger, associant des macroparticules (quartz, céramique, verre) de 1 à 40 μm à une résine matricielle.

Microchargés

Apparus pour pallier les défauts des macrochargés, ces composites contiennent des microcharges de silice (0,04 μm en moyenne). Ils peuvent être homogènes ou hétérogènes.

Composites Hybrides

Représentant la majorité des composites actuels, ils combinent des charges de tailles et compositions variées : microcharges (0,01 à 0,1 μm), minicharges (0,1 à 1 μm), midicharges (1 à 10 μm) et macrocharges (10 à 100 μm). Cette catégorie inclut les composites microhybrides et nanochargés.

En Fonction de la Viscosité

La consistance influence le choix du composite pour une restauration spécifique. Plusieurs consistances peuvent être utilisées dans une même intervention.

Composites de Viscosité Moyenne

Dits « universels », ils conviennent à de nombreuses indications (antérieures et postérieures). Leur opacité est ajustée selon l’indication clinique, avec un taux de charges d’environ 78 % en poids et 60 % en volume.

Composites Fluides

Indiqués pour des microcavités occlusales, cavités slot, cavités cervicales ou comme substitut dentinaire. Leur fluidité facilite l’étalement et l’adaptation aux parois cavitaires, mais ils présentent un retrait de polymérisation important (jusqu’à 5 % en volume) et des propriétés mécaniques réduites en raison d’un faible taux de charges (50 à 70 % en poids, < 50 % en volume).

Composites Compactables ou Condensables

Développés dans les années 1990 pour remplacer les amalgames dans les restaurations postérieures, ils ont été abandonnés en raison d’un taux d’échec élevé.

En Fonction du Mode de Polymérisation

Composites Chémo-polymérisables

Présentés sous forme de deux composants (pâtes ou poudre et liquide), l’un contenant l’amorceur, l’autre le co-amorceur, mélangés au moment de l’intervention.

Composites Photopolymérisables

La génération des radicaux primaires est initiée par des photons, via une activation photochimique des monomères.

Composites Duals

Combinant une initiation photochimique et chimique des radicaux primaires.

En Fonction de l’Indication Clinique

Cette classification n’est pas détaillée dans le document, mais les composites sont adaptés à des indications spécifiques (restaurations antérieures, postérieures, etc.).

Propriétés des Résines Composites

Propriétés Mécaniques

Résistance à la Compression

Les composites affichent des valeurs satisfaisantes comparées à l’émail et à la dentine :

MatériauRésistance à la compression (MPa)
Résines non chargées80
Composites conventionnels300 (240-350)
Microfins350 (300-400)
Hybrides universels350-450

Résistance à la Traction

Les composites surpassent l’amalgame (≈ 48 MPa), mais leur résistance dépend de la qualité de la finition de surface, sensible aux microfractures.

MatériauRésistance à la traction (MPa)
Microcharges≈ 40
Fluides≈ 35
Macrocharges53,4
Hybrides52 à 72

Module d’Élasticité de Young

Le module d’élasticité mesure la rigidité du matériau. Un module proche de celui de la dentine est idéal pour éviter une déformation excessive sous contrainte occlusale.

Dureté

La dureté de surface définit la résistance à la pénétration. Les composites fluides et microfins sont les moins durs, tandis que les microhybrides universels affichent les valeurs les plus élevées. L’émail reste plus dur que tous les composites.

Résistance à la Fatigue

Les contraintes mécaniques cycliques provoquent des microfêlures, entraînant des fractures par fatigue, particulièrement dans les zones de contact occlusal ou les extensions gingivales profondes.

Résistance à l’Usure

Longtemps point faible des composites postérieurs, la résistance à l’usure a été améliorée grâce à des charges plus nombreuses, plus petites et de compositions variées.

Propriétés Physiques

Expansion Thermique

Le coefficient d’expansion thermique des composites est 3 à 4 fois supérieur à celui des tissus dentaires (émail : 11,4 ; dentine : 8,3). Un coefficient idéal se situerait autour de 10 pour minimiser les écarts.

Rétraction de Prise après Polymérisation

La rétraction de prise reste un inconvénient majeur, entraînant des hiatus périphériques, des douleurs postopératoires, des discolorations et des caries secondaires. Le contrôle de cette rétraction est un objectif clé du développement des composites.

Absorption Hydrique et Solubilité

Les composites absorbent environ 2 % d’eau en poids, particulièrement les composites microfins à faible concentration de charges. L’absorption et la solubilité dépendent :

  • De la proportion de charges : moins de charges augmente l’absorption.
  • Du degré de polymérisation : une polymérisation inadéquate double l’absorption et multiplie la solubilité par 4 à 6.

Radio-opacité

La radio-opacité dépend du type et du pourcentage de charges. À l’exception des composites microfins (SiO₂ non radio-opaque), la plupart des composites actuels dépassent la radio-opacité de l’émail.

Propriétés Optiques

Les différences d’opacité sont obtenues par des variations d’indices de réfraction entre les charges et la matrice, tandis que les niveaux de saturation dépendent des concentrations en oxydes métalliques. Les systèmes colorimétriques imitent la structure histologique de la dent (composites « émail » ou « dentine ») via une stratification.

Propriétés Biologiques

Biocompatibilité

La biocompatibilité des composites reste mal définie. Les monomères libres de la matrice résineuse peuvent causer des dommages cellulaires.

Réaction du Tissu Gingival

Les résines composites, surtout macrochargées, sont plus irritantes pour les tissus gingivaux que les ciments verre-ionomères (CVI). La rugosité ou porosité favorise l’accumulation de plaque dentaire.

Sensibilités Post-opératoires

Les douleurs postopératoires dépendent principalement de l’épaisseur de dentine résiduelle et de la persistance de la boue dentinaire dans les tubulis, limitant les variations de pression intra-tubulaire, principale cause de souffrance du système dentino-pulpaire.


Voici une sélection de livres en français sur les prothèses dentaires:

Les résines composites

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