LES PREMIERS STADES DU DEVELOPPEMENT DE LA DENT / Histologie Dentaire

LES PREMIERS STADES DU DEVELOPPEMENT DE LA DENT / Histologie Dentaire

LES PREMIERS STADES DU DEVELOPPEMENT DE LA DENT / Histologie Dentaire

I – INTRODUCTION

L’histogenèse de la dent, ou odontogenèse, décrit l’ensemble des phénomènes aboutissant à la formation de la dent. C’est un processus complexe, qui regroupe des phénomènes de mise en place cellulaires et tissulaires résultant d’une série d’interactions entre un épithélium et un mésenchyme sous l’influence des cellules des crêtes neurales.

Le développement dentaire débute avant la naissance, dès le stade embryonnaire, à la sixième semaine de la vie intra-utérine et se poursuit jusqu’à l’âge adulte avec l’éruption et l’achèvement du développement de la racine de la troisième molaire.

Chez l’homme, l’ébauche dentaire commence à se former après seulement un mois de la vie embryonnaire. Deux dentitions se succèdent : d’abord la dentition transitoire ou temporaire (primaire ou « dents de lait »), remplacée ensuite par la dentition permanente (dents définitives).

Composition des dentitions

  • Dentition temporaire : comprend 20 dents (quatre incisives, deux canines et quatre molaires par arcade dentaire).
  • Dentition permanente : comprend 32 dents (quatre incisives, deux canines, quatre prémolaires, six molaires par arcade dentaire).

Les premières dents apparaissent vers l’âge de 6 mois et les dernières vers 18 à 25 ans. Les deux molaires de la dentition temporaire seront remplacées par des prémolaires. Les trois molaires de la dentition permanente apparaissent respectivement vers 6 ans pour les premières molaires, 12 ans pour les deuxièmes molaires et à l’âge adulte pour les troisièmes molaires (dents de sagesse).

Origine de la dent

La dent a une double origine :

  • Épithéliale
  • Mésenchymateuse
    Elle se forme à partir d’une ébauche embryonnaire appelée le germe dentaire.

II – LES DIFFÉRENTS STADES DE L’ODONTOGENÈSE

L’odontogenèse débute vers le 28ᵉ jour de la vie intra-utérine. Elle est décrite par :

  • La succession de trois phases contribuant à la formation de la couronne en premier lieu :
    1. Phase d’initiation : vers le 28ᵉ jour du développement intra-utérin.
    2. Phase de morphogenèse : caractérisée par :
      • La formation des bourgeons dentaires (8ᵉ semaine intra-utérine).
      • La formation de la cupule dentaire (8ᵉ-9ᵉ semaine).
      • La formation de la cloche dentaire (11ᵉ-12ᵉ semaine).
    3. Phase de cytodifférenciation : différenciation des odontoblastes et des améloblastes.
  • Puis, la formation radiculaire en deuxième lieu.

1 – PHASE D’INITIATION

Cette phase est caractérisée par la formation de l’épithélium odontogène et l’apparition de la lame dentaire et vestibulaire.

1.1 – Formation de l’épithélium odontogène

  • La cavité buccale est individualisée vers la 5ᵉ semaine de la vie intra-utérine. À ce stade, elle est recouverte d’un épithélium d’origine épiblastique composé d’une à deux couches de cellules superficielles aplaties et une couche profonde de cellules cubiques, séparée du tissu conjonctif sous-jacent par une membrane basale.
  • L’épithélium odontogène apparaît entre le 28ᵉ et le 37ᵉ jour du développement intra-utérin comme un épaississement localisé de l’épithélium buccal qui va proliférer, réalisant une invagination dans le tissu conjonctif sous-jacent. Cette prolifération est caractérisée par un changement de l’orientation du fuseau mitotique : au lieu d’être perpendiculaire, lors des divisions cellulaires, la plaque équatoriale est parallèle à la membrane basale.
fig1 : épithélium odontogene

1.2 – Formation du mésenchyme odontogène

À ce stade, on note une densification cellulaire au niveau du mésenchyme face à l’épithélium odontogène, due à la migration de cellules provenant de l’ectomésenchyme des crêtes neurales. Cette migration est induite par l’épithélium odontogène. En raison de nombreuses mitoses, la zone présomptive de l’odontogenèse présente une densité cellulaire plus importante que les zones voisines. Cette zone porte le nom de mésenchyme odontogène.

Pendant les stades initiaux du développement du germe dentaire, le mésenchyme odontogène joue un rôle inducteur. L’épithélium qui surmonte le mésenchyme odontogène est compétent pour répondre à cette induction et va proliférer à son tour.

1.3 – Formation de la lame primitive

Des épaississements épithéliaux bilatéraux apparaissent isolément, dès le 28ᵉ jour, sur la face inférieure des bourgeons maxillaires et sur les versants linguaux des bourgeons mandibulaires.

Stade du mur saillant
Fig2. stade du mur saillant

L’accroissement des mitoses au niveau de l’assise germinative de l’épithélium buccal, sous l’induction du mésenchyme odontogène, entraîne une augmentation du nombre des assises superficielles, avec un épaississement épithélial qui apparaît dès le 28ᵉ jour de la vie intra-utérine. Ce stade porte le nom de mur saillant.

Chez l’embryon humain de 6 à 7 semaines, cet épaississement épithélial est composé de deux couches cellulaires (épithélium bistratifié : une couche de cellules basales hautes et une couche de cellules superficielles aplaties), séparées du mésenchyme sous-jacent par une lame basale.

Stade du mur plongeant

L’épaississement épithélial prolifère et s’enfonce dans le mésenchyme sous-jacent pour former le mur plongeant ou lame primitive, constitué de 4 à 6 couches de cellules. Sur la couche la plus profonde, les cellules sont prismatiques à noyaux allongés, orientées perpendiculairement par rapport à la membrane basale. Le mésenchyme sous-jacent présente une condensation cellulaire aux limites imprécises.

La forme générale de la lame primitive est celle d’un fer à cheval, épousant ainsi la configuration du rebord des futurs maxillaires.

1.4 – Formation de la lame dentaire et de la lame vestibulaire

développent de la lame dentaire et vestibulaire

Le mur plongeant se développe et se dédouble en deux épaississements :

  • Lame vestibulaire : à direction verticale externe, elle se creuse par la cytolyse des cellules centrales, aboutissant à la formation du vestibule.
  • Lame dentaire : à direction linguale ou palatine interne (6ᵉ-7ᵉ semaine du développement embryonnaire).

1.5 – Formation du bourgeon dentaire

À partir de la lame dentaire primaire s’individualisent des petits renflements épithéliaux coiffés par des cellules mésenchymateuses, les futurs bourgeons dentaires. La lame dentaire primaire donne naissance à 10 germes dentaires lactéaux par arcade, ensuite une apoptose (mort programmée) de cette dernière entraîne l’apparition de la lame dentaire secondaire, à l’origine des dents définitives.

2 – PHASE DE MORPHOGENÈSE DENTAIRE

2.1 – Stade du bourgeon dentaire (début 8ᵉ semaine intra-utérine)

Chaque lame donne naissance à des bourgeons dentaires, épaississements épithéliaux plus conséquents et localisés, correspondant à des dents individuelles. Le mésenchyme sous-jacent se condense. Les bourgeons se présentent sous la forme d’un cylindre qui s’enfonce dans l’ectomésenchyme.

Formation du bourgeon dentaire

2.2 – Stade de la cupule ou capuchon dentaire (8ᵉ-9ᵉ semaine intra-utérine)

La prolifération cellulaire et l’augmentation de volume du massif cellulaire provoquent une dépression à la base (partie antérieure) de chaque bourgeon, réalisant une concavité du massif épithélial qui enveloppe partiellement l’ectomésenchyme sous-jacent (future pulpe dentaire). Le bourgeon devient alors un capuchon ou cupule, qui évolue par la suite vers l’organe de l’émail.

Dans la partie apicale centrale, un regroupement cellulaire constitue le nœud de l’émail primaire (NEP). Le NEP, constitué d’un petit nombre de cellules sans différence morphologique, comporte des molécules de signalisation et des facteurs de transcription non exprimés par les autres cellules épithéliales. Le NEP est une formation transitoire.

Stade de la cupule jeune
  • Différenciation de l’épithélium en plusieurs assises cellulaires :
    1. Épithélium adamantin interne (EAI) : couche de cellules tapissant la concavité du massif épithélial, enveloppant partiellement l’ectomésenchyme sous-jacent (future pulpe dentaire). L’EAI est séparé du mésenchyme par une membrane basale et des cellules de remplissage.
    2. Épithélium adamantin externe (EAE) : constitué d’une seule couche cellulaire tapissant la partie périphérique du capuchon.
    3. Nœud de l’émail primaire : regroupement de cellules épithéliales au sommet de la dépression du capuchon dentaire, centre de signalisation responsable des axes du développement du germe dentaire, qui disparaît à la fin du stade de la cupule.
    4. Cellules de remplissage : masse épithéliale sans dénomination particulière à ce stade.
Partie ectomésenchymateuse
  1. Apparition d’une vascularisation sans organisation particulière au sein de la densité cellulaire regardant l’EAI.
  2. Une organisation cellulaire périphérique se forme, donnant par la suite le sac folliculaire (SF), qui commence à s’individualiser sous forme de strates cellulaires relativement inorganisées. L’ectomésenchyme dans la concavité donnera la papille dentaire (future pulpe).
Stade de la cupule âgée
Partie épithéliale
  1. Disparition du NEP.
  2. Les cellules de remplissage se dissocient et prennent une forme étoilée pour donner le réticulum étoilé (RE).
  3. Les cellules de l’épithélium dentaire interne (EAI) faisant face à l’ectomésenchyme s’allongent et prennent une morphologie caractéristique.

De l’extérieur vers l’intérieur, l’organe de l’émail, constituant la partie épithéliale du futur germe dentaire, sera formé de :

  • Épithélium dentaire externe (EDE).
  • Réticulum étoilé (RE).
  • Épithélium dentaire interne (EDI).
Partie ectomésenchymateuse
  • Prend le nom de papille ectomésenchymateuse (densité cellulaire regardant l’EDI), avec une organisation de la vascularisation et le début de l’innervation.
  • La partie périphérique, le sac folliculaire (SF), s’organise en strates cellulaires.
l’organe de l’èmail au stade de la cupule âgée

2.3 – Stade de la cloche dentaire (11ᵉ-12ᵉ semaine intra-utérine)

  • La cupule dentaire prend la forme d’une cloche : apparition d’une zone de réflexion et progression en direction apicale, délimitant de plus en plus la pulpe dentaire.
  • L’EAI se plisse, préfigurant les futures cuspides.
  • Apparition des nœuds de l’émail secondaires au sommet des cuspides en formation. Leur nombre dépend du nombre de cuspides (autant de cuspides que de nœuds secondaires). Ils contrôlent les phénomènes de différenciation responsables de la morphogenèse dentaire.
  • Une quatrième couche cellulaire, appelée stratum intermedium (SI), s’intercale entre le RE et l’EAI.
  • Les cellules de l’EAI s’allongent encore pour devenir les futures améloblastes, à l’origine de l’émail.
  • L’EAI et l’EAE en périphérie de la cloche se juxtaposent pour donner la gaine de Hertwig, qui s’enfonce dans l’ectomésenchyme ; cette structure sera à l’origine de la formation radiculaire.
L’organe de l’email au stade de la cloche

L’ORGANE DE L’ÉMAIL AU STADE DE LA CLOCHE

À ce stade, quatre couches – EAE, RE, SI, EAI – seront à l’origine de la formation de l’organe de l’émail.

a) Épithélium adamantin externe (EAE)

  • Formé de cellules cuboïdes ou aplaties, régulières, en rapport avec la gelée de l’émail (réticulum étoilé), séparées des améloblastes par le stratum intermedium.
  • Les mitoses sont nombreuses au voisinage de la zone de réflexion, à la base de l’organe de l’émail, et diminuent progressivement vers le sommet.
  • Les capillaires provenant du sac dentaire assurent l’apport nutritionnel et le métabolisme.

b) Réticulum étoilé (RE)

  • Occupe le centre de l’organe de l’émail.
  • Le cytoplasme de ces cellules est comprimé par la présence d’un gel occupant les espaces intercellulaires.

c) Stratum intermedium (SI)

  • Situé entre le RE et l’EAI, formé de 3 à 5 assises cellulaires contiguës reliées par de nombreux desmosomes.
  • Les cellules ont une forme très aplatie, avec un cytoplasme présentant de nombreuses activités enzymatiques.

d) Épithélium adamantin interne (EAI)

  • Cellules légèrement aplaties par rapport à celles de l’épithélium externe, bordant la concavité de la cloche sous forme d’une palissade.
  • Ces cellules représentent les futures pré-améloblastes, évoluant en améloblastes qui secrèteront l’émail.

Zone de réflexion

  • Bord libre de l’organe de l’émail, où s’opèrent toutes les divisions cellulaires.

Papille mésenchymateuse

  • Se distingue du tissu conjonctif qui l’entoure par sa richesse cellulaire.
  • Les cellules ectomésenchymateuses faisant face aux cellules de l’EAI (pré-améloblastes) se différencient en odontoblastes, à l’origine de la dentine coronaire.

Sac folliculaire

  • Issu du mésenchyme péridentaire, il entoure l’organe de l’émail et la papille mésenchymateuse.
  • Rôles :
    • Protéger le germe dentaire au cours des étapes ultérieures de son développement.
    • Assurer à l’organe de l’émail les éléments nutritionnels nécessaires au cours de l’amélogenèse via sa vascularisation.
    • Fournir les éléments cellulaires et fibrillaires induisant la formation du cément, du desmodonte et de l’os alvéolaire.

LES PREMIERS STADES DU DEVELOPPEMENT DE LA DENT / Histologie Dentaire

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