LES OSTEITES DES MAXILLAIRES

LES OSTEITES DES MAXILLAIRES

  LES OSTEITES DES MAXILLAIRES


Introduction

Les ostéites maxillaires et mandibulaires représentent des affections inflammatoires du tissu osseux, elles sont d’origines diverses (locales ou générales). Souvent infectieuses ou traumatiques, elles peuvent être parfois induites par des traitements médicamenteux (bisphosphonates, denosumab) ou encore par un antécédent de radiothérapie cervico-faciale. Le maître symptôme est la douleur, accompagnée fréquemment de tuméfaction locale et d’un trismus. Cependant, il s’avère que leurs sémiologies cliniques varient selon la localisation anatomique, la présence ou non de suppuration, la durée d’évolution ainsi que l’étiologie de la pathologie. Dans la majorité des cas, elles entraînent des délabrements osseux importants, posant des problèmes diagnostiques et thérapeutiques délicats.

Ce qu’il faut savoir

Les ostéites sont à l’origine d’une déminéralisation osseuse entraînant l’apparition à terme de fragments osseux isolés du reste de l’os (séquestres). Le séquestre est un fragment osseux non irrigué et dévitalisé siégeant dans un os ou dans un tissu périosseux. Les ostéites sont plus fréquentes à la mandibule qu’au maxillaire du fait de la vascularisation de type terminale à la mandibule. L’inflammation entraîne des thromboses intra-osseuses qui entraînent la formation d’îlots de cellules qui se nécrosent, formant ainsi des séquestres osseux sans vascularisation ni innervation. La bactériologie des ostéites inclut une flore polymicrobienne associant des bactéries aérobies et parfois anaérobies (des streptocoques +++ et des staphylocoques dorés).

Les étiologies

Causes déclenchantes

Cause locale (origine infectieuse)

  • Dentaire ou parodontale : C’est la cause la plus fréquente, incluant « pulpite, granulome, kyste périapical, parodontopathie… »
  • Traumatismes maxillo-faciaux : Par exemple, fracture.
  • Origine iatrogène : Elle est la conséquence d’un geste thérapeutique, comme « exodontie notamment dent incluse, chirurgie des maxillaires… »

Cause générale

Au cours de certaines maladies infectieuses, il peut y avoir une atteinte diffuse du squelette. Les ostéomyélites hématogènes ont une origine souvent cutanée (furoncle) ou ORL (angine).

Cause exogène

  • Physique :
  • Le réchauffement de l’os par les instruments rotatifs.
  • Les radiations ionisantes utilisées dans le traitement des cancers.
  • Chimique : Intoxication arsenicale, phosphorée, fluorée.
  • Thérapeutique : Chimiothérapie anticancéreuse, radiothérapie.

Causes favorisantes

  • L’âge : Les ostéites sont plus fréquentes chez l’enfant du fait des éruptions successives qui provoquent des remaniements osseux.
  • Le terrain : Certaines pathologies prédisposent les patients aux infections qui peuvent revêtir une allure plus grave, comme « diabète, sida, dystrophie osseuse, ostéoporose ».

La section histologique du rebord alvéolaire nous montre :

Classification

Formes cliniques

Les ostéites circonscrites de causes locales

Ostéites localisées

Les signes infectieux peuvent être locaux, régionaux ou rarement généraux, ils traduisent la diffusion de l’infection.

L’ostéopériostite

La forme la plus légère, plus fréquente chez l’enfant.

Clinique :

  • Légère tuméfaction des parties molles.
  • Épaississement des tables osseuses.
  • Signes d’une monoarthrite aiguë.

Radio :

  • Image radio claire péri-apicale + élargissement desmodontal.

Évolution :

  • Guérison ou diffusion.

Image : périostite.png

L’ostéopériostose

Fréquente chez l’enfant suite à une monoarthrite chronique de la première molaire.

Clinique :

  • Déformation faciale.
  • Épaississement non douloureux de l’os basal.

Radio :

  • Lésion d’infection apicale.
  • Épaississement de la corticale osseuse.

Évolution :

  • Guérison après traitement, soit conservateur, soit par l’extraction de la dent causale.
Abcès sous-périosté

Il survient chez l’enfant et l’adulte dans les régions où le périoste adhère à la muqueuse (palais ou gencive).

Au palais :

  • Plus fréquent chez l’adulte.
  • Racines de : incisive latérale, première prémolaire et première molaire.
  • Voussure fluctuante, douloureuse.
  • Muqueuse œdémateuse, congestionnée.

Image : abcès sous périosté.png, img233

Ostéites du rebord alvéolaire

Les alvéolites sont dues à une inflammation de la paroi alvéolaire qui survient après une extraction dentaire traumatique. Elles apparaissent 2 à 3 jours après l’extraction. Cliniquement, on décrit deux formes d’alvéolites :

Alvéolite sèche

Clinique :

  • Douleurs intenses, continues, insensibles aux antalgiques.
  • Halitose fréquente.
  • Signes physiques :
  • Vacuité de l’alvéole.
  • Parois blanches grisâtres.
  • Muqueuse péri-alvéolaire inflammatoire.

Évolution :

  • Guérison spontanée généralement au bout d’une dizaine de jours.
  • Risque de complications à type d’ostéite.

Image : alveoliteA.jpg

Alvéolites suppurées

Clinique :

  • Signes généraux : Fièvre de 38 à 38,5°C.
  • Signes fonctionnels : Douleurs moins intenses que dans l’alvéolite sèche.
  • Signes physiques :
  • Adénopathie.
  • Tuméfaction vestibulaire.
  • Alvéole comblée par un caillot de couleur brunâtre saignant.
  • Débris osseux, dentaires ou tartriques souvent retrouvés au fond de l’alvéole.

Évolution :

  • Non résolutive spontanément, évolue vers des complications à type d’ostéite.

Le syndrome du septum

Le septum peut être exposé suite à une irritation locale secondaire (mauvais point de contact interdentaire, obturation débordante, prothèse traumatisante).

Clinique :

  • Papille inflammatoire.
  • Pseudo-poche parodontale au sondage.
  • Saignement gingival.
  • Os découvert, nécrosé.

Radio :

  • Septum interdentaire flou « fer de lance ».
Ostéite centrale

Plus fréquente à la mandibule : région prémolaire et symphysaire (structure plus spongieuse).

Clinique :

  • Tuméfaction.
  • Signes généraux marqués.
  • Fistulisation sous-mentonnière.
  • Mobilité dentaire.
  • Douleurs continues rebelles aux antalgiques.

Radio :

  • Raréfaction osseuse diffuse à contours irréguliers.

Évolution :

  • Fistulisation + sédation des signes.
Ostéites corticales

Elles progressent de la périphérie (corticale) vers la profondeur (médullaire). Le périoste et la corticale se nécrosent.

Clinique :

  • Tuméfaction osseuse douloureuse avec présence de fistule.
  • Œdème des parties molles.
  • Signe de Vincent négatif.
  • Pas de mobilité dentaire.

Radio :

  • Zone claire de décalcification avec ou sans formation de séquestre.

Évolution :

  • Suppuration avec ou sans séquestration, diffusion.

Ostéites diffuses ou diffusées de causes locales

Ostéites diffuses aiguës

L’ostéite diffusée correspond à l’extension progressive du processus, initialement circonscrit. Le terme d’ostéite diffuse est réservé aux formes qui sont d’emblée étendues. Elles sont appelées à tort ostéomyélite des maxillaires, parce qu’elles ont à la période d’état une symptomatologie analogue à l’ostéomyélite hématogène. En effet, à l’inverse de cette dernière qui est une septicémie à localisation osseuse secondaire, elles passent par les phases suivantes :

Stade initial

Clinique :

  • Douleurs intenses, irradiées et continues, rebelles aux antalgiques.
  • Trismus, adénopathies cervicales, signes généraux importants (fièvre, teint pâle, asthénie).
  • Examen endo-buccal : comblement du vestibule par une tuméfaction dure, douloureuse, adhérente à l’os, mobilité dentaire.

Radio :

  • Rien de particulier à cette phase.
Phase d’état

Clinique :

  • Aggravation de la symptomatologie locale et générale.
  • Stade de la collection purulente.
  • Déformation du visage avec peau rouge.

Radio :

  • Raréfaction osseuse commençant à apparaître, mais aucun signe de nécrose osseuse.
Phase de séquestration

Clinique :

  • Disparition des signes douloureux et généraux.
  • Persistance du trismus et des troubles de la sensibilité labiale.
  • Tuméfaction et fistules évoluant par poussées inflammatoires successives, aboutissant à l’élimination du séquestre osseux.

Radio :

  • Os floconneux et séquestres.
Phase de réparation
  • Débute dès la disparition des processus infectieux.
  • Régénération osseuse très lente, ne concernant que le secteur basilaire.
  • Séquelles liées à la séquestration : pertes de dents, troubles de croissance, ankylose temporo-mandibulaire, déformations osseuses, cicatrices rétractiles.

Ostéite chronique

Il s’agit d’une inflammation osseuse chronique non purulente, caractérisée également par l’absence de fistulisation et de séquestration osseuse. Elle fait suite aux formes précédentes mal traitées.

Clinique :

  • Signes généraux absents.
  • Aucun symptôme ni dentaire ni parodontal.

Radio :

  • Opacité médullaire témoignant d’une réaction de sclérose, parfois associée à des zones d’ostéolyse.
  • Séquestres rares.
  • Zones de destruction et de construction osseuse.
  • Image radio claire géodique.

Les ostéites de causes générales

Ostéites hématogènes banales (« ostéomyélite »)

Ostéomyélite aiguë

Plus fréquente chez l’enfant que l’adulte.

Clinique :

  • Douleur intense, continue.
  • Trismus serré.
  • Adénopathies cervicales inflammatoires.
  • Tuméfaction osseuse masquée par un œdème des tissus mous.
  • Peau rouge, tendue et luisante.
  • Tuméfaction devenue fluctuante en quelques jours.

Radio :

  • Raréfaction osseuse.
Ostéomyélite chronique

Très rare, siégeant au niveau du bord inférieur mandibulaire.

Clinique :

  • Asymétrie, trismus.
  • Jamais de fistulisation.
  • Peu ou pas d’adénopathie cervicale, ni signes généraux.

Radio :

  • Réaction périostée.
  • Zone d’ostéolyse.
  • Épaississement osseux en hauteur et en largeur.
  • Racines dentaires résorbées.

Les ostéites spécifiques

Ostéites actinomycosiques

Elles se manifestent sous forme de cellulite chronique, le germe responsable est l’Actinobacterium israelii.

Ostéites mycosiques

Très rares au niveau des maxillaires, elles surviennent chez les patients immunodéprimés. Le germe responsable est Candida albicans.

Ostéites syphilitiques

Elles apparaissent comme une tuméfaction inflammatoire, et la sérologie spécifique permet de poser le diagnostic : TPHA, VDRL.

Ostéites tuberculeuses

Elles ont un début insidieux, et l’examen bactériologique et l’aspect histologique permettent de poser le diagnostic (« IDR » à la tuberculine).

Les ostéites de causes thérapeutiques

Ostéites sous bisphosphonates (OMN)

L’aspect clinique de l’ostéonécrose est très variable, elle peut être asymptomatique ou provoquer des douleurs importantes ou une perte de la sensibilité, généralement dans la région du nerf alvéolaire inférieur, selon l’étendue de la nécrose. L’os exposé est dur, rugueux et de couleur blanc-jaunâtre. Cette zone dénudée est indolore, ne saigne pas, et peut néanmoins être accompagnée d’une fistule muqueuse et/ou cutanée avec ou sans écoulement purulent. La gencive et la muqueuse buccale périphérique peuvent être normales ou légèrement inflammatoires. Généralement, il existe des antécédents de traumatisme, le plus fréquemment une extraction dentaire.

Caractéristiques de l’ONM :

  • Exposition osseuse persistante dans la cavité buccale, de plus de 8 semaines.
  • Patients ayant été traités ou en cours de traitement par bisphosphonates.
  • Absence d’antécédents de radiothérapie cervico-faciale.
  • Absence de localisation métastatique dans la zone d’ostéonécrose, objectivée par la réalisation systématique d’un examen histopathologique.

Image : Biphosphonates.bmp

Ostéoradionécrose

Elle se manifeste par une nécrose osseuse secondaire aux radiations ionisantes utilisées à des fins thérapeutiques, provoquant une altération des capacités de défense et de cicatrisation du tissu osseux mandibulaire ou maxillaire. L’ORN se développe plus fréquemment à la mandibule qu’au maxillaire (vascularisation centromédullaire prédominante au niveau de l’angle et de la branche horizontale), le plus souvent unilatéral. Il peut exister des formes bilatérales compliquant la stratégie thérapeutique quand elles sont asynchrones.

Clinique :

  • Exposition osseuse chronique (inconstante).
  • Os de couleur grisâtre, insensible, mou, associé parfois à une nécrose muqueuse, une fracture osseuse ou une fistule cutanée.
  • Plus rarement au niveau maxillaire, avec des répercussions fonctionnelles moins graves, en dehors d’une possible communication bucco-sinusienne ou bucco-nasale.

Traitement

Traitement prophylactique

  • Motivation à l’hygiène buccodentaire.
  • Antibioprophylaxie.
  • Remise en état de la cavité buccale.
  • Extraction non traumatisante.
  • Révision systématique de l’alvéole.

Traitement curatif

Traitement médical

Il permet :

  • Contre l’infection : Antibiotiques basés sur un antibiogramme.
  • Contre la douleur : Antalgiques + bain de bouche.
  • Contre la contraction musculaire.
  • Renforçateurs de terrain.
  • Oxygénothérapie hyperbare.

Objectifs :

  • Traitement précoce.
  • Éviter les complications.
  • Limiter les séquelles.

Traitement chirurgical

  • Étiologique : Traitement conservateur, résection apicale, extraction.
  • Drainage : Endo- ou exobuccal.
  • Séquestrectomie.
  • Traitement des séquelles.
  • Restauration prothétique.
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Conclusion

Les ostéites sont des affections graves, mais heureusement rares. Leur rareté est le résultat du traitement préventif, de l’amélioration de l’hygiène buccodentaire et des progrès de l’antibiothérapie. Le traitement des ostéites des maxillaires avérées doit être précoce. Il est médical ou médico-chirurgical. Son but est de guérir l’affection et d’en limiter les séquelles.


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