Les Luxations des ATM / Pathologie et chirurgie buccale

Les Luxations des ATM / Pathologie et chirurgie buccale

Les Luxations des ATM / Pathologie et chirurgie buccale

Introduction

L’articulation temporomandibulaire (ATM) est une diarthrose bi-condylienne, symétrique, qui relie la fosse mandibulaire de l’os temporal au condyle de la mandibule par l’intermédiaire d’un ménisque fibro-cartilagineux, fermé par une capsule articulaire. C’est l’articulation la plus mobile du corps humain. Les deux articulations fonctionnent de manière synergique, et tout déséquilibre dans leur fonctionnement entraîne des troubles fonctionnels, regroupant des désordres musculaires, articulaires et morphologiques. Ces troubles se manifestent par des bruits articulaires, des douleurs, une limitation de l’ouverture buccale et des luxations condylo-discales ou condylo-glénoïdiennes.

Définition

Les luxations temporo-mandibulaires se définissent par la perte des rapports normaux entre les surfaces articulaires condylienne et temporale. Elles peuvent être unilatérales ou bilatérales, antérieures (le plus souvent), ou plus rarement postérieures, externes ou internes.

Étiologie

L’étiologie des luxations des ATM est multifactorielle. Les facteurs incluent :

Troubles occlusaux

  • Béance antérieure
  • Occlusion croisée
  • Forte supraclusion incisive
  • Classes II et III
  • Déficience du guidage antérieur
  • Édentations postérieures non compensées
  • Déviations asymétriques en occlusion d’intercuspidation maximale
  • Interférences, surtout en latéralité
Quelques exemples de troubles occlusaux responsables de dysfonctionnement articulaire.

Autres facteurs

  • Forme de la cavité glénoïde : peu profonde
  • Traumatismes : séquelles de fractures, ouverture buccale forcée et prolongée
  • Anomalies posturales : certaines activités (violonistes, joueurs d’instruments à vent, cyclistes) ou postures nocives (sommeil en décubitus ventral avec appui mandibulaire)
  • Bruxisme et parafonctions : contractions involontaires des muscles masticateurs, entraînant fatigue musculaire et étirements ligamentaires
  • Pathologies inflammatoires et arthrosiques de l’ATM
  • Traitements orthodontiques : mauvais équilibres à certains stades du traitement

Classification des facteurs (selon Gola)

  • Facteurs prédisposants : fragilité articulaire (laxité ligamentaire congénitale), fragilité psychique, parafonctions (bruxisme), troubles occlusaux
  • Facteurs déclenchants : traumatismes mandibulaires, perturbations comportementales, perturbations occlusales
  • Facteurs entretenants : vieillissement, syndrome dépressif

Formes cliniques

Luxation condylo-discale antérieure

La luxation condylo-discale antérieure, où le disque se situe en position antérieure par rapport au condyle en intercuspidation maximale, est l’atteinte la plus fréquente des ATM.

Stades de l’atteinte

Stade musculaire et capsuloligamentaire
  • Douleurs liées à des spasmes musculaires, tendinites, capsulites ou synovites
  • Topographie variable : articulation, muscles (temporal, masséter, rétromolaire, cervical)
  • Palpation révélant des secteurs algiques
  • Hypertrophie musculaire possible (masséter, temporal) due à l’hyperfonction
Stade de luxation antérieure réductible
  • Symptômes précédents, plus :
    • Bruits articulaires (claquements uni- ou bilatéraux) à l’ouverture, à la fermeture, ou les deux
    • Amplitude d’ouverture buccale normale
  • IRM : en bouche fermée, disque en position antérieure ; en ouverture, le condyle rattrape le disque pour des relations discocondyliennes normales ou subnormales (transitoires)
Stade de luxation discale irréductible
  • Disque restant en avant du condyle, même en ouverture buccale
  • Limitation douloureuse de l’ouverture buccale avec déviation vers le côté atteint
  • Disparition des bruits articulaires
Lésions discales
  • Anomalies structurales : dégénérescence mucoïde, perforations
  • Douleurs articulaires, parfois violentes, lors des mouvements
Perforation discale mettant à nu la tête condylienne
Anomalies synoviales
  • Adhérences intra-articulaires (synoviales) limitant les mouvements ou causant une raideur matinale
Anomalies osseuses
  • Lésions arthrosiques : déformation des condyles, ostéophytes (visualisés par IRM)

Moyens thérapeutiques

Traitements symptomatiques
  • Antalgiques : paracétamol, AINS (Diclofénac pour diffusion synoviale)
  • Décontracturants musculaires : Mydocalm 150 mg, 1 cp le soir
  • Toxine botulique : pour lever les spasmes (effet en 2-3 jours, durée 2-3 mois)
  • Infiltrations intra-articulaires : anesthésiques locaux, corticoïdes (Diprostène, Célestène, Kenacort) ; risques d’infection et d’érosion articulaire (2-3 injections/an maximum)
Gouttières occlusales
  • Gouttière de relaxation musculaire :
    • En résine acrylique dure, couvrant toute l’arcade
    • Indications : protection dentaire, contractures musculaires, diagnostic occlusal
    • Épaisseur 1-2 mm, ajustée pour contacts simultanés
    • Port 24h/24 pendant 2-3 mois, contrôles toutes 3-4 semaines
  • Gouttière de repositionnement :
    • Maxillaire, pour luxation discale réductible
    • Stabilise la mandibule en position antérieure (manœuvre de Farrar et Mc Carthy)
    • Épaisseur 2-3 mm, port 4-6 mois 24h/24, contrôles toutes 3 semaines
Manoeuvre de Farrar et Mc Carthy (d’après Rozencweig).
  • Gouttière de décompression :
    • Pour luxation discale irréductible
    • Favorise la transformation du ligament rétrodiscal en néodisque
    • Port 24h/24 pendant 6-8 mois
Ajustement occlusal
  • Meulages sélectifs pour éliminer prématurités et interférences
  • Ordre : relation centrée, trajet vers intercuspidation maximale, latéralité, propulsion
Traitement prothétique
  • Remplacement des dents manquantes
  • Prothèse provisoire testée 3-6 mois avant définitive
Traitement orthodontique
  • Correction des malpositions dentaires
  • Finition par meulage sélectif pour équilibre occlusal
Rééducation
  • Objectifs : relaxation musculaire, symétrisation des mouvements
  • Moyens : kinésithérapie (chaleur, massages), mécanothérapie (mouvements d’ouverture/fermeture, propulsion/rétropulsion)
Traitement chirurgical
  • Techniques : condylectomie, condylotomie, condyloplastie, repositionnement méniscal, discectomies, discoplasties, fixation du disque
Traitement psychologique
  • Pour patients anxieux avec bruxisme
  • Approches comportementales ou médicamenteuses (anxiolytiques, antidépresseurs)

Luxation condylo-discale postérieure

Rare, elle peut être réductible ou irréductible.

  • Réductible : disque postérieur en bouche fermée, reprenant sa place en ouverture
  • Irréductible : disque restant postérieur en bouche fermée et ouverte
  • Causes possibles : traumatisme, hyperlaxité ligamentaire, béance incisive, anomalies du guide incisif
  • Signes cliniques : béance molaire unilatérale, sensation de corps étranger, ouverture limitée, bruits articulaires non caractéristiques
  • Diagnostic : IRM montrant la position rétrocondylienne du disque
  • Traitement : conservateur (réduction sous anesthésie locale, myorelaxants, antalgiques, gouttière, tractions élastiques) ; chirurgie en cas d’échec

Luxation condylo-glénoïdienne

Luxation anatomique où le condyle sort des limites de l’articulation, dépassant le tubercule zygomatique.

Luxations bloquées

  • Survenue brutale (bâillement, ouverture forcée) avec douleur, craquement, impossibilité de fermer la bouche
  • Réduction : manuelle (manœuvre de Nélaton, 90 % de succès) ou sous anesthésie générale
  • Manœuvre de Nélaton : pouces sur cuspides molaires inférieures, autres doigts sur maxillaires ; abaissement puis rétropulsion
  • Suivi : fronde mentonnière, conseils alimentaires pour éviter récidives
Manœuvre de Nélaton (d’après Rozencweig).

Luxations récidivantes

  • Réductions de plus en plus faciles mais fréquentes
  • Causes : hyperlaxité ligamentaire, troubles occlusaux
  • Traitement :
    • Correction occlusale prioritaire
    • Chirurgie (butée en titane, augmentation du tubercule zygomatique) si invalidant

Conclusion

La luxation des ATM est une pathologie complexe d’étiologie variée, nécessitant un diagnostic précis pour un traitement adapté. La luxation bilatérale antérieure bloquée est la plus fréquente, avec un traitement initial simple mais des récidives problématiques. Les approches thérapeutiques doivent privilégier des solutions non invasives, la chirurgie étant un dernier recours.

Bibliographie

  1. Anatomie de l’articulation temporo-mandibulaire. Kinésithérapie de la face, du crâne et du cou © 2015, Elsevier Masson SAS.
  2. Étude de l’articulation temporomandibulaire. J. Dargaud, H. Vinkka-Puhakka, F. Cotton, M. Del Corso, J. Bruy, B. Vialle. EMC 28-025-P-10.
  3. Altérations fonctionnelles de l’articulation temporomandibulaire. C. Bodin.

Les Luxations des ATM / Pathologie et chirurgie buccale

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