Les ciments verre-ionomere (CVI) – Biomatériaux Dentaire

 Les ciments verre-ionomere (CVI) – Biomatériaux Dentaire

 Les ciments verre-ionomere (CVI) – Biomatériaux Dentaire

Introduction

Un ciment verre-ionomère (CVI) est un matériau composé de verres basiques et d’un polymère acide. Leur principal atout réside dans leur grande variété de fonctions, notamment en dentisterie restauratrice, en prothèse et en prévention. Initialement difficiles à manipuler, les améliorations apportées à ces matériaux ont permis d’optimiser leurs propriétés et de les rendre plus pratiques à utiliser. Leur caractéristique essentielle est l’adhérence naturelle au substrat dentaire, ce qui constitue leur intérêt majeur.

Classifications

Selon l’usage du ciment

  • CVI de type I : Matériaux de scellement, utilisés pour le scellement de couronnes, d’inlays, d’onlays, de bridges ou de bagues orthodontiques.
  • CVI de type II :
    • Type II.1 : Matériaux pour les restaurations esthétiques.
    • Type II.2 : Matériaux d’obturation où l’esthétique n’est pas prioritaire, mais où la résistance est importante.
  • CVI de type III : Matériaux utilisés comme base ou liner sous les restaurations.

Classification internationale

Quatre familles sont distinguées :

  • Famille I : CVI traditionnels.
  • Famille II : CVI-MAR (modifiés par des résines).
  • Famille III : Compomères (composites modifiés par des polyacides).
  • Famille IV : Autres CVI modifiés.

Les CVI traditionnels

Les ciments verre-ionomères (CVI), également appelés ciments polyalkénoates, sont des ciments dont la prise résulte d’une réaction acide-base entre des particules de verre aluminosilicique hautement fluorées et un acide polyalkénoïque. Ces matériaux se distinguent par une libération continue de fluor, une faible cytotoxicité et une adhérence spontanée à l’émail et à la dentine grâce à une couche interfaciale d’échange ionique entre le matériau et son substrat. Cependant, leur sensibilité à la balance hydrique affecte négativement leurs propriétés optiques et mécaniques, limitant leur usage aux restaurations temporaires.

Composition

Poudre

La poudre est un fluoro-alumino-silicate (FAS) composé de :

  • Silice (SiO₂) : 30 %
  • Alumine (Al₂O₃) : 16 %
  • Cryolithe (Na₃AlF₆) : 5 %
  • Fluorure de calcium (CaF₂) : 34 %
  • Trifluorure d’aluminium (AlF₃) : 5 %
  • Phosphate d’alumine (AlPO₄) : 10 %

Liquide

Le liquide est une solution aqueuse contenant :

  • Acide polyalkénoïque : 50 %
  • Acide itaconique (durcisseur) : 45 à 50 %
  • Acide tartrique (accélérateur de prise)
  • Acide maléique (durcisseur)

Réaction de prise

La réaction de prise implique une interaction entre l’acide polyacrylique et l’alumino-silicate de calcium fluoré, formant un sel de polyacrylate de calcium et d’aluminium. Cette libération d’ions après l’attaque acide sur les particules de verre est caractéristique et donne naissance à une matrice de polyacrylate de Ca²⁺ et Al³⁺ enrobant les particules de verre.

Propriétés

Adhésion

Les CVI adhèrent naturellement au substrat dentaire par échange ionique entre les charges négatives des polyacides et les charges positives de l’hydroxyapatite. Les valeurs d’adhésion sont :

  • Dentine : 2 à 6 MPa
  • Émail : 4 à 8 MPa

L’adhésion est plus forte sur l’émail que sur la dentine en raison de la plus grande présence d’apatite dans l’émail.

Dilatation thermique

Le coefficient de dilatation thermique des CVI, d’environ 10 × 10⁻⁶/°C, est proche de celui de la dent. Cela réduit le risque de micro-infiltration et améliore l’étanchéité à long terme.

Retrait de polymérisation

Le retrait de prise est de 2 à 3 % lors de la polymérisation. Les contraintes liées à ce retrait se dissipent dans le matériau, favorisant une bonne étanchéité.

Étanchéité

L’étanchéité des CVI dépend de plusieurs facteurs :

  • Coefficient de dilatation thermique : Proche de celui de la dent, il évite les chocs thermiques à l’interface.
  • Solubilité : Une fois totalement gélifiés (après 48 heures), les CVI résistent bien à l’hydrolyse hydrique et aux acides faibles.
  • Résistance à l’usure : Dépend des contraintes subies par le matériau.

Absorption hydrique

L’absorption hydrique, de l’ordre de 2 %, est un inconvénient majeur. Elle favorise l’absorption de liquides pigmentés, entraînant une coloration des restaurations. Un CVI exposé à l’humidité pendant la prise présente :

  • Une diminution des propriétés mécaniques.
  • Une perte de translucidité (aspect crayeux).
  • Une tendance accrue à fixer les colorants.

Pour limiter ces effets, il est recommandé d’isoler le matériau avec un vernis lors de la pose et d’attendre 48 heures avant de polir sous spray.

Degré de porosité

La structure poreuse des CVI, avec des discontinuités et des différences de dureté entre les charges et la matrice, augmente leur potentiel de dégradation, particulièrement sous contraintes occlusales.

Solubilité

Les CVI ont une solubilité de 0,3 % en 24 heures, qui augmente en cas de contamination salivaire durant les premières minutes de prise ou d’un mauvais rapport poudre-liquide. Cependant, après 48 heures, les CVI gélifiés résistent bien à l’hydrolyse et aux acides faibles.

Rugosité

À l’état initial, les CVI sont lisses et brillants grâce à l’application d’un vernis protecteur. Sans ce vernis, la surface serait rugueuse. Les techniques de polissage peuvent arracher des particules de verre, augmentant la rugosité et l’agressivité envers la dent antagoniste.

Esthétique

Les propriétés esthétiques dépendent fortement du praticien. Les CVI conventionnels sont opaques immédiatement après la pose, mais deviennent plus translucides avec la maturation.

Propriétés mécaniques

Les CVI présentent une résistance mécanique insuffisante pour les zones soumises à des contraintes occlusales :

  • Résistance à la compression : 150 MPa
  • Résistance à la flexion : 30 MPa
  • Résistance à l’abrasion : Faible

Ces limitations contre-indiquent leur utilisation dans les secteurs à fortes sollicitations occlusales.

Bioactivité

Les CVI libèrent des ions fluorures dans la salive et vers la dent, pendant et après la prise. Ces ions fluorures :

  • Possèdent un caractère antibactérien.
  • Augmentent la résistance des tissus dentaires à la solubilité en milieu acide.
  • Favorisent la reminéralisation des tissus partiellement déminéralisés.
  • Réduisent l’adhésion de la plaque bactérienne.

Les CVI peuvent se recharger en fluor (via dentifrices, applications topiques ou aliments fluorés) et le relarguer à nouveau.

Manipulation

  • Mélange poudre-liquide : Utiliser un bloc à spatuler non absorbant et une spatule en plastique. Homogénéiser la poudre et le liquide avant le mélange, en respectant les doses préconisées par le fabricant.
  • Spatulation : Incorporer la poudre en deux fois dans le liquide pour faciliter le mélange. Mouiller toute la poudre en un minimum de temps (spatulation < 30 secondes). Le mélange doit avoir un aspect brillant avant la mise en place.

Indications des CVI

En dentisterie restauratrice

  • Obturations cervicales.
  • Bases intermédiaires sous restaurations céramiques, métalliques, composites ou amalgames.
  • Cavités tunnels.

En prothèse

  • Restaurations préprothétiques sur dents pulpées avec un délabrement minimal (3 ou 4 parois dentaires résiduelles).
  • Scellement.

En odontologie pédiatrique

  • Restaurations sur dents temporaires.
  • Sealants.
  • Brackets d’orthodontie.

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