Les Anesthésiques Locaux, Anesthésiologie Dentaire

Les Anesthésiques Locaux, Anesthésiologie Dentaire

Les Anesthésiques Locaux, Anesthésiologie Dentaire

Anesthésie Locorégionale (ALR)

Définition

L’anesthésie locorégionale (ALR) touche un territoire limité sans perte de conscience. Les substances anesthésiques sont mises en contact avec :

  • Des terminaisons nerveuses
  • Des plexus nerveux
  • Des racines rachidiennes (dans le cadre de la rachianesthésie et de l’anesthésie péridurale)

Types d’ALR

  • Anesthésie topique
  • Infiltration pariétale
  • Blocs périphériques :
    • Bloc du tronc
    • Bloc du plexus
  • Blocs centraux :
    • Rachianesthésie
    • Anesthésie péridurale
    • Anesthésie caudale
    • Anesthésie rachi-péridurale combinée

Mécanisme de l’ALR

L’ALR est obtenue par l’administration d’un anesthésique local au contact des fibres nerveuses. Les anesthésiques locaux bloquent la conduction des influx sensitifs et moteurs par les fibres nerveuses.

Anesthésiques Locaux

Définition

Un anesthésique local est un agent pharmacologique capable de bloquer de manière réversible l’excitabilité et la conduction nerveuse lorsqu’il est appliqué à une concentration appropriée au contact d’une fibre nerveuse.

Caractéristiques Communes et Différences

Tous les anesthésiques locaux ont :

  • Une structure moléculaire commune
  • Un mode d’action identique

Ils diffèrent par :

  • La puissance
  • Le délai d’action
  • La durée d’action
  • La toxicité

Structure Chimique

La molécule des anesthésiques locaux est composée de trois parties :

  1. Cycle aromatique : pôle lipophile, joue un rôle dans la diffusion et la fixation du médicament.
  2. Pôle hydrophile : conditionne la répartition sanguine et la diffusion.
  3. Chaîne intermédiaire : influence la liposolubilité (allongement) ou l’hydrosolubilité (raccourcissement), la puissance et la toxicité.

La liaison entre le cycle aromatique et le pôle hydrophile peut être :

  • Ester : instable, dégradé rapidement.
  • Amide : stable, dégradation hépatique plus lente, durée d’action plus longue, métabolites actifs.

Classification des Anesthésiques Locaux

Les anesthésiques locaux sont classés en deux groupes selon leur structure chimique :

A. Amino-amides

  1. Lidocaïne (Xylocaïne)
  2. Mépivacaïne (Carbocaïne, Scandicaïne)
  3. Articaïne
  4. Ropivacaïne (Naropeine)
  5. Lévobupivacaïne (Chirocaïne)

B. Amino-esters

  1. Procaïne
  2. Tétracaïne
  3. Benzocaïne

Comparaison des Anesthésiques Locaux

AnesthésiquePuissanceDélai d’actionDurée d’action
ProcaïneFaible1 à 2 min2 à 40 min
LidocaïneIntermédiaire2 à 5 min45 à 90 min
BupivacaïneForte10 à 30 min150 à 240 min
MépivacaïneForte10 à 30 min60 à 180 min
RopivacaïneForte10 à 30 min150 à 210 min
LévobupivacaïneForte10 à 15 min150 à 210 min

Propriétés Physico-chimiques

  • Liposolubilité : Plus un anesthésique local est liposoluble, plus grande est sa puissance.
  • Liaison aux protéines : Conditionne la durée d’action.
  • pKa : Plus le pKa est élevé, plus long est le délai d’action. Le pKa est le pH pour lequel une fonction acide a libéré 50 % de ses protons.

Physiologie de la Transmission Nerveuse de la Douleur

Au Repos

  • Fibre nerveuse polarisée.
  • Concentration de Na⁺ plus élevée à l’extérieur de la cellule.
  • Concentration de K⁺ plus élevée à l’intérieur de la cellule.
  • Les canaux sodiques sont fermés.

Dépolarisation

  • Ouverture des canaux sodiques.
  • Mouvement du sodium vers l’intérieur de la cellule.

Repolarisation

  • Migration des ions K⁺ en sens inverse des ions Na⁺.
  • Les pompes ioniques corrigent le déséquilibre après la repolarisation.

Action des Anesthésiques Locaux

  • Bloquent la dépolarisation responsable de la conduction de l’influx nerveux.
  • Empêchent l’ouverture des canaux sodiques et stabilisent la membrane.

Choix d’un Anesthésique Local

Le choix dépend de :

  • Type de nerf à bloquer
  • Délai ou temps de latence
  • Durée d’action

Effets sur les Canaux Ioniques

  • Blocage des canaux Na⁺ rapides.
  • Canaux K⁺ : bloqués à des concentrations 2 à 3 fois supérieures.
  • Canaux Ca²⁺ : bloqués à des concentrations 4 à 6 fois supérieures.

Autres Effets des Anesthésiques Locaux

  • Système nerveux central (SNC) : Traversent la barrière hémato-méningée, pouvant causer :
    • Convulsions
    • Tremblements
    • Nausées
    • Céphalées
    • Dépression du SNC
  • Système cardiaque : Dépriment toutes les fonctions, entraînant :
    • Hypotension artérielle
    • Risque d’arrêt cardiaque
  • Système respiratoire : Induisent une dépression (arrêt respiratoire à fortes concentrations).
  • Effets allergisants : Rares, parfois éruptions cutanées.

Contre-indications

Formes Injectables

  • Malades sous anticoagulants
  • Porphyries
  • Antécédents d’hyperthermie maligne
  • Enfants de moins de 30 mois
  • Épileptiques non contrôlés par traitement

Formes Adrénalinées

  • Traitement par IMAO ou antidépresseurs tricycliques
  • Injection par voie intraveineuse

Formes Non Injectables

  • Allergie
  • Porphyries
  • Nourrissons et petits enfants (moins de 6 ans pour Lidocaïne 5 %, moins de 3 mois pour crème EMLA)

Les Adjuvants

Définition

Un adjuvant est un produit ajouté, généralement en faible quantité, pour améliorer certaines caractéristiques ou renforcer l’action d’un médicament.

Composition des Solutions Anesthésiques

  • Substance anesthésique
  • Substance vasoconstrictrice
  • Substances adjuvantes
  • Solution diluante

Adjuvants Vasoconstricteurs

Ce sont des amines sympathicomimétiques agissant sur les récepteurs alpha et bêta. Ils :

  • Accélèrent le début de l’anesthésie
  • Prolongent la durée de l’anesthésie
  • Augmentent la puissance de l’action anesthésique
  • Diminuent les effets toxiques sur le SNC
  • Combattent les effets toxico-allergiques

Types de Sympathicomimétiques

  • Naturels :
    • Catécholamines : Épinéphrine, Norépinéphrine
    • Non-catécholamines : Félipressine
  • Synthétiques : Nordéphrine, Phényléphrine, Lévonordéphrine

Avantages

  • Retardent l’absorption de l’anesthésique, réduisant la toxicité
  • Augmentent la durée d’action
  • Permettent l’utilisation de petites quantités de solution
  • Réduisent le saignement dans le champ opératoire

Exemples d’Adjuvants

  • Adrénaline : Augmente la durée d’action des anesthésies et des blocs.
  • Clonidine (Catapressan®) : Augmente la durée et la puissance des blocs.
  • Morphine, Fentanyl, Sufentanil : Augmentent la durée et la puissance des anesthésies.

Désavantages

  • Utilisation à des concentrations trop élevées
  • Injections répétées augmentant la quantité de vasoconstricteurs
  • Injection intravasculaire accidentelle

L’Épinéphrine

  • Produit par la médullosurrénale dans des conditions de stress.
  • Effets principaux : vasoconstriction et hypertension transitoire.

Effets Vasoconstricteurs

  • Augmentation de la tension artérielle
  • Accélération du pouls
  • Tachycardie
  • Pâleur du visage
  • Risque de syncope cardiaque
  • Ischémie locale (pâleur blanchâtre) sur les muqueuses, pouvant causer des nécroses.

Complications des Anesthésiques Locaux

Complications Locales

  • Rares

Complications Générales

Toxicité

Causes :

  • Surdosage
  • Injection intravasculaire
  • Vitesse d’absorption trop rapide dans le sang
  • Diminution de la tolérance (fièvre maligne, état de choc, personnes âgées)

Toxicité Neurologique Centrale

Signes Subjectifs :

  • Engourdissement des lèvres
  • Vertige
  • Bourdonnement d’oreilles
  • Diplopie
  • Désorientation temporo-spatiale
  • Somnolence

Signes Objectifs :

  • Frissons
  • Secousses musculaires au visage et aux extrémités distales
  • Nystagmus
  • Empâtement de la voix
  • Crises convulsives généralisées
  • Coma avec dépression cardiorespiratoire

Prévention :

  • Maintenir un contact verbal pendant l’injection
  • Injections fractionnées de 3 à 5 ml

Traitement :

  • Oxygénation et ventilation
  • Arrêt des convulsions avec barbituriques ou benzodiazépines (Valium)
  • Intubation sous thiopental + curare si nécessaire
  • Ephédrine en cas de collapsus
  • Surveillance attentive

Toxicité Cardiaque

  • Plus tardive que la toxicité neurologique.

Signes :

  • Altération de la conduction auriculoventriculaire (élargissement du QRS)
  • Bradycardie, voire arrêt cardiaque
  • Diminution de l’inotropisme (baisse du volume d’éjection systolique)
  • Vasodilatation généralisée (hypotension sévère)

Traitement :

  • Réanimation longue et difficile en cas d’arrêt cardiaque
  • Intubation, ventilation en oxygène pur
  • Massage cardiaque externe prolongé
  • Atropine systématique
  • Adrénaline à petites doses titrées
  • Pas d’alcalinisation (gêne la sortie de bupivacaïne des cellules myocardiques)
  • Pas de preuve d’efficacité pour le brétylium, la clonidine ou l’amiodarone

Allergie

  • Rares, parfois éruptions cutanées

Règles d’Utilisation des Anesthésiques Locaux

  • Connaître les doses maximales de chaque produit
  • Injection lente après test aspiratif
  • Maintenir un contact verbal
  • Surveillance scopique et hémodynamique

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