LE RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU

LE RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU

LE RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU

Le Rhumatisme Articulaire Aigu

Objectifs

  1. Définir le rhumatisme articulaire aigu.
  2. Décrire les signes cliniques de la polyarthrite du rhumatisme articulaire aigu.
  3. Énumérer et décrire les manifestations du RAA.
  4. Connaître les modalités du traitement d’une crise de R.A.A.
  5. Indiquer les principes de la prophylaxie du R.A.A. et préciser leurs modalités d’application.

Définition

Le rhumatisme articulaire aigu (RAA) est l’ensemble des manifestations inflammatoires touchant essentiellement le cœur, les articulations et le système nerveux central, liées à une complication retardée d’une infection pharyngée par le streptocoque bêta-hémolytique du groupe A (SBHA).

Épidémiologie

Fréquence

  • Dans les pays industrialisés, le RAA, très fréquent au début du 20ème siècle, a connu une décroissance importante avec l’amélioration des conditions socioéconomiques et l’apparition des antibiotiques. Son incidence est actuellement très faible.
  • Dans les pays en voie de développement, le RAA est endémique et constitue un problème de santé publique.
  • En Algérie (1990) : Incidence du RAA = 3 %.

Âge

  • C’est une maladie de l’âge scolaire, observée entre 5 et 15 ans.
  • Elle est rare avant 4 ans et après 30 ans.

Étiopathogénie

  • Le RAA est précédé (2-3 semaines avant la poussée) par une infection pharyngée au SBHA.
  • Une réinfection par le SBHA chez un patient ayant déjà présenté une poussée de RAA réactive la maladie.
  • Il existe une antigénicité croisée entre le myocarde et le streptocoque, due à une analogie structurale entre des protéines de la capsule du streptocoque (protéine M, polysaccharide C) et certains constituants du myocarde (tropomyosine), des antigènes articulaires, et certaines cellules nerveuses du noyau caudé.
  • Rôle de facteurs familiaux et génétiques avec prédominance de certains groupes HLA.

Diagnostic Positif

Signes Extracardiaques

Signes Généraux
  • Ils sont constants :
    • Fièvre modérée, ne dépassant pas 39°C.
    • Altération de l’état général.
    • Asthénie, anorexie, amaigrissement modéré.
    • Pâleur.
  • Une fièvre associée à une atteinte endocardique pose des problèmes diagnostiques avec une endocardite infectieuse.
Signes Cutanés
  • Ils sont rares :
    • Nodules de Meynet :
      • Nodules fermes, arrondis, indolores, mobiles par rapport aux plans sous-cutanés.
      • Siègent sur la face d’extension des grosses articulations.
      • Disparaissent en moins d’un mois.
      • Souvent associés à une cardite.
      • Non pathognomoniques du RAA, car présents dans le LED et la PR.
    • Érythème marginé de Besnier :
      • Macules rosées, non prurigineuses, non indurées, localisées au tronc et à la racine des membres.
      • Souvent associé à une cardite.
Signes Articulaires
  • Arthrites :
    • Polyarthrite aiguë typique avec signes inflammatoires locaux importants, fugace (chaque arthrite dure de 3 jours à 1 semaine), et migratrice.
    • Touche habituellement les articulations superficielles de taille moyenne (genoux, chevilles, poignets), mais toutes les articulations peuvent être atteintes, y compris les petites articulations des doigts et des pieds, les articulations profondes comme la hanche, ou même les articulations vertébrales lombaires ou cervicales.
    • Évolue sans séquelle ni suppuration.
  • Arthralgies :
    • Sans signes inflammatoires locaux visibles, mais douleur spontanée provoquée par les mouvements articulaires, entraînant une impotence fonctionnelle.
    • Mobiles et fugaces, touchant les grosses articulations.
Chorée de Sydenham
  • Rare, touchant volontiers les filles.
  • Peut apparaître au décours des manifestations articulaires ou isolément.
  • Apparition retardée par rapport à la poussée (2 à 6 mois après la pharyngite). Les signes inflammatoires ont disparu et les ASLO se sont normalisés. Suffit au diagnostic de RAA.
  • Débute par des troubles de l’humeur et des maladresses.
  • À la phase d’état :
    • Ataxie, hypotonie.
    • Mouvements anormaux : involontaires, rapides, amples, siégeant aux racines des membres. S’exagèrent lors de l’examen clinique et des émotions, diminuent pendant le sommeil.
  • Disparaît sans séquelles en quelques mois.
Signes Biologiques
  • Signes Inflammatoires :
    • Peu spécifiques, témoignent de l’évolutivité de la maladie, permettent la surveillance du traitement.
    • Une cardite est à craindre en cas de signes inflammatoires importants avec VS > 60 mm à la 1ère heure.
    • La VS peut être faussement basse en cas d’insuffisance cardiaque, faussement élevée en cas d’anémie.
    • Augmentation de la CRP, fibrinémie (> 5 g/l), haptoglobine, α2-globuline.
    • Anémie inflammatoire modérée : bon reflet de la durée d’évolution de l’atteinte rhumatismale.
    • Hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles.
  • Signes d’Infection Streptococcique :
    • Prélèvement de gorge :
      • Recherche du SBHA souvent négative, car le RAA survient 2-3 semaines après l’infection.
    • Test de diagnostic rapide :
      • Technique immunologique déterminant des antigènes spécifiques du SBHA dans le prélèvement de gorge.
      • Spécifique mais moins sensible, impose une culture si négatif.
    • Anticorps antistreptococciques :
      • Taux d’ASLO > 250 UI/ml témoigne d’une infection récente.
      • Élévation du taux d’ASLO sur deux examens espacés de 15 jours est plus significative.
      • Un taux normal n’élimine pas le diagnostic, d’où l’importance du dosage d’autres anticorps (ASDOR, antistreptokinase).
      • Utilisation des trois tests : sensibilité de 95 %.

Signes Cardiaques

  • La cardite représente le risque majeur de la maladie.
  • L’insuffisance mitrale (IM) et l’insuffisance aortique sont contemporaines de la crise, tandis que le rétrécissement mitral (RM) et le rétrécissement aortique surviennent après plusieurs années.
Endocardite
  • Insuffisance Mitrale (IM) :
    • Atteinte la plus fréquente.
    • IM modérée ou importante (physiopathologie, diagnostic, évolution, traitement : cf. IM).
  • Rétrécissement Mitral (RM) :
    • Survien après plusieurs années, à l’âge adulte, mais fréquent chez l’enfant dans les pays d’endémie rhumatismale.
    • Cf. RM.
  • Insuffisance Aortique :
    • Souvent associée à une atteinte mitrale.
    • Cf. IAo.
  • Rétrécissement Aortique :
    • Survien après plusieurs années, souvent associé à une insuffisance aortique.
    • Cf. RAo.
  • Atteinte Tricuspide :
    • Insuffisance tricuspide organique rarement isolée, toujours associée à un rétrécissement tricuspide, souvent à une atteinte mitrale ou aortique.
  • Polyvalvulopathies :
    • Fréquentes dans les pays d’endémie rhumatismale.
Myocardite Rhumatismale
  • Accompagne souvent une valvulopathie.
  • Assourdissement des bruits cardiaques, B3, insuffisance cardiaque globale, cardiomégalie au téléthorax.
  • Échocardiographie : hypokinésie globale du ventricule gauche.
  • S’améliore rapidement sous corticoïdes.
  • Concept remis en cause par certains auteurs, l’insuffisance cardiaque pouvant être liée à une IM sévère.
Péricardite Rhumatismale
  • Frottement péricardique.
  • Troubles de la repolarisation à l’ECG.
  • Péricardite sèche ou avec épanchement.
  • N’évolue pas vers la constriction.
Troubles Conductifs
  • Témoin du syndrome inflammatoire et de l’atteinte myocardique.
  • Bloc nodal, généralement simple allongement de PR, mais peut atteindre le 2ème ou 3ème degré.
  • Régressent rapidement sous corticoïdes.
Pancardite Rhumatismale
  • Atteinte des trois tuniques cardiaques.
  • Rare.

Critères de Diagnostic

Critères de Jones
  • Utilisés uniquement pour une atteinte initiale.
  • RAA probable en cas de :
    • 2 critères majeurs, ou
    • 1 critère majeur + 2 critères mineurs, associés à la preuve d’une infection streptococcique récente.
Critères MajeursCritères Mineurs
PolyarthriteArthralgie
CarditeFièvre
Érythème marginéÉlévation VS ou CRP
Nodule de MeynetAllongement PR
Chorée
  • Infection Streptococcique Récente :
    • Élévation significative des anticorps antistreptococciques.
    • Culture ou test diagnostique rapide positif.
    • Scarlatine récente.

Diagnostic Différentiel

Devant une Polyarthrite

  • Maladie de Still (arthrite chronique juvénile) :
    • Peut s’accompagner d’une péricardite, mais pas d’endocardite.
    • Arthrites fixes.
  • Autres : LED, SPA, maladie de Lyme, PR, hémopathies malignes, drépanocytose, tuberculose.

Devant une Cardite

  • Endocardite Infectieuse :
    • Échocardiographie : végétations.
    • Hémocultures : isolement du germe.
  • Dystrophie valvulaire.

Évolution/Pronostic

Pronostic de la Poussée Rhumatismale

  • Dépend de l’existence d’une cardite.
  • Rechutes fréquentes sans prophylaxie, surtout dans les 5 premières années, avec risque d’apparition ou d’aggravation de l’atteinte cardiaque.
  • Pronostic plus grave si rechute sur un cœur lésé.

Pronostic de la Cardite

  • Régression rare si insuffisance cardiaque et cardiomégalie apparaissent en phase aiguë.
  • Lésions valvulaires peuvent progresser même sans rechute (perturbations hémodynamiques, cicatrisation traînante).
Classification des Cardites
TypeDescription
Cardite légèreSouffle mitral ou aortique peu intense, cœur de volume normal.
Cardite modéréeSouffle intense persistant après la crise aiguë, cardiomégalie légère (RCT ≤ 0,55).
Cardite sévèreIM ou insuffisance aortique importante, cardiomégalie importante (RCT > 0,55).
  • Pronostic dépend du type et du nombre de valves atteintes.

Traitement

Traitement de la Poussée

Mesures Générales
  • Repos primordial.
  • Éducation du patient et de sa famille.
  • Si insuffisance cardiaque : traitement symptomatique (digitalo-diurétique, vasodilatateur).
  • Si chorée : neuroleptique (Halopéridol 0,2-0,5 mg/kg/j).
Traitement Antibiotique
  • Supprime le SBHA du pharynx :
    • Benzathine-benzyl-pénicilline (BBP) : Injection unique IM :
      • 600 000 UI si poids < 30 kg.
      • 1 200 000 UI si poids ≥ 30 kg.
    • Alternative : Pénicilline G IM pendant 10 jours.
    • Voie orale (si contre-indication aux injections ou enfant pusillanime) :
      • Pénicilline V : 50 000-100 000 UI/kg/j (enfant), 2 000 000 UI/j (adulte), en 3 prises au moment des repas, pendant 10 jours.
    • Si allergie à la pénicilline : Érythromycine 30 mg/kg/j, en 3 prises, pendant 10 jours.
Traitement Anti-inflammatoire
  • Prednisone : 2 mg/kg/j (max. 80 mg/j), en 3 prises au moment des repas.
  • Traitement adjuvant :
    • Régime pauvre en sodium, riche en protéines.
    • Supplémentation potassique et calcique.
    • Pansement gastrique.
Durée du Traitement
  • Sans cardite :
    • Attaque : 2 semaines (VS se normalise).
    • Entretien : Diminution progressive (5 mg/semaine) pendant 6 semaines.
  • Avec cardite :
    • Attaque : 3 semaines.
    • Entretien :
      • Cardite modérée : 6 semaines.
      • Cardite sévère : 9 semaines.
  • Aspirine (3 g/j) proposée par certains dans les formes sans cardite ou en relais des corticoïdes pour éviter un rebond.

Prophylaxie

Prévention Primaire
  • Traitement des angines streptococciques :
    • Antibiotique systématique par BBP (cf. supra).
    • Aux États-Unis, tests de diagnostic rapide pour dépistage.
  • Amélioration des conditions socioéconomiques.
Prévention Secondaire (Prévention des Rechutes)
  • BBP IM tous les 21 jours.
  • Pénicilline V : 500 000 UI, 2 fois/j, per os.
  • Érythromycine : 250 mg, 2 fois/j, per os.

Plan National de Lutte Contre le RAA

  • Institué en 1990.
  • Objectif : diminution de l’incidence du RAA et des cardiopathies rhumatismales par une meilleure organisation des structures sanitaires.

Voici une sélection de livres:


 

LE RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU

Leave a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *