La couronne jacket

La couronne jacket

Abstract

La couronne jacket est née aux États-Unis vers la fin du dix-neuvième siècle grâce à Land. Avec les contributions d’autres auteurs, elle est devenue une pratique courante. C’est une couronne de recouvrement total, très esthétique, avec des qualités mécaniques acceptables. Réalisée dans un seul matériau (porcelaine ou résine), elle se distingue de la couronne céramo-métallique par l’absence d’infrastructure métallique et par sa limite cervicale, qui prend la forme d’un épaulement périphérique.

I. Définition

La couronne jacket est une couronne de recouvrement total de la partie coronaire d’une dent, réalisée en céramique ou en résine, redonnant à une dent défectueuse un aspect naturel. C’est une restauration unitaire qui concerne souvent les dents antérieures, pratiquée aussi bien sur des dents pulpées que dépulpées. Elle est également appelée “Jacket Crown” (voir Fig. 1).

Types de couronnes jacket :

En résine
En thermo-résine
En céramique feldspathique stratifiée
En céramique pressée
En céramique usinée

Fig. 1 : Couronne jacket en céramique

II. Indications et Contre-indications

1. Indications

Dents antérieures inesthétiques, pulpées ou dépulpées, notamment les incisives supérieures atteintes de caries de collet ou caries proximales apparentes.
Dents présentant une dystrophie, mylolyse, dysplasie, fracture d’angle ou fracture coronaire sans mise à nu de la pulpe.
Dents en malposition.
Dents atteintes d’une anomalie de teinte après mortification pulpaire.
Dents présentant une anomalie de forme ou de volume.

2. Contre-indications

Couronne clinique courte.
Dents trop minces dans le sens vestibulo-lingual.
Articulé inversé.
Articulé en bout-à-bout.
Occlusion serrée.
La couronne jacket ne peut en aucun cas servir de pilier de bridge.

III. Avantages et Inconvénients

1. Avantages

1.1 Couronne jacket en porcelaine

Esthétique : Une couronne jacket bien exécutée est indiscernable des dents naturelles.
Longévité : Elle est durable dans le temps.
Vitalité pulpaire : Permet de conserver la vitalité pulpaire de la dent préparée.
Invisibilité du joint : Le joint au niveau du collet est invisible.
Facilité d’exécution : Pas de coulée métallique, directement sculptée (voir Fig. 2).

Fig. 2 : La couronne jacket, limite cervicale correcte

1.2 Couronne jacket en résine

La gencive est préservée au niveau du collet.
Le joint est invisible.
La taille est moins mutilante, car la résine, élastique, peut être sculptée sous une faible épaisseur.

2. Inconvénients

2.1 Couronne jacket en porcelaine

Fragilité : La porcelaine est fragile et peu élastique, ne supportant pas une traction permanente.
Faible résistance : Elle se casse facilement sous une faible épaisseur ; un renforcement par des fibres d’alumine est indispensable.
Perte de translucidité : L’alumine, qui améliore les qualités mécaniques, réduit la translucidité.
Difficulté d’exécution.
Coût élevé (voir Fig. 3).

Fig. 3 : La couronne jacket, limite cervicale modifiée

2.2 Couronne jacket en résine

Porosité : Si la résine est mal manipulée.
Faible résistance à l’usure.
Risque de déformation.
Infiltration et changement de teinte avec le temps.
Joint prothèse-dent moins hermétique.

IV. Préparation clinique

Avant de poser l’indication d’une couronne jacket, un examen clinique minutieux est requis pour évaluer :

La position de la dent sur l’arcade.
La morphologie de la dent (hauteur, longueur, largeur) : le moignon doit être suffisamment large, long et haut.
Les rapports dento-dentaires ou l’articulé, en raison des forces exercées sur la couronne jacket.
Les habitudes et tics du patient.
L’état du parodonte : gencive marginale saine, absence de poches ; la position de l’attache épithéliale détermine la profondeur de la limite cervicale.
La couleur et la forme de la future couronne jacket.

Remarque : La supraclusie et le bout-à-bout incisif sont des caractères défavorables à l’indication de la couronne jacket.

Cet examen doit être complété par un examen radiologique pour évaluer l’état de l’os, de la pulpe et des racines.

1. Taille de la face vestibulaire

Outil : Fraise cylindrique diamantée, légèrement tronconique, montée sur turbine.
Méthode :
- Creuser des rainures d’orientation sur la face vestibulaire :
  - Trois rainures profondes de 1 mm parallèles au tiers cervical.
  - Deux rainures profondes de 2 mm parallèles aux deux tiers incisifs.
- Régulariser la surface :
  - Réduction d’environ 2 mm sur la moitié incisive.
  - Réduction de 1 mm sur la partie cervicale avec une fraise diamantée à bout plat.
- Tracer la limite cervicale en forme d’épaulement (largeur 1 mm, sous-gingival, perpendiculaire à l’axe de la dent).
Résultat : Vue tangentiellement, la face vestibulaire réduite doit s’inscrire en retrait par rapport au profil des dents adjacentes.

2. Réduction des faces proximales et création des épaulements proximaux

Outil : Fraise diamantée longue et fine.
Méthode :
- Supprimer les points de contact et les bombés proximaux en plaçant la fraise au niveau de la limite émail-dentine, parallèlement à l’axe de la dent.
- Créer les épaulements proximaux dans le prolongement de l’épaulement vestibulaire.
- Rendre les faces mésiale et distale dépouillées et convergentes vers le bord libre.

3. Taille de la face palatine

3.1 Création de l’épaulement palatin

Outil : Fraise diamantée utilisée pour la face vestibulaire.
Méthode :
- Tailler l’épaulement (largeur 0,8 à 1 mm) parallèlement au tiers cervical de la dent.
- Étendre l’épaulement autour des angles linguo-proximaux, l’unissant aux autres épaulements.
Résultat : Le tiers cervical forme un anneau cylindrique, principale zone de rétention de la couronne jacket.

3.2 Réduction de la concavité palatine

Outil : Fraise diamantée.
Méthode : Réduction par mouvements de va-et-vient mésio-distaux.
Épaisseur : Dépend des rapports d’occlusion avec les dents antagonistes ; la zone doit être concave horizontalement et verticalement.

4. Réduction du bord incisif

Méthode : Réalisée après la taille des faces vestibulaire et palatine.
Réduction : 1,5 à 2 mm.

Préparation de la dent pour une couronne jacket

À la fin de la préparation

Le bord incisif doit être biseauté obliquement :
- De bas en haut en direction palatine pour les dents supérieures.
- Du côté vestibulaire pour les dents inférieures.

5. Contrôle de la préparation

S’assurer que la réduction du moignon est suffisante pour répondre aux exigences esthétiques et mécaniques de la couronne jacket.
Le moignon doit :
- Être de dépouille.
- Être parallèle au grand axe de la dent.
Épaulement :
- Bien situé et continu.
Vérifier les rapports d’occlusion :
- Espace-libre suffisant entre le bord occlusal de la préparation et le bord incisif des dents antagonistes dans toutes les positions d’occlusion.
Les angles de raccordement entre les différentes faces sont arrondis (voir Fig. 4).
- Fig. 4 : L’épaulement périphérique
  - A : Face vestibulaire (V).
  - B : Face palatine (P).

6. Finition de la préparation

Se fait avec des fraises à granulation fine et à petites vitesses.

6.1 Finition de l’épaulement

Régularisation des surfaces de l’épaulement :
- Utilisation de fraises à granulation fine pour la finition.
- Continuité entre les différents épaulements.
L’épaulement ne doit présenter aucune irrégularité.
De profil, l’angle de raccordement avec le moignon doit être à angle droit.

6.2 Finition du moignon

Tous les angles vifs sont adoucis et arrondis.
Finir les différentes faces et les angles de raccordement avec l’instrument approprié.
Le moignon peut être légèrement poli pour obtenir une empreinte plus fine de la préparation.

7. Prise d’empreinte

Identique à celle des autres couronnes :
- Utilisation d’une technique adéquate et d’un matériau convenable.
Le moignon est protégé avec un vernis.
Mise en place d’une coiffe provisoire ayant un rôle :
- Esthétique.
- Prophylactique.

V. Phase de laboratoire

Coulée de l’empreinte

L’empreinte, prise préalablement avec une technique précise (empreinte unitaire + empreinte de situation), est coulée au laboratoire avec du plâtre dur.
Objectif : Obtenir un MPU (Modèle de Précision Unitaire) ou Die amovible.

1. Élaboration de la couronne jacket en porcelaine

1.1 La porcelaine

Se présente sous forme de poudre mélangée à de l’eau distillée pour former une pâte.
Cette pâte est façonnée à la forme de la dent à restaurer, puis cuite au four.
Nécessite un support reproduisant fidèlement le moignon : une feuille métallique (matrice).

1.2 Les étapes de la confection

Confection de la matrice de platine sur le MPU

La matrice de platine supporte la porcelaine pendant la cuisson.
Exigences de la matrice :
- Réalisée avec un métal laminé en feuilles minces de 2/10 mm.
- Ne doit pas s’oxyder pendant la cuisson.
- Ne doit pas contracter de liaison avec la céramique.
- Doit être suffisamment rigide.
- Doit avoir un point de fusion supérieur à celui de la céramique.
Processus :
- La feuille de platine est appliquée étroitement sur le MPU.
- L’affrontement des deux portions s’effectue sur les faces proximales.
- Suppression des excès de platine en ménageant une surface suffisante pour former les plis de fermeture (plis Ferblantier).
- Brunissage de la matrice avec un brunissoir.
- Passage au four à 1700°C pour :
  - Éliminer les impuretés organiques.
  - Provoquer un recuit du platine.
- (Voir Fig. 5 : Montage de la céramique sur la matrice de platine).

Montage de la céramique

Application successive de couches de porcelaine sur la matrice :

Couche d’opaque :
- Appliquée avec un pinceau et travaillée avec une spatule spéciale.
- L’excès d’eau est épongé avec un papier absorbant.
- Séchage de quelques minutes dans un compartiment de four adapté.
- Cuisson selon le cycle indiqué par le fabricant.
Couche de dentine :
- Appliquée sur la couche d’opaque par apports successifs.
- Construction de la dent avec la porcelaine dentine.
- Biseautage pour obtenir un dégradé avec la porcelaine émail.
- Les contours sont largement exagérés (retrait de la céramique après cuisson).
- Lissage de la surface, assèchement, puis cuisson.
- (Voir Fig. 6 : Montage de la couche dentine).

Couche d’émail :
- Appliquée après refroidissement sur la couche de dentine.
- La jacket est replacée sur le moignon et le modèle pour d’éventuels apports supplémentaires.
- Cuisson finale.
- Essai en bouche avec retouches possibles au laboratoire.

Glaçage et finition

Objectif : Obtenir une surface brillante.
Processus :
- Glaçage au laboratoire après l’essayage en bouche.
- Retrait de la matrice de platine :
  - Mise de la couronne dans l’alcool ou l’eau chaude pour réduire l’adhérence.
  - Retrait de la porcelaine avec une pince fine, des bords vers les parois.
- Vérification de l’adaptation sur le Die.
- Envoi au cabinet pour scellement définitif.
- (Voir Fig. 7 : Glaçage et finitions).

2. Élaboration de la couronne jacket en résine

Applicable aux résines polymétacrylate ou thermorésines.
Même technique d’élaboration, seule la cuisson diffère.

2.1 Technique d’élaboration de la couronne jacket en résine

Sur le MPU :
- Sculpture de la couronne en cire bleue à Inlays.
- Reproduction de la morphologie définitive de la dent en tenant compte :
  - Des contacts proximaux avec les dents adjacentes.
  - De l’occlusion avec les dents antagonistes.
Finition de la cire au niveau de la limite cervicale pour une bonne adaptation.

2.2 Mise en moufle

Similaire à la couronne coulée :
- Ébouillantage pour éliminer la cire bleue.
- Vernissage à chaud du plâtre du moufle.
Préparation de la résine :
- Choix de la poudre selon la teinte de la dent.
- Résine préparée, bourrée dans le moufle, puis pressée.
Polymérisation :
- Résine polymétacrylate : Cuisson dans l’eau avec augmentation progressive de la température.
- Thermorésine : Cuisson dans une cocotte sous pression de vapeur.