La cicatrisation apicale
Introduction
La lésion apicale ou lésion inflammatoire péri-radiculaire d’origine endodontique (LIPOE) est une des affections les plus courantes de la planète.
L’étude de sa distribution montre des répartitions diverses et variées, en fonction des pays, et des méthodes d’investigation choisies.
D’un point de vue biologique, une lésion apicale, comme une plaie, est une rupture de la structure anatomique normale ou fonctionnelle. Elle est le résultat d’un processus interne appliqué ici à l’organe dentaire. Comprendre les mécanismes de cicatrisation, c’est définir des stratégies adéquates et obtenir une guérison dans les meilleures conditions.
- Définitions
- La régénération :
Un processus par lequel des tissus altérés sont intégralement remplacés par des tissus originels aussi bien par leur architecture que par leur fonction
- La réparation :
Un processus de restauration architectural incomplet des tissus altérés. C’est le comblement de la lésion par un tissu différent du tissu original.
- Cicatrisation :
La cicatrisation d’une plaie est un phénomène complexe. Elle fait appel aux processus de réparation d’une lésion localisée et de la régénération d’un tissu
- Le périapex:
- Anatomie :
L’anatomie apicale est complexe, plusieurs tissus de nature différente se superposent et la limite du traitement endodontique est sujette à discussion.
Dans les années cinquante, un chercheur mexicain, Kuttler, a réalisé une étude anatomique sur 268 dents extraites n’ayant présenté aucune pathologie pulpaire.
La partie apicale de chaque racine a été sectionnée de façon à observer la portion terminale du canal et son rapport avec la surface radiculaire.
Cette étude, confirmée par de nombreuses analyses postérieures, sert de référence à toutes les réflexions sur la région apicale.
Elle définit les structures anatomiques et les situe topographiquement.
- L’apex (A) correspond à “l’apical vertex”, c’est-à-dire le sommet du dôme constitué par l’extrémité de la racine.
- La constriction apicale (B) est une zone de rétrécissement de la section du canal à une courte distance de son ouverture sur la surface radiculaire.
- Le foramen (F) est la limite entre le canal et la surface
radiculaire ; il est rarement situé au niveau de l’apex. Le parodonte produit du cément qui recouvre la surface radiculaire et s’invagine dans le canal.
- La jonction cémento-dentinaire (J) peut se situer à différents niveaux selon l’histoire de la dent et la production de cément ou selon qu’elle a ou non subi une résorption radiculaire, même légère
Kuttler a montré que cette région est en fait constituée de deux troncs de cône, l’un dentinaire, l’autre cémentaire, qui s’opposent par leurs petites bases Dans la partie dentinaire, le canal se rétrécit plus ou moins régulièrement jusqu’à la constriction apicale. Il s’élargit à nouveau dans sa partie cémentaire jusqu’au foramen.
Les deux cônes forment un angle variable ; le cône cémentaire est souvent dévié distalement par rapport à l’axe du canal. L’espace de Black est délimité par le cône cémentaire et la lame cribliforme de l’os alvéolaire.
- Physiologie :
Après éviction pulpaire, la fonction dentinogénétique de cette dernière est annulée. Mais il reste à l’apex, des éléments vivants tel que le cément, l’os qui sont les supports de la réparation périapicale.
- Cément :
C’est un élément en perpétuel remaniement tout au long de la vie.
Les fibroblastes sont disposés en une seule rangée sur la surface dentinaire radiculaire puis se différencient en cémentoblastes et vont sécréter le précément. Ce dernier va se calcifier pour donner le cément pendant que la seconde couche du précément s’appose en surface.
Son épaisseur croit avec l’âge, mais les appositions sont plus ou moins régulières ce qui témoigne d’une calcification par poussée.
Toutefois dans l’étendue du cément sain, ou note de petites zones de résorption isolées sans relation avec aucune pathologie, qu’elle soit périapicale ou parodontale.
Les couches profondes calcifiées renferment peu ou pas de cémentoblastes, on parle alors de cément acellulaire ou fibrillaire.
Du cément primaire partent des fibres ligamentaires dites de SHARPEY qui vont être enfermées au cours de la calcification de ce cément primaire. Nous devons donc toujours, après le traitement canalaire, redonner le plus rapidement possible à la dent sa fonction, ce qui stimulera la réparation périapicale.
On a donc une cémentogenèse lente tout au cours de la vie qui va brusquement devenir active lors de stimulus, jusqu’au moment où un équilibre nouveau sera retrouvé et la cémentogenèse redeviendra alors lente.
- Os alvéolaire :
L’os alvéolaire est le siège de remaniements continus ; par coordination d’activités destructrices et formatrices (apposition, résorption) par des cellules tels que ostéoblastes et ostéoclastes, les phénomènes d’ostéogénèse et d’ostéoclasie se succèdent.
Ainsi LAURICHE et coll. cités par Amathe D., ont démontré qu’une pression entraînait une résorption et qu’une traction une apposition. De même, l’os congestionné par la présence d’une infection canalaire pendant ou après une gangrène pulpaire, se résorbe, et à sa place, réapparaît la trame conjonctive fondamentale.
- Mécanismes de défense péri-apicale
Une fois que les bactéries ont infecté le système endodontique, et donc que le premier niveau de défense n’existe plus, c’est au second niveau de défense d’intervenir afin de limiter la diffusion de l’infection.
Au niveau péri-apical, c’est d’abord l’immunité innée qui intervient.
Comme les bactéries persistent au niveau intracanalaire (le seul moyen de les éliminer est le traitement endodontique), ne peuvent donc pas être éliminées par les défenses « bloquées » au niveau des tissus périapicaux et sont incapables de pénétrer dans le système endodontique, la défense innée va faire appel à la défense adaptative. Celle-ci s’organise en plusieurs phases :
- La pré-inflammation :
Lorsque les bactéries envahissent le tissu pulpaire, elles sont immédiatement reconnues par les macrophages résidants et par le système du complément.
cette phase va déclencher la libération de molécules ou médiateurs de l’inflammation
- l’inflammation à proprement parler qui, elle, est déclenchée par la libération des médiateurs précédents.
Elle se caractérise notamment par des changements vasculaires ;
Cette phase a pour rôle d’amener de manière massive les cellules de défense au site d’infection.
- l’intervention de l’immunité adaptative : L’immunité adaptative est la seconde ligne de défense de l’organisme.
Sa mise en place est retardée puisqu’elle survient seulement 4 jours après le contact avec l’agent pathogène.
Elle fait intervenir les lymphocytes B et T qui jouent un rôle central dans cette immunité.
- Potentiel réparateur du périapex
Toute infection endodontique, entraîne au niveau apical une réaction inflammatoire qui aura pour conséquence une diminution de l’activité synthétique et une augmentation des phénomènes ostéoclasiques et cémentoclasiques.
Une fois la phase inflammatoire préliminaire contrôlée par les cellules de défense, et un traitement endodontique bien instauré, la réparation biologique peut commencer.
- Composantes cellulaires :
- cellules de défense :
Elles constituent environ la moitié de la population cellulaire des lésions périapicales. Cette population cellulaire est plus dense dans les granulomes que dans les kystes.
- les macrophages : Reconnaissance et présentation d’antigènes et leurs phagocytose, produire plusieurs types de substances (cytokines, interleukines).
- les polymorphonucléaires neutrophiles (PMN)
Les neutrophiles prédominent dans les phases aiguës (la première ligne de défense cellulaire péri-apicale).
- les plasmocytes :
Synthétisent les anticorps (Ig)
- les lymphocytes :
Les lymphocytes B et T s’accumulent dans les phases chroniques
- Les cellules épithéliales de Malassez :
Ces cellules normalement quiescentes peuvent être stimulées au cours du processus inflammatoire par les cytokines et les facteurs de croissance. Elles forment alors des proliférations épithéliales qui participent à la pathogénèse des kystes péri-apicaux.
- Les cellules de synthèse :
Ces cellules participent activement au processus de réparation.
- Les fibroblastes • Les cémentoblastes • Les ostéoblastes
- Les cellules de résorption
- Les ostéoclastes • Les cémentoclastes
- Les cellules quiescentes ou incorporées dans les tissus durs
Ce sont essentiellement les cémentocytes et les ostéocytes pris dans une gangue minérale, cémentoblastes et ostéoblastes prennent le nom de cémentocytes pour les uns et d’ostéocytes pour les autres.
- L’espace de Black
Le péri apex constitue une unité fonctionnelle où toutes les composantes sont liées par des fibres et des vaisseaux, et où l’espace de BLACK (centre nourricier) assure le métabolisme des tissus durs qui l’entourent : le cément d’un côté et l’os alvéolaire de l’autre côté.
Cependant, l’espace de Black possède un fort potentiel de régénération que le traitement endodontique, par le biais de l’obturation canalaire, devra stimuler entraînant une cicatrisation apicale.
- Cicatrisation apicale
L’examen histologique de la majorité des coupes tissulaires en expérimentation animale et humaine montre que la cicatrisation des lésions péri-radiculaires après un traitement endodontique est plutôt une réparation qu’une régénération des tissus péri-radiculaires.
Trois phases successives sont observées lors de la cicatrisation apicale :
- Disparition de l’inflammation ;
- Formation d’un tissu conjonctif fibreux ;
- réparation tissulaire.
- La réparation cémentaire :
Les cémentoblastes créent des plages de résorption appelées cémentoclasies qui sont réparées spontanément par néoformation cémentaire.
Les lacunes sont comblées et tapissées par une fine couche de cément qui permet le ré attachement des fibres desmodontales néoformées.
Deux trames fibrillaires sont donc formées : l’une extrinsèque, produite par le desmodonte et représentée par l’insertion des fibres de SHARPEY qui se minéralisent secondairement ; l’autre intrinsèque », et produite par les cémentoblastes .
Le cément ainsi reconstitué recouvre l’apex de la dent en tapissant les parois internes du foramen (une fermeture de l’apex).
Le cément de réparation semble toujours cellulaire avec peu de fibres.
Il est moins radio-opaque, donc moins minéralisé que le tissu qui l’entoure.
- La réparation osseuse :
Os néoformé remplace le tissu fibreux le processus inflammatoire induit la différenciation et la prolifération des ostéoclastes sur la paroi alvéolaire adjacente au site enflammé qui entre alors en résorption.
Les résorptions radiculaires ne sont radiologiquement décelables qu’à partir d’un certain degré de destruction de la racine,
Lorsque les stimuli disparaissent, de nouveaux ostéoblastes en front secrètent une matrice organique à l’origine d’un nouveau tissu osseux comme le cément, l’os d’ancrage présente deux orientations fibrillaires :
- L’une intrinsèque, produit des ostéoblastes .
- L’autre extrinsèque constituée par les fibres demodontales.
Ces dernières réalisent l’ancrage dentaire sous la forme des fibres de SHARPEY minéralisées. Les ostéoblastes entourés de matrice minéralisée deviennent ostéocytes et constituent un ensemble de cellules de réserve qui participent au métabolisme de l’os.
- La réparation desmodontale :
Au niveau du ligament les changements observés vont dans le sens d’une augmentation de la différenciation et de l’activité cellulaire surtout pour une dent fonctionnelle par rapport à une dent qui ne l’est pas. Les fibroblastes assurent le remaniement des fibres desmodontales.
En effet, leur fonction principale est la synthèse et la sécrétion des précurseurs collagéniques qui subissent ensuite leur maturation.
Le potentiel réparateur de la zone périapicale inclut donc la fibrogénèse, la cémentogénèse et l’ostéogénèse
- Le remodelage apicale après traitement endodontique :
La guérison après traitement endodontique est accompagnée d’un remaniement, plus ou moins important, des tissus calcifiés.
La première phase de cicatrisation consiste en la transformation du tissu granulomateux de la lésion en tissu de granulation.
Lors de la deuxième phase de cicatrisation, les médiateurs de la résorption osseuse n’étant plus sécrétés, les cellules osseuses migrent à partir de l’endoste pour reformer l’os qui remplace peu à peu le tissu de granulation.
Des fibroblastes et des cémentoblastes migrent à partir du ligament pour reformer un néo cément et restaurer l’appareil d’attache apical.
- Cinétique de la guérison apicale :
-Certains auteurs considèrent qu’une LOE est une maladie guérie que lorsque l’image radioclaire apicale a totalement disparu après une période de suivi donnée. Cette situation implique des périodes de suivi très importantes, l’intervalle préconisé est d’au moins 4 ans.
-D’autres auteurs considèrent le traitement endodontique est « efficace » désque la taille de la lésion diminue après un suivi de Jan, comme « inefficace » si la lésion a augmenté de volume. Si elle n’a pas changé de taille, le traitement endodontique est considéré comme « incertain ».
- Critères de cicatrisation
- Critères cliniques :
-absence de symptomatologie
- absence de fistule, ou de tuméfaction
- percussion non douloureuse
- Critères radiologiques :
- ligament régulier non élargi
- absence d’image apicale
- Facteurs influençant la cicatrisation
- Généraux
Age, nutrition, état de santé général, troubles hormonaux, vitaminiques et organiques,…
- Locaux
- infection persistante
- présence de corps étrangers (fragment de lame d’instrument, gutta,…)
- présence de canaux accessoires
Conclusion
Aujourd’hui, les limites de conservation de la pulpe sont nettement repoussées, et c’est une façon de procéder à la prévention de l’apparition des lésions apicales.
Demain, cette approche biologique va s’ouvrir sur la zone apicale et la prise en charge du traitement des lésions d’origine endodontique se fera sur la base des connaissances biologiques des processus de guérison.
Pour l’heure, il est possible d’investir la question sous cet angle, de reprendre les critères cliniques et radiologiques de guérison apicale et de mettre en valeur, par la pertinence des techniques choisies, la notion d’efficacité dans la guérison.
La cicatrisation apicale
La médecine dentaire exige une précision et une rigueur constantes pour garantir des soins optimaux.
Les étudiants en odontologie doivent maîtriser l’anatomie dentaire avant de pratiquer des interventions cliniques.
Les praticiens doivent se tenir informés des dernières avancées technologiques pour améliorer leurs traitements.
Une bonne communication avec le patient est essentielle pour établir un climat de confiance et de compréhension.
L’asepsie et la stérilisation sont des piliers incontournables pour prévenir les infections en cabinet dentaire.
La planification thérapeutique permet d’optimiser les résultats et d’éviter les complications postopératoires.
Les formations continues sont indispensables pour maintenir ses compétences à jour en médecine dentaire.
La cicatrisation apicale

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.