LA CHIRURGIE PARODONTALE
LA CHIRURGIE PARODONTALE
1. Introduction
Les maladies parodontales sont des affections cycliques, indolores, évoluant progressivement avec le temps. Les épisodes aigus, résultant de l’interaction entre les produits bactériens et la réponse immunitaire de l’hôte, entraînent une destruction graduelle de l’alvéole, du cément et de l’appareil d’attache conjonctif. Cela conduit à l’approfondissement des poches parodontales et à l’apparition de défauts muco-gingivaux. Dans certains cas, les thérapeutiques initiales, telles que le détartrage et le surfaçage radiculaire, ne suffisent pas à traiter ces lésions ni à prévenir leur récidive.
La chirurgie parodontale reste un pilier thérapeutique majeur pour guérir ou stabiliser la maladie parodontale. Elle a évolué vers des techniques guidées par deux principes fondamentaux :
- L’économie tissulaire : préserver au maximum les tissus sains.
- La reconstruction : restaurer les structures parodontales endommagées ou détruites.
2. Historique
Au fil des années, de nombreuses techniques chirurgicales parodontales ont été décrites et mises en œuvre. Il est souvent complexe de déterminer avec précision l’origine exacte d’une technique ou la date de sa première utilisation, tant les contributions se sont accumulées au cours du temps.
3. Définition et Objectifs
3.1 Définition
La chirurgie, par définition, désigne « l’acte et l’art de traiter les lésions ou les maladies par des interventions manuelles ». En parodontie, la chirurgie parodontale est une thérapeutique visant à corriger les anomalies gingivales ou osseuses qui entravent une hygiène bucco-dentaire optimale.
3.2 Objectifs
3.2.1 Objectifs généraux
L’objectif principal de la chirurgie parodontale est de préserver le parodonte en facilitant l’élimination de la plaque bactérienne et son contrôle par le patient. Pour atteindre cet objectif, la chirurgie peut :
- Garantir l’efficacité du détartrage et du surfaçage radiculaire.
- Rétablir une architecture gingivale esthétique et fonctionnelle, optimisée pour le contrôle de la plaque par le patient.
- Favoriser la régénération de l’ancrage parodontal détruit par la maladie.
3.2.2 Objectifs spécifiques
3.2.2.1 Créer une voie d’accès pour le détartrage et le surfaçage radiculaire
L’élimination complète des dépôts mous (plaque) et durs (tartre) sur les surfaces radiculaires est essentielle au succès du traitement parodontal. Le détartrage sous-gingival et le surfaçage radiculaire sont des techniques complexes, dont l’efficacité est influencée par :
- La profondeur des poches parodontales.
- Des facteurs anatomiques comme les fissures, les concavités radiculaires ou les espaces interradiculaires.
Pour assurer un débridement sous-gingival complet, une intervention chirurgicale peut être nécessaire afin de dégager les surfaces radiculaires et faciliter l’accès.
3.2.2.2 Faciliter le contrôle de plaque et rétablir l’esthétique
Les efforts quotidiens du patient en matière d’hygiène bucco-dentaire sont cruciaux pour maintenir la santé parodontale après le traitement. Ces efforts doivent être soutenus par des conditions optimales, notamment :
- Une architecture gingivale déflectrice.
- Un contour gingival harmonieux.
Les anomalies majeures, telles que l’hyperplasie gingivale, les cratères gingivaux ou les récessions, doivent être corrigées chirurgicalement. Ces défauts posent des problèmes esthétiques et favorisent la rétention de la plaque bactérienne.
3.2.2.3 Faciliter la régénération des tissus parodontaux
L’objectif ultime de la thérapeutique parodontale est non seulement d’arrêter la progression de la maladie, mais aussi de restaurer les structures détruites (fibres conjonctives, os alvéolaire, cément radiculaire) par une régénération tissulaire, visant une restitution complète (ad integrum).
4. Principes Généraux de la Chirurgie
La décision concernant le type et l’ampleur de l’intervention chirurgicale doit être prise après évaluation des résultats de la thérapeutique étiologique initiale. Cette approche offre plusieurs avantages :
- Réduction de l’inflammation : L’élimination du tartre et de la plaque réduit l’inflammation gingivale, permettant une évaluation précise de l’architecture gingivale et des poches parodontales.
- Raffermissement des tissus : La résolution de l’inflammation facilite les manipulations chirurgicales en réduisant la friabilité des tissus et la tendance au saignement.
- Évaluation du pronostic : La coopération du patient et sa motivation à maintenir une hygiène bucco-dentaire optimale permettent d’établir un pronostic à long terme.
5. Classification des Actes de la Chirurgie Parodontale
Les techniques de chirurgie parodontale peuvent être classées en plusieurs catégories :
Chirurgie gingivale
Cette chirurgie cible principalement la gencive. Elle inclut :
- Gingivectomie à biseau externe (GBE) ou à biseau interne (GBI) : pour retoucher le contour gingival.
- ENAP (Excision New Attachment Procedure) et curetage parodontal : utilisés lorsque l’accès au site est simple, pour éliminer le tissu de revêtement interne des poches supra-osseuses peu profondes (jusqu’à 4 mm).
Chirurgie de la poche
Cette catégorie, souvent appelée « interventions à lambeaux », concerne la gencive et l’os. Les lambeaux peuvent être :
- Muco-périostés de pleine épaisseur.
- Muqueux à épaisseur partielle.
Les lambeaux permettent :
- L’excision de l’épithélium des poches infra-osseuses avec une économie tissulaire maximale grâce à une incision à biseau interne.
- Le surfaçage et la désinfection des racines pour favoriser le rattachement conjonctif.
- Une cicatrisation par première intention.
Exemples : Lambeau de Widman modifié, lambeau esthétique d’accès (LEA), lambeau à glissement apical.
Chirurgie muco-gingivale ou chirurgie plastique
Elle vise à restaurer ou maintenir une zone de gencive attachée (minimum 1 mm) compatible avec la résistance du parodonte superficiel. Elle inclut :
- Greffes libres ou pédiculées.
Chirurgie osseuse
Comprend les interventions à lambeau associées à :
- Un remodelage osseux soustractif.
- Un comblement des défauts osseux (chirurgie additive).
Chirurgie inductive
Cette catégorie inclut les interventions à lambeau accompagnées de :
- Régénération Tissulaire Guidée (RTG).
- L’utilisation de facteurs de croissance osseux (par exemple, Emdogain).
Indications : récessions gingivales, défauts osseux, atteintes des furcations.
6. Contre-indications
6.1 D’ordre local
- Manque de coopération du patient : Un contrôle insuffisant de la plaque bactérienne en période postopératoire compromet le succès du traitement. Un patient non coopérant ne devrait pas subir de chirurgie parodontale.
6.2 D’ordre général
La chirurgie parodontale est contre-indiquée chez les patients dont l’état de santé général présente un risque en cas d’intervention chirurgicale.
6.2.1 Maladies cardiovasculaires
- Hypertension artérielle, angine de poitrine, antécédents d’infarctus du myocarde.
- Patients sous anticoagulants, porteurs de prothèses valvulaires ou vasculaires, de stimulateurs cardiaques (pace-maker), ou présentant une endocardite ou une cardiopathie congénitale.
Ces conditions constituent généralement des contre-indications relatives. La chirurgie peut être réalisée après accord du médecin traitant et préparation adéquate du patient.
6.2.2 Troubles hématologiques
- Les anémies modérées n’empêchent pas la chirurgie, mais les formes sévères nécessitent une consultation médicale préalable.
- Contre-indications absolues : leucémie aiguë, agranulocytose, lymphogranulomatose, troubles graves de l’hémostase.
6.2.3 Troubles hormonaux
Un avis médical et des précautions spécifiques sont requis.
6.2.4 Troubles neurologiques
- Épilepsie : Nécessite des précautions en coordination avec le médecin traitant.
- Sclérose en plaques ou maladie de Parkinson : Peut nécessiter une anesthésie générale.
7. Programmation de la Chirurgie Parodontale
La chirurgie parodontale s’inscrit dans la continuité d’une thérapeutique initiale réussie, qui inclut :
- Une sensibilisation du patient à l’importance de l’élimination de la plaque dentaire et des habitudes nocives (tabagisme, parafonctions).
- Une équilibration occlusale temporaire ou une orthodontie mineure pour corriger les anomalies fonctionnelles.
La chirurgie devient indispensable pour :
- Le débridement des poches résiduelles profondes.
- La compensation des destructions parodontales.
8. Instruments et Matériels pour la Chirurgie Parodontale
Les instruments doivent être adaptés au type de chirurgie, préconditionnés et stérilisés. Voici une liste type d’une trousse chirurgicale :
- Plateau d’examen
- Précelles à coton
- Miroir à bouche
- Sondes exploratrices
- Sonde parodontale graduée
- Instruments à détartrer (grattoirs, curettes)
- Bistouris d’Orban 1 et 2
- Porte-bistouris Bard-Parker (2)
- Pince gouge de Friedman
- Ciseaux à os Ochsenbein 1 et 2
- Ciseaux Goldman Fox
- Ciseaux à suture
- Porte-aiguille
- Pinces à hémostase courbes
- Spatule
- Pièce à main avec fraises rondes, petites pointes diamantées, fraises à polir
- Lames de bistouri Bard-Parker n°11, 12B, 15
- Fils de suture 3/0, 4/0, 5/0, 6/0 avec aiguilles courbes atraumatiques ou à biseau inversé
- Compresses stériles
- Embout d’aspirateur
- Sérum physiologique et seringues jetables pour irrigation
- Pansements parodontaux
9. Conditions Opératoires Générales
Pour garantir le succès de la chirurgie parodontale, plusieurs conditions doivent être respectées :
- Asepsie : Indispensable à tout acte chirurgical.
- Anesthésie locale : Doit être progressive, complète, avec un vasoconstricteur pour limiter le saignement.
- Réexamen des tissus anesthésiés : Vérification des profondeurs des poches et des lésions osseuses.
- Incision : Adaptée à la technique, à l’épaisseur des tissus, à la hauteur de la gencive attachée, et aux considérations esthétiques et anatomiques.
- Décollement : Réalisé délicatement, en préservant la vascularisation, qu’il s’agisse d’un lambeau muqueux ou muco-périosté.
- Élimination des tissus pathologiques : Doit être complète, suivie d’un nettoyage et polissage minutieux des surfaces radiculaires.
- Sutures : Cruciales pour le résultat final, elles doivent être précises, sans traction ni déchirure des tissus.
- Pansement chirurgical : Protège la zone opérée, assure la contention de la gencive, et doit être appliqué sans blesser les tissus.
- Soins postopératoires : Incluent antibiotiques, antalgiques et anti-inflammatoires selon l’intervention.
- Hygiène bucco-dentaire : Contrôle rigoureux postopératoire.
10. Complications Liées à la Chirurgie Parodontale
Un diagnostic précis et des soins pré- et postopératoires attentifs permettent de prévenir la plupart des complications. Cependant, certaines peuvent survenir, notamment :
- Choc ou syncope
- Hémorragie
- Douleur
- Tuméfaction ou hématome
- Retard de cicatrisation
- Réaction allergique au pansement
- Sensibilité dentaire
La connaissance de ces complications, leur prévention et leur prise en charge sont essentielles pour garantir le succès de l’intervention.
Conclusion
La chirurgie parodontale est un complément indispensable au traitement étiologique des maladies parodontales. Elle vise à corriger les défauts causés par la maladie et à contrôler son évolution. Il n’existe pas une seule approche, mais une variété de techniques adaptées aux besoins spécifiques de chaque patient.
Les objectifs de la chirurgie incluent l’arrêt de la progression de la maladie, la régénération des structures parodontales détruites, et la facilitation de la réhabilitation occluso-fonctionnelle (prothèse, orthodontie, implants). Toutefois, la chirurgie ne peut être entreprise qu’après la suppression de l’inflammation et une évaluation rigoureuse de la coopération du patient et de la réponse tissulaire.
Voici une sélection de livres:
- Guide pratique de chirurgie parodontale Broché – 19 octobre 2011
- Parodontologie Broché – 19 septembre 1996
- MEDECINE ORALE ET CHIRURGIE ORALE PARODONTOLOGIE
- Parodontologie: Le contrôle du facteur bactérien par le practicien et par le patient
- Parodontologie clinique: Dentisterie implantaire, traitements et santé
- Parodontologie & Dentisterie implantaire : Volume 1
- Endodontie, prothese et parodontologie
- La parodontologie tout simplement Broché – Grand livre, 1 juillet 2020
- Parodontologie Relié – 1 novembre 2005
LA CHIRURGIE PARODONTALE

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.