Histologie de l’émail
L’émail tapisse la surface de la couronne dentaire et protège ainsi dentine et pulpe sous-jacentes contre l’abrasion lors des pressions mécaniques de la mastication.
Ce tissu hautement minéralisé (la structure la plus minéralisée de l’organisme), est formé de cristaux d’hydroxyapatite enrobés de matrice organique et d’eau.
Seul tissu minéralisé dépourvu de cellules, il est élaboré en totalité pendant l’odontogénèse et ne peut être reconstruit dans la dent adulte.
Structure de l’émail adulte :
1. CARACTÈRES PHYSIQUES :
– Substance dure mais cassante. Son manque d’élasticité est compensé par la présence de bandes de Hunter – Schreger et de stries de Retzius qui autorisent la dissipation des contraintes dans ce tissu.
– Sa translucidité, sa brillance, son aspect lisse et sa couleur blanc bleuâtre.
– Son épaisseur moyenne est de 1,5 mm. Elle varie en fonction de la topographie. Plus importante en regard des cuspides et du bord incisif, elle diminue au niveau du collet en regard de l’attache gingivale.
– Sa vulnérabilité à l’attaque acide.
– Sa radio opacité : Par cette propriété, l’émail, et notamment son épaisseur, est visible sur les clichés radiographiques.
2. STRUCTURE CHIMIQUE :
L’émail, le plus minéralisé des tissus durs, est constitué de 96 % de minéraux, sous forme de cristaux d’hydroxyapatite, de 4 % de matériel organique et d’eau siégeant entre les cristaux.
– Phase minérale :
Les minéraux sont en majeure partie des cristaux d’hydroxyapatite (Ca10 [PO4]6H2O, sels de calcium et de phosphore) également présents dans l’os, le cartilage calcifié, la dentine et le cément. Accessoirement, des ions variés (strontium, magnésium, plomb, fluor) peuvent être incorporés ou absorbés par les cristaux lorsqu’ils sont présents pendant l’amélogénèse ou pendant la vie adulte à partir de la salive et de l’alimentation.
Le monocristal d’hydroxyapatite est la plus petite unité composant l’émail. Les monocristaux se regroupent pour former une cristallite de section hexagonale. Ces cristallites vont s’organiser soit en prismes, soit en substance interprismatique.
A : cristaux d’email B : cristallites C : monocristal d’hydroxyapatite
– Phase aqueuse (eau libre et liée) :
L’eau serait soit libre, disposée autour des cristaux, soit incorporée aux protéines.
– Phase organique :
La matrice organique est constituée de produits de dégradation des protéines de l’émail (amélogénine et autres variétés). Après l’éruption dentaire, une partie de la matrice serait éliminée à l’extérieur, ce qui augmenterait le taux de minéralisation.
3. STRUCTURE HISTOLOGUE D’ENSEMBLE :
– Émail prismatique et non prismatique :
La structure de l’émail passe par deux types d’organisation : celle de l’émail non prismatique (dit aussi aprismatique) et celle de l’émail prismatique.
L’émail se compose de trois couches : l’émail aprismatique interne, l’émail prismatique qui
occupe la plus grande partie de l’épaisseur de l’émail et enfin l’émail aprismatique externe.
- Émail non prismatique : (couches interne et externe)
Il correspond à la première et à la dernière phase de sécrétion des améloblastes. Les cristaux
d’hydroxyapatite sont distribués de manière uniforme.
- Émail prismatique : (prismes et interprismes)
IL est constitué d’un assemblage de bâtonnets minéralisés, autrefois dénommés prismes, tendus de la jonction amélodentinaire à la surface de la couronne et d’une substance interprismatique également minéralisée.
Les prismes constituent les sous-unités structurales de l’émail, tandis que monocristaux d’hydroxyapatite (nanostructure) et cristallites (microstructure) sont des éléments de base.
– Stries de Retzius :
Les stries correspondent à l’apposition des couches successives d’émail créant des lignes de croissance pendant l’d’ontogénèse. Sur les coupes longitudinales, ce sont des lignes d’apposition successives séparées chacune de 4 µm et parallèles à la surface de l’émail et à la jonction amélodentinaire. Sur les coupes transversales, elles sont concentriques autour de la dentine et parallèles au contour externe de l’émail.
Coupe longitudinale a : Stries de Retzius b : Dentine Lignes concentriques
Ces stries sont dues à l’activité intermittente des améloblastes et correspondent à des phases de moindre minéralisation au cours de l’élaboration de l’émail.
La « ligne néonatale » de l’émail : C’est une strie de Retzius plus accentuée que les autres. Elle correspond à l’émail formé au moment de la naissance, période pendant laquelle interviennent des perturbations métaboliques importantes.
– Bandes d’Hunter-Schreger :
Les bandes sont observées au microscope électronique et correspondent au trajet onduleux des prismes. Elles sont dues à l’alternance de zones de réfraction différente. Elles sont visibles en lumière réfléchie sous forme de lignes sombres et claires perpendiculaires à la jonction amélodentinaire.
Les bandes sombres sont dites diazonies, les bandes claires parazonies. Les diazonies sont formés de prismes sectionnés transversalement, tandis que dans les parazonies, les prismes sont orientés longitudinalement.
4. ULTRASTRUCTURE HISTOLIQUE :
– Les prismes ou bâtonnets :
L’unité fonctionnelle de l’émail est un bâtonnet tendu de la jonction amélodentinaire à la surface de la dent.
Ils ont un parcours sinueux même s’ils sont perpendiculaires à la surface externe de la dent et
paraissent coupés tangentiellement ou obliquement selon le plan de section.
Sa longueur est variable selon sa topographie : plus court dans la région cervicale, il atteint son maximum de longueur dans la région cuspidienne.
Son diamètre moyen est de 4 µm ; il s’accroît de la jonction amélodentinaire à la surface.
Le prisme est irrégulier, avec des nœuds et des ventres qui présentent une structure périodique car ils sont espacés par des intervalles répétitifs (épaisseur d’émail fabriquée quotidiennement pendant l’amélogénèse).
Agrandissement
Autrefois dénommé prisme de l’émail, sur les sections transversales on lui décrivait une forme hexagonale, avec une gaine prismatique périphérique riche en protéines et une substance interprismatique minéralisée mais moins dure que celle des prismes.
Leur lumière renferme les cristaux d’hydroxyapatite. Ceux-ci sont allongés, orientés perpendiculairement à l’axe du bâtonnet dans la portion supérieure et transversalement dans la portion inférieure où ils forment un angle de 40 à 70° par rapport aux précédents. Entre les bâtonnets, la région interprismatique, également minéralisée, comporte des cristaux orientés selon un angle de 50° environ par rapport à l’axe du bâtonnet.
Les bâtonnets ont tendance à être disposés en rangées, alignées circonférentiellement autour de l’axe longitudinal de la dent. Dans chaque rangée, les bâtonnets sont perpendiculaires à la surface de la dentine. Ils sont horizontaux dans la région du collet. Cliniquement, les fractures de l’émail se font entre des rangées adjacentes.
Sur cette disposition d’ensemble se greffent deux phénomènes. Chaque bâtonnet a un trajet ondulé, sinueux, déviant à droite et à gauche. Bien qu’à l’intérieur d’une même rangée les bâtonnets aient une même direction, il existe des variations d’inclinaison de 2° entre des rangées successives.
D’autres structures :
– les « buissons ou touffes » de l’émail sont des zones peu calcifiées nées à la jonction amélodentinaire et irradiant en « touffes » dans la partie profonde de l’émail. Ces zones, plus riches en protéines et moins résistantes favorisent la propagation des caries.
– les lamelles sont des fissures droites de substance hypominéralisée, s’étendant perpendiculairement de la surface de l’émail vers la dentine. Elles sont remplies de matériel organique (protéines de l’émail mêlées à des débris de provenance salivaire). Elles représentent peut-être des voies d’échange entre émail et dentine.
– les aiguilles ou les fuseaux s’étendent de la jonction amélodentinaire vers la portion profonde de l’émail. Parfois en continuité avec les canalicules dentinaires, elles représentent les vestiges de prolongements odontoblastiques jeunes dirigés entre les améloblastes et secondairement emprisonnés dans l’émail sécrété. Elles ne suivent pas la direction des bâtonnets.
Jonctions avec les tissus durs de la dent :
Jonction amélodentinaire :
En regard de la dentine, il existe une couche aprismatique se prolongeant dans l’émail et constituant les aspects en « aiguilles » visibles en optique.
Agrandissement
Jonction émail-cément :
Classiquement, elle varie selon les individus, réalisant trois types différents : le plus souvent (65 % des cas), le cément recouvre l’émail ; dans 30 % des cas, émail et cément se rejoignent bout à bout ; dans 5 % des cas, émail et cément restent séparés par une zone dentinaire, ce qui prédispose aux caries du collet. En fait, les études en microscopie à balayage ont montré les variations de cette jonction selon les dents considérées, voire dans une même dent où les trois aspects peuvent être intriqués.
Variations morphologiques de l’émail :
VARIATIONS PHYSIOLOGIQUES
– Dents temporaires :
Le taux de minéralisation de l’email est plus faible tandis que leur teneur en protéine est plus élevée. Les cristaux d’hydroxyapatite sont plus volumineux.
La substance aprismatique de la jonction amélodentinaire est plus épaisse.
– Variations avec l’âge
L’émail adulte, tissu acellulaire non vitalisé, est incapable de régénération.
Au cours du vieillissement, il se détruit progressivement (érosions), surtout dans les zones d’attrition provoquée par la mastication.
De plus, divers traumatismes (mécaniques, thermiques, chimiques) peuvent provoquer l’apparition de stries et de microfractures.
Le noircissement de l’émail est habituel ; il serait lié à l’incorporation de matériel organique provenant du milieu buccal ou à la visibilité anormale de la dentine du fait de l’amincissement de son revêtement d’émail.
La perméabilité de l’émail diminue. Alors que chez les sujets jeunes, l’émail laisse passer de l’eau et des substances de faible poids moléculaire à travers des pores entre les cristaux, chez le sujet âgé, les pores sont rétrécis du fait de l’accroissement de volume des cristaux.
MODIFICATIONS PATHOLOGIQUES
Du fait de la disparition des améloblastes au terme de l’amélogénèse, tout défaut agissant durant l’odontogénèse persistera dans la dent adulte.
- Dysplasie génétique (amélgénèse imparfaite ou dysplasie héréditaire de l’émail)
Le mécanisme variable du défaut permet d’en décrire trois types :
– l’hypoplasie caractérisée par une sécrétion défectueuse de la matrice par l’améloblaste du fait de perturbations dans la différenciation de cette cellule ;
– l’hypominéralisation, caractérisée par une calcification défectueuse de la matrice organique qui s’est formée normalement ;
– l’hypomaturation où les cristaux d’hydroxyapatite restent jeunes, sans atteindre le volume de cristaux normaux.
Cliniquement, dans les deux dentures, l’émail est parsemé de taches brunes ou lacunes, ou peut être absent en certains points.
La radiographie montre l’amincissement, voire l’absence, de la couche d’émail. L’opacité peut être réduite, devenant analogue à celle de la dentine.
- Hypoplasies acquises de l’émail
Provoquées par des facteurs extrinsèques, elles peuvent toucher toute la denture ou ne porter que sur une ou quelques dents. Elles atteignent à la fois l’émail et la dentine sous-jacente.
De multiples facteurs peuvent les engendrer (avitaminoses A, C, D, maladies fébriles, hypocalcémie, infection locale ou traumatisme, ingestion de produits fluorés).
Dans les formes frustes, on constate des cavités et fissures à la surface de l’émail. Dans les atteintes plus sévères, la surface de l’émail est sillonnée de dépressions horizontales superposées les unes aux autres.
Parmi ces hypoplasies acquises, deux sont particulièrement intéressantes :
– L’hypoplasie de l’hyperfluorose :
Le fluor est normalement présent dans l’émail à des taux faibles. Son ingestion à faibles doses est bénéfique, protégeant l’émail contre les caries. En revanche, s’il est ingéré en trop grande quantité, il devient nocif et peut déterminer des hypoplasies diffuses.
L’émail lésé présente des taches blanches ou brunes. En microscopie électronique, la substance interprismatique n’est pas minéralisée. Les prismes, pauvres en calcium, se désagrègent, ce qui crée des lacunes.
– L’intoxication par la tétracycline :
Cet antibiotique, s’il est administré pendant l’odontogénèse, s’incorpore dans les tissus minéralisés. Il crée au niveau de l’émail des bandes de pigmentation indélébiles. L’émail peut être aussi hypoplasique ou absent. L’intensité des lésions est fonction de la dose et de la durée du traitement.
Histologie de l’émail
Les caries profondes peuvent nécessiter un traitement de canal.
Les facettes dentaires corrigent les dents ébréchées ou décolorées.
Les dents mal alignées peuvent provoquer une usure inégale.
Les implants dentaires préservent la structure osseuse de la mâchoire.
Les bains de bouche fluorés aident à prévenir les caries.
Les dents de lait cariées peuvent influencer la position des dents définitives.
Une brosse à dents électrique nettoie plus efficacement les zones difficiles d’accès.