HISTOIRE DE L'ANESTHÉSIE – Anesthésiologie Dentaire

HISTOIRE DE L’ANESTHÉSIE – Anesthésiologie Dentaire

HISTOIRE DE L’ANESTHÉSIE – Anesthésiologie Dentaire

INTRODUCTION

L’histoire de l’anesthésie se superpose bien entendu à l’histoire de la médecine caractérisée par une très longue période de plusieurs millénaires appelée protomédecine, marquée par deux grandes phases : Grèce classique du Ve siècle avant Jésus-Christ à la médecine alexandrine du IVe siècle après Jésus-Christ et de l’empire abbasside jusqu’au XIIIe siècle arabo-musulman.

Le développement de la chimie (gaz), de la médecine inhalatoire, de l’histoire de la préparation de l’éther, du chloroforme, du protoxyde d’azote, et celles des appareils utilisés pour les administrer, entre la fin du XVIIIe et la première moitié du XIXe siècle, permet de comprendre que les premières techniques d’anesthésie générale ou d’analgésie sont des techniques d’anesthésie inhalatoire.

OBJECTIFS

  • Rappeler l’histoire de la médecine et de l’anesthésie
  • Comprendre les premières techniques d’anesthésie et d’analgésie
  • Expliquer le développement de l’anesthésie buccodentaire

LA PÉRIODE PRÉ-ANESTHÉSIQUE AVANT 1846

Premières tentatives pour calmer la douleur

Le premier devoir du médecin est bel et bien de trouver le moyen pour soulager son patient. Au XVe et XVIe siècle, des méthodes assez grossières et peu efficaces pour assommer le patient se pratiquaient. La plus agréable consistait à enivrer le patient et la plus désagréable à l’étouffer car on avait compris que les humains comme les animaux pouvaient devenir insensibles si on leur serrait la carotide, de manière à empêcher l’afflux du sang au cerveau. Paré Moore (1784) a beaucoup utilisé cette méthode. D’autres chirurgiens insensibilisaient les membres en se servant d’un tourniquet serré à l’extrême. John Hunter obtenait le même effet avec moins d’inconvénients pour le patient par le froid intense.

La découverte des potions anesthésiantes

Dès la haute antiquité, les hommes ont cherché des remèdes capables de calmer les souffrances. Les deux premières drogues furent la mandragore et le chanvre indien ou le hachisch. La mandragore resta l’anesthésique le plus employé pendant le Moyen Âge, et on s’en servait encore pendant l’époque élisabéthaine en guise de narcotique. Dioscoride mentionne l’absorption d’un extrait alcoolisé de mandragore avant une opération, ce qui suggère que les chirurgiens grecs de la Rome antique avaient coutume de pallier la douleur d’une opération, en versant à leurs malades des potions sédatives. Les anciens Scythes avaient l’habitude d’inhaler la fumée produite par une certaine qualité de chanvre ; ils obtenaient ainsi un état d’excitation mentale suivie de sommeil. Ceci est prouvé par Hérodote, le grand historien grec, 500 ans après Homère.

Au IIIe siècle, Hoa Tho, médecin chinois, utilisait une préparation de chanvre indien pour insensibiliser ses patients. Les Égyptiens, respirant la fumée de cette plante sous le nom de hachisch, se procuraient un état d’exaltation mentale. Le hachisch est considéré comme le premier anesthésique inhalatoire. Le médecin Hunayn Ibn Ishaq, ophtalmologiste, faisait inhaler un narcotique composé d’extraits de pavot et de mandragore à ses patients. Théodoric est le premier à essayer l’anesthésie générale par inhalation. Il pratiquait au moyen d’une éponge trempée dans un mélange soporifique qu’il appliquait ensuite sous le nez du patient, conseillé aussi par Dioscoride ; mais la préparation des divers mélanges utilisés a été abandonnée.

Giambattista Porta, chirurgien de Naples, commence à employer en 1589 une méthode personnelle d’anesthésie générale par inhalation. Il faisait bouillir dans un récipient un mélange de jusquiame, solanum, coquelicot et belladone ; la vapeur de cette infusion était respirée par le patient qui s’endormait profondément. L’opium, lui aussi, est de connaissance fort ancienne, et on le doit aux Chinois. L’effet précis de ces plantes contre la douleur dentaire n’est pas nécessairement établi autrement que par d’ancestrales coutumes. Il s’agit le plus souvent d’une action anti-inflammatoire ou d’une action désinfectante.

La découverte des gaz

Vers la moitié du XVIIIe siècle, une série de gaz sont découverts, parmi lesquels l’hydrogène, l’azote, l’oxygène et le protoxyde d’azote. C’est le chimiste anglais Joseph Priestley, en 1772, qui découvre le protoxyde d’azote, mais il ne lui reconnaît aucune importance ni utilité.

La découverte du protoxyde d’azote

La spécialisation connue aujourd’hui sous le nom d’anesthésiologie a pris naissance le jour où Sir Humphrey Davy (dès 1795) découvrit les qualités anesthésiques du protoxyde d’azote. En 1800, il l’utilise pour soulager les migraines et l’extraction de ses dents cariées sans douleur. Le premier à se servir du protoxyde d’azote comme anesthésique est le Dr Riggs et un de ses collègues, le dentiste Horace Wells ; ils réalisent l’extraction dentaire sous anesthésie générale par le protoxyde d’azote (1844-1848) dans le village de Hartford en Amérique. Le protoxyde d’azote donnait une anesthésie beaucoup trop transitoire pour pouvoir convenir à des interventions de longue durée. De ce fait, on s’est mis à la recherche d’autres gaz ou produits volatils capables d’avoir un effet plus durable.

La découverte de l’éther

L’éther a été synthétisé au VIIIe siècle par un savant arabe, Jabir ibn Hayyan, mais cela n’a atteint l’Occident qu’au XIIIe siècle grâce à Valerius Cordus (1514-1544). Un premier test sur des poules a été effectué par Paracelse (1493-1541). Michael Faraday, le célèbre assistant de Sir Humphrey Davy, avait bien avant donné, en 1818, la description de la vapeur de l’éther mélangée avec l’air, qui produit des effets très similaires à ceux occasionnés par le protoxyde d’azote. En 1847, l’étudiant de la faculté de médecine de Harvard, William Morton, l’utilise chez un malade devant subir une intervention chirurgicale à l’hôpital du Massachusetts. Ce fut un événement marquant pour lui, comme pour l’histoire de l’anesthésie. C’est l’anesthésie générale qui a permis les progrès de la chirurgie et la recherche expérimentale chez les animaux.

LA PÉRIODE PRÉ-ANESTHÉSIQUE APRÈS 1846

La découverte du chloroforme

En 1847, James Young Simpson imbibe son mouchoir de chloroforme et le respire ; en 1848, il endort la reine Victoria pour la soulager durant l’accouchement de son prince Léopold.

Le gaz oléfiant

Après la découverte des premières anesthésiques (1842-1847), une série de médecins, chimistes et pharmacologistes se lancent à la recherche de nouveaux narcotiques.

Un gaz qui n’a pas de chance

En 1868, Edmond Andrews, chirurgien de Chicago, découvre que le meilleur moyen pour obtenir de bonnes anesthésies avec le protoxyde d’azote est de l’employer mélangé avec de l’oxygène, mais 10 ans après, il retombe dans l’oubli.

Vicissitudes de l’anesthésie

Le chloroforme, une fois découvert, commence à remplacer l’éther, surtout en Angleterre ; mais en 1848 se produit le premier décès. Une période de discussions et de polémiques interminables sur les effets toxiques des anesthésiques commence ; beaucoup d’appareils pour l’anesthésie inhalatoire sont imaginés et peu après abandonnés ou modifiés ; des mélanges variés des différents anesthésiques sont conseillés afin de diminuer leurs effets toxiques. L’anesthésie générale par inhalation de cyclopropane est la meilleure anesthésie générale connue ; mais ce n’est pas encore l’anesthésie parfaite. Les progrès sont grands et, même si nous ne possédons pas encore l’anesthésie idéale, nous y parviendrons sans aucun doute un jour ou l’autre.

L’induction et l’entretien de l’anesthésie par inhalation resteront un standard des pratiques anesthésiques jusqu’à l’apparition du thiopental en 1934, best-seller de l’anesthésie chez les Anglo-Saxons. L’administration d’anesthésie par voie intraveineuse, rendue possible notamment grâce à la seringue de Pravaz en 1852, est importante. Il est important de rappeler l’origine de ce précieux instrument, si banal aujourd’hui, qui va permettre, en 1884, l’injection hypodermique des produits d’anesthésie locale.

L’éthrane (1963), le forène (1965), le desflurane (1960, mais commercialisé 20 ans plus tard, AMM 1996), l’halothane, dont les premières utilisations remontent à la fin des années 1950, n’est plus utilisé du fait de sa toxicité et de ses effets cardiovasculaires délétères. L’enflurane, commercialisé en 1973, n’est quasiment plus administré pour des raisons similaires. Le sévoflurane (1981, mais commercialisé après AMM 1994). En France, l’isoflurane, commercialisé depuis 1984, le desflurane depuis 1990 et le sévoflurane depuis 1996 constituent actuellement les trois agents halogénés les plus fréquemment administrés.

L’ÉVOLUTION VERS L’ANESTHÉSIE LOCALE

Pourquoi y a-t-il eu une évolution vers l’anesthésie locale ?

Les risques de l’anesthésie générale par inhalation de gaz allaient de la mort immédiate sur la table d’opération aux complications, presque toujours inexplicables. Ces risques ont été extrêmement diminués notamment grâce à la découverte des barbituriques. Néanmoins, encore de nos jours, aucun médecin ne peut garantir que le patient se réveillera. En 1884, un patient obèse meurt suite à une extraction dentaire pratiquée sous anesthésie générale par le chirurgien-dentiste Duchesne. Ce drame fit jurisprudence et une loi fut créée : la loi du 30 novembre 1892 octroie au chirurgien-dentiste diplômé le droit d’utiliser l’anesthésie générale pour des interventions dentaires, à condition qu’elle soit effectuée avec l’assistance d’un médecin.

Sigmund Freud aurait eu le premier l’idée de supprimer la douleur par des applications locales de solution de cocaïne. S. Halsted, chirurgien du Johns Hopkins Hospital de Baltimore, est l’un des premiers à réaliser des anesthésies locales par injection directe de dérivés de cocaïne dans les tissus, en chirurgie générale. Le professeur Paul Reclus de la faculté de Paris, chirurgien et secrétaire général de la Société de Chirurgie, consacra toute son existence, de 1885 à la Première Guerre mondiale, au développement de l’anesthésie locale. Il mit au point des règles pour obtenir en même temps la sécurité et la certitude d’une complète anesthésie. Il insiste sur l’importance de la concentration de la dose quand il remarque en clinique que « 10 centigrammes de cocaïne contenus dans un seul gramme d’eau ont provoqué des accidents redoutables, tandis que, chaque jour, j’injectais les mêmes 10 centigrammes, mais noyés dans 20 grammes d’eau, impunément et sans troubler l’équilibre physiologique de mes patients ». Une autre règle concerne l’adrénaline ajoutée, et il réunit toutes ces règles dans un ouvrage intitulé La cocaïne en chirurgie, 1894.

L’évolution des produits d’anesthésie locale

Un jeune chimiste du nom de M. E. Fourneau ouvrit la voie en créant la stovaïne, un produit synthétique avec une puissance d’insensibilisation égale à celle de la cocaïne. Le chlorhydrate de procaïne a été synthétisé en 1904 par A. Eichhorn et Braun, et commercialisé sous le nom de Novocaïne. Des expérimentations animales ont prouvé qu’elle était deux fois moins toxique que la stovaïne. C’est en 1900 que l’adrénaline a été proposée pour contrer l’effet vasodilatateur engendré par les anesthésiques locaux, en dehors de la cocaïne et de la mépivacaïne. En 1901, J. Takamine et T. Aldrich réussissent à isoler de l’adrénaline pure. On obtient alors une meilleure anesthésie et une diminution du saignement. Enfin, elle est synthétisée pour la première fois par le chimiste F. Stolz en 1904.

ANESTHÉSIE MODERNE

Il existe actuellement plusieurs produits et techniques d’anesthésie avec ou sans adrénaline dont il faut respecter les doses : lidocaïne 2 %, mépivacaïne 3 %, mépivacaïne 2 %, articaine. Les différentes techniques d’anesthésies locales et loco-régionales actuellement utilisées par les chirurgiens-dentistes incluent l’anesthésie par contact, par infiltration (para-apicale, intraligamentaire, intraseptale) ou l’anesthésie régionale.

Pour traiter la peur du patient, des adjuvants de l’anesthésie interviennent, comme l’acupuncture, l’hypnose, le MEOPA (mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote), qui sont les alliés futurs du chirurgien-dentiste. En effet, ces disciplines, vieilles de plusieurs siècles, comme nous l’avons vu plus haut, doivent être reprises par notre spécialité d’une façon plus universelle.

CONCLUSION

Les techniques sont désormais exploitées, mais la recherche et le goût de l’innovation font que l’anesthésie au cabinet dentaire continuera d’évoluer. La douleur est maîtrisée. Le praticien peut exercer dans un confort qui ne cessera de croître. Il restera alors au temps de faire son œuvre afin que le chirurgien-dentiste ne soit plus vu comme un pourvoyeur de douleur, de peur et de souffrance, mais comme un praticien au service du bien-être et de la guérison de son patient.

RÉFÉRENCES

  1. Kenneth Walker, Histoire de la médecine : des pratiques anciennes aux découvertes les plus modernes, Éditions Gérard et Co, Verviers, 1962, pp. 211-223.
  2. Cousin MT. Le cent-cinquantenaire du chloroforme. Un agent anesthésique plus merveilleux et terrible encore que l’éther. Ann Fr Anesth Reanim 1997;16:1037-44.
  3. Ernest Kern, Jean Lassner, Guy Vourc’h. Regard sur l’anesthésie d’hier. Éditions Glyphe et Biotem, Paris, 2003.
  4. Paul Depovere. La fabuleuse histoire des bâtisseurs de la chimie moderne. Édition De Boeck, p. 74, Bruxelles, 2008.
  5. Bourne JG. General anaesthetics for out-patient, with special reference to dental extraction. Proc R Soc Med 1954;5:416-22.
  6. Thirion Julie. Contribution à l’histoire de l’anesthésie à visée odontologique. Thèse : chirdent : 2012 : Université Claude Bernard Lyon I.

HISTOIRE DE L’ANESTHÉSIE – Anesthésiologie Dentaire

  La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.  

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