Dermatologie buccale : ulcérations, aphtes et aphtoses, les lésions bulleuse de la muqueuse buccale

Dermatologie buccale : ulcérations, aphtes et aphtoses, les lésions bulleuse de la muqueuse buccale

Dermatologie buccale : ulcérations, aphtes et aphtoses, les lésions bulleuse de la muqueuse buccale

I. Rappels histologiques: 

La muqueuse est constituée par un épithélium de revêtement reposant sur le chorion à travers une membrane basale. 

II. Les lésions élémentaires 

La lésion élémentaire est la lésion primitive non modifiée de l’atteinte de la muqueuse buccale, telle qu’elle apparaît à l’observateur.

 Elle peut être nette, permanente, mais être plus ou moins évidente selon l’évolution, la zone d’apparition ou les thérapeutiques utilisées. Cette lésion s’analyse par l’observation et la palpation. L’usage d’une optique est souvent utile pour en préciser certains caractères. 

Le diagnostic clinique repose sur l’anamnèse, sur la topographie et principalement sur l’examen.

La lésion élémentaire  primaire doit être distinguée des lésions secondaires qui résultent d’une transformation spontanée ou provoquée de la lésion primaire.  

  1. Macules, plages, et placards : 

Les macules correspondent à une modification de la couleur de la muqueuse sur une surface limité sans relief ni infiltration.

Une plage ou placard correspond à une modification de la couleur de la muqueuse buccale dont le diamètre dépasse 0.5 cm de diamètre

Ces lésions uniques ou multiples ont le plus souvent des limites nettes et peuvent être erythémateuses, blanches ou pigmentées, ou au contraire hypochromiques ou achromiques.

Les signes subjectifs se traduisent par : une impression de brulure, d’agacement.

A l’examen histologique , elles répondent à une dilatation capillaire sans extravasation d’hématies, parfois une atrophie épithéliale est observée.

2)Plaques et papules :

Lésions saillantes et circonscrites, solides, ne contenant pas de liquide, on parle de plaque lorsque le diamètre dépasse 0.5 cm de diamètre.

Elles peuvent être en rapport avec une augmentation du diamètre de l’épithelium , ou une augmentation du volume du chorion ; 

Les papules peuvent être chorio-épithéliales, elles sont bien limitées, et peuvent être érythémateuses, blanches, pigmentées, ou hypochromiques 

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3)les Nodules :

ce sont des élevures rondes et saillantes, de diamètre supérieur à 1cm, 

correspondent à une infiltration profonde du chorion par prolifération cellulaire

il s’agit le plus souvent de tumeurs qu’elles soient bénignes ou malignes.

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4)Les lésions bulleuses :

Les bulles sont des décollements épithéliaux arrondis ou ovalaires de taille variable, elles contiennent un liquide séreux ou hémorragique, leur présence est généralement éphémère à cause de la fragilité du toit, de l’humidité buccale et des traumatismes alimentaires.

Les affections bulleuses peuvent s’observer isolément ou s’associer à une éruption cutanée. 

Dermatologie buccale : ulcérations, aphtes et aphtoses, les lésions bulleuse de la muqueuse buccale

5)Les érosions : 

Elles peuvent être primitives ou secondaires : 

C’est une perte de substance superficielle, sans nécrose des tissus sous jacents , le fond de la lésion garde une couleur plus ou moins rouge ;

Le caractère bien circonscrit avec une collerette épithéliale blanchâtre fait évoquer une érosion post bulleuse ou post vésiculeuse.

6)Les Ulcérations :

Perte de substance profonde avec destruction de l’épithélium buccal et de la partie supérieure du chorion contrairement à l’érosion ou la perte de substance ne concerne que la partie superficielle de l’épithélium. 

III. Les ulcérations et aphtes buccaux 

Les ulcérations buccales posent surtout un problème étiologique pouvant révéler des maladies locales ou générales très diverses et parfois graves.

Ulcérations isolées ; puis les ulcérations orales aiguës multiples et les ulcérations récidivantes, et enfin les ulcérations chroniques. 

III.1) les ulcérations isolées 

Les ulcérations traumatiques :

Il s’agit le plus souvent d’une ulcération unique 

avec un pourtour moulé sur l’agent causal

une prothèse dentaire mal adaptée

une morsure surtout après l’anesthésie locorégionale.

 Cette ulcération guérit en 7 à 8 jours si la cause est traitée. L’utilisation de bain de bouche avec une solution saline ou une solution de chlorhexidine à 0,2% peut aider à la guérison. 

La persistance de l’ulcération on doit faire biopsier la lésion pour éliminer une cause néoplasique.

 III.3) Les ulcération récurrentes 

D’origine systémique un certain nombre de patient présente un problème d’ulcérations orales récurrentes, s’échelonnant parfois sur une période de plusieurs années.

  • Ulcère aphteux (aphtose bucco pharyngée et maladie de Behcet)
  • leucopénie, neutropénie cyclique
  • Ulcérations liées à la chimiothérapie
  • Maladies inflammatoires intestinales (Crohn-RCH)
  • Syndrome de malabsorption (maladie coeliaque)
  • Anémie et déficiences nutritionnelles
  • Hypogammaglobulinémie 
  • Infection par le HIV
  • Insuffisance rénale chronique
  • Lupus érythémateux.

III.3) Les ulcération récurrentes: Aphtes et aphtoses :

L’aphte  mot grecque « Aphta »  = ulcère ou brûlure.

Les aphtes buccaux sont des ulcérations relativement communes mais dont l’étiologie est inconnue.

C’est l’ulcération de la muqueuse buccale qui est la plus douloureuse. Le patient éprouve des difficultés à mastiquer, à  déglutir et à assurer une hygiène buccale.

Les aphtes buccaux peuvent être isolés (aphtes vulgaires ou communs et aphtose bucco-pharyngée) ou s’inscrire dans le cadre d’une aphtose atteignant d’autres organes (maladie de Behçet ou grande aphtose de Touraine, aphtes cutanéomuqueux). 

MECANISMES D’APPARITION                                           

 Phase 1 :   phase prodromique (douloureuse) :

Picotements +  brûlures (- de 24 h) (souvent absente dans M. Behçet)

Phase 2 : phase pré ulcérative (courte)  

Lésions érythémateuses, maculaires ou papuleuses voire vésiculeuses 

(vésicules éphémères le plus souvent passées inaperçues.

Phase 3 : l’aphte  s’ulcère de manière punctiforme ou  lenticulaire, ne  saigne  jamais.

  • La base ⇒  légèrement oedémateuse,  souple, non indurée,sauf dans les  variétés nécrosantes.
  • L’aphte gêne l’alimentation et la parole.
  • La lésion très douloureuse bien limitée, peu profonde arrondie ou ovalaire avec un fond nécrotique, recouvert d’une pseudomembrane et entouré d’un halo érythémateux  avec bord surélevé.

Phase 4 :   douleur ↓ ,  la lésion s’aplatit + se réépithélialise .

  1. l’aphte isolé:

La lésion initiale est une macule érythémateuse

Ulcération ronde ou ovalaire, entourée d’un halo érythémateux, avec un fond jaunâtre 

Siège : lèvres, palais, face interne des joues, sillon gingivo labial…

Lésion non infiltrée, sans adénopathies satellites.

Le diagnostic différentiel se fait avec l’ulcération traumatique, le chancre de syphilis buccal

b) Aphtose commune:

La poussée est constituée de un à trois éléments mesurant de 3,6 jusqu’à 10mm

Evolution spontanée vers la guérison en 8 jours.

Des circonstances déclenchantes sont évoquée et sont propres à chaque patient : alimentaires, soins dentaires , stress, fatigue etc…

Les poussées sont rares, avec des périodes de latence de plusieurs mois.

Le bilan de l’aphtose commune est essentiellement étiologique 

Le traitement est symptomatique.

Les poussées d’aphtes sont soulagées par l’application de topiques : antiseptiques, anesthésiques en topique, antalgiques.

Localisée uniquement au niveau des muqueuses peu kératinisées.

c) Aphtose  multiple:

Rare, faite de 4à 10 éléments bien individualisés ;

Parfois confluents, ils prennent un aspect herpétiforme.

Le bilan est essentiellement étiologique ; essayant de retrouver les criconstances de déclenchements afin de pouvoir les éviter ; 

L’état général est conservé, 

Les traitements sont symptomatiques mais ne réduisent pas la durée de la poussée.

d) Aphtose  millaire:

Forme particulière de l’aphtose multiple

Les éléments sont nombreux de 10 à 100, rarement confluents ; 

Extrêmement douloureuse

Cette forme doit être différenciée d’une stomatite herpétique de primo infection, 

L’aphtose miliaire doit être différenciée d’une stomatite herpétique de primo-infection, le diagnostic clinique parfois difficile, mais certains éléments peuvent orienter vers l’infection virale : confluence des éléments, altération de l’état général, fièvre, lésions péri buccales

Le traitement de l’aphtose miliaire reste symptomatique.

 e) Aphtose  géante :

Taille supérieure à 1 cm

La lésion est le plus souvent unique ; 

L’ulcération est parfois infiltrée d’œdème parfois nécrotique et évolue sur plusieurs semaines, parfois sur plusieurs mois ;

Les signes fonctionnels sont importants, à type de dysphagie, dysphonie, hypersialorrhée.

Traitement : Thalidomide à raison de 100mg par jour et entraine en quelques jours une sédation spectaculaire des douleurs qui évoluaient depuis plusieurs semaines, mais ca reste un ancien médicament qui provoque des malformations congénitales graves chez la femme enceinte. Le traitement par corticoides locaux a démontré son efficacité.

f) Maladie de Behçet:

Dermatologue turc (Hulusi Behçet)  1937.

C’est une vascularite comportant des manifestations systémiques diverses dont les plus fréquentes sont cutanées, ophtalmologiques, articulaires et neurologiques. Le diagnostic est clinique et repose sur un ensemble de critères, essentiellement ceux définis par le Groupe International d’Etude sur la maladie de Behçet .

TABLEAU II : CRITERES DE DIAGNOSTIC DE LA MALADIE DE BEHCET (MB) « Lancet, 1990 »
Critères Commentaires 
1. Ulcérations buccales récidivantes Aphtes vulgaires, géants ou miliaires, observés par le médecin ou le patient, avec une récurrence d’au moins 3 fois en 12 mois  
2. Plus 2 des 4 critères suivants : 
2.1 Ulcérations génitales récidivantes Ulcération aphteuse ou cicatrice, observée par le médecin ou le patient 
2.2. Lésions oculairesUvéite antérieure ou postérieure, cellules dans le vitré, vascularite rétinienne    diagnostiquée par un ophtalmologiste 
2.3. Lésions cutanéesErythème noueux, pseudofolliculite, lésions papulopustuleuses, nodules acnéïques. 
2.4. Pathergy-test  positif Lu par le médecin après 24-48 heures

Investigations et diagnostic de la maladie de Behçet:

Le diagnostic est fait essentiellement sur la base de l’histoire de l’affection rapportée par le patient; et par la  recherche des critères cliniques

Il n’y a pas d’examen de laboratoire spécifique

L’interrogatoire est fait de manière à reconnaître ou  détecter d’autres désordres comme la maladie de Crohn, maladie cœliaque, neutropénie, HIV et syndrome de Behcet.

 Les AB sont classés selon 5 critères cliniques : 

  • la taille, 
  • le nombre, 
  • la durée d’évolution des lésions,
  • la fréquence des récidives,
  • et les associations à un contexte pathologique.
  • Cette étape diagnostique oriente les éventuelles investigations complémentaires et les choix thérapeutiques. 
  • L’aphtose récidivante est caractérisée par une fréquence des poussées supérieures à 4 par an, quels que soient le nombre des éléments, leur taille, leur durée. Les périodes de rémission varient de 2 à 3 mois  à quelques jours, et les poussées sont parfois subintrantes.

III.3) Les ulcération récurrentes: Aphtes et aphtoses: Moyens thérapeutiques :

Bains  de bouche :

Les bains de bouche prescrits dans le cas d’ABR ont pour but de contrôler les contaminations microbiennes et les infections secondaires. 

Même si leurs bénéfices n’ont pas été confirmés, plusieurs BB  à base d’ATB ont été utilisés pour traiter les ABR (Tétracycline, Céphalexine) ; 

Une solution peut être préparée avec 250 à 500 mg : 1 à 2 capsules de Vibramycine dissoutes dans 30 à 50 ml d’eau stérile.

On peut aussi imbiber des compresses pour les appliquer directement sur la lésion.

Chlorhexidine : le gluconate de chlorhexidine  agit sur la cicatrisation en réduisant la durée de l’ulcération, mais il n’a aucun effet sur la récurrence.

Corticostéroïdes 

En topiques, les corticostéroides ont pour effet de limiter le processus inflammatoire associé à l’aphte. L’efficacité des corticostéroïdes en topique dans le traitement de l’aphte est indiscutable ; ce qui explique leur large utilisation.

Ceci est conforté par l’absence des effets secondaires. Les crèmes dermiques ne sont cependant pas appropriées  l’usage intrabuccal.

Les bains de bouche aux corticoïdes procurent l’avantage supplémentaire de ne pas être avalés et de ne pas rejoindre la circulation.

Pour optimiser l’effet des corticoïdes, il est recommandé de :

Masser au doigt ou avec un coton durant 30 à 60 secondes.

De garder le produit au niveau de l’ulcération

D’éviter de manger ou boire au moins 30 mn après.

L’usage prolongé des corticostéroïdes peut favoriser la survenue de candidoses.

IV. Les lésions bulleuses: 

Cliniquement une bulle est une collection liquidienne superficielle à contenu clair ou séro hématique, de plusieurs millimètres de diamètre.

Elle peut sièger sur la peau ou sur les muqueuses.

Il faut savoir évoquer une lésion élémentaire bulleuse devant une érosion post-bulleuse.

IV.1) dermatose bulleuse non auto immune:

  1. l’erythème polymorphe: 

Maladie bulleuse de l’adulte jeune et de l’enfant, 

C’est un développement d’une réponse immunitaire contre divers agents infectieux, souvent l’HSV est incriminé.

Les manifestations d’érythème polymorphe post-hérpetique aparaissent généralement 7 à 10 jours après la récurrence herpétique, avec un début brutal. 

  • Atteinte curative est caractéristique et conduit au diagnostic
  • Ces lésions en cocarde de 1à 3 cm de diamètre réalisent des papules centrées par une vésicule et entourées par un halo érythémateux.
  • Un syndrome pseudo grippal peut être associé

Les lésions muqueuses sont observées dans 50% des cas .

Clinique

L’examen endo-buccal retrouve des érosions post-bulleuses de grande taille, recouvertes de fibrine, très étendues, à la partie antérieure mais également sur la face interne des joues, le voile et la langue, entravant l’alimentation, l’ouverture buccale et l’examen. Une chéilite croûteuse et hémorragique est très fréquente. La rémission spontanée et sans séquelle se fait en 2 à 3 semaines. 

Conduite à tenir 

Une alimentation liquide ou semi-liquide ou de substitution (Renutryl, Fortimel) est nécessaire. Une hygiène buccodentaire correcte sera reprise dès que possible, avec un brossage doux en utilisant une brosse chirurgicale.

Traitement local symptomatique:Dans toutes les formes, le traitement local comprend : 

– de la Xylocaïne gel en applications sur les érosions ;

– des bains de bouche composés, avec adjonction d’un flacon de Xylocaïne 5% dans la préparation. Ils sont prescrits avant les repas pour anesthésier les muqueuses ;

Dans les formes majeures, on rajoutera dans chaque verre de bain de bouche composé un comprimé de Solupred 20 mg ou de Célestène dispersible 2 mg .

IV.2) dermatose bulleuse  auto immune:

a) Pemphigoide bulleuse 

  • c’est la plus fréquente , touche surtout les sujets agés 
  • Peut débuter par un prurit généralisé, par des placards eczématiformes ou urticariens 
  • L’éruption caractéristique est faite de bulles tendues à contenu clair souvent de grande taille, siègeant sur une base érythémateuse.
  • L’atteinte muqueuse est rare.

B) Pemphigus vulgaire :

c’est une maladie rare qui touche l’adulte d’âge moyen 

Le début est incidieux par des lésions muqueuses érosives, surtout buccales entraînant une dysphagie et parfois un amaigrissement 

L’éruption cutanée typique est caractérisée par des bulles flasques en peau saine rapidement rompues en laissant des érosions ne cicatrisant pas , avec un signe de Nikolski.

  • le taux de mortalité est de l’ordre de 10%, dans les formes évolutives ou étendues la corticothérapie générale constitue le traitement d’attaque.
  • Prednisone 1à 1.5 mg/kg/jour.
  1. Pemphigoide cicatricielle :
  • Caractérisée par l’atteinte élective des muqueuses
  • Touche surtout le sujet âgé
  • Gingivite, stomatite bulleuse ou érosive dans la bouche
  • Conjonctivite avec risque de cécité par opacification cornéenne 
  • Atteinte cutanée inconstante
  • La gravité potentielle de l’atteinte oculaire justifie un traitement par immunosuppresseurs.

Conclusion :

Les ulcérations et aphtes buccaux restent un domaine très vaste en Odontostomatologie, parfois nécessitent une collaboration pluridisciplinaire afin que la prise en charge soit globale.

En médecine buccale, la prise en charge de ces patients est a visée primordiale antalgique. Cependant le médecin-dentiste contribue au diagnostic précoce de certaines lésions aphtoides et ulcérations buccales, puisqu’il est le seul spectateur de la cavité buccale,et cela  par son examen clinique précis. 

Une bonne hygiène bucco-dentaire  Le détartrage régulier chez le dentiste  La pose d’un implant dentaire Les radiographies dentaires  Le blanchiment dentaire  Une consultation chez le dentiste  Le dentiste utilise une anesthésie locale pour minimiser la douleur  

Dermatologie buccale

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