Biomécanique appliquée à l’orthodontie
Introduction :
Le terme d’orthodontie n’était pas encore né alors que la relation entre force et déplacement dentaire était évidente.
Aujourd’hui, l’orthodontie est pratiquée presque partout dans le monde et l’arsenal thérapeutique compte quelques centaines de techniques qui se veulent de plus en plus «simples » et « automatiques ». Beaucoup d’auteurs insistent sur l’importance de biomécanique en ODF que devrait maîtriser tout orthodontiste afin d’appréhender, avec l’aisance et la rigueur nécessaire, l’essence physique et mécanique des appareils et technique qu’ils utilisent.
I. Réactions tissulaires :
1. les éléments en présence
- Os
On décrit :
- L’os cortical qui constitue les rebords et les limites osseuses maxillaire et mandibulaire ;
- L’os spongieux ou trabéculaire qui occupe l’espace entre les zones d’os cortical.
L’os cortical a un rôle de soutien (en particulier musculaire), il est donc beaucoup plus dense et est calcifié à 80 ou 90 %.
L’os trabéculaire a un rôle de réservoir médullaire intervenant dans l’hématopoïèse. Sa calcification est de 15 à 25 %.
- Lamina dura
C’est l’os qui entoure la dent et son espace ligamentaire. Il est formé d’os compact mince perforé de nombreux trous (lame criblée).
Ces perforations établissent une communication avec les espaces médullaires voisins et permettent à l’espace ligamentaire rempli de liquide de jouer le rôle d’amortisseur hydropneumatique de la dent.
- Espace ligamentaire :
Il est rempli de liquide, de cellules (fibroblastes, cellules médullaires, cellules osseuses, cellules sanguines), de vaisseaux sanguins, de fibres nerveuses, et bien sûr de fibres de collagène constituant le desmodonte : le ligament alvéolodentaire.
Ce ligament va de la lamina dura où il s’ancre dans la lame d’os cortical, jusqu’au cément qui recouvre la racine de la dent.
- Le cément :
Il est constitué de cellules fabriquant une matrice calcifiée. Il recouvre la dentine radiculaire et permet l’ancrage du desmodonte.
- Notions biologiques du déplacement dentaire:
- Phénomène de remodelage:
Parmi tous les éléments en présence, la plupart sont soumis à des phénomènes de remodelage dont la perturbation permet le déplacement thérapeutique des dents.
- Tissu osseux
Les remaniements ont lieu dans des foyers bien localisés.
La résorption ostéoclasique y précède l’apposition selon une séquence : activation-résorption-inversion-formation (ARIF) :
- activation :
- recrutement de préostéoclastes ;
- reconnaissance de la zone osseuse à résorber ;
- attachement des préostéoclastes à la surface ;
- fusion des préostéoclastes ostéoclastes multinucléés ;
- résorption :
- les ostéoclastes détruisent le tissu osseux ;
- inversion :
- mise en jeu des cellules mononucléées type macrophages, qui établissent la limite os nouveau/os ancien (ligne cémentante) ;
- recrutement de préostéoblastes qui se différencient en ostéoblastes ;
- formation :
- apposition de tissu ostéoïde le long de la ligne cémentante ;
- minéralisation.
Cette séquence ARIF est suivie par une phase dite de quiescence où l’os nouveau est tapissé de cellules bordantes.
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Régulation du remodelage osseux :
Facteurs généraux
Les hormones calciotropes les plus importantes ainsi que
les minéraux, en particulier le calcium et les ions phosphates.
Facteurs locaux :
De très nombreux sont synthétisés par les cellules osseuses, mais d’autres proviennent des cellules du système immunitaire ou hématopoïétique, et se retrouvent dans le microenvironnement osseux.
- On distingue : les cytokines (interleukines), prostaglandine stimule la résorption osseuse.
- Ligament alvéolodentaire :
Le ligament est un tissu conjonctif composé de nombreuses cellules et d’une matrice extracellulaire.
Cellules
- Fibroblastes en majorité.
- Ostéoblastes au niveau de l’os alvéolaire voisin du ligament.
- Cémentoblastes au niveau de la racine dentaire.
- Cellules échappées des capillaires (lymphocytes, macrophages et mastocytes) et cellules provenant des espaces médullaires voisins.
Matrice extracellulaire
- Substance fondamentale.
- Fibres parodontales (collagène, réticuline, oxytalase).
Il existe également un réseau de capillaires et de terminaisons nerveuses.
Le ligament alvéolodentaire au niveau du remodelage joue un double rôle :
- il possède sa propre capacité de remodelage ;
- il a un rôle régulateur du remodelage osseux
- Remodelage ligamentaire
On connaît déjà le rôle du fibroblaste pour la synthèse du collagène, ils auraient également les mêmes propriétés que les macrophages avec possibilité de phagocytose, et seraient vraisemblablement responsables de la dégradation du collagène, compte tenu de la rareté des macrophages,
L’ensemble de ces opérations est réalisé en présence de vitamine C et peuvent être réalisées simultanément par le fibroblaste.
- Migration physiologique des dents
Tout au long de la vie de chaque individu, les dents se déplacent. Le déplacement est dû à la migration physiologique du germe et de la dent.
Les changements de position du germe seraient provoqués principalement par la croissance des structures dentaires et le remodelage concomitant des tissus voisins c’est-à-dire l’os alvéolaire, la gencive, le ligament alvéolodentaire.
Les conséquences de cette migration se retrouvent essentiellement dans deux zones
- zone alvéolaire ;
- zone desmodontale.
Au niveau de l’os alvéolaire
Selon Baron, au cours de la migration physiologique, ” toute travée osseuse tend à maintenir constante son épaisseur “. De ce fait, il explique que chaque fois qu’il y a résorption du côté de la lame cribriforme, il y a apposition de l’autre côté et vice versa.
Au niveau du ligament
Le desmodonte est un tissu conjonctif fibreux et de ce fait possède un certain turnover ; la migration physiologique des dents accentue son rythme de renouvellement cellulaire et fibrillaire créant une adaptation permanente à la nouvelle position de la dent. Tout au long du mouvement, la largeur du ligament reste constante.
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- Application d’une force sur une dent :
3.1 Effets immédiats
Au moment de l’application de la force, un déplacement rapide de la dent se produit correspondant à la mise en jeu du ligament et du système hydropneumatique desmodontal, les liquides étant chassés des zones de pression vers les zones de tension et les espaces médullaires voisins. Cette déformation a une limite, et si la force se poursuit, le déplacement se poursuit grâce aux possibilités de déformation de l’os alvéolaire.
Si la force augmente encore, on aura une déformation de la dent, mais on sort du cadre des forces utilisées en thérapeutique orthodontique.
Si la force s’arrête, il s’ensuit un retour à la normale plus ou moins rapide.
Si la force continue, de nouveaux événements se produisent en réponse à ce nouvel équilibre.
3.2 Effets à plus long terme
Il convient maintenant de distinguer différentes zones :
- zone de pressions (avec diminution de l’espace ligamentaire) ;
- zone de tensions (avec augmentation de l’espace ligamentaire) ;
- zone intermédiaire où il n’y a pas de variation de l’espace ligamentaire mais où les fibres de collagène sont en tension ou relâchées.
Côté en pression
Zone où la pression est faible
L’espace desmodontal se rétrécit, entraînant une compression du tissu conjonctif et des vaisseaux. La vascularisation est perturbée mais peut quand même se produire, permettant aux éléments cellulaires d’atteindre la zone en compression. L’organisme va alors essayer de recréer l’espace desmodontal normal. Pour cela, il y a mise en jeu des ostéoclastes qui vont résorber la lame criblée correspondant à la zone en compression : résorption osseuse directe.
Zone où la pression est forte
Si la zone subit une compression plus importante, la vascularisation est impossible.
Il y a dégénérescence des tissus non vascularisés et formation d’une zone hyaline.
Les tissus cherchent à recréer un nouvel équilibre. Mais la zone hyaline est inaccessible à la vascularisation et aux cellules. Pour pouvoir la résorber, l’organisme utilise un moyen détourné : la résorption indirecte. Les ostéoclastes envahissent les espaces médullaires voisins de la zone hyaline, puis résorbent le mur alvéolaire jusqu’à atteindre la zone hyaline, qui est alors accessible aux ostéoclastes. Le déplacement de la dent peut alors se faire.
Côté en tension
Les réactions des tissus sont très proches de celles observées du côté en pression, mais de sens opposé.
Si la force est légère, il y a élargissement du ligament et des espaces vasculaires. De nombreux ostéoblastes apparaissent et sont actifs dès le deuxième jour, permettant l’apposition osseuse.
Si la force est plus lourde, il y a production de nombreuses cellules ostéoclastiques et apparition de lésions ligamentaires. Une force trop importante peut provoquer un déchirement fibrillaire.
Après un temps de latence faible (quelques heures), apparaissent des cellules ostéogéniques. Les ostéoblastes sécrètent alors un tissu ostéoïde qui se minéralise et permet l’apposition osseuse.
Zone intermédiaire
Ce sont des zones où il n’y a pas de modification de l’épaisseur desmodontale. En revanche, les fibres sont mises en tension ou relâchées. Leur ancrage osseux répercute donc soit un relâchement, soit une mise en tension au niveau osseux.
- Mécanismes de transformation d’une force en déplacement dentaire
Nous allons ici essayer d’analyser les mécanismes qui transforment une composante physique, la force, en des phénomènes histologiques et cellulaires aboutissant à un autre phénomène physique : le déplacement dentaire.
Lors de l’application d’une force sur une dent, on a vu qu’il y a modification de l’espace ligamentaire avec :
- création de zone de pression et de tension ;
- mouvements liquidiens.
Ceci aboutit à des déformations dans ces zones :
- des éléments cellulaires ;
- des éléments vasculaires et nerveux ;
- des éléments de la matrice extracellulaire.
Réponse cellulaire : remodelage
- Au niveau osseux
Les ostéoblastes sont des cellules fondamentales de la régulation et de la coordination du remodelage osseux.
Ils reçoivent des signaux entraînent la formation de collagénase qui entraîne l’élimination du collagène et permet la résorption osseuse par les ostéoclastes.
- Au niveau ligamentaire
Le fibroblaste gère simultanément la synthèse mais aussi la dégradation du collagène en diminuant:
- la prolifération des cellules osseuses ;
- la production de phosphatase alcaline qui est une des enzymes fondamentales du remodelage osseux.
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- Force idéale du point de vue histologique
- Force légère – force lourde
De nombreux auteurs ont essayé de quantifier cette force idéale pour laquelle la vitesse de déplacement dentaire est maximale sans provoquer de lésions tissulaires.
Force légère | Force lourde | |
0-1 sec | L’os alvéolaire se déforme avec apparition de phénomène bio-éléctrique au sein de l’os. | |
1-2 sec | Les fluides du ligament sont expulsés de la zone comprimée.La dent se déplace dans l’espace ligamentaire. | |
3-5 sec | Coté Pression Coté tensionVx comprimés Vx dilatés (partiellement oblitérés) Fibres et cellules déformées | Coté Pression Coté tensionVx oblitérés Vx dilatés Fibres et cellules très déformées, lyse cellulaire |
2 jours | Déplacement dentaire avec remodelage alvéolaire | |
7-14 jours | La résorption indirecte atteint la zone hyalineDéplacement dentaire |
- Lésions tissulaires
Elles peuvent être irréversibles et atteignent :
- la dent (rhizalyse) ;
- le parodonte (perte d’attache épithéliale et d’os marginal).
- Résorptions radiculaires :
Elles sont dues aux fortes pressions et touchent en particulier les zones de pression au cours de ce mouvement :
- apex lors de l’ingression ;
- racine côté pression lors de la translation
- Lésions parodontales
On peut avoir :
- Des fenestrations causées par une vitesse de déplacement trop importante ou des forces lourdes ;
- Des fentes gingivales faites avec fermeture d’espaces d’extraction avec des vitesses importantes ;
- Des pertes d’attache épithéliale et d’os marginal.
II. La biomécanique :
1. Définition de la biomécanique :
Bio : Bios = vie
Mécanique : Mékhani = machine
La biomécanique est la mécanique physique appliquée au vivant.
– Partie biologique: la dent+ parodonte
– Partie mécanique: c’est les systèmes qui permettent d’appliquer des forces
- Notions mécaniques de corps déplacé :
2.1. La force:
Concept fondamental de la physique : Cause de la déformation d’un corps ou de la modification de son état de repos ou de mouvement.
Elle est caractérisée par quatre éléments :
- l’intensité ;
- le sens ;
- la direction ;
- le point d’application.
2.2 Couple de force :
C’est un ensemble de deux forces parallèles, de même intensité et de sens contraires. Le couple tend à provoquer la rotation du solide auquel il est appliqué.
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2.3 Centre de résistance : hypomochlion
Une force dont la ligne d’action passe par l’hypomochlion provoque une translation de la dent.
La notion de centre de résistance est fondamentale et sa localisation, même approchée, suffit à prévoir les déplacements. On peut dans notre pratique le considérer comme fixe et situé entre le milieu et le tiers apical de la racine.
2.4 Centre de rotation:
Point autour duquel la dent effectue un mouvement de rotation.
- Moment de force:
M = F x D
3. Notion d’ancrage:
3.1 Définition: résistance d’un corps au déplacement
Déplacement du corps nécessite une force motrice > force résistante.
Résistance stabile: point d’ancrage de la force.
Résistance mobile: point d’application et résistance de la dent à déplacer.
3.2 Trinôme de DENEVREZE :
RS=Rm>F : Pas de déplacement
RS=Rm<F : Déplacement égale et symétrique
F>Rs>Rm : Déplacement inégale
Rs>F>Rm : Déplacement orthodontique désiré
Rs<F<Rm : Perte d’ancrage.
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4. CARACTERISTIQUES D’UNE FORCE ORTHODONTIQUE :
- Intensité:
- Forces orthodontiques: « Biologiques ».
- Force optimale: Déplacement par résorption osseuse sans lésions parodontales.
- Direction:
Verticale, horizontale, oblique.
- Rapport moment /force.
- Rythme:
– Intermittente : Périodes sans aucun dispositif (FEB porté 14 heures/jour).
– Continue : longe période d’activité, énergie très progressivement décroissante.
– Discontinue: diminution rapide de la force avec le déplacement
5. Déplacements Dentaires En O.D.F :
7.1. Déplacements dus aux forces horizontales :
- Mouvement de version ( Tipping):
- Mouvement de redressement après version (Uprigthing)
- Mouvement de translation (bodily mouvement).
7.2. Déplacements dus aux forces verticales :
- Egression: déplacement de la dent dans le sens de son éruption.
- Ingression : sens opposé à l’éruption.
- Rotation : Rotation de la couronne autour de son axe.
6. Facteurs physiologiques individuels compliquant le système mécanique :
- Facteur généraux:
- Alimentation-métabolisme.
- Grossesse
- Age.
- Densité osseuse.
- Cycle cellulaire.
- Rythme biologique.
- Facteurs locaux:
- Facteurs anatomiques
- Facteurs Histologiques.
- Perte de hauteur de l’os alvéolaire.
- Facteurs fonctionnels.
Conclusion :
La connaissance des notions fondamentales de la biomécaniques en ODF nous permet non seulement de faire le choix quant aux diverses techniques orthodontiques nous permettons d’atteindre nos objectifs thérapeutiques mais aussi savoir comment les exploiter afin de traiter le plus rapidement possible tout en respectant l’intégrité tissulaire.
Biomécanique appliquée à l’orthodontie
Les caries non traitées peuvent atteindre le nerf de la dent.
Les facettes en porcelaine redonnent un sourire éclatant.
Les dents mal alignées peuvent causer des maux de tête.
Les soins dentaires préventifs évitent des traitements coûteux.
Les dents de lait servent de guide pour les dents définitives.
Les bains de bouche fluorés renforcent l’émail des dents.
Une consultation annuelle permet de surveiller la santé bucco-dentaire.