Approche psychologique chez l'enfant / Odontologie Pédiatrique

Approche psychologique chez l’enfant / Odontologie Pédiatrique

Approche psychologique chez l’enfant / Odontologie Pédiatrique

Introduction

La pratique de l’odontologie pédiatrique se définit par la nature particulière de ses patients : les enfants. Cependant, l’enfant n’est pas comme l’adulte, il présente des particularités pathologiques, physiologiques et psychologiques qui lui sont propres.

Rappel sur le développement de l’enfant

Le développement de l’enfant est réparti sur quatre grandes périodes.

La petite enfance de 0 à 2 ans

Cette phase se caractérise par différentes acquisitions motrices et posturales. L’enfant passe progressivement d’une relation de parfaite dépendance vis-à-vis de sa mère à une très relative autonomie lui permettant de découvrir le monde qui l’entoure. L’enfant a peur des stimuli brusques, bruyants ou lumineux.

L’Académie Américaine de dentisterie pédiatrique recommande une visite dès l’âge de 1 an chez le médecin dentiste. Hélas, ceci reste souvent lié au contexte d’urgence d’ordre traumatique ou lié à l’atteinte carieuse précoce. À cet âge, l’enfant manifeste ses émotions par une crise de pleurs, il ne doit pas être séparé de sa mère. Il convient de moduler la voix qui doit être très douce et de ne pas avoir de gestes brusques, bruyants ou lumineux.

La période préscolaire de 2 à 6 ans

Entre 2 et 4 ans

Au cours de cette période, l’enfant devient plus explorateur et plus autonome physiquement. Il fonctionne beaucoup par imitation, la peur et l’anxiété développementale existent toujours et l’enfant a besoin de rituels accompagnant les différents moments de la journée (repas, bain, coucher, etc.). Au cabinet, le praticien doit toucher sa curiosité, lui décrire le tout et lui demander de reproduire sa propre description. Il doit également instaurer un rituel.

Entre 4 et 6 ans

Cette période correspond à la phase œdipienne, pendant laquelle l’enfant est jaloux de son parent du même sexe et le considère comme son rival. Durant cette phase, l’enfant prend conscience des différences sexuelles, le langage se développe et la curiosité est sans limites. Au cabinet dentaire, l’attention de l’enfant doit être captée par la curiosité et la mise en valeur de l’enfant lui-même, de ses vêtements, son chapeau, ses lunettes, sa montre, son sac, etc. Le praticien explique et demande l’aide de l’enfant, il lui fait également participer en lui donnant un miroir ou un rouleau de coton à tenir. Décrire la procédure : « Je vais rendre ta dent très propre et je vais mettre également une très jolie perle dedans ».

La période scolaire : de 6 à 11 ans

À 6 ans, l’enfant est scolarisé, il commence à acquérir une certaine indépendance et une adaptation aux contraintes extérieures. Il présente une stabilité émotionnelle et accepte la discipline. Vers la fin de cette période, l’enfant est coopérant et aime être considéré comme adulte. Au cabinet dentaire, le praticien repère les centres d’intérêt de l’enfant comme par exemple les champions sportifs, les stars, etc. À 11 ans, l’enfant adore qu’on lui fasse confiance tout en gardant en tête que le praticien doit rester dominant et leader de son acte.

La période d’adolescence : entre 12 à 15 ans

Cette période est caractérisée par une série de changements physiques, émotionnels et hormonaux, ce qui rend les enfants plus ou moins perplexes. L’enfant se considère indépendant de ses parents et refuse en général les soins et l’hygiène dentaire, cependant il a besoin d’être rassuré et motivé en permanence. Au cabinet dentaire, il est à noter que l’adolescent a besoin de débat et d’explications raisonnables.

La relation de soins

Dans cette situation, il existe trois partenaires et la relation est un ménage à trois : l’enfant, les parents, le praticien.

Acteur n°1 dans la relation de soins : l’enfant

La relation de soins doit être centrée sur l’enfant dans l’objectif de répondre à ses besoins. Le praticien doit être attentif aux attitudes et aux comportements de l’enfant afin de l’évaluer et de s’y adapter.

Acteur n°2 dans la relation de soin : la mère de l’enfant

Le mode d’éducation de la mère et son attitude influencent énormément la conduite de l’enfant et permettent de prédire son comportement au cabinet dentaire. Le praticien doit bien observer le comportement de la mère et la classer soit en :

  • Mère surprotectrice : elle est trop anxieuse et son enfant est également anxieux. Au cabinet, cette mère est source de stress pour son enfant, elle a besoin de beaucoup d’explications de la part du praticien afin d’être rassurée. Il est préférable que cette mère n’assiste pas aux soins.
  • Mère permissive : elle est indulgente et insiste peu pour que son enfant soit obéissant. En général, son enfant développe un comportement égoïste et refuse la contrainte. Au cabinet dentaire, le praticien ne doit pas se substituer à la mère, il doit être ferme et directif avec l’enfant et avec sa mère, et il est préférable que la mère n’assiste pas aux soins.
  • Mère autoritaire : elle impose et contrôle le comportement de son enfant selon une règle bien définie. Pour elle, son enfant doit se soigner et peu importe la manière. Au cabinet, il faut expliquer à cette mère que les soins dentaires sont une étape pas évidente et ambiguë pour l’enfant, que c’est tout à fait normal et que l’apprentissage et la prise en charge du comportement sont nécessaires sans pour autant dévaloriser l’enfant.
  • Mère bienveillante : elle sait valoriser son enfant, est émotionnellement disponible pour lui et a la capacité de gérer le comportement de son enfant sans rôle de toute-puissance. Au cabinet, cette mère est capable d’aider le praticien par un renforcement positif et il est recommandé qu’elle assiste aux soins.

Acteur n°3 dans la relation de soins : le praticien

Le praticien doit avoir la compétence technique et scientifique afin de s’adapter à ce contexte particulier, celui de l’enfant. En revanche, à chaque praticien son expérience professionnelle et sociale. L’enfant joue d’habitude sur les rapports affectifs, le praticien doit se prémunir des transferts affectifs trop forts de l’enfant et montrer qu’il est dans une relation attentive et non pas affective. Le praticien doit également gérer ses propres émotions, sentiment de culpabilité, incompréhension de l’enfant, énervement, impatience, frustration, acharnement ou désinvestissement. Par ailleurs, un pourcentage important de praticiens estiment qu’ils rencontrent des difficultés dans la relation de soin avec l’enfant et que certains actes sont stressants comme les chirurgies et la gestion des traumatismes.

La gestion du comportement de l’enfant au cabinet dentaire

L’enfant a besoin d’être soutenu qu’il soit anxieux ou non, sa prise en charge passe par des techniques de communication et de contrôle du comportement.

Les techniques de communication

La communication non verbale

Le langage du corps est très important, ceci se fait via les expressions du visage, les postures, les gestes et la tenue vestimentaire. Il est à noter que lors de la première consultation, le praticien doit de préférence éviter de porter masque et lunettes (en dehors des situations pandémiques particulières comme la pandémie COVID-19).

  • Le toucher : Permet de manifester l’attention, par exemple prendre la main de l’enfant et lui caresser la joue.
  • L’attitude d’écoute : La position du corps légèrement incliné vers l’avant est signe de compréhension.
  • La distance de communication : Elle doit se situer entre 50 et 120 cm, ce qui permet le dialogue.
  • Le regard : Se placer à hauteur de l’enfant et être en contact visuel avec lui donne une signification d’attention bien portée.
  • La modulation de la voix : Soit hausser légèrement le ton pour capter l’attention de l’enfant, soit le baisser pour l’apaiser.

La technique « expliquer, montrer, faire » (Tell, show, do)

Le praticien donne une explication verbale de ce qui va être fait avec un vocabulaire adapté à l’enfant, par exemple : « la digue est une robe pour la dent, la seringue à air est monsieur le vent, l’anesthésie est la potion magique qui endort les dents ». Le praticien montre les instruments à l’enfant et procède à une démonstration sur sa main en premier, puis sur celle de l’enfant. Il est à noter que l’aiguille d’anesthésie n’est pas à montrer à l’enfant, elle doit être masquée dans un petit coton par exemple.

Les termes suivants sont à exclure :

  • Douleurs, mal
  • Anesthésie, piqûre
  • Sang
  • Examen clinique
  • Arrachement des dents

La distraction

Il s’agit d’une technique verbale qui consiste à détourner l’attention de l’enfant au moment où il est susceptible de ressentir une gêne et de l’intéresser à quelque chose de ludique en parlant des jouets préférés, poser des questions sur les animaux de compagnie, les vêtements et objets.

Le renforcement positif

Le praticien encourage l’enfant et le félicite soit pour son comportement coopérant, soit pour l’amélioration de son comportement. L’enfant est valorisé et une récompense pourrait éventuellement être attribuée.

Les techniques de contrôle du comportement

Le choix de la méthode dépend du comportement initial de l’enfant.

Le stop signal

Avant que l’acte ne commence, l’enfant est informé qu’il a la possibilité de faire interrompre le soin s’il ressent une gêne importante (les mots « douleurs » ou « avoir mal » ne devront pas être prononcés).

La modélisation

Il s’agit de faire apprendre à l’enfant à se comporter sur le fauteuil en observant un autre enfant qui se fait soigner ; soigner un doudou ou une poupée peut également contribuer à gagner sa confiance.

Le contrôle vocal

Lors du soin, il est possible que l’enfant commence à ne plus être coopérant, le praticien peut hausser sa voix brutalement, ce qui peut créer un effet de surprise et le faire s’arrêter. Quand l’enfant se calme, le praticien reprend un ton normal. Cette méthode demande un accord des parents.

La technique de la main sur la bouche

Cette technique est controversée, elle est utilisée quand le patient est particulièrement difficile. Les cris de l’enfant sont contenus par la main du praticien appliquée fermement, mais sans brutalité. Le praticien doit garder son calme et parler d’une voix posée.

Importance de la première consultation au cabinet dentaire

Il s’agit d’un moment d’une importance majeure car ceci est déterminant sur le devenir de la relation de soin. C’est la raison pour laquelle il est recommandé de planifier les visites de contrôle chez le dentiste dès l’âge de 3 ans ou moins afin de permettre à l’enfant de découvrir le cabinet dentaire.

Les objectifs de la première consultation

  • L’anamnèse médicale
  • L’évaluation de l’enfant et de son comportement
  • L’évaluation de l’accompagnant
  • L’institution d’un rituel de soin
  • La réponse au motif de consultation

Concernant l’évaluation comportementale de l’enfant, l’enfant peut être : peureux, anxieux, angoissé ou phobique.

Définitions

  • La peur : Un sentiment de forte inquiétude, d’alarme, en présence ou à la pensée d’un danger, d’une menace. Elle est une émotion normale chez le jeune enfant face à une situation nouvelle.
  • L’anxiété : Une vive inquiétude née de l’incertitude de la situation, de l’appréhension d’un événement. C’est un état émotionnel de tension nerveuse, caractérisé par l’attente d’un danger imminent accompagné de malaise, de peur ou d’un sentiment d’impuissance.
  • L’angoisse : Un malaise psychique et physique né du sentiment de l’imminence d’un danger, caractérisé par une crainte diffuse pouvant aller de l’inquiétude à la panique et par des sensations pénibles.
  • La phobie : Une crainte déraisonnable déclenchée par un objet, une personne, une situation, dont le sujet reconnaît en général le caractère inadapté, tout en se sentant impuissant face à cet état.

Le praticien peut se référer à la classification suivante :
Échelle de Venham modifiée par Veerkam

  • Score 0 : Détendu, souriant, ouvert, capable de converser, meilleures conditions de travail.
  • Score 1 : Mal à l’aise, préoccupé. Pendant une manœuvre stressante, peut protester brièvement et rapidement.
  • Score 2 : Tendu. Le ton de la voix, les questions et les réponses traduisent l’anxiété.
  • Score 3 : Réticent à accepter la situation thérapeutique, a du mal à accepter le danger.
  • Score 4 : Très perturbé par l’anxiété et incapable d’évaluer la situation. Pleurs et véhéments sans rapport avec le traitement, cris.
  • Score 5 : Totalement déconnecté de la réalité et du danger.

Gestion de l’anxiété au cabinet dentaire

Thérapies cognitivo-comportementales

Relaxation

Cette méthode nécessite un apprentissage. Quelques exercices simples peuvent être réalisés au cabinet dentaire, comme la respiration abdominale, serrer et desserrer une balle en mousse, à titre d’exemple.

La désensibilisation

L’enfant est confronté progressivement à une liste hiérarchisée d’éléments stressants en association avec la relaxation.

NB : L’utilisation d’autres techniques cognitives est également possible, tout en sachant que ces techniques nécessitent un apprentissage, comme l’exposition prolongée et l’entraînement à l’affirmation de soi.

Il arrive que les techniques présentées précédemment ne suffisent pas pour atténuer et gérer l’anxiété et créer un climat favorable au soin. Dans ce cas, le recours à des méthodes pharmacologiques s’avère indispensable.

Méthodes de sédation

Il est recommandé en première intention de prescrire l’hydroxyzine (Atarax en sirop ou en comprimé) par voie orale. La posologie est de : 1 mg/kg. Elle est administrée la veille et une heure avant l’intervention. Sa demi-vie d’élimination est de 3 à 4 heures.

Les benzodiazépines du type diazépam (Valium) peuvent être prescrites chez l’enfant, elles sont indiquées pour des manifestations sévères de l’anxiété. La posologie est de 0,2 mg/kg. L’efficacité est obtenue au bout de 45 minutes pour la voie orale et 15 minutes pour la voie rectale. La demi-vie est de 32 heures.

Si l’administration d’anxiolytiques ne donne pas l’effet voulu qui permet le bon déroulement du soin, il est judicieux d’avoir recours à la sédation consciente par inhalation de MEOPA (mélange équimolaire, protoxyde d’azote, oxygène) ou à l’anesthésie générale.

Bibliographie

  1. Chantal Naulin-IFI. Odontologie pédiatrique clinique. Editions CDP, 2011.
  2. Hervé Foray, Sylvie Djean-Tutaud. Odontologie pédiatrique de la psychologie à la clinique, coordination scientifique Frédérique d’Arbonneau. Editions de l’information dentaire n°2, 2017.
  3. Mathilde Laumaillé et coll. Guide d’odontologie pédiatrique la clinique par la preuve, 2ème édition, 2018.

Approche psychologique chez l’enfant / Odontologie Pédiatrique

  La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.  

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