ANESTHESIE EN ODONTOLOGIE PEDIATRIQUE
INTRODUCTION
L’anesthésie se définit comme un blocage de la conduction nerveuse de façon réversible, à la différence de l’analgésie qui augmente le seuil de la douleur.
Cet acte doit être, dans la mesure du possible, non douloureux physiquement et psychologiquement.
Une relation de confiance déjà établie constitue un atout majeur pour sa réalisation en toute sécurité.
I. ANESTHESIE LOCALE EN ODONTOLOGIE PEDIATRIQUE :
La réalisation d’une anesthésie locale et locorégionale demande une connaissance parfaite de l’anatomie de la région concernée. L’utilisation d’anesthésiques locaux chez l’enfant implique le respect de règles strictes qui sont liées à la structure des nerfs et à la pharmacologie des différents agents selon l’âge et le poids de l’enfant.
- Caractéristique de l’anesthésie en odontologie pédiatrique :
- Différences anatomiques :
-Présence des germes des dents permanentes.
-Faible Densité osseuse
-les fibres nerveuses sont plus fines, la couche de myéline moins épaisse que chez l’adulte
🡪 La concentration minimale efficace est plus faible / adulte
-Position de l’épine de Spix :
- 3 ans le foramen est 4mm sous le plan d’occlusion,
- 7 à 9 ans il est au niveau du plan d’occlusion
- l’âge adulte il est 4,16 mm au-dessus
- Différences physiologiques
- Sensibilité aux agents anesthésiques :
- Eviter les vasoconstricteurs avant 3 ans.
- Dose maximale :
0-2 ans : 1 carpule
3-4 ans : 2 carpules
5-12 ans : 2 ou 3 carpules
> 12 ans : 3 carpules
- Spécificités psychologiques
- Angoisse et phobies d’origines multifactorielles
- Approche psychologique adaptée est nécessaire
🡪 Attention au vocabulaire et aux gestes,
- Les anesthésiques locaux utilisés en pédodontie
Différentes molécules peuvent être utilisées chez l’enfant. Les plus courantes sont les amino- amides (lidocaïne, Mépivacaine, articaïne),
Les vasoconstricteurs sont ajoutés aux molécules anesthésiques pour augmenter leur efficacité et réduire les risques de surdosage et de saignement.
- Lidocaïne :
-Souvent utilisé avec un vasoconstricteur.
-Le poids corporel minimal pour l’utilisation d’une cartouche entière supérieur ou égal à 16 kg.
-Durée anesthésie : Pulpe🡪5 à 10 min sans vasoconstricteur et 60 min avec.
Tissus mous🡪3-5 h
- Mépivacaine :
-Il peut être utilisé sans vasoconstricteur.
-Le poids corporel minimal pour l’utilisation d’une cartouche entière supérieur ou égal à 18 kg.
-Durée anesthésie : Pulpe🡪 20 à 40min sans vasoconstricteur et 60 min avec.
Tissus mous🡪 2-3 h
- Articaine :
-Le poids corporel minimal pour l’utilisation d’une cartouche entière supérieur ou égal à 14 kg.
-Durée anesthésie : Pulpe🡪 60 min avec vasoconstricteur.
Tissus mous🡪 3-6 h.
- Vasoconstricteur :
La dose d’adrénaline généralement recommandée est 1 mL/kg d’une solution 1/200 000 chez l’enfant et de 1/400 000 chez le nourrisson.
Ce vasoconstricteur est contre-indiqué dans tous les cas où il existe une vascularisation terminale.
- Principales techniques d’anesthésie locale et locorégionale chez l’enfant :
L’anesthésie locale ou locorégionale est effectuée selon différentes techniques
- L’anesthésie de surface :
Anesthésie par badigeonnage : La substance anesthésique liquide, gélatineuse ou en crème est appliquée avec une boulette de coton sur la muqueuse préalablement séchée et isolée.
L’insensibilisation n’apparaît qu’au-delà d’une minute. Cette anesthésie très superficielle est utilisée en préparation à l’anesthésie par injection dans les zones douloureuses, particulièrement la muqueuse palatine.
Fig. 1 : Anesthésie de surface
- Anesthésie par infiltration :
Elle consiste à utiliser une solution anesthésique à température ambiante. Pénétrer la muqueuse en dirigeant le biseau vers la muqueuse avec des points d’appui stables.
a- L’anesthésie péri apicale :
L’infiltration para apicale est la technique la plus fréquemment utilisée. L’injection se fait dans le vestibule en regard des apex de la dent à traiter, le biseau tourné vers la zone d’injection.
La réalisation d’une infiltration vestibulaire supra-périostée est suffisante pour obtenir l’analgésie pulpaire et desmodontale.
Elle est indiquée pour toutes les dents supérieures, les incisives et les canines inférieures.
Fig. 2 : Anesthésie para-apicale
- Infiltration palatine :
Elle constitue une injection de complément indispensable.L’infiltration doit être réalisée le plus lentement possible.
Fig.3 : Infiltration palatine
- Anesthésie papillaire :
Elle permet la mise en place de clamp ou se réalise avant une infiltration palatine pour limiter la douleur .Une injection de quelques gouttes suffit à faire blanchir la muqueuse.
Fig.4 : Anesthésie papillaire
- Anesthésie locorégionale à l’épine de spix :
Elle permet de programmer des soins sur plusieurs dents. Cette technique insensibilise les muqueuses, ce qui peut provoquer des morsures chez le jeune patient.
Elle permet d’obtenir un bon silence opératoire pour les molaires temporaires inferieures, elle est notamment contre indiquée en cas de pathologie de l’hémostase.
Fig.5 : Anesthésie locorégionale à l’épine de spix
- Techniques intra-osseuse :
Elles sont pour objectif de déposer la solution anesthésique directement dans l’os spongieux au plus près de la zone à atteindre.
- Intraligamentaire
- Ostéocentrale
- Trans-corticale
Fig.6 : Techniques intra-osseuse. a- L’intraligamentaire :
-Souvent réalisée pour les soins des dents permanentes.
-cette anesthésie sera déconseillée en cas de résorption importante de la dent temporaire.
-L’aiguille courte (8mm) est insérée dans le sulcus en proximal pour déposer 0,2 ml de solution en exerçant une pression importante.
Fig. 7 : anesthésie intraligamentaire
b. Anesthésie ostéocentrale.
-C’est l’anesthésie intra osseuse la plus utilisée chez l’enfant.
-Après anesthésie de la muqueuse, l’aiguille est alors réorientée dans un axe de 30 à 45° par rapport au grand axe de la dent, l’injection de 0,5 à 0,7 cartouche permet le plus souvent d’obtenir un silence opératoire immédiat.
-L’absence d’anesthésie des tissus mous limite fortement le risque de morsure.
Fig.8 : Anesthésie ostéocentrale (flèche) c- Anesthésie trans-corticale
Le principe est le même. Seul l’axe d’insertion différée, avec une orientation de l’aiguille à 90° de la table osseuse 1 à 5mm sous la ligne des collets.
Avant 7 ans, la pénétration osseuse ne nécessite pas de mise en rotation de l’aiguille, elle se fait par simple pression contre la table osseuse
Fig.9 : Anesthésie trans-corticale (flèche)
- Les clés de succès de l’anesthésie en odontologie pédiatrique
- Préparer l’enfant
En fonction de l’âge et de ses expériences passées, prévenir l’enfant de nos gestes en utilisant une terminologie non agressive et positive :
Pour un enfant très jeune :
« Je vais juste faire dormir ta dent en mettant une potion magique »
« Tu dois rester très tranquille ou la potion magique ne marchera pas »
« Ta lèvre va te sembler un peu bizarre ensuite comme toute molle » Pour un enfant plus âgé :
« Je vais juste injecter un peu de somnifère prés de ta dent »
« Tu vas peut-être sentir un petit pincement ou tu ne sentiras peut-être rien »
« Cela a un mauvais goût : tu pourras te rincer juste après
- Préparer le matériel :
-L’utilisation de seringues à usage unique donne un aspect rassurant.
-Réchauffement du produit : l’emploi d’un réchauffeur de cartouche reste assez rare au cabinet. Cependant, la douleur lors de l’injection est réduite en cas d’utilisation de produit réchauffé
- Mettre de l’anesthésie de contact
Appliquer sur la muqueuse sèche avec une boulette de coton pendant environ 2 mn. Prévenir l’enfant de « picotements » et sensations inhabituelles.
- Se positionner correctement et distraire l’enfant :
Tout l’art d’une bonne technique d’anesthésie locale réside dans la distraction. Pendant que le praticien se positionne discrètement pour effectuer l’anesthésie, et tout au long de l’injection, il faut parler avec l’enfant.
Fig. 10 : l’assistante passe la seringue au praticien discrètement (à gauche).
- Réalisation d’une injection lente :
Une vitesse de 1 mL/min est recommandée. Les premières gouttes doivent être injectées le plus lentement possible pour éviter une distension douloureuse des tissus.
- Eviter les goûts désagréables :
Les enfants détestent le goût amer des solutions anesthésiques.
Gardez toujours une pompe à salive près de votre seringue pendant l’injection et rincez immédiatement après l’injection.
- Avertir des suites post-opératoires éventuelles
Toujours prévenir les enfants et les parents des risques de morsures involontaires des tissus mous anesthésiés et des fourmis et picotements signant le retour à la normale.
Fig. 11 : morsures involontaires des tissus mous anesthésiés.
II- LA SEDATION CONSCIENTE
- Le mélange équimolaire d’oxygène (50%) et de protoxyde d’azote (50%) est utilisé depuis des décennies en tant qu’agent sédatif et anesthésique (MEOPA).
- Son absorption et son élimination sont exclusivement pulmonaire.
-Représente une alternative à l’anesthésie générale pour les personnes qui ne coopèrent pas suffisamment pour recevoir les soins dentaires à l’état vigile.
- Indications :
- Les jeunes enfants.
- Les enfants anxieux ou phobiques dans le contexte des soins dentaires.
- Les patients en situation de handicap.
- Contre-indications :
L es strictes contre-indications (CI) sont rares du fait de la pharmacocinétique du MEOPA. D’autres sont liées à ses conséquences métaboliques.
Si les soins nécessaires sont nombreux et/ou complexes, l’intérêt d’une seule séance de soins sous anesthésie générale doit être évalué.
- Méthode :
-l’inhalation par un masque est réalisée en 3 à 5min.
-L’effet sédatif attendu est une légère somnolence avec une relaxation musculaire, et parfois une légère euphorie.
- à la fin du soin, arrêter l’inhalation et surveiller la disparition de l’effet sédatif : 3 à 5 min.
-Donner des consignes postopératoires.
-Proposer un suivi.
III- ANESTHESIE GENERALE
La pratique de l’anesthésie générale connait actuellement un essor du fait que le malade et le praticien recherchent un maximum de rendement et d’efficacité dans les traitements dentaires, Elle permet d’exécuter en une seule séance un nombre important de soins.
- Indications pour les soins dentaires chez l’enfant
*Liées à l’état général du patient :
-Conditions empêchant tout traitement à l’état vigil au fauteuil
-Nécessité de mise en état buccal lourde et pressante avant thérapeutiques médico-chirurgicales spécifiques urgentes (ex : carcinologie, hématologie, cardiologie, greffe d’organe…)
-Réflexes nauséeux prononcés
*Liées à l’intervention :
-Interventions longues, complexes, regroupement de plusieurs actes en une même séance
- État infectieux locorégional nécessitant d’intervenir en urgence
* Liées à l’anesthésie locale
- Contre-indications avérées l’anesthésie locale
- Les contre-indications :
-Impossibilité d’examen médical et biologique préalable.
-Malades atteints de cardiopathies majeurs, d’infection pulmonaire.
-refus des parents.
-rapport bénéfice/risque défavorable
IV. SYNTHESE DES DIFFERENTES METHODES D’ANESTHESIE EN OP :
| État vigil : Anesthesie par infiltration | Sédation consciente par inhalation de MEOPA | Anesthésie générale | |
Indications | Prise en charge de l’enfant coopérant•Traitement d’urgence | Anxiété modérée à sévèrePatient porteur d’handicapPatient à risque médical pour lequel un état de stress put induire une décompensation | Remise en état rapide de la cavité buccaleImportante quantité de soins à réaliserContre-indication au MEOPA |
Contre- Indications | Absence totale de coopération | Contre-indications lies à l’administration du MEOPA (altération de la conscience, Hypertension intracrânienne, pneumothorax,intervention chirurgicale oculaire récente). | •Rapport bénéfice / risque défavorable |
Avantages | Prise en charge rapideAccessibilité du plateautechnique | Mise en place aiséeTechnique simple, efficaceet sûreRééducation comportementale | Réhabilitation buccodentaire globale en une séance |
Inconvénients et limites | En cas d’absence de coopérationLassitude due à la Répétitiondes séances | CoûtIndication limitée sibeaucoup de soins sont àréaliserEnfants de moins de 4 ans | Délais de prise en chargeAbsence de rééducation comportementale |
Conclusion
La pratique en pédodontie a très fortement bénéficié des progrès réalisés en anesthésiologie (découverte des produits et des techniques et la mise au point de dispositifs médicaux d’assistance à l’injection).
La prise en charge d’un enfant au cabinet dentaire peut nécessiter le recours à des techniques de sédation, voire à l’anesthésie générale. Mais la prise en charge à l’état vigile est recommandée.
ANESTHESIE EN ODONTOLOGIE PEDIATRIQUE
Voici une sélection de livres en français sur les prothèses dentaires:
Prothèse fixée, 2e Ed.: Approche clinique Relié – Illustré, 4 janvier 2024
Prothèse Amovible Partielle : Clinique et Laboratoire
Collège National des Enseignants en Prothèses Odontologiques (CNEPO), Michel Ruquet, Bruno Tavernier
Traitements Prothétiques et Implantaires de l’Édenté Total 2.0
Conception et Réalisation des Châssis en Prothèse Amovible Partielle
Prothèses supra-implantaires: Données et conceptions actuelles
Prothèse complète: Clinique et laboratoire Broché – Illustré, 12 octobre 2017
ANESTHESIE EN ODONTOLOGIE PEDIATRIQUE

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.

