Anesthésie chez l'enfant / Odontologie Pédiatrique

Anesthésie chez l’enfant / Odontologie Pédiatrique

Anesthésie chez l’enfant / Odontologie Pédiatrique

Introduction

La douleur associée à un traitement dentaire chez les enfants et les adolescents doit être évitée, surtout que la prévalence de la « peur du dentiste » est de 14,4 % déjà avant le début du traitement.

Les soins peuvent être réalisés sans douleur et avec moins d’anxiété par la réalisation d’une anesthésie locale, locorégionale ou générale.

L’anesthésie locorégionale permet d’éviter la transmission de la sensation de douleur pendant les procédures, ce qui peut servir à établir la confiance et à favoriser la relation entre le patient et le médecin dentiste, ainsi qu’à atténuer la peur et l’anxiété. Cependant, l’injection demeure la plus fréquente des peurs (74 %) chez l’enfant.

La prémédication psychologique est la clé qui permet de tenir compte au mieux des besoins réels des petits patients par une bonne communication qui doit être adaptée individuellement à chaque enfant.

Les particularités psychologiques chez l’enfant

Les particularités psychologiques de l’enfant demandent une prise en charge adaptée à chaque période de vie :

  • Âge < 6 mois : pas de peur des étrangers.
  • 6 mois – 4 ans : peur de la séparation.
  • 4 – 8 ans : comprend les explications, peur de l’intégrité corporelle.
  • 8 ans – adolescence : comprend les explications, bonne tolérance à la séparation, peut avoir peur que ça ne marche pas.

La préparation psychologique doit se tenir en utilisant des termes adaptés à l’âge et doit préciser très clairement comment, en cours du traitement, l’enfant pourra se manif Flux de signaler l’apparition d’événements particuliers ou la nécessité de faire une pause. Elle repose sur :

  • Une information honnête et sereine des parents sur les risques et les techniques proposées.
  • Création d’un climat de confiance avec l’enfant : information vraie et adaptée à son niveau de compréhension.
  • Il faut s’appuyer sur un document (fiche d’information, livre) qui pourra être lu et relu à domicile avec les parents.

L’information donnée systématiquement aux parents et à l’enfant fait partie de la prévention de l’anxiété périopératoire. Le médecin dentiste doit expliquer à l’enfant ce qui va se passer, ce qu’il va ressentir, et l’information doit se donner oralement et à travers des livrets, des films, des jeux de poupées, etc.

Autres techniques

Des moyens de distraction ont été évalués, tels que les clowns, l’hypnose ou les jeux vidéo. Différentes études rapportent une efficacité toute en réduisant l’anxiété préopératoire par rapport à une prémédication médicamenteuse.

Cependant, des travaux réalisés chez les enfants autistes, chez les adolescents et chez les multi-opérés montrent l’inefficacité des techniques de distraction, et concluent à la nécessité d’une prémédication médicamenteuse.

Prémédication médicamenteuse

La prémédication médicamenteuse est actuellement réservée pour les enfants très anxieux :

  • Les enfants de 2 à 6 ans ;
  • Les enfants de parents très anxieux ;
  • Les enfants timides, renfermés ou très dépendants de leurs parents ;
  • Les enfants qui ont déjà subi une ou plusieurs hospitalisations et/ou interventions antérieures (expérience négative).

Les particularités physiologiques pharmacologiques chez l’enfant

  • Les voies respiratoires supérieures sont de dimensions réduites, la langue volumineuse et les muqueuses fragiles, impliquent qu’on doit s’attendre à des difficultés respiratoires en cas d’œdème ou d’hémorragie.
  • Chez l’enfant de moins de 1 an, le risque de toxicité systémique est renforcé par des concentrations plasmatiques libres d’AL élevées en relation avec un taux constamment faible de protéines sériques. Ce risque est encore plus grand avant l’âge de 6 mois en raison de l’immaturité hépatique, surtout en cas de réinjections ou d’administration continue.
  • Il faut réduire les posologies d’AL chez l’enfant de moins de 2 ans en raison d’une fréquence cardiaque de base élevée qui augmente la toxicité cardiaque des AL.
  • La dose anesthésique est exprimée en mg/kg de poids corporel (PC).
  • Les concentrations employées doivent être plus faibles que chez l’adulte.
  • L’aminoamide représente la famille de choix chez l’enfant, cependant il n’a pas d’AMM avant 4 ans.

Les anesthésiques locaux et les adjuvants

Les anesthésiques locaux

Les anesthésiques locaux (AL) sont des agents qui bloquent de façon réversible la conduction nerveuse, par l’inhibition de la perméabilité membranaire aux ions sodiques, responsables ainsi de l’apparition d’un bloc sensitif, moteur voire un bloc sympathique, en fonction de la dose et la concentration utilisées.

On distingue deux grandes classes d’AL :

  • Les aminoesters (procaïne, chloroprocaine, tétracaïne), qui sont peu utilisés en Europe en dehors de l’utilisation en collyres en ophtalmologie.
  • Les aminoamides, avec des formes à délai d’action court (lidocaïne, prilocaïne, articaine) ou plus long (bupivacaïne, ropivacaïne et lévobupivacaïne).

Les adjuvants

Adrénaline

Il est possible de diminuer le risque toxique des AL d’action courte en utilisant des solutions adrénalinées à la concentration maximale de 5 μg/ml (1/200000ᵉ). L’association diminue la résorption systémique des AL de façon plus marquée pour les AL de courte durée d’action.

Contre-indications absolues aux vasoconstricteurs :
  • Il ne faut pas ajouter d’adrénaline aux AL pour réaliser un bloc qui intéresse une région dont la vascularisation artérielle est de type terminal ;
  • Patients porteurs d’un phéochromocytome (tumeur de la médullosurrénale) ;
  • Anesthésie intra-osseuse chez les patients arythmiques.
Précautions nécessaires lors de l’utilisation de vasoconstricteurs (adrénaline) :
  • Troubles du rythme cardiaque (sauf les bradycardies) ;
  • Insuffisance coronarienne ;
  • Hypertension artérielle sévère.

Amino-amides

LidocaïneMépivacaïneArticaine
CaractéristiquesVasodilatateur, d’où une perte d’efficacité et un risque de surdosage. De ce fait, souvent utilisé avec un vasoconstricteurSans action sur les vaisseaux, il peut être utilisé sans vasoconstricteur. Il est intéressant en cas d’allergie aux bisulfites
Dose maximale2,2 mg/kg sans dépasser la dose totale de 300 mg3 mg/kg sans dépasser la dose totale de 300 mg5 mg/kg sans dépasser la dose totale de 300 mg
Par cartouche1,8 mL de lidocaïne à 2 % (36 mg)1,8 mL de mépivacaïne à 3 % (54 mg)1,8 mL d’articaine à 4 % (72 mg)
VasoconstricteurAvec ou sansSansAvec ou sans
Poids corporel minimal pour l’utilisation d’une cartouche entière> 16,4 kg≥ 18 kg≥ 14,4 kg
Pour un enfant de 20 kg≤ 1,2 cartouche≤ 1,1 cartouche≤ 1,4 cartouche
Durée anesthésiePulpe : 5 à 10 min sans vasoconstricteur, et 60 min avec. Tissus mous : 3-5 hPulpe : 20-40 min sans vasoconstricteur, et 60 min avec. Tissus mous : 2-3 hPulpe : 60 min avec vasoconstricteur. Tissus mous : 3-6 h

Tableau 1 : Caractéristiques des anesthésiques locaux et adjuvants chez l’enfant

La sédation au cabinet dentaire

Il s’agit de l’utilisation de moyens, médicamenteux ou non, destinés à assurer le confort physique et psychique d’un malade soumis à une agression et destinés également à faciliter les techniques de soins.

Le patient est conscient, il garde ses réflexes de protection des voies aériennes intacts, les fonctions ventilatoires et cardiovasculaires sont maintenues et les mouvements oculaires sont normaux. Le médecin peut s’aider de scores pour l’évaluation du niveau de la sédation, surtout chez l’enfant. Le score de Ramsay est utilisé avec un objectif assuré entre les niveaux 2 et 3.

Tableau 3 : Scores de Ramsay pour évaluer le niveau de sédation

Pour la prémédication, l’objectif est d’assurer un niveau 2 à 3.

NiveauRéponse
1Malade anxieux, agité
2Malade coopérant, orienté et calme
3Malade répondant aux ordres
4Malade endormi mais avec une réponse nette à la stimulation de la glabelle ou à un bruit intense
5Malade endormi répondant faiblement aux stimulations ci-dessus
6Pas de réponse aux stimulations nociceptives

Ces protocoles peuvent être réalisés par le médecin dentiste au cabinet dentaire. Deux types de sédation peuvent être utilisées : orale ou par MEOPA (Mélange Équimolaire Oxygène/Protoxyde d’Azote), justifiant ainsi la diminution des doses des anesthésiques locaux.

La préparation d’un matériel de réanimation est obligatoire devant l’association d’une anesthésie inhalatoire ou intraveineuse.

Les techniques anesthésiques et conditions de réalisation

Le bloc anesthésique est réalisé en respectant les règles d’asepsie, avec la préparation d’un matériel adéquat :

  • Une radiographie est systématique avant toute anesthésie pour éliminer d’éventuelles contre-indications.
  • La réalisation d’une anesthésie de surface est toujours préférée pour diminuer l’inconfort lié à la pénétration de l’aiguille, avec respect d’un temps de contact d’au moins une minute.
  • Des aiguilles de 23 à 27 de diamètre doivent être utilisées pour les injections intrabuccales lorsque l’aspiration est nécessaire.
  • La dose des anesthésiques locaux doit être déterminée individuellement, en fonction de l’âge et du poids corporel de l’enfant :
    Dose limite de l’AL (mg/kg pc) × poids corporel de l’enfant (kg) / Concentration de l’AL (mg/ml) × 10
  • La dose maximale de la substance active de choix, l’articaïne, avec un additif vasoconstricteur, est de 7 mg/kg de poids corporel chez l’enfant à partir de 1 an, ce qui correspond à 0,125 ml/kg pc.
  • Les doses d’anesthésie locale doivent être réduites lorsqu’elles sont associées à des médicaments sédatifs (prémédication médicamenteuse).
  • Des instructions spécifiques doivent être données aux enfants, aux parents ou aux tuteurs pour éviter l’automutilation des tissus mous après la réalisation du geste.
  • Respecter toujours les contre-indications d’une anesthésie locale ou locorégionale.
  • Le matériel utilisé doit être adapté à l’âge et la technique anesthésique (voir Tableau 2).

Tableau 2 : Matériels utilisés en fonction de l’âge et la technique anesthésique

Avant 6 moisDe 6 mois à 3 ansDe 3 ans à 8 ansPlus de 8 ans
CaractéristiquesÉmail I, C et M1 en formationÉmail dents permanentes en formationFin formation émail M2 (7-8 ans). Corticales fines
Anesthésie par infiltration :
Sans vasoconstricteurPara-apicale¹Para-apicale¹Para-apicale¹Para-apicale¹ (maxillaire et mandibule uniquement dans secteurs antérieur et latéral). Tronculaire² (secteur postérieur mandibule)
Avec vasoconstricteur
Anesthésie intra-osseuse avec vasoconstricteur :
Sans rotationPossible à partir de 2 ans si os alvéolaire sain³,⁴Oui, si os alvéolaire sain³,⁴
Avec rotationOui si os alvéolaire sain³,⁴

¹ Aiguille 16-23 mm et Ø 0,3-0,4 mm
² Aiguille 23 mm et Ø 0,4 mm
³ Aiguille 8-12 mm et Ø 0,3-0,4 mm
⁴ Contre-indiquée si os alvéolaire rare ou absent

I : incisives permanentes ; C : canines permanentes ; M1 et M2 : 1ère et 2ème molaires permanentes.

Les contre-indications de l’AL et ALR

  • Patients sous anticoagulants (AVK, AOD) ou ayant un trouble de l’hémostase sévère (hémophilie sévère, insuffisance hépatocellulaire sévère, etc.).
  • Hypersensibilité aux anesthésiques locaux (ou un autre composant de la cartouche).
  • Troubles de la conduction auriculo-ventriculaire sévères et non appareillés.
  • Épilepsie non contrôlée par un traitement.
  • Porphyrie aiguë (contre-indication de l’articaïne, la mépivacaïne et la lidocaïne).

Conclusion

La prise en charge anesthésique chez l’enfant requiert des connaissances des particularités anatomophysiologiques, psychologiques de l’enfant ainsi que des compétences spécifiques afin de limiter les complications per- et post-opératoires.

Anesthésie chez l’enfant / Odontologie Pédiatrique

  La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.  

Anesthésie chez l’enfant / Odontologie Pédiatrique

Leave a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *