Anatomie et physiologie de l’appareil manducateur

Anatomie et physiologie de l’appareil manducateur 

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Anatomie et physiologie de l’appareil manducateur

Introduction

L’articulation temporo-mandibulaire (ATM) est une articulation unique, caractérisée comme une diarthrose bicondylienne. Elle met en relation le condyle mandibulaire avec la fosse mandibulaire de l’os temporal, par l’intermédiaire d’un fibrocartilage discal qui divise l’articulation en deux compartiments distincts.

Situations

L’ATM est localisée à la partie latérale de la face, en arrière du massif facial, sous la base du crâne. Elle se situe en avant et en dessous du conduit auditif externe, aux confins des régions suivantes :

  • Temporale en haut,
  • Massétérine en bas,
  • Parotidienne et auriculaire en arrière.

Limites

L’ATM appartient à la région condylienne, dont les limites inférieures sont fictives. Cette région est constituée du col et du condyle, formant l’extrémité postéro-supérieure de la branche montante de la mandibule. Elle est délimitée comme suit :

  • En dehors : par le tubercule zygomatique antérieur.
  • En avant : par le plan sous-temporal de la grande aile du sphénoïde.
  • En dedans : par la suture pétro-sphénoïdale.
  • En arrière : par la cavité glénoïde non articulaire.

Surfaces articulaires

Le condyle mandibulaire est en contact avec le disque articulaire, l’ensemble s’appuyant sur la paroi postérieure du tubercule articulaire de l’os temporal.

Surfaces temporales

Condyle temporal

Le condyle temporal est une saillie presque transversale, située en arrière, légèrement concave de dedans en dehors. Seul le tubercule articulaire est recouvert de cartilage.

Cavité glénoïde ou fosse mandibulaire

Non articulaire, cette cavité est fortement concave d’avant en arrière. Elle est située sur la face latérale de l’os temporal, juste en avant du méat acoustique externe (MAE). La scissure de Glaser la divise en deux parties :

  • Une partie antérieure articulaire,
  • Une partie postérieure non articulaire.

Surface mandibulaire

Condyle mandibulaire ou processus condylien

Supporté par un col, le condyle mandibulaire est une saillie ellipsoïde dont le grand axe horizontal est oblique en arrière et en dedans. Les axes des deux condyles mandibulaires se croisent sur la ligne médiane, formant un angle de 130 à 140°. Les surfaces articulaires sont recouvertes d’un tissu conjonctif fibrocartilagineux. Une crête mousse divise le condyle en deux versants :

  • Un versant antérieur, convexe, s’articulant avec son homologue temporal,
  • Un versant postérieur, formant le bord postérieur de la mandibule.
Col du condyle

Le col unit le condyle à la branche montante. Aplati d’avant en arrière, il présente deux faces : antérieure et postérieure. Sa portion antéro-interne est déprimée par une fossette irrégulière où s’insèrent le muscle ptérygoïdien latéral et l’aponévrose ptérygo-temporo-mandibulaire. La partie haute de la crête du col se termine par le tubercule médial.

Appareil discal

L’appareil discal, composé du disque et de ses attaches, englobe la tête du condyle mandibulaire. Le condyle et l’appareil discal forment un complexe appelé condylo-discal.

Le disque

Le disque est une lentille fibro-cartilagineuse biconcave, plus épaisse en arrière qu’en avant. Constitué d’un tissu fibreux collagénique dense, avasculaire et non innervé, il est souple mais inextensible. Il occupe l’espace entre les surfaces articulaires (condyle mandibulaire et cavité glénoïde), divisant l’articulation en deux compartiments :

  • Une zone temporo-méniscale (supra-discale),
  • Une zone méniscale-mandibulaire (infra-discale).

Le disque est divisé en trois zones topologiques :

  • La bande postérieure, la plus épaisse,
  • La zone intermédiaire,
  • La bande antérieure, plus mince.

Il est également subdivisé en trois parties : médiale, centrale et latérale.

La zone rétrodiscale bilaminaire

Également appelée tissu rétrodiscal ou lame bilaminaire, elle s’insère sur le bord postérieur du disque. Cette zone occupe l’espace entre le disque et le mur postérieur de la capsule articulaire. Elle est formée d’un tissu lâche riche en plexus veineux, appelé « coussin vasculaire de Zenker ».

La lame prédiscale

C’est une zone tendineuse richement vascularisée et innervée, recevant deux insertions musculaires :

  • Une insertion antéro-médiale, unique et horizontale, formée par les fibres du faisceau supérieur du muscle ptérygoïdien latéral (la plus importante),
  • Une insertion antéro-latérale, double et verticale, formée par des fibres du muscle temporal (en profondeur) et du muscle masséter (en superficie).

Les moyens d’union

Les surfaces articulaires sont maintenues en contact étroit principalement par la tonicité des muscles manducateurs et, de manière accessoire, par une capsule.

La capsule articulaire

La capsule articulaire est un manchon fibreux entourant l’articulation. Constituée de tissu conjonctif vascularisé et innervé, elle présente deux circonférences d’insertion :

  • Une supérieure, au niveau temporal,
  • Une inférieure, à la jonction col-condyle.

La synoviale

La synoviale tapisse la face profonde de la capsule. Il existe deux synoviales correspondant aux étages supra- et infra-discaux de l’articulation. Le liquide synovial lubrifie l’articulation, facilitant les mouvements, et assure les échanges métaboliques des tissus non vascularisés, comme le disque.

Les ligaments

Il existe deux types de ligaments selon leur position anatomique :

  • Ligaments intrinsèques (articulaires) :
  • Ligament collatéral latéral, principal moyen d’union,
  • Ligament collatéral médial.
  • Ligaments extrinsèques (extra-articulaires) : bandelettes fibreuses sans rôle dans la régulation des mouvements de l’ATM.

Les muscles de l’articulation temporo-mandibulaire

Les muscles masticateurs, agissant comme des ligaments actifs, assurent la stabilité de l’ATM par leur action symétrique dans les mouvements d’élévation, d’abaissement, de propulsion et de rétropulsion. Ils sont divisés en deux groupes :

Muscles élévateurs de la mandibule

  • Ptérygoïdien latéral,
  • Ptérygoïdien médial,
  • Masséter,
  • Temporal.

Muscles abaisseurs de la mandibule

  • Digastrique,
  • Mylo-hyoïdien,
  • Génio-hyoïdien,
  • Stylo-hyoïdien.

Vascularisation, innervation et lymphatiques

Vascularisation

La vascularisation de l’ATM est assurée par plusieurs artères, dont :

  • Temporale superficielle,
  • Temporale profonde moyenne,
  • Maxillaire,
  • Auriculaire postérieure,
  • Pharyngienne ascendante.

Innervation

L’ATM est innervée :

  • Sur le plan sensitif, par le nerf auriculo-temporal (rameau du nerf mandibulaire),
  • Sur le plan moteur, principalement par le nerf mandibulaire, et accessoirement par le nerf facial.

Lymphatiques

Les vaisseaux lymphatiques se drainent dans les ganglions parotidiens et prétragiens.

Rapports de l’ATM avec les structures du voisinage

  • Latéralement : recouverte par le fascia parotidien et la peau.
  • En avant : région ptérygo-mandibulaire, en rapport avec l’insertion du muscle ptérygoïdien latéral, le muscle masséter, le tendon du muscle temporal, les nerfs lingual et alvéolaire inférieur.
  • Médialement : en rapport avec l’espace infra-temporal.
  • En arrière : un prolongement parotidien peut s’interposer entre l’articulation et la paroi antérieure ostéo-cartilagineuse du méat.

Physiologie

La disposition anatomique de la mandibule par rapport à la base du crâne et au maxillaire définit deux types de rapports :

  • Rapports temporo-mandibulaires : dépendants des surfaces articulaires, déterminant une relation maxillo-mandibulaire.
  • Rapports inter-dentaires (occlusion).

Classification des mouvements

Mouvements selon le plan vertical et sagittal

Les mouvements d’abaissement et d’élévation de la mandibule, correspondant à l’ouverture et à la fermeture de la bouche, sont décrits par le diagramme de Posselt. Ces mouvements se déroulent en deux phases :

  • Phase initiale : rotation sur place des condyles mandibulaires autour de leur axe, limitée à environ 20 mm par l’étroitesse de la cavité glénoïde.
  • Phase secondaire : translation en avant des condyles, qui glissent en avant et en bas contre la pente condylienne temporale, se plaçant au-dessus du condyle temporal.

L’ouverture moyenne varie de 44 à 54 mm (over-bite inclus), soit environ l’épaisseur de trois doigts. L’amplitude de propulsion est de 10 à 15 mm, mesurée de l’occlusion d’intercuspidation maximale à la protrusion maximale (11 à 13 mm en normalité). Selon Farrar, le rapport entre les amplitudes de diduction et d’ouverture buccale est de 1/4.

Mouvements dans le sens horizontal et antéro-postérieur

Les mouvements de propulsion et de rétropulsion s’effectuent par translation simultanée des condyles mandibulaires en avant ou en arrière. Lors de la propulsion, les condyles glissent en avant et en bas contre la pente condylienne temporale, se positionnant sous les condyles temporaux.

Mouvements selon le plan horizontal et transversal

Les mouvements de diduction ou latéralité (arc gothique de Gysi) résultent de la combinaison de :

  • Translation en avant et en dedans du condyle controlatéral (condyle non travaillant),
  • Rotation passive du condyle homolatéral autour de son axe vertical (condyle travaillant), appelé mouvement de Bennett (environ 3 mm).

Le Collège National d’Occlusodontie (C.N.O) définit l’Occlusion de Relation Centrée (O.R.C) comme :
« La situation condylienne de référence la plus haute, réalisant une coaptation bilatérale condylo-disco-temporale, simultanée et transversalement stabilisée, suggérée et obtenue par contrôle non forcé, réitérative dans un temps donné et pour une posture corporelle donnée et enregistrable à partir d’un mouvement de rotation mandibulaire sans contact dentaire. »

Cette définition implique :

  • Une position condylienne « la plus haute » (et non la plus reculée) pour éviter un abaissement du condyle.
  • Une « coaptation » avec interposition et calage du disque, simultanée des deux côtés.
  • Un guidage non forcé, appris par des mouvements d’ouverture-fermeture en rotation.
  • Une reproductibilité (« réitérative »).
  • Une absence de contact dentaire pour ne pas influencer la position condylienne.

Cette définition s’applique uniquement à une ATM saine.

ATM et occlusion

  • Position de repos : la mandibule est légèrement abaissée ; le complexe condyle-disque est bloqué contre l’éminence articulaire du temporal, orienté antéro-supérieurement.
  • Position d’intercuspidation maximale : le disque est en plan oblique, bas et antérieur, entre l’éminence temporale et la tête condylienne.
  • Relation centrée : position de référence pour l’équilibre articulaire, caractérisée par une coaptation condylo-disco-temporale bilatérale, haute, simultanée, obtenue par rotation.
  • Courbes de compensation : courbe de Spee et courbe de Wilson.

Bilan diagnostic

Anamnèse

L’anamnèse est essentielle pour établir le diagnostic. Elle inclut :

  • Le moment d’apparition des symptômes (douleurs, souvent liées à des soins dentaires ou au stress),
  • Les caractéristiques des douleurs ou bruits articulaires,
  • Les antécédents personnels et familiaux, notamment ostéoarticulaires.

Tableau clinique

La sémiologie clinique est dominée par :

  • La douleur,
  • Des signes directs et indirects de perturbation de la dynamique articulaire,
  • Des manifestations secondaires (signes d’appel de pathologie articulaire).

La palpation explore minutieusement les structures articulaires et les muscles masticateurs. Les perturbations dynamiques sont évaluées par :

  • Inspection des mouvements mandibulaires,
  • Palpation des structures articulaires et musculaires.

Un examen endobuccal complète le bilan :

  • Étude des dents et de leur parodonte, à la recherche de lésions secondaires (troubles fonctionnels, surcharges occlusales),
  • Analyse gnathologique au repos et lors des mouvements, avec mesure précise de leur amplitude.

Imagerie temporo-mandibulaire

Orthopantomogramme

Visualise bilatéralement :

  • Les structures osseuses temporo-mandibulaires,
  • Les procès alvéolaires,
  • Les bases maxillaires,
  • Les dents.

L’interligne articulaire est cependant peu visible.

Radiographies spécifiques

  • Incidence de Schuller : explore les profils condyliens et l’espace interarticulaire. Limite : ne montre pas les régions latérales du condyle, souvent atteintes par des remaniements arthrosiques.
  • Téléradiographie de profil : superposition des deux côtés, peu informative.
  • Incidence face basse : visualise les deux condyles, utile pour détecter des asymétries.
  • Incidence de Hirtz : complémentaire dans certains cas.

Tomographies

Montrent l’état osseux. La position du disque est déduite par comparaison des images en bouche ouverte et fermée. Une injection de produit de contraste peut rendre le disque visible.

Arthrographie

Indiquée pour détecter :

  • Dysfonction disco-condylienne,
  • Lésions du disque.

Scanner

Visualise simultanément les éléments osseux et tissulaires, mais sans indication pour l’étude du système disco-ligamentaire. Il est utile pour évaluer les constituants osseux.

Tomographie volumique à faisceau conique (cone beam)

Avantages :

  • Faible irradiation,
  • Images précises, résolution supérieure à la TDM,
  • Reconstitutions 2D et 3D.

Imagerie par résonance magnétique (IRM)

Examen de choix, atraumatique et sans irradiation, pour visualiser :

  • Le disque et son environnement tissulaire,
  • L’état osseux avec une précision croissante.

Exploration scintigraphique

Utilise une injection de méthyldiphosphonate de technétium 99 (20 mCi) pour :

  • Évaluer la vascularisation immédiatement après injection,
  • Cartographier l’activité ostéoblastique trois heures plus tard (fixation du technétium aux cristaux d’hydroxyapatite).

Indiquée pour détecter précocement des altérations osseuses (inflammatoires ou tumorales, notamment métastatiques).

Arthroscopie

Utilise des arthroscopes de faible diamètre avec fibre optique et caméra pour observer en direct les structures articulaires.

Échographie

Requiert une sonde à haute fréquence (≥ 7,5 MHz). Le disque apparaît comme une image hypoéchogène bordée de liserés hyperéchogènes, au-dessus du condyle.

Tableau biologique

Cytobactériologie

La ponction articulaire est utile en cas d’arthrite septique :

  • Analyse bactériologique : souvent Staphylococcus aureus, mais aussi streptocoques, pneumocoques, coliformes, bactéroïdes.
  • Permet un lavage articulaire et l’injection de médicaments.

Cytoponction et biopsie synoviale

Informatives mais rarement utilisées en raison de la faible quantité de liquide synovial.

Examens biologiques non spécifiques

  • Vitesse de sédimentation (VS),
  • Protéine C-réactive (CRP),
  • Hémogramme,
  • Sérologies,
  • Urée, créatinine, glycémie.

Autres examens complémentaires

  • Axiographie : enregistre les mouvements condyliens en 3D, comparés dans l’espace et le temps.
  • Électromyographie (EMG) : analyse la symétrie des contractions musculaires et évalue la qualité des restaurations avant/après traitement.
  • Sonographie : enregistre les vibrations temporo-mandibulaires, trace leur évolution et précise leur chronologie par rapport aux mouvements.
  • Thermographie : détecte les variations de température cutanée, parfois liées à des anomalies sous-jacentes.
  • Analyseurs des contacts occlusaux : enregistrent la chronologie, la pression et la répartition des points de contact occlusaux, avec suivi de leur évolution.
  • Analyseur des mouvements mandibulaires (mandibulographie) : enregistre la cinématique mandibulaire via ondes ou champs magnétiques, captés par une antenne ou caméra, pour une représentation graphique (temps, vitesse, accélération).

Conclusion

L’articulation temporo-mandibulaire est une structure complexe, dont les éléments et le fonctionnement ne sont pas encore pleinement élucidés. Elle intègre un ensemble de systèmes neuromusculaires et articulaires, où la moindre pathologie peut entraîner des perturbations physiques, psychiques, voire esthétiques. Actuellement, son étude s’inscrit dans une approche plus globale, intégrant l’équilibre et la posture corporelle.


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