ADAPTATIONS THÉRAPEUTIQUES CHEZ LE SUJET ÂGÉ TRAITEMENTS PARODONTAUX
I-INTRODUCTION:
Le déclin de l’édentulisme résulte d’une augmentation du nombre des dents à risque pour des formes des parodontites modérées.
L’âge affecte le parodonte et induit des modifications structurales et physiologiques.
La prévalence et la sévérité de la maladie augmentent avec l’âge, mais il n’y a aucune évidence qui montre actuellement que la susceptibilité individuelle à la maladie parodontale et l’évolutivité des formes sévères augmentent avec l’âge.
L’âge perse ne constitue pas une contre-indication à l’une quelconque des différentes modalités du traitement parodontal.
Cependant, l’approche thérapeutique doit tenir compte de l’état général du patient, de ses capacités à maintenir une hygiène buccodentaire satisfaisante, de sa motivation, ainsi que de l’objectif thérapeutique.
- DÉFINITIONS:
Vieillissement :
Temps qui sépare la conception de la mort. Il regroupe le développement, la différenciation, la maturation et la sénescence.
Personne âgée :
L’OMS définit la personne âgée comme une personne âgée de plus de 60 ans.
- PARODONTE DU SUJET ÂGÉ :
Des modifications physiologiques liées à l’âge ont été décrites pour les différents tissus parodontaux :
- GENCIVE:
Sur le plan clinique, la gencive présente peu de modifications liées à l’âge. La hauteur de gencive attachée n’évolue plus après 45 ans.
Sur le plan histologique, l’effet du vieillissement sur l’épithélium se caractérise par une diminution de l’épaisseur de la couche cornée et de l’activité mitotique.
Quant à l’épithélium jonctionnel, il devrait se maintenir à la jonction amélocémentaire, sans migration, si la santé gingivale a pu être maintenue.
Au niveau du tissu conjonctif, les modifications les plus manifestes concernent le dépôt collagénique.
La densité des fibroblastes dans le tissu conjonctif supracrestal décroît avec l’âge.
Le taux de synthèse du collagène diminue et les fibres de collagène deviennent plus stables.
Le taux de conversion du collagène insoluble en collagène soluble augmente avec l’âge et la température de dénaturation est significativement plus élevée.
Ces changements pourraient expliquer la transformation du tissu conjonctif d’une texture fine en tissu dense.
On note aussi des modifications de la vascularisation, le nombre de micro vaisseaux gingivaux permettant un flux actif étant moins important et la vitesse du flux sanguin diminuant.
Gencive d’une personne âgée : Augmentation du volume gingival, apparition des récessions
- DESMODONTE:
En ce qui concerne les modifications de l’espace desmodontal liées au vieillissement, des observations contradictoires ont été publiées.
Des altérations de l’épaisseur du desmodonte ont été rapportées, mais elles semblent liées aux variations de la charge occlusale en fonction du nombre de dents résiduelles.
. Dans le cas d’une denture quasi complète, l’espace desmodontal serait diminué. En
revanche, au niveau des dents résiduelles chez les personnes partiellement édentées, l’espace desmodontal est élargi. Quant aux cellules, les modifications liées à l’âge comprennent une diminution de leur nombre et un ralentissement du turnover cellulaire.
Une étude récente montre que cette réduction affecte aussi les cellules pro-génitrices des tissus minéralisés, ce qui pourrait par ailleurs limiter le potentiel régénérateur du desmodonte « âgé »
.Les débris épithéliaux de Mallassez diminuent avec l’âge. Le desmodonte chez le jeune contient significativement plus de cellules épithéliales que celui du sujet âgé.
Par ailleurs, on observe une diminution du contenu des fibres de collagène mais sans changement de l’orientation des faisceaux, des calcifications sur et entre les fibres de collagène, une augmentation relative de la taille des espaces interstitiels, et une diminution de la vascularisation
Espace desmodontal rétrécit chez le sujet âgé denté Espace desmodontal élargi chez le sujet
Agé édenté partiel
- CÉMENT:
Son épaisseur s’accroît avec l’âge, par apposition de cément secondaire.
Le cément est plus épais du côté distal et au niveau du tiers apical de la racine, ceci étant considéré comme un mécanisme compensant l’éruption passive due à l’attrition dentaire.
L’hyper-cémentose est également liée à une activité fonctionnelle accrue.
Cément épais au niveau distal et apical
- OS ALVÉOLAIRE:
Il est sujet à des changements dus à l’âge, tout autant que le reste du squelette. La masse osseuse diminue progressivement, le nombre d’ostéoblastes et leur activité sont réduits, les proportions volumétriques du tissu adipeux, du tissu hématopoïétique, du tissu ostéoïde et de l’os trabéculaire sont modifiées. Le métabolisme osseux décroît et la balance entre les phénomènes de résorption et d’apposition est altérée en faveur des sites en résorption
La perte de l’os alvéolaire est liée à la perte dentaire, probablement à cause de la diminution de la fonction masticatoire. La diminution en hauteur et en épaisseur de l’os alvéolaire et interradiculaire est sujette à controverse. Elle semble être minime chez les personnes en bonne santé.
Cependant, les effets du vieillissement se distinguent difficilement des effets de l’ostéoporose, maladie fréquente chez les femmes après la ménopause.
Par ailleurs, la réduction de la masse osseuse de l’os ostéoporotique semble être corrélée avec la densité de l’os mandibulaire. Toutefois, quand la hauteur osseuse alvéolaire est calculée par rapport à la longueur radiculaire, on observe une diminution plus prononcée
chez les femmes de plus de 60 ans .
Il existe donc des modifications structurales des tissus parodontaux liées à l’âge.
Ces modifications peuvent affecter leurs propriétés fonctionnelles, mais il n’y a pas de données qui suggèrent qu’elles se traduisent obligatoirement par une perte d’attache et une lyse de l’os alvéolaire, donc par une perte critique du support parodontal.
Réduction de la masse osseuse avec l’âge Coupe histologique de l’os alvéolaire mandibulaire
humain (homme de 80 ans). Présence de tissu osseux (rose) et d’un tissu interstitiel comprenant
de nombreux adipocytes
- SÉNESCENCE ET MALADIE PARODONTALE:
La maladie parodontale est une maladie infectieuse qui détruit les tissus parodontaux. Elle résulte des interactions entre la plaque bactérienne et la réponse de l’hôte. On distingue des formes modérées et réversibles, comme la gingivite, et des formes destructrices du parodonte (parodontites).
Les symptômes comprennent l’inflammation gingivale, le saignement au sondage, la formation de poches parodontales, la migration apicale de l’attache épithéliale, la perte de l’os alvéolaire, la mobilité dentaire, et enfin la perte de l’organe dentaire. Les données actuelles suggèrent que la parodontite évolue, non pas de façon linéaire, mais par poussées aiguës successives, asynchrones.
On admettait jusqu’à présent une association étroite entre l’âge, la maladie parodontale et la perte dentaire, mais les études les plus récentes remettent en question ce concept en intégrant la présence de diverses formes de la maladie, l’utilisation de différents paramètres d’évaluation et les variations socioculturelles. Les études transversales montrent que la prévalence et la sévérité de la maladie parodontale augmentent avec l’âge .
- SUSCEPTIBILITÉ À LA MALADIE ET VIEILLISSEMENT :
Des études longitudinales prenant en compte l’évolution de la maladie au cours du temps sont peu nombreuses. En absence de traitement parodontal, la maladie évolue avec l’âge dans le cas de parodontite à progression rapide, mais pratiquement pas dans la parodontite chronique de l’adulte . Un taux annuel de destruction de l’os alvéolaire accru chez les sujets âgés de plus de 70 ans a été observé, mais notons que les facteurs systémiques et les problèmes de santé générale peuvent influencer la progression de la maladie . Chez les personnes âgées, les parodontites sont en effet des maladies à progression lente . Il n’y a aucune évidence qui montre actuellement que la susceptibilité individuelle à la maladie parodontale et l’évolutivité des formes sévères de la maladie augmentent avec l’âge .
L’âge peut donc être considéré uniquement comme un marqueur et non comme un facteur de risque en ce qui concerne la présence et la sévérité de la maladie parodontale
- IEILLISSEMENT ET FLORE PARODONTALE :
La flore bactérienne est l’agent étiologique des maladies parodontales et quelques particularités propres aux sujets âgés sont à noter. Des modifications quantitatives et qualitatives de la flore ont été décrites. Les dépôts de plaque supra gingivale sembleraient plus importants chez les sujets âgés. La composition de la flore cultivable sous-gingivale du parodonte sain est similaire à celle observée chez le sujet jeune.
Quant aux bactéries parodontopathogènes, il semble que leur prévalence et leur rôle changent avec l’âge. La prévalence et le nombre relatif d’Actinobacillus actinomycetomcomitans diminuent, tandis que ceux de Porphyromonas gingivalis augmentent.
Aucun changement n’a été noté pour Prevotella intermedia et Fusobacterium spirochètes.
Des sujets âgés présentent une prévalence plus importante de Pseudomonas et d’entérocoques. Les conditions environnementales changent avec l’âge (flux salivaire diminué par les médicaments, régime alimentaire mou, constat d’une diversité des surfaces due aux restaurations prothétiques, rétention alimentaire) et peuvent influencer l’adhérence et la croissance bactériennes.
Il est donc difficile de déterminer si les changements observés sont une conséquence directe du vieillissement physiologique ou le résultat de facteurs environnementaux .
- IEILLISSEMENT, RÉPONSE IMMUNITAIRE ET MALADIE PARODONTALE :
Le déclin avec l’âge du système immun est un phénomène bien caractérisé qui pourrait entraîner une diminution de la réponse aux bactéries parodontopathogènes.
Les altérations principales du système immun avec l’âge incluent le nombre et les rapports des cellules B, des cellules T activées ou non, les natural killers.
Des telles modifications ont été observées chez les sujets âgés atteints ou non de parodontopathies .
Par ailleurs, le taux élevé d’anticorps circulant anti-Porphyromonas gingivalis suggère que les personnes âgées sont capables de déclencher une réponse immune à immunoglobuline (Ig)G normale.
En effet, pour l’instant, aucune corrélation entre les altérations du système immunitaire associées au vieillissement et les maladies parodontales n’a été mise en évidence.
En conclusion, les données actuelles ne permettent pas de considérer la maladie parodontale comme une conséquence naturelle du vieillissement.
Parodontose associée à une PCHA chez une personne de 60 ans
- THÉRAPEUTIQUES PARODONTALES CHEZ LA PERSONNE ÂGÉE :
Le nombre de personnes âgées et l’espérance de vie augmentent, le nombre de patients édentés diminuent : le potentiel global de patients ayant besoin d’un traitement parodontal est donc en progression. D’autre part, les patients traités qui se trouvent en maintenance nécessitent un suivi plus strict en vieillissant .
En effet, indépendamment de l’âge, le but du traitement parodontal est d’éliminer ou de contrôler la gingivite et d’arrêter la progression des parodontites . L’âge per se ne constitue pas une contre indication à l’une quelconque des différentes modalités du traitement parodontal . Les facteurs à considérer sont l’objectif thérapeutique, l’état général du patient, ainsi que ses capacités à maintenir une hygiène buccodentaire satisfaisante. Les besoins et les souhaits du patient âgé sont particuliers et on doit en tenir compte.
En effet, 80 à 90 % des personnes âgées souffrent de maladies chroniques et constituent le groupe de la population qui consomme le plus de médicaments. Plusieurs types de médicaments, tels que les antihypertenseurs et les antidépresseurs, sont susceptibles d’entraîner une xérostomie qui rend le contrôle de la plaque difficile. Par ailleurs, les soins d’hygiène demandent aux personnes âgées un effort particulier, alors que la dextérité manuelle, l’acuité visuelle, la mobilité et la mémorisation peuvent être réduites. Ceci rend l’hygiène plus difficile et peut influencer la motivation du patient. En outre, l’apport glucidique accru favorise l’accumulation de la plaque et les prothèses amovibles entraînent des difficultés supplémentaires pour maintenir en bonne santé le parodonte des dents restantes
- TRAITEMENT NON CHIRURGICAL :
Le nettoyage fréquent et les instructions d’hygiène buccale constituent une approche thérapeutique appropriée pour les patients âgés . Une instrumentation adaptée, en particulier une brosse à dents électrique, l’usage du fil avec un port fil et les brossettes interdentaires facilitent le contrôle de la plaque bactérienne qui est particulièrement indiqué pour les restaurations prothétiques multiples .
La chlorhexidine peut être administrée aux patients qui présentent des difficultés à assurer une bonne hygiène buccodentaire . Le traitement des lésions avec poches modérées peut être envisagé par le biais de soins conservateurs . Dans ce cas, les difficultés thérapeutiques semblent être liées à une diminution du seuil de la douleur, ainsi qu’à la nécessité de séances courtes. En présence de xérostomie ou de maladies telles que les arthrites, la maladie d’Alzheimer ou la maladie de Parkinson, le suivi professionnel devra être effectué tous les 1 à2 mois .
NB :
-Certains types de médicaments, tels que les antihypertenseurs et les antidépresseurs, sont susceptibles d’entraîner une xérostomie qui rend le contrôle de la plaque difficile.
-Radiothérapie , diabète , aussi occasionnent l’hyposialie
– Hyperthyroïdie ,syndrome de Sjögren favorisent l’apparition de la xérostomie
C’est pour cela nous avons toujours recours à prescrire certains types de médicaments comme : les sialogogues: exemple : La pilocarpine qui stimule la production de la salive disponible
sous forme de CP comprimé (SALAGEN 5 mg ) ,la mastication de chewing-gum permet également de stimuler les glandes salivaires à secréter de la salive.
Aussi l’utilisation de l’huile d’olive, les bains de bouches BB riches en enzymes aide à humidifier la cavité buccale.
Patiente de 68 ans présentant une parodontite chronique de l’adulte avec une perte osseuse horizontale atteignant le tiers apical et des récessions gingivales multiples traitées par des soins conservateurs non chirurgicaux
Toutefois, lors du détartrage-surfaçage ,l’instrumentation doit être limitée pour préserver la surface la plus externe et les applications fluorées sont conseillées pour minimiser le risque de caries radiculaires. L’approche thérapeutique des récessions gingivales fréquentes chez les sujets du troisième âge dépend de la sensibilité radiculaire et de la demande esthétique du patient. Néanmoins, des modifications des techniques de brossage s’avèrent nécessaires.
- TRAITEMENT CHIRURGICAL :
Dans le cas de poches profondes, le traitement conservateur par détartrage-surfaçage peut
s’avérer insuffisant et un traitement chirurgical pour un débridement approprié ou pour assurer une morphologie gingivale qui facilite le contrôle de plaque peut être indiqué.
Les traitements chirurgicaux tels que la chirurgie osseuse, la régénération tissulaire guidée, les greffes osseuses et les implants peuvent être appliqués selon les indications, si l’état général du patient le permet (c’est-à-dire pas de contre-indications absolues).
L’âge perse du patient ne constitue pas une contre-indication à la chirurgie parodontale, les principes restant identiques, mais une approche plus conservatrice est préférée pour minimiser l’exposition de la surface radiculaire et le risque accru de caries radiculaires .
Dans le cas d’absence de gencive kératinisée, en particulier au niveau des dents supportant des crochets ou une prothèse fixée, une greffe gingivale peut être préconisée.
Il faut enfin noter que le facteur décisif pour le succès de la chirurgie parodontale reste le contrôle de la plaque bactérienne et le suivi professionnel.
Ceci exclut le traitement chirurgical chez le patient qui ne présente pas une hygiène adéquate, ce qui, malheureusement, est souvent le cas chez le patient âgé, pour les raisons que nous avons déjà évoquées.
- INCIDENCE DU VIEILLISSEMENT SUR LA CICATRISATION PARODONTALE:
Des modifications structurales ou fonctionnelles liées à l’âge incluent une diminution de l’activité fibroblastique, du taux de formation du collagène, ainsi qu’une altération du système microvasculaire .
Cependant, ces éléments en apparence défavorables ne semblent pas altérer outre mesure la réponse clinique.
Lors d’une gingivite expérimentale, la gencive cicatrise indépendamment de l’âge.
Dans le cas de parodontite modérée ou sévère, les résultats thérapeutiques après un traitement parodontal (chirurgical ou non) ne diffèrent pas chez les personnes âgées de plus de 60 ans .
L’âge ne semble pas non plus affecter la cicatrisation.
Ainsi, bien que le processus de cicatrisation soit plus lent chez les sujets âgés, des résultats très satisfaisants peuvent être attendus si les conditions optimales pour la réparation tissulaire (manipulation tissulaire atraumatique, contrôle de plaque) sont respectées.
- CONCLUSION
Le parodonte change avec l’âge mais la maladie parodontale ne devrait pas être considérée comme une conséquence naturelle du vieillissement.
De plus, l’âge du patient n’influence pas la réponse tissulaire au traitement parodontal et ne constitue pas une contre-indication à la chirurgie parodontale.
Cependant, l’approche thérapeutique doit tenir compte de certaines spécificités, telles que les difficultés de mise en pratique des mesures d’hygiène buccodentaire, les conditions particulières d’accumulation de plaque, les effets des thérapeutiques générales sur la flore et les tissus parodontaux ainsi que les contre indications d’ordre systémique à la chirurgie.
Un programme de maintenance plus strict, comportant des séances rapprochées de détartrage et de renforcement des mesures d’hygiène (entre 1 et 3 mois suivant les cas) assurera un meilleur contrôle de la progression de la maladie parodontale et la préservation d’une fonction et d’un confort masticatoires.
ADAPTATIONS THÉRAPEUTIQUES CHEZ LE SUJET ÂGÉ TRAITEMENTS PARODONTAUX
Voici une sélection de livres:
- Guide pratique de chirurgie parodontale Broché – 19 octobre 2011
- Parodontologie Broché – 19 septembre 1996
- MEDECINE ORALE ET CHIRURGIE ORALE PARODONTOLOGIE
- Parodontologie: Le contrôle du facteur bactérien par le practicien et par le patient
- Parodontologie clinique: Dentisterie implantaire, traitements et santé
- Parodontologie & Dentisterie implantaire : Volume 1
- Endodontie, prothese et parodontologie
- La parodontologie tout simplement Broché – Grand livre, 1 juillet 2020
- Parodontologie Relié – 1 novembre 2005
ADAPTATIONS THÉRAPEUTIQUES CHEZ LE SUJET ÂGÉ TRAITEMENTS PARODONTAUX

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.