Les adhésifs amélo-dentinaires
Introduction
Le collage s’est peu à peu imposé en odontologie comme un moyen efficace d’assurer la rétention de nos restaurations, tout en restant conservateur et esthétique. Cependant, pour répondre à la complexité du collage aux tissus dentaires, les matériaux à notre disposition évoluent sans cesse. De nouvelles colles sont apparues, avec des protocoles de mise en œuvre particuliers, afin de coller des matériaux eux aussi en perpétuel progrès. Il est très important pour le clinicien de comprendre parfaitement les mécanismes d’adhésion, les matériaux qui doivent être collés, les systèmes adhésifs dentaires et comment ils doivent être utilisés dans une situation clinique donnée.
L’obtention d’un collage fiable et durable en dentisterie nécessite une connaissance approfondie des caractéristiques des systèmes adhésifs amélo-dentinaires et des substrats (tissus dentaires, émail, dentine et résinaires).
1. Adhésion Amélo-Dentinaire
1.1. Définition de l’Adhésion
L’adhésion (ou adhérence) est définie comme l’union d’une surface à une autre avec laquelle elle est en contact intime. En dentisterie, il existe deux principales théories d’adhésion : micro-mécanique et chimique. La rétention micromécanique est l’explication la plus courante du mécanisme d’adhésion d’un matériau à la structure dentaire (émail et dentine).
1.1.1. Adhérence Micro-Mécanique

Cette forme d’adhésion est directement liée à la présence, sur la surface dentaire, d’irrégularités qui présentent des contre-dépouilles microscopiques. Le liquide adhésif peut pénétrer à l’intérieur de ces puits et, lorsqu’il durcit, il est maintenu en place grâce à ces contre-dépouilles microscopiques.
Théorie mécanique de l’adhésion selon Jean-François Roulet et Michel Degrange.
1.1.2. Liaison Hydrogène

L’atome d’hydrogène est une structure dipolaire qui peut former une liaison avec un autre atome dipolaire, réalisant ainsi des ponts hydrogène.
Selon Jean-François Roulet et Michel Degrange.
1.1.3. Liaison Ionique
Elle correspond au transfert d’un électron d’un atome à un autre lorsque les deux atomes en présence ont des électronégativités très différentes.
Selon Jean-François Roulet et Michel Degrange.
1.1.4. Liaison Covalente

Elle correspond à la mise en commun d’un ou de plusieurs doublets d’électrons au niveau de la couche électronique de covalence.
Selon Jean-François Roulet et Michel Degrange.
1.1.5. Paramètres Intervenant dans le Phénomène d’Adhésion
Énergie de Surface
L’énergie de surface mesure la façon dont les molécules d’un matériau sont attirées les unes par les autres et par les molécules d’autres matériaux, généralement mesurée avec une goutte d’eau. L’énergie de surface, et par conséquent les qualités adhésives d’un solide donné, peuvent être réduites par toute impureté de la surface. Plus l’énergie de surface est grande, plus la capacité d’adhérence est élevée.
Le Mouillage
Le mouillage désigne l’aptitude d’un liquide à occuper la plus grande surface possible lorsqu’il est déposé sur une surface solide. Il est difficile de forcer deux surfaces solides à adhérer. Pour surmonter cette difficulté, on utilise des liquides qui s’étalent entre les irrégularités des surfaces, assurant ainsi un contact sur la majeure partie de la surface solide. Si le liquide adhésif ne mouille pas la surface du fait de sa faible énergie, l’adhérence est négligeable ou inexistante.
Angle de Contact
Si les molécules de l’adhésif sont attirées par les molécules du substrat autant ou plus qu’elles le sont entre elles, l’adhésif liquide s’étalera complètement à la surface du solide et aucun angle ne se formera. Plus l’angle de contact est petit, plus l’adhésif est capable de remplir les irrégularités de la surface à adhérer. L’étalement du liquide n’est parfait que si l’angle de contact est nul.
1.2. Rappel sur les Substrats Dentinaires

1.2.1. L’Émail
L’émail est la partie externe de la couronne des dents. Cette substance d’origine épithéliale, qui recouvre la dentine, est la plus dure et la plus minéralisée de l’organisme. Elle présente une structure prismatique.
1.2.2. La Dentine
La dentine est un tissu d’origine ectomésenchymateuse, minéralisé, non vasculaire et sans innervation propre. Elle constitue la majeure partie de la dent, entourant la pulpe. Elle est revêtue par l’émail au niveau de la couronne et par le cément dans la racine. Elle est caractérisée par une unité métabolique.
1.2.3. La Boue Dentinaire

La boue dentinaire est une couche de débris organiques et minéraux résultant de la préparation d’une cavité dentaire.
Rôle :
- Diminution de l’énergie de surface.
- Nuit à l’étanchéité.
- Source de contamination septique des cavités préparées.
- Constitue une barrière contre l’invasion microbienne.
- Limite le flux sortant de fluide dentinaire susceptible de diminuer l’efficacité du collage.
Source : Jean-François Roulet et Michel Degrange.
1.3. Adhésion à l’Émail

Le collage à l’émail a été découvert dès 1955 par Buonocore. Le mordançage acide de l’émail aboutit à une surface rugueuse plus étendue avec une grande énergie de surface. Une telle surface :
- Facilite la mouillabilité.
- Augmente la rétention micromécanique.
- Réunit ainsi les critères pour un collage efficace.
1.4. Adhésion à la Dentine
L’adhésion à la dentine est plus complexe que celle à l’émail en raison :
- De l’hétérogénéité de ce tissu.
- De son caractère hydrophile.
- De la boue dentinaire présente à sa surface.
La clé de l’adhésion dentinaire réside dans la possibilité de pénétrer les tubuli dentinaires par l’adhésif (tags de résine) et par l’infiltration des fibres de collagène déminéralisées de la surface préparée, formant une couche hybride à la fois naturelle (collagène) et synthétique (résine).
2. Les Systèmes Adhésifs
2.1. Définition
Les adhésifs amélo-dentinaires sont des biomatériaux d’interface. Ils contribuent à former un lien idéalement adhérant et étanche entre les tissus dentaires calcifiés et les biomatériaux de restauration (principalement le composite). Les systèmes adhésifs sont constitués de différents agents appliqués successivement sur les surfaces dentaires. Leur utilisation est très souvent indispensable pour réaliser une interface dent-résine de collage cohérente et répondant aux impératifs posés par le collage.
2.2. Composition des Différents Systèmes Adhésifs

Les trois constituants clés des systèmes adhésifs amélo-dentinaires sont :
- Acide de mordançage : Gel d’acide orthophosphorique à 37 % appliqué sur l’émail et la dentine simultanément.
- Primaire ou primer : Monomères hydrophiles dissous dans des solvants organiques tels que l’eau, l’acétone ou l’éthanol.
Types de primaires :- Water-free primer.
- Water-based primer.
- Primaire de composition intermédiaire.
- Résine adhésive ou bonding : Agent d’interface contribuant à former un lien adhérant et étanche. Elle possède des propriétés hydrophobes représentées par le bisphénol A-glycidyl méthacrylate (BisGMA) et l’uréthane diméthacrylate (UDMA), auxquels s’ajoutent des régulateurs de viscosité comme le triéthylène glycol diméthacrylate (TEGDMA) et des agents de mouillabilité comme l’hydroxyéthyl méthacrylate (HEMA). Les monomères hydrophobes interagissent avec le matériau de restauration et copolymérisent.
Note : La résine possède également des propriétés hydrophiles pour augmenter la mouillabilité de la surface dentaire.
2.3. Critères des Différents Systèmes Adhésifs
Les critères des systèmes adhésifs incluent leur capacité à assurer une adhésion fiable, durable et étanche, ainsi que leur compatibilité avec les substrats dentaires et les matériaux de restauration.
2.4. Classification des Adhésifs
2.4.1. Classification selon le Principe d’Action (1999)
Selon la classification de Van Meerbeeck et coll., basée sur le mode de traitement de la boue dentinaire :
- Substrat : L’adhésif utilise les porosités renfermées.

- Modifiée : La boue dentinaire est sélectivement dissoute.

- Complètement éliminée : La boue dentinaire est entièrement retirée.

2.4.2. Classification selon la Stratégie Engagée
Les adhésifs dentaires sont classés en trois groupes principaux selon la stratégie utilisée :
- Mordançage et rinçage.
- Auto-mordançage.
- Approche verre ionomère modifié par résine.
2.5. Mécanisme d’Adhésion des Systèmes Adhésifs
2.5.1. Les Systèmes avec Mordançage Préalable et Rinçage (M&R)
Les M&R à 3 Étapes

Le mordançage : Application d’une solution ou d’un gel d’acide phosphorique (concentration de 30 % à 40 %) pendant 30 secondes sur l’émail et 15 secondes sur la dentine, suivie d’un rinçage et d’un séchage. La surface tissulaire devient poreuse, permettant un ancrage mécanique du primaire et/ou de l’adhésif.

Le primaire : Deuxième étape consistant à appliquer un mélange de solvants et de monomères entre les fibrilles de collagène pour réduire le collapsus du réseau organique et faciliter l’infiltration des monomères polymérisables. L’application du primaire doit être suivie d’un séchage court et doux pour volatiliser l’excès de solvant avant l’application de la résine adhésive.
La résine adhésive : Elle doit pénétrer les tubules dentinaires et s’infiltrer dans les réseaux collagéniques intertubulaires. Appliquée sur la dentine préparée par le primaire, la résine doit être polymérisée avant l’insertion du composite pour éviter tout déplacement.
Les M&R à 2 Étapes (MR2)
L’application se fait en deux étapes :
- Mordançage, rinçage et séchage.
- Application simultanée du primer et de l’adhésif, contenus dans une seule bouteille.
2.5.2. Les Systèmes Auto-Mordançants (SAM)
Les SAM à 2 Étapes (SAM 2)
Application en deux étapes :
- Application d’un primer acide, alternative à l’étape de mordançage acide, suivie d’un séchage.
- Application de l’adhésif.
Les SAM à 1 Étape (SAM 1)
Application en une seule étape. Le primer et l’adhésif sont soit dans deux flacons à mélanger, soit dans un seul flacon (adhésif all-in-one).
3. Adhésifs Universels
3.1. Définition
Apparus sur le marché depuis 2011, les adhésifs universels, également appelés multimodes, sont à la fois hydrophiles et hydrophobes. Conditionnés dans un seul flacon sans mélange préalable, ils peuvent être utilisés comme :
- M&R (mordançage et rinçage).
- SAM (auto-mordançage).
Ils sont adaptés aux restaurations directes et indirectes et peuvent être utilisés comme amorce adhésive sur des matériaux comme la zircone, les métaux nobles et non précieux, les composites et divers types de céramiques à base de silice.
3.2. Composition
La composition des adhésifs universels varie selon leur pH et les monomères utilisés, combinant des propriétés hydrophiles et hydrophobes pour une compatibilité avec divers substrats.
3.3. Les Adhésifs Universels Disponibles sur le Marché
Les adhésifs universels sont classés en fonction de leur pH :
- Fort (Strong) : pH < 1.
- Intermédiaire fort (Intermediate Strong) : pH = 1,5.
- Doux (Mild) : pH entre 2 et 2,5.
- Ultra-doux (Ultra-mild) : pH > 2,5.
Exemples :
- G-Premio Bond : Intermédiaire fort, pH = 1,5.

- Futura Bond U : Doux, pH = 2,3.

- OptiBond Universal : Ultra-doux, pH = 2,5-3,0.

- All-Bond Universal : Ultra-doux, pH = 3,1-3,2.

- Scotchbond Universal (3M) : Ultra-doux, pH = 2,7.

3.4. Quelle est la Meilleure Stratégie : Auto-Mordançage ou Mordançage Préalable ?
Les performances des adhésifs universels dépendent de leur pH et du substrat sur lequel ils sont appliqués (émail ou dentine).
3.4.1. L’Adhésion à l’Émail
Quel que soit le pH de l’adhésif, la force d’adhérence à l’émail est améliorée par un mordançage préalable à l’acide phosphorique. Cette technique reste la meilleure stratégie, car elle produit des macro- et microporosités sur la surface de l’émail, permettant aux monomères de résine de s’infiltrer et de former des prismes après polymérisation.
En revanche, les adhésifs auto-mordançants sont incapables de mordre l’émail à la même profondeur que l’acide phosphorique, ce qui entraîne une plus faible résistance de l’émail. Un mordançage sélectif de l’émail avec de l’acide phosphorique est nécessaire pour une adhésion micro-mécanique maximale.
3.4.2. L’Adhésion à la Dentine
Les preuves in vitro suggèrent que la force d’adhésion à la dentine des adhésifs universels dépend de leur pH.
- Les adhésifs universels doux (« Mild », pH entre 2 et 2,5) peuvent améliorer leurs performances d’adhésion in vitro avec un mordançage sélectif, mais ils restent stables dans les techniques SAM et M&R.
- Les adhésifs ultra-doux (« Ultra-mild », pH > 2,5) et intermédiaires forts (pH = 1,5) doivent être appliqués en SAM sur la dentine.
Conclusion
Le choix d’un système adhésif adapté au cas clinique représente un réel défi pour les praticiens, d’où la nécessité d’une connaissance approfondie des caractéristiques, de la spécificité et de l’efficacité de ces adhésifs. Actuellement, les adhésifs universels apparaissent comme une solution de choix dans un cabinet dentaire moderne.
Les adhésifs amélo-dentinaires
La prévention des caries repose sur une hygiène bucco-dentaire rigoureuse et des visites régulières chez le dentiste. La maîtrise des techniques d’anesthésie locale est essentielle pour assurer le confort du patient lors des soins. L’imagerie dentaire, comme la radiographie panoramique, permet un diagnostic précis des pathologies buccales. Les étudiants doivent comprendre l’importance de la stérilisation pour prévenir les infections croisées en cabinet. La restauration dentaire, comme les composites ou les couronnes, exige une précision technique et un sens esthétique. Les praticiens doivent rester informés des avancées en implantologie pour proposer des solutions modernes aux patients. Une communication claire avec le patient renforce sa confiance et favorise l’adhésion au plan de traitement.
Les adhésifs amélo-dentinaires

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.