Parodontites selon la classification d'Armitage

Parodontites selon la classification d’Armitage

Parodontites selon la classification d’Armitage

Introduction

Les maladies parodontales sont des pathologies plurifactorielles très complexes, de par leurs facteurs modifiants et aggravants. Ces maladies peuvent être schématiquement divisées en deux grands groupes :

  • Gingivites
  • Parodontites

Dans ce cours, seront abordées les caractéristiques des parodontites selon la classification d’Armitage (1999), en se concentrant sur les parodontites chroniques et agressives.


1. Définition des parodontites

Les parodontites sont des maladies irréversibles, inflammatoires, d’origine bactérienne, affectant les tissus du parodonte superficiel et profond. Elles se caractérisent par :

  • Des signes cliniques inflammatoires (rougeur, œdème, saignement provoqué et/ou spontané, etc.) ;
  • Une migration apicale de l’attache épithéliale (perte d’attache, donc formation d’une poche parodontale) ;
  • Une lyse osseuse (visible radiologiquement).

2. Formes cliniques des parodontites

Dans la classification d’Armitage (1999), les parodontites sont regroupées en :

  1. Parodontites chroniques
  2. Parodontites agressives
  3. Parodontites manifestations de maladies systémiques

3. Parodontites chroniques

3.1. Définition

  • La parodontite chronique représente la forme la plus fréquente des parodontites, constituant 95 % des cas.
  • C’est une pathologie qui progresse lentement.
  • Sa prévalence est majeure chez l’adulte, mais elle peut survenir chez les enfants et les adolescents.
  • C’est une pathologie plurifactorielle induite par les micro-organismes (bactéries parodontopathogènes) contenus dans le biofilm dentaire.
  • En l’absence de traitement, son évolution peut conduire à la perte de la dent.

3.2. Caractéristiques

  • Présence de signes cliniques inflammatoires variables.
  • Flore microbienne variable (polymorphe), principalement composée de bactéries anaérobies.
  • Présence modérée à élevée et fréquente de plaque et de tartre sous-gingival.
  • La sévérité de l’atteinte est associée à des facteurs locaux.
  • Association à des facteurs aggravants locaux (anatomiques ou iatrogènes).
  • Association à des facteurs environnementaux comme le tabagisme et la résistance au stress.
  • Association à des facteurs modifiants généraux comme le diabète.
  • Une corrélation entre la quantité de biofilm bactérien, les facteurs favorisants (tartre, caries, malpositions dentaires, etc.), les facteurs aggravants et environnementaux (diabète, anémie, SIDA, tabac, stress, etc.) et la sévérité de l’atteinte.
  • Progression globalement lente, mais pouvant présenter des épisodes de destruction rapide.
  • Radiologiquement, la lyse osseuse est majoritairement de type horizontal et progresse lentement.
  • Absence de susceptibilité familiale.
  • Absence de dysfonction immunitaire.

3.3. Classification

Les parodontites chroniques sont classées selon :

  1. Étendue :
    • Localisées : moins de 30 % des sites atteints (fig. 01).
    • Généralisées : 30 % ou plus des sites atteints (fig. 02).
  2. Sévérité :
    • Parodontite légère (débutante) : poches < 5 mm, perte d’attache entre 1 et 2 mm, lyse osseuse au tiers cervical de la racine.
    • Parodontite modérée : poches entre 5 et 6 mm, perte d’attache entre 3 et 4 mm, lyse osseuse au tiers moyen de la racine.
    • Parodontite sévère : poches > 6 mm, perte d’attache ≥ 5 mm, lyse osseuse au tiers apical de la racine.

3.4. Thérapeutique

Le traitement des parodontites chroniques repose essentiellement sur la diminution immédiate et durable de la charge globale des micro-organismes grâce à :

  • Une motivation à l’hygiène bucco-dentaire : contrôle de plaque individuel mécanique (brossage dentaire) et chimique (dentifrices) au quotidien.
  • Une élimination mécanique professionnelle de la plaque dentaire : traitement non chirurgical (détartrage supra- et sous-gingival, surfaçage radiculaire et polissage).
  • La maîtrise des facteurs/indicateurs de risque environnementaux (tabagisme, diabète non/mal équilibré, etc.) et locaux (édentements, malpositions dentaires, etc.), indispensable à la réussite à long terme du traitement.
  • Un traitement chirurgical peut être nécessaire selon la sévérité de la parodontite (curetage gingival, lambeaux d’assainissement, etc.).
  • Le suivi parodontal et le contrôle de plaque quotidien sont indispensables pour éviter les récidives (maintenance parodontale).

4. Parodontites agressives

4.1. Définition

  • Les parodontites agressives sont des affections caractérisées par des pertes d’attache et des lyses osseuses rapides, conduisant à des mobilités dentaires importantes et à une perte précoce des dents. Elles provoquent un préjudice esthétique, fonctionnel et psychologique, surtout chez les patients jeunes.
  • Elles représentent une entité spécifique distincte de la parodontite chronique, n’affectant qu’une faible proportion de la population (11 à 16 %).

4.2. Caractéristiques des parodontites agressives

4.2.1. Caractéristiques constantes

  • Elles apparaissent le plus souvent chez les sujets jeunes, mais peuvent être rencontrées chez les adultes.
  • Les patients sont en bonne santé.
  • Présence d’une composante familiale (certaines familles sont génétiquement prédisposées à développer des formes de parodontites agressives).
  • Perte d’attache et destruction osseuse rapides.

2. Caractéristiques des parodontites

  • Elles peuvent être localisées ou généralisées.

2.2. Caractéristiques inconstantes :

  • Inadéquation entre l’importance de la plaque et la sévérité de la destruction tissulaire ;
  • Présence d’anomalies de la fonction phagocytaire ;
  • La flore microbienne riche en Actinobacillus actinomycetemcomitans (A.a) et Porphyromonas gingivalis (P.g) ;
  • Arrêt spontané possible de la destruction osseuse.

3. Classification des parodontites agressives

3.1. Les parodontites agressives localisées (PAL)

a. Sur le plan clinique :

  • Âge de survenue aux alentours de la puberté, bien que souvent diagnostiquée beaucoup plus tardivement en raison de ses manifestations cliniques discrètes.
  • Inadéquation entre la rapidité d’évolution, l’importance de la destruction osseuse, le peu de biofilm présent et la discrétion de la réaction inflammatoire.
  • Localisation spécifique au niveau des premières molaires et des incisives, avec une perte d’attache sur au plus 2 dents supplémentaires.
  • Malgré une inflammation gingivale discrète, le taux des pertes d’attache peut être égal ou supérieur à 5 mm.
  • Le tartre sous-gingival n’est pas systématiquement présent, mais la plaque microbienne, même en faible quantité, est toujours observée sur les surfaces radiculaires exposées à la maladie.

b. Sur le plan radiologique :

  • La PAL est caractérisée par des lyses osseuses angulaires, souvent bilatérales et symétriques, donnant à la radiographie un aspect qualifié d’image en miroir.

c. Sur le plan microbiologique :

  • Les germes incriminés dans cette forme de parodontite sont représentés par Actinobacillus actinomycetemcomitans (renommé Aggregatibacter actinomycetemcomitans, abrégé A.a).
  • A.a possède plusieurs facteurs de virulence qui en font une bactérie à fort potentiel pathogène.
  • Leur effet principal est dirigé contre les leucocytes, en particulier les polymorphonucléaires neutrophiles (PMN), par :
    • Formation de pores dans leur membrane, induisant l’apoptose des PMN ;
    • Effet similaire sur les monocytes et certaines sous-populations de lymphocytes (capacité de les détruire).

3.2. Les parodontites agressives généralisées (PAG)

a. Sur le plan clinique :

  • Elle affecte habituellement des patients de moins de 30 ans, mais qui peuvent également être plus âgés.
  • La perte d’attache et les destructions osseuses sont prononcées ; les dents deviennent mobiles et peuvent, dans les stades terminaux, être expulsées spontanément.
  • Présence d’une perte d’attache interproximale généralisée, affectant au moins 3 dents permanentes autres que les incisives et les premières molaires.

b. Sur le plan radiologique :

  • La PAG est caractérisée par des lyses osseuses angulaires généralisées, nettement visibles à la radiographie, souvent associées à des lésions osseuses inter-radiculaires.

c. Sur le plan microbiologique :

  • La flore microbienne des PAG est plus complexe que celle de la PAL ; elle est essentiellement dominée par une association de :
    • Porphyromonas gingivalis (P.g) ;
    • Autres espèces bactériennes Gram-négatives telles que Prevotella intermedia (P. intermedia), Fusobacterium nucleatum (F. nucleatum), Capnocytophaga.
  • Elle dispose de plusieurs facteurs de virulence, dont :
    • Les adhésines ;
    • Le LPS (Lipopolysaccharide).

4. Traitement des parodontites agressives

4.1. Thérapeutique d’urgence

  • Nécessaire si le patient présente une mobilité dentaire importante gênant la fonction et la phonation.
  • Une contention d’urgence sera réalisée.

4.2. Thérapeutique initiale

1. Éducation et motivation à l’hygiène :

  • Dans les PAL, la quantité d’irritants locaux n’est pas en rapport avec l’importance de la destruction parodontale.
  • Cependant, il est nécessaire de les éliminer, même s’ils sont en faible quantité.

2. Traitement mécanique non chirurgical :

  • Le traitement mécanique vise une modification de la composition de la flore sous-gingivale, et non pas seulement la réduction de sa quantité.
  • Contrairement au traitement des parodontites chroniques (surtout mécanique), celui des parodontites agressives nécessite systématiquement l’association du traitement mécanique (détartrage, surfaçage) et chimique (antibiotiques, antiseptiques).
  • On commence par le traitement mécanique, car il est nécessaire pour la désorganisation du biofilm, permettant une pénétration maximale et donc une efficacité optimale des antibiotiques.

3. Traitement chimique :

a. Les antibiotiques :
  • L’antibiothérapie est un complément du traitement mécanique ; elle ne peut se concevoir qu’après la désorganisation du biofilm sous-gingival pour permettre la pénétration de la molécule.
  • Les parodontopathogènes tels que A.a et P.g sont difficiles à éliminer par détartrage-surfaçage radiculaire (DSR). Ces bactéries persistent au sein de la paroi conjonctive gingivale de la poche parodontale après surfaçage ; il est donc légitime de prescrire des antibiotiques pour achever leur éradication.
  • Note : Les effets de l’antibiothérapie durent environ 3 mois. Il n’est pas recommandé de la répéter pendant cette période sous peine de favoriser les résistances.
Schéma d’antibiotiques administrés par voie générale (selon AFSSAPS 2011) :
Type de parodontiteAntibiotique et posologie
Parodontite agressive localiséeDoxycycline : 200 mg/jour en une prise (midi ou soir, pendant le repas, au plus tard 1h avant coucher). <br> En dessous de 60 kg : 200 mg le 1er jour, puis 100 mg les jours suivants. <br> Durée : 14 jours.
Parodontite agressive localisée ou généraliséeAmoxicilline : 1,5 g/jour en 3 prises ou 2 g/jour en 2 prises + Métronidazole : 1500 mg/jour en 2 ou 3 prises. <br> En cas d’allergie aux pénicillines : Métronidazole : 1500 mg/jour en 2 ou 3 prises. <br> Durée : 7 jours.
Traitement chimique par voie locale :
  • L’antibiotique est délivré localement, son action cible directement les bactéries de la poche.
  • Les irrigations sont réalisées avec :
    • Micropipettes ;
    • Seringues à pointe mousse ;
    • Hydropulseur à embout muni d’une aiguille à pointe mousse.
  • Ces méthodes permettent d’atteindre la limite apicale des poches profondes (Hardy et coll.).
  • Exemples : Gel de Métronidazole ou fibres de tétracyclines.
b. Les antiseptiques :
  • Chlorhexidine (CHL) :
    • Composé le plus employé grâce à son action antibactérienne et anti-inflammatoire, ainsi que son effet de rémanence.
    • Utilisée sous forme de :
      • Bain de bouche (ex. Cariax, Eludril) ;
      • Irrigation sous-gingivale.
    • L’irrigation sous-gingivale de chlorhexidine améliore l’efficacité du traitement parodontal.

4.3. Le traitement correctif :

  • Il survient après la réévaluation qui se fait souvent 3 mois après la fin de la phase initiale.
  • Cette étape de traitement permet de réaliser des corrections anatomiques visant à stabiliser et à améliorer les résultats obtenus lors de la phase non chirurgicale, elle comporte :
    $\checkmark$ Les traitements chirurgicaux (lambeaux d’assainissement)
    $\checkmark$ La réhabilitation occlusale qui comprend :
    $\rightarrow$ Traitement orthodontique des malpositions et des migrations secondaires
    $\rightarrow$ La contention semi définitive ou définitive des dents mobiles.
    $\rightarrow$ La prothèse définitive.

4.4. La maintenance :

  • La maintenance, suivi post-opératoire à proprement dit, est une forme d’extension des thérapeutiques parodontales.
  • Elle implique, à la fois, une réévaluation continue de l’état parodontal et un traitement prophylactique permettant de détecter précocement les récidives de la lésion.
  • Elle est considérée comme une étape très importante dans les parodontites agressives.
    $\checkmark$ Maintenance personnelle.
    $\checkmark$ Maintenance professionnelle.

N.B :
Le sondage parodontal de dépistage limité aux incisives et aux premières molaires est une méthode spécifique pour identifier une parodontite agressive.


Conclusion :

La connaissance des caractéristiques des différents types de parodontites est une nécessité absolue pour tout praticien, afin de pouvoir poser le bon diagnostic et par conséquence planifier une thérapeutique correcte et adéquate ou au moins une orientation correcte.

Bibliographie :

  • Philippe Bouchard,
    Chapitre 14 : parodontites chroniques, 103-107
    Chapitre 15 : parodontites agressives, 108-114
    Parodontologie et dentisterie implantaire vol 1, 2015

Parodontites selon la classification d’Armitage

  Une occlusion équilibrée est cruciale pour la fonction masticatoire et la santé articulaire.
Le contrôle de la plaque dentaire reste la meilleure prévention contre les gingivites.
L’empreinte numérique transforme les workflows en prothèse et orthodontie.
Un bon éclairage opératoire améliore la précision des préparations cavitaires.
L’occlusion influence la mastication et l’équilibre de l’articulation temporo-mandibulaire.
L’analyse du sourire guide les traitements esthétiques antérieurs.
La gestion du stress pré-opératoire fait partie intégrante de la prise en charge.
 

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