DIAGNOSTIC EN PARODONTIE
- Introduction :
Le traitement de toute pathologie parodontale nécessite l’établissement d’un diagnostic précis et exact. Ce dernier est conditionné en grande partie par un examen clinique rigoureux du malade en suivant un ordre chronologique.
Il se présente comme la déduction de l’examen clinique et de l’étude des différents examens complémentaires ; ce diagnostic établi ainsi que la démarche thérapeutique influencent le choix du pronostic.
- Définition du diagnostic :
Il vient du mot grec « diagnôsis » qui signifie à la fois discernement et décision.
Il s’agit donc d’acquérir la connaissance à travers les signes observables et le raisonnement menant à l’identification de la cause (l’origine) d’une défaillance, d’un problème ou d’une maladie, ou tout simplement à la détermination d’une espèce biologique par rapport à une autre.
De la qualité de cette étape de l’acte médical, dépend étroitement la cohérence des examens et des traitements.
Tous les éléments recueillis dans l’examen clinique et les examens complémentaires vont nous permettre de poser un diagnostic précis dont va dépendre le plan de traitement.
- Moyens de diagnostic :
- Examen clinique :
Le diagnostic des maladies parodontales est évoqué initialement en présence de signes cliniques.
Le diagnostic de gingivite est établi en présence de signes cliniques de rougeur, œdème, de saignement au sondage sans perte d’attache.
Le diagnostic de parodontite est établi en présence de perte d’attache qui constitue le signe pathognomonique.
- Examen radiologique :
C’est un examen complémentaire incontournable, indispensable pour confirmer le diagnostic déjà posé par l’examen clinique.
La radiographie panoramique permet :
- Une visualisation globale de l’état osseux ;
- Elle n‘a que de peu de valeur en présence de légers changements du niveau osseux car elle ne permet pas de détecter les petites pertes osseuses.
Donc elle n’est pas beaucoup recommandée pour le diagnostic des maladies parodontales.
Le praticien procédera à l’interprétation du bilan radiologique en répondant aux questions suivantes :
- Les pertes osseuses sont-elles localisées ou généralisée ?
- Les pertes osseuses sont-elles verticales ou horizontales ?
- La lamina dura est-elle présente ?
- Existe-t-il des cratères inter proximaux ?
- Existe-t-il des images radiologiques d’atteinte des espaces inter-radiculaires ?
- Examen microbiologique :
L’étiologie bactérienne des maladies parodontales amène à mettre l’accent sur l’importance des examens microbiologiques dans le diagnostic et le traitement de ces pathologies.
Cet examen est reconnu indispensable dans certaines situations pour détecter et /ou quantifier la présence de certaines bactéries suspectées pathogènes particulièrement dans le diagnostic des parodontites agressives.
Donc l’information microbiologique est devenue un outil de valeur dans la pratique parodontale actuelle.
- Marqueurs biologiques :
Le dosage des marqueurs biologiques de la maladie parodontale dans le fluide gingival, pourrait avoir un intérêt diagnostique et/ou pronostique. Ils restent encore du domaine de la recherche clinique.
- Diagnostic étiologique : (voir le cours sur l’étiologie des maladies parodontales)
C’est la partie du diagnostic qui vise à la recherche des diverses causes de la maladie parodontale.
Une partie essentielle de l’examen consiste à déterminer les facteurs étiologiques des parodontopathies, ceci ne sert pas seulement à parvenir à un diagnostic positif et un pronostic, mais aussi à souligner les problèmes qui doivent être supprimés pour que la maladie soit traitée.
Il détermine la part plus ou moins prépondérante des différentes étiologies possibles ; il est certainement le plus difficile ; et il demande une certaine expérience sinon un sens clinique développé.
Les principales causes de la maladie parodontale étaient décrites en 1936 par Weski sous forme de triade :
- Etiologie locale :
- Facteurs locaux directs :
- Facteur local direct déclenchant :
C’est la plaque bactérienne, que l’on peut objectiver à l’aide des révélateurs de plaque ou d’une sonde. Elle est définie comme un dépôt mou, amorphe adhérent aux structures sous-jacentes et dans la poche, constituée essentiellement de bactéries reliées par une matrice extracellulaire. Il est admis que la plaque bactérienne peut exercer son effet pathogène grâce aux enzymes, toxines et antigènes qu’elle libère.
Il faut ajouter la notion de spécificité bactérienne, car certaines maladies parodontales peuvent être provoquées par des germes spécifiques.
- Facteurs locaux directs favorisants :
Ce sont les facteurs de rétention qui créent des conditions favorables à l’accumulation de la plaque bactérienne et à la maturation et au développement d’une flore pathogène.
Parmi ces facteurs on peut citer :
Tartre, caries dentaires cervicales et proximales, malpositions dentaires, diastèmes, insertion pathologique des freins et des brides, vestibule peu profond, respiration buccale, prothèse fixe iatrogène qui ne respecte pas l’espace biologique, mauvais ajustement de prothèse partielle amovible, appareil d’ODF, obturation débordante ou mal polie, fêlures, fractures intéressant le 1/3 cervical de la couronne.
- Facteurs locaux indirects :
Ce sont tous les facteurs qui peuvent entraîner un traumatisme occlusal (malocclusions, mastication unilatérale, déglutition atypique, parafonctions, mauvais tics).
Les forces qui ne sont pas correctement transmises au niveau du parodonte agissent en aggravant l’inflammation présente en modifiant le trajet inflammatoire et provoquent une destruction osseuse angulaire.
- Etiologie générale : (voir le cours sur maladies parodontales et maladies générales)
Les anomalies d’ordre général ou systémique provoquent des défauts quantitatifs ou fonctionnels, et donc modifient la réponse de l’hôte à l’agression bactérienne et entraîne une destruction osseuse importante et rapide, parmi ces déficits, on cite :
- Maladie parodontale et maladie générale coexistent toujours :
Syndrome de Papillon Lefevre, syndrome de Chediak Higashi, syndrome de Down, hypophosphatasie, histiocytose X (granulome éosinophile).
- Maladie parodontale et maladie générale coexistent fréquemment :
- Facteurs endocriniens : diabète, hypo ou hyperparathyroïdisme ;
- Facteurs hormonaux : états physiologiques modifiés : puberté, menstruation, grossesse, ménopause, prise de contraceptifs oraux ou encore lors d’une hormonothérapie substitutive ;
- Facteurs sanguins : leucémies ;
- Facteurs nutritionnels : carences nutritionnelles et avitaminoses ;
- Facteurs médicamenteux : la 5-5 diphénylhydantoïne (Di-Hydan®) traitements antiépileptiques, les inhibiteurs du calcium du type Nifédipine → des antihypertenseurs, la ciclosporine (ciclosporine A)
→ médicament antirejet chez les patients greffés.
- Facteurs de risque :
- Stress :
Le stress induit des changements de comportement directs et indirects chez l’individu :
- Un patient stressé est un patient qui a tendance à négliger son contrôle de plaque, ce qui entraîne de façon directe une gingivite.
- Les comportements induits par le stress comme le tabagisme, l’abus d’alcool et une mauvaise diététique vont avoir une action indirecte par leur effet sur les défenses immunitaires du sujet qui est plus exposé aux maladies parodontales.
Le stress crée un état d’activation continu de l’axe hypothalamo-hypophysaire qui va se traduire par des altérations profondes de la réponse immunitaire et une susceptibilité aux infections et aux maladies néoplasiques.
En plus de son action sur les mécanismes de défense, les hormones libérées en grande quantité lors d’états affectifs telle que l’adrénaline, fournissent un milieu favorable au développement de certaines populations bactériennes et provoquent une ischémie relative de la gencive, rendant plus facile l’invasion par les bactéries anaérobies.
La pathologie parodontale qui semble être la plus affectée par le stress est la gingivite ulcéro-nécrotique.
- Tabac :
L’ensemble des études désigne le tabac comme un facteur de risque majeur sur le parodonte. Les effets du tabac sur le système de défense sont les suivants :
- le nombre de polynucléaires neutrophiles est diminué ;
- les fonctions chimiotactique et phagocytaire sont diminuées ;
- des niveaux sériques décroissants d’IgG, IgA et IgM ;
- la réponse inflammatoire est réduite dans son amplitude ;
- la production d’immunoglobulines A sécrétoires est réduite ;
- La nicotine stimule la libération d’adrénaline entrainant une vasoconstriction avec un ralentissement du flux sanguin, ce qui diminue les signes inflammatoires.
- Cytotoxicité pour les fibroblastes. Il semble agir à 02 niveaux :
- sur des mécanismes physiologiques tels que la réponse immunitaire ou le flux salivaire d’une part,
- mais aussi en modifiant le comportement et donc les facteurs environnementaux qui peuvent alors devenir des comportements à risque pour la santé parodontale : augmentation du tabagisme, réduction de l’hygiène bucco-dentaire.
Le tout conduirait à une susceptibilité aux infections parodontales et à la maladie elle-même.
L’Académie Américaine de Parodontologie recommande fortement d’inclure l’arrêt du tabac dans le plan de traitement (AAP, 2000).
La cessation du tabac doit faire partie de l’arsenal thérapeutique en parodontologie.
- Etiologie constitutionnelle :
- Hérédité :
Il n’a pas été prouvé que la maladie parodontale soit transmissible à travers les générations. Cependant le facteur génétique ou familial a plusieurs fois mis en évidence dans les formes précoces et sévères des parodontites.
- Âge :
Des études ont montré que les gingivopathies sont très fréquentes chez l’enfant, alors que les parodontolyses sont très fréquentes chez l’adulte.
L’âge joue un double rôle :
- Par augmentation de la durée d’exposition aux facteurs locaux déclenchants ;
- Par les modifications biologiques qu’il entraine :
- Diminution de la fonction immunitaire ;
- Diminution du turn over ;
- Ralentissement du métabolisme parodontal.
Donc, les tissus parodontaux sont plus vulnérables à l’action du biofilm bactérien.
- Sexe :
La maladie parodontale est très fréquente chez la femme que l’homme.
La plupart des enquêtes montrent que le sexe masculin est quand même plus atteint par la parodontite de l’adulte. Toute fois la femme est plus touchée par les formes sévères et précoces de maladie parodontale.
- Race et situation géographique :
Ces facteurs peuvent ne pas être absolus en eux-mêmes mais relatifs aux facteurs d’hygiène, de nutrition et de soins dentaires.
- Niveau intellectuel et facteurs socio-économiques :
Les enquêtes ont montré que l’indice de fréquence de maladie est en rapport direct avec le quotient intellectuel des sujets examinés et est inversement proportionnel au revenu et au niveau social de l’individu.
Aussi il s’avère que le facteur hygiène, conditionné par les facteurs socio-économiques et culturels, contrôle l’apparition des parodontopathies dans leur vaste majorité.
- Diagnostic différentiel :
Il consiste en l’élimination des entités cliniques dont les signes et symptômes se rapprochent à celle du diagnostic présomptif, on élimine les maladies à peu près similaires en cherchant les différences d’ordre cliniques, radiologiques, ou même bactériologiques.
Exp : on fait le diagnostic différentiel entre parodontite chronique sévère généralisée et parodontite agressive généralisée.
- Diagnostic positif : (voir le cours sur classification des maladies parodontales)
Démarche visant à connaitre, face à un symptôme ou à un ensemble de symptômes, une origine précise. C’est le moment où sont confrontés les signes recueillis dans la description typique d’une maladie, c’est la détermination d’une maladie après le recueil de tous ses symptômes et signes.
L’établissement du diagnostic positif à l’aide des critères fournis par les classifications est une étape importante dans la prise en charge des maladies parodontales.
Selon Charon, le diagnostic positif sera plus précis et plus facile à élaborer si on se posera 04 questions :
- La pathologie est-elle en rémission ou en activité ?
Les signes d’activité de la maladie parodontale sont :
- La suppuration :
Etant donné la nature infectieuse des maladies parodontales, il n’est pas surprenant que les abcès fassent partie de la sémiologie. Le diagnostic d’abcès parodontal se fait lors de l’examen clinique. Sa localisation précise et son étendue se déterminent par sondage et/ou mise en place d’un cône de gutta. Il est quelque fois nécessaire d’utiliser la pression digitale ou celle d’un fouloir à amalgame pour confirmer la présence de pus. Au total, les collections purulentes parodontales sont l’expression d’une activité de la lésion considérée.
- L’halitose :
Il n’est pas étonnant que l’halitose soit un des signes des parodontites actives, et qu’elle puisse représenter un motif de consultation. Ceci est dû aux bactéries anaérobies à Gram (-) (bactéroides spirochètes, fusobactérium) capables de métaboliser et de synthétiser des quantités importantes de composés sulfurés ; dont l’odeur caractéristique est assimilable à celle de l’odeur forte de goudron frais.
- Le saignement :
Il reflète le degré de l’inflammation, par la fragilité tissulaire et le degré d’atteinte des capillaires. Ce saignement se produit lors du sondage et peut dans certains cas être spontané.
- Les migrations dentaires secondaires à la maladie parodontale :
C’est en fait, le processus par lequel les dents tendent à s’échapper des forces traumatogènes. En présence d’une maladie parodontale, certains déplacements dentaires peuvent avoir lieu, suite à la perte d’attache, et à la réduction du capital osseux entourant la dent.
- Quelle est la quantité de tissus déjà détruits (stade d’avancement) ?
- Mesure de la profondeur des poches et du niveau d’attache (récessions) ;
- Mesure radiologique : évaluation de la lyse osseuse.
- Quelles sont les bactéries infectantes ? voir la pyramide de Sokransky en 1998.
- De quel type de maladie s’agit-il ? voir la classification d’Armitage en 1999.
Il y a de nouveaux diagnostics qu’on peut ajouter à savoir :
Diagnostic bactériologique :
Il est fondé sur le principe de l’isolement et de la culture des bactéries d’intérêt. Ces techniques sont les plus anciennes, mais constituent donc la méthode de référence permettant d’évaluer toute autre stratégie.
Diagnostic immunologique :
Le diagnostic immunologique repose sur la spécificité de la réaction antigène-anticorps. Il peut permettre la détection des antigènes bactériens (détection directe de la bactérie) ou d’immunoglobulines de type IgG ou IgM (détection de la réaction immunitaire humorale de l’hôte dirigée contre la bactérie d’intérêt).
Les principales techniques immunologiques qui peuvent être utilisées sont : le test d’agglutination au latex, la cytométrie en flux, le test ELISA, et l’immunofluorescence directe et indirecte.
Diagnostic moléculaire :
Le diagnostic moléculaire est un nouveau terme, qui consiste en l’utilisation des sondes génétiques, il est basé sur l’existence, pour tout micro-organisme, de parties spécifiques de son génome qui le distingue des autres micro-organismes. Ces sondes peuvent être réalisées à partir d’ADN, d’ARN, ou d’oligonucléotides de synthèse.
- Conclusion :
Un diagnostic correct signifie un traitement adéquat et ciblé.
Un diagnostic incorrect signifie un traitement erroné.
L’intérêt du diagnostic est de nommer la maladie parodontale, et de la placer dans une catégorie dépendant d’une classification connue.
Le diagnostic étiologique permet de mieux définir la conduite des traitements, et d’envisager un pronostic en fonction des facteurs de risque et du degrés actuel de gravité.
Respecter la démarche diagnostique, c’est établir le plan de traitement adéquat pour garantir le plus de chances de guérison ou de cicatrisation du parodonte.
- Bibliographie :
- Bercy P. Tenenbaum H. Parodontologie du diagnostic à la pratique. DeBoek Université. 1996.
- Bouchard P. Parodontologie et dentisterie implantaire Volume 1 – Médecine parodontale. Lavoisier Médecine SCIENCES. 2015.
- Calas-Bennasar I, Bousquet P, Jame O, Orti V, Gibert P. Examen clinique des parodontites.
Encyclopédie Médico-Chirurgicale. 2005 ; 23-442-A-10.
- Carranza F A. La parodontologie clinique selon Glickman. 5ème édition. Editions CdP. 1988.
- Charon J. Mouton C. Parodontie médicale. Editions CdP. 2003.
- Charon J. et al. Parodontie médicale Innovations cliniques. 2ème édition. Editions Cdp, 2010.
- Glickman I. Parodontologie clinique. Editions CdP. 1983.
- Lindhe J. Manuel de Parodontologie Clinique. Editions CdP. 1986.
- Newman M G et al. Carrranza’s clinical periodontologie. 12ème édition. Elsevier Saunders. 2015.
- Wolf Herbert F, Edith M. et Rateitschak Klaus H. Atlas de parodontologie. MASSON. 2004.
- Wolf Herbert F, Rateitschak E. et Rateitschak K. Parodontologie. MASSON. 2005.
DIAGNOSTIC EN PARODONTIE
La prévention des caries commence par une bonne hygiène bucco-dentaire et des visites régulières chez le dentiste. Maîtriser les techniques de restauration dentaire est essentiel pour redonner fonction et esthétique aux patients. L’anatomie dentaire est la base de toute intervention, de l’extraction à la pose d’implants. Les avancées en imagerie, comme la radiographie 3D, facilitent un diagnostic précis et un traitement optimal. La gestion de la douleur et de l’anxiété des patients est une compétence clé pour tout praticien. Les étudiants en dentisterie doivent s’entraîner à reconnaître les pathologies orales dès les premiers stades. Collaborer avec des prothésistes dentaires garantit des solutions sur mesure pour chaque cas clinique.
DIAGNOSTIC EN PARODONTIE

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.