L’ostéo-intégration
Après avoir étudié les premiers chapitres dédiés à l’implantologie orale, nous voilà face à un thème incontournable représenté par l’ostéo-intégration.
2. Rappels :
2.1 Aspects anatomo-histologiques :
L’os des mâchoires est constitué de procès alvéolaires et de l’os basal (sans limite entre les deux). Les procès alvéolaires se développent parallèlement à l’odontogénèse et à l’éruption des dents. Leur existence est étroitement liée à la présence des dents. Ils sont constitués, entre deux corticales (externe et interne), d’os compact et d’os spongieux. L’os spongieux est un os lamellaire, formé par les trabécules qui délimitent des espaces occupés par de la moelle et des vaisseaux.
2.2 Aspects cellulaires et moléculaires :
Le tissu osseux est formé d’une faction inorganique et d’une faction organique.
Fraction inorganique :
La fraction inorganique représente 70% du poids de l’os. Elle est constituée d’un certain nombre d’ions, où prédominent respectivement le calcium et le phosphate, le magnésium, les carbonates, et le sodium.
Fraction organique :
La fraction organique est composée de cellules (ostéoblastes, ostéocytes, cellules bordantes et ostéoclastes) et d’une matrice. Cette dernière est constituée principalement de collagène (90%), et d’éléments non collagéniques (protéoglycanes…).
2.3 Aspects physiologiques :
L’os est en constant remodelage qui résulte des activités de résorption et d’apposition osseuse. L’équilibre entre les deux détermine l’homéostasie osseuse. À la suite d’une avulsion, le processus de modelage /remodelage aboutit à leur résorption (procès alvéolaires). Cette résorption est expliquée en partie par l’absence de stimulations (mécaniques), liées à l’absence de fonctions. Dans certains cas extrêmes, la totalité des procès alvéolaires peut être perdue, avec la persistance seule de l’os basal, à la base du site.
Lekholm et Zarb (1985) ont classé les différents types d’os résiduel (volume) en cinq groupes (A, B, C, D, E).
Le site cicatrisé est recouvert d’une fibro-muqueuse d’une épaisseur de 2 à 3 mm.
Histologiquement, elle est constituée d’un épithélium stratifié, et d’un tissu conjonctif séparés par une interface. Le tissu conjonctif est riche en fibroblastes et dense en fibres de collagène organisées en faisceaux.

3. Définition de l’ostéo-intégration :
L’ostéo-intégration est un concept apporté par Brånemark (1969), appuyé par des recherches fondamentales et des études cliniques ayant maintenant plus de 40 ans de recul.
L’ostéo-intégration est définie comme :
- « La connexion structurelle directe entre un os vivant, remanié et la surface d’un implant supportant une charge » (Brånemark et coll. 1969) ;
- « Le processus par lequel est obtenue une connexion rigide et cliniquement asymptomatique, entre un matériau inerte et l’os. Cette connexion est maintenue sous une charge fonctionnelle » (Zarb et Albrekisson 1991).
On pourrait qualifier tout simplement l’ostéo-intégration comme le collage biologique de l’os sur l’implant.
Lorsque l’on parle d’ostéo-intégration, on parle également de stabilité. Il faut alors distinguer la stabilité primaire de la stabilité secondaire. La stabilité primaire est donnée lors de la pose de l’implant, elle est mécanique et correspond à la force de l’insertion. Elle diminue avec le temps.
La stabilité secondaire, par contre, qui est biologique, à l’opposé de la précédente, augmente avec le temps.
4. Processus de l’ostéo-intégration :
L’apposition de l’os sur la surface implantaire résulte d’une série d’évènements moléculaires et cellulaires à l’interface os-implant, orientant les réponses tissulaires sur la surface implantaire.
À la suite de la pose d’un implant en titane, sont observés :
- Des modifications électrochimiques de la surface de titane avec la formation d’une couche d’oxydes de titane (TiO2) :
Le titane est un métal avide d’oxygène, cette avidité fait qu’il se recouvre instantanément d’une couche d’oxyde de titane, qui va lui conférer ses qualités biologiques. - Formation d’un tissu calcifié complexe : immédiatement après la mise en place d’un implant, la blessure vasculaire entraîne la formation d’un caillot qui contient du fibrinogène, des plaquettes et des ions « calcium (Ca), et phosphate (Po4) », dont l’adsorption par l’oxyde de titane forme un tissu calcifié complexe, non fibreux (TiOCaPo4).
- Colonisation du site par les cellules de l’inflammation (polynucléaires neutrophiles / monocytes).
- Attraction et migration des cellules ostéoprogénitrices.
- Adsorption de protéines (sialoprotéine osseuse, ostéopontine).
- Formation d’une lamina limitans et l’adhésion des cellules ostéogéniques (ostéoblastes) : le fibrinogène se transforme en fibrine lors de la coagulation, créant un premier réseau fibreux, sur lequel les pré-ostéoblastes migrent, s’activent, se transforment en ostéoblastes, qui vont minéraliser la charpente fibreuse encore mal organisée, à disposition aléatoire, formant un os tissé (woven bone), qui est un os mécaniquement faible.
- Ces phénomènes sont accompagnés d’une néo-vascularisation où des nouveaux capillaires se trouvent présents dès le 6ème jour.
- Formation du front de minéralisation : dès la 2ème semaine, les ostéoblastes plus présents, s’organisent pour former sur l’os présent un front de minéralisation dirigé vers la surface de l’implant. Ce front progresse vers l’implant, remplaçant l’os tissé par un os lamellaire. Certains ostéoblastes pris dans la matrice osseuse, deviennent des ostéocytes.
Entre la 4ème et 6ème semaine, le front de minéralisation se trouve en contact direct de l’implant créant une véritable connexion « ostéo-intégration ».
Les ostéoclastes accompagnent l’activité des ostéoblastes pour assurer les remaniements osseux.
5. Évaluation de l’ostéo-intégration :
La validation de l’ostéo-intégration se fait généralement de manière clinique et radiologique selon des critères, ceux édictés par Albrektsson (1986) peuvent toujours être retenus.
Ces facteurs sont représentés par :
- Absence de douleurs ;
- Absence de signes cliniques de l’infection et de l’inflammation ;
- Absence de nécrose tissulaire ;
- Absence de mobilité ;
- Absence de perte osseuse marginale : il est admis qu’une perte osseuse verticale de 1 à 1,5 mm avant la mise en charge et moins de 0,2 mm/an après la charge de l’implant est considérée comme physiologique, dans le cas contraire, elle s’inscrit dans un cadre pathologique.
- Absence de paresthésie ou anesthésie de la zone implantée.

6. Les facteurs influençant l’ostéo-intégration :
L’ostéo-intégration est un processus complexe et dynamique, multifactoriel, dont la réussite ou l’échec dépend de plusieurs facteurs.
6.1 Facteurs liés au patient :
La motivation du patient à l’hygiène bucco-dentaire est le principal facteur à prendre en considération, sachant que cette dernière conditionne la santé bucco-dentaire, aujourd’hui indissociable de la santé générale.
D’autres facteurs systémiques qui peuvent influencer la réponse tissulaire et osseuse sont aussi à retenir, exemple (diabète mal équilibré, ostéoporose, patients sous biphosphonates, tabagisme……).
Les crêtes édentées (la qualité et quantité de la fibro-muqueuse ainsi que le facteur osseux), attirent aussi notre attention.
6.2 Facteurs liés à l’implant :
- Matériau :
Ce dernier doit regrouper plusieurs propriétés : biocompatibilité, dureté, résistance à la corrosion. - Design implantaire : forme et dimensions ;
- Surface implantaire :
Cette dernière conditionne l’énergie de surface (force qui existe au niveau de toute interface, entre deux milieux différents solide et liquide), conditionnant la mouillabilité (hydrophile) et donc l’adhésion du caillot sanguin à la surface implantaire. Plus cette énergie de surface est élevée, plus le matériau sera hydrophile, et meilleure se fera l’adsorption des molécules.
Des études comparatives ont conclu de la supériorité des surfaces rugueuses en comparaison avec les surfaces lisses.
6.3 Facteurs liés à la technique chirurgicale :
Dans ce contexte, plusieurs paramètres sont à retenir :
- L’asepsie ;
- Chronologie implantaire et technique chirurgicale :
Ces dernières doivent être bien étudiées, validées selon les possibilités techniques adaptées selon les besoins et attentes du patient.
Protocole de forage :
Le respect du protocole de forage (vitesse de rotation, élévation thermique, irrigation abondante, aspiration, forets tranchants et de diamètre croissant) permet de limiter le traumatisme au niveau du site implantaire et donc la zone de nécrose osseuse.
La stabilité du caillot sanguin influençant les phases initiales du processus d’ostéo-intégration et pouvant le compromettre suscite un intérêt majeur. Cela est obtenu notamment si la distance entre l’os et l’implant n’est pas trop importante. Une distance supérieure à 0,5 mm sera moins bonne pour l’ostéo-intégration.
Le torque d’insertion prédéterminé doit être respecté, permettant de visser l’implant jusqu’à son assise finale, conditionnant la stabilité primaire et par conséquent la secondaire.
6.4 Autres facteurs :
La biomécanique implantaire et l’équilibration occlusale doivent aussi être prises en considération.
La planification des séances de maintenance permettant de maintenir les résultats et d’intercepter toute complication trouve largement sa place dans ce contexte.
L’ostéo-intégration
Voici une sélection de livres:
- Guide pratique de chirurgie parodontale Broché – 19 octobre 2011
- Parodontologie Broché – 19 septembre 1996
- MEDECINE ORALE ET CHIRURGIE ORALE PARODONTOLOGIE
- Parodontologie: Le contrôle du facteur bactérien par le practicien et par le patient
- Parodontologie clinique: Dentisterie implantaire, traitements et santé
- Parodontologie & Dentisterie implantaire : Volume 1
- Endodontie, prothese et parodontologie
- La parodontologie tout simplement Broché – Grand livre, 1 juillet 2020
- Parodontologie Relié – 1 novembre 2005
L’ostéo-intégration

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.