Le parodonte de l’enfant

Le parodonte de l’enfant

Le parodonte de l’enfant

Le parodonte de l’enfant et l’adolescent présente un certain nombre de particularités qui ont longtemps été méconnues aussi bien de la part des étudiants que les professionnels de la santé du fait du manque d’information et de recherches scientifique sur ce sujet.

L’architecture gingivale de l’enfant et de l’adolescent est soumise à de multiples modifications qui restent physiologiques. De ce fait, le médecin dentiste se trouve dans l’obligation de les connaitre afin de les différencier des processus pathologiques.

  1. Rappel sur l’enfance et l’adolescence :
  • L’enfance

L’enfance est une période de l’évolution de l’homme qui se situe au début de son existence. L’enfance débute dès les premiers jours de vie d’un être humain et se termine à la puberté, qui marque le début de l’adolescence.

  • L’adolescence :

L’OMS considère que l’adolescence est la période de croissance et de développement humain qui se situe entre l’enfance et l’âge adulte, entre les âges de 10 et 19 ans. Elle représente une période de transition critique dans la vie et se caractérise par un rythme important de croissance et de changements qui n’est supérieur que pendant la petite enfance

  • La puberté :

La puberté désigne l’ensemble des phénomènes physiques et psychiques qui définissent le passage de l’état d’enfant à l’état d’adulte, aboutissant à l’acquisition de la taille définitive et de la fonction de reproduction. Cette période, qui dure environ 4 ans, se caractérise par une accélération de la vitesse de croissance,   contemporaine   de   l’apparition   des   caractères   sexuels   secondaires.

  1. Le parodonte chez l’enfant et l’adolescent :

Le parodonte pendant l’enfance et la puberté est en constant remaniement à cause de l’exfoliation et de l’éruption des dents. Une description figée du parodonte de l’enfant et de l’adolescent est difficile en raison, des changements permanents qui surviennent entre l’éruption des dents temporaires, leur exfoliation, l’apparition des dents définitives et leur mise en occlusion. Depuis l’apparition de la première dent lactéale (6-7mois) jusqu’à la mise en occlusion de la deuxième molaire définitive (13-14 ans), le parodonte doit s’adapter à toutes ces variations physiologiques.

Les différents constituants du parodonte sont : la gencive, le ligament parodontal, l’os alvéolaire et le cément

  1. Gencive : parodonte superficiel

La gencive est cette partie de la fibromuqueuse qui recouvre les procès alvéolaires et entoure les dents dans leur partie cervicale.

  • Histologie de la gencive :
  1. En denture temporaire et mixte :

La gencive présente un épithélium plus mince et moins kératinisé et la vascularisation est plus importante ce qui lui confère sa couleur rougeâtre. Au niveau des diastèmes, qui sont fréquent en denture temporaire, la gencive est recouverte d’un épithélium orthokératinisé ou parakératinisé desquamant.

Le chorion gingival est de nature identique à celui de l’adulte ; cependant une hydratation supérieure aux tissus adultes est notée avec une quantité importante de collagène soluble et une activité accrue des fibroblastes. La cellularité du tissu conjonctif est augmentée par rapport à l’équivalent adulte avec une moindre quantité de cellules inflammatoires sous l’épithélium de jonction

  1. En denture permanente :

La gencive de l’adolescent présente la même histologie que celle de l’adulte.

  • Aspect anatomo-clinique d’une gencive saine :
  1. Gencive marginale :

La gencive marginale est la gencive coronaire à l’os alvéolaire. Elle entoure toute la dent en suivant une ligne sinueuse parallèle à la jonction amélo-cémentaire.

  • En denture temporaire :

La gencive marginale de la denture temporaire en période stable est rose, mais souvent décrite comme étant plus rouge que celle de l’adulte. Elle est de consistance ferme et élastique et d’aspect lisse ou finement granité avec un bord arrondi qui n’adhère pas à la dent. Ces signes peuvent par ailleurs masquer une gingivite légère chez l’enfant. Le granité, qui est moins marqué que chez l’adulte, n’apparaît qu’après l’âge de deux ans.

Sa hauteur est largement accrue en denture temporaire, elle est d’une valeur moyenne de 2,1mm. La limite marginale a un aspect ourlé et épais. Ce contour est en relation avec l’anatomie cervicale, la proéminence des bombés vestibulaires, l’étranglement cervical et la présence fréquente de diastèmes. Le sillon gingivo-dentaire est très peu marqué, sa profondeur à une valeur constante de 1 mm en moyenne.

  • De la denture mixte à la denture permanente jeune :

La gencive marginale souvent inflammatoire est épaisse, ourlée, flasque et rouge. Elle réagit très rapidement aux agressions locales comme le biofilm bactérien, mais aussi les dispositifs orthodontiques ou encore les obturations iatrogènes.

Les conditions d’émergence, influencent grandement la qualité de ce tissu gingival, Ainsi une évolution ectopique d’une dent permanente, fragilise le parodonte en formation.

  1. Gencive papillaire :

C’est la partie de la gencive située dans l’espace inter proximal créé par les dents adjacentes en contact.

. Elle est appelée col inter dentaire.

  • En denture temporaire :

Elle occupe comme chez l’adulte l’espace inter-dentaire, sous le point de contact des dents. Cependant, avec la présence fréquente des diastèmes en denture temporaire l’espace inter- dentaire est complètement occupé par la gencive papillaire avec absence de la forme pyramidale ou lancéolée que l’on retrouve chez l’adulte. Elle apparaît plus large dans le sens vestibulo-linguale, mais plus étroite dans le sens mésio-distal que chez l’adulte.

  1. Gencive attachée :

La gencive attachée est la zone de muqueuse fixée à la surface radiculaire et aux procès alvéolaires sous-jacents par l’intermédiaire des fibres de son chorion.

Cette portion de gencive est située apicalement par rapport à la gencive marginale, dont elle constitue une prolongation. Sa hauteur est plus importante au maxillaire qu’à la mandibule, et elle augmente avec l’âge (Ainamo et coll. 1981) et lors du remplacement de la denture temporaire par la denture permanente3.

  • En denture temporaire

La hauteur la plus importante se situe au niveau des incisives, ou elle peut atteindre 6 mm et elle diminue en allant vers les molaires temporaires, ou elle n’est plus que de 1 mm. La densification progressive des fibres de collagène du chorion avec l’âge contribue à l’apparition du granité de surface qui n’a lieu qu’après deux ans chez l’enfant.

  • En denture permanente,

La gencive attachée présente les mêmes caractéristiques que celle de l’adulte et sa hauteur peut atteindre jusqu’à 9mm.

  1. Os alvéolaire :

L’alvéole osseuse est une extension de l’os maxillaire, elle constitue sa partie superficielle. Les dents sont ancrées et positionnées dans ces alvéoles par le ligament alvéolo-dentaire. L’os alvéolaire naît, vit et meurt avec la dent.

  • Aspect anatomo-histologique :

En denture temporaire :

  • L’os alvéolaire est peu volumineux.
  • La lamina dura est plus mince et fine mais marquée, de la phase du germe à la phase d’éruption.
  • Les espaces médullaires sont plus larges.
  • Les crêtes des septa inter-dentaires sont plus plates.
  • Les corticales externes et internes sont fines en particulier au niveau du secteur antérieur.
  • La vascularisation sanguine et lymphatique est très importante et dense.
  • Plasticité marquée de l’os alvéolaire en denture temporaire.
  • Les trabécules osseuses sont épaisses mais moins denses et moins nombreuses.
  • La minéralisation est moindre.
    • Aspect physiologiques :

L’os alvéolaire est sensible aux processus inflammatoires locaux ou généraux. On observe fréquemment des lésions de résorptions marquées et cela même en denture temporaire et mixte.

Tout au long de la vie, l’os alvéolaire est remodelé comme tous les autres os. Le turn-over de l’os alvéolaire est celui le plus rapide de l’organisme. Ceci explique l’apparition rapide de lésions en présence d’un déficit organique ou métabolique de l’équilibre phosphocalcique.

  • Aspect radiologique

L’image des crêtes osseuses au cours de l’éruption est variable, elle peut être rectiligne, oblique, linéaire ou concave. Les radiographies rétro-coronaires permettent d’évaluer la distance entre la crête osseuse et la jonction amélo-cémentaire.

Sur les dents en éruption post fonctionnelle, une distance entre la crête osseuse et la jonction amélo- cémentaire inférieure à 2 mm est considérée comme normale au-delà, elle signe un défaut osseux. Les dents jeunes avec apex immature, montrent un épaississement de la lamina dura, particulièrement dans les régions apicales.

  1. Le desmodonte :

Le desmodonte est un tissu conjonctif fibreux qui unit la racine à son alvéole .Sa forme globale est en sablier.

  • Aspect anatomo-histologique :

En denture lactéale, le desmodonte communique avec les espaces médullaires des procès alvéolaires. Il se continue avec le tissu conjonctif pulpaire par l’intermédiaire de l’orifice apical et par de nombreux canaux latéraux pulpo-parodontaux.

Chez l’enfant, on y retrouve des résidus de la gaine de Hertwig ou de l’épithélium de l’organe de l’émail.

Les faisceaux fibrillaires collagéniques et les fibres oxytalanes, quoique organisés comme dans le desmodonte des dents définitives, y sont moins denses et une vascularisation importante du desmodonte de l’enfant est notée.

  • Aspect radiologique :

Chez l’enfant, la radiographie de l’espace desmodontal laisse apparaître une radio clarté marquée, un espace large surtout au niveau de la furcation.

  1. Cément :

Le cément est une couche très fine de tissu calcifié qui recouvre la surface de la racine de la dent et assure la cohésion de celle-ci avec l’os alvéolaire.

  • Aspect anatomo- histologique :

La densité et l’épaisseur du cément des dents temporaires sont moindres que celles des dents permanentes.

Le cément lactéal est généralement de type acellulaire dans la zone coronaire de la racine et de type cellulaire dans la zone apicale.

Chez l’adolescent, les caractéristiques du cément sont identiques à celles de l’adulte.

  1. Le milieu buccal chez l’enfant et l’adolescent :

La cavité buccale constitue un des écosystèmes microbiens les plus complexes de l’organisme humain avec plus de 600 espèces bactériennes colonisant ses différents sites. Les bactéries du biofilm dentaire sont responsables de deux principales pathologies buccodentaires, la carie et la parodontopathie. (Chantal NAULIN-IFI et coll. Odontologie pédiatrique clinique JPIO=2)

  1. La salive :

La salive est un liquide biologique secrété et excrété par les glandes salivaires : les glandes parotides, les sous-maxillaires et les glandes salivaires accessoires.

  • Caractéristiques :

La salive est un liquide incolore, translucide, légèrement filant et visqueux et de gout fade, son poids spécifique est de 1,002 à 1,008 (98% d’eau).

La sécrétion salivaire est un phénomène constant dans des conditions physiologiques normales ; elle est d’environ 8 à 10 ml/h chez l’enfant (4 ml/h chez le nourrisson et 15ml/h chez l’adulte).

  • pH salivaire :

Le pouvoir tampon de la salive est surtout le résultat de la présence de bicarbonates dans sa composition. Les valeurs limites de son pH s’étendent cependant de 3,25 à 8. Mais, en moyenne, chez les enfants, le pH salivaire est de 7,32 (6,40 – 8,24) ; le pH tend donc vers l’alcalinité chez l’enfant, alors qu’il devient plus acide chez l’adulte (pH 6)

  1. Fluide gingival :

Présente les mêmes caractéristiques que celle chez l’adulte

  1. Flore bactérienne

La composition de la flore bactérienne buccale est influencée par différents facteurs qui changent au cours du développement de l’enfant à savoir les caractéristiques de l’hôte, la colonisation bactérienne, l’alimentation et les relations écologique entre les différentes espèces (DARBY et CURTIS, 2001).

La quantité et la composition de la flore bactérienne de la cavité buccale diffère chez l’enfant, l’adolescent et l’adulte. Elle varie en fonction de nombreux facteurs, qui changent au cours de la maturation de l’enfant. La puberté jouant notamment un rôle important.

Les effets des changements physiologiques, se produisant avec l’éruption des dents, sur la flore bactérienne ne sont pas bien connus. L’éruption des dents temporaires et permanentes offrent de nouvelles surfaces de fixation des bactéries, telles que l’émail, ou le sulcus. Ainsi, l’incidence de S.mutans croît avec l’augmentation des surfaces dentaires

***A la naissance :

A la naissance la cavité buccale est libre de bactéries. C’est au cours des deuxième et troisième jours que s’installe la flore bactérienne permanente. Il y prédomine alors principalement les streptocoques Progressivement de nouvelles espèces vont se développer et coloniser de nouveaux sites .Les spirochètes et les Bactéroides à pigments noirs (BPN) sont absents chez l’enfant sans dent.

***En denture temporaire :

C’est entre 4 et 8 mois que le nombre et la variété de bactéries augmente. Jusqu’à 12 mois, les aérobies prédominent.

Les spirochètes et les Bactéroïdes à pigmentation noire (BPN) sont des germes qui apparaissent en bouche au moment de l’apparition des dents. Leurs incidences sont en rapport avec l’âge et augmentent lorsqu’il y a une inflammation gingivale .Cependant, ces germes sont présents de façon inconstante chez l’enfant, alors qu’ils sont présents de façon permanente chez l’adulte .Par ailleurs la présence d’un sillon gingival ne conditionne pas l’installation d’une flore anaérobie

***En denture mixte :

L’accroissement des conditions favorables au développement des bactéries est dû à un état inflammatoire du parodonte. En effet, l’exfoliation des dents temporaires et l’éruption des dents définitives fragilisent la gencive.

Lorsqu’une dent temporaire est proche de la chute, sa mobilité augmente de manière importante et provoque l’apparition d’une zone d’effraction au niveau de la gencive propice à la colonisation anaérobie.

De même, on note la présence de poches parodontales profondes liées aux phénomènes d’exfoliation et d’éruption du germe sous-jacent.

Ainsi, la composition de la plaque se rapproche de celle de l’adulte, même si on observe encore une faible proportion de spirochètes (16%). On note aussi une augmentation de Gram négatifs anaérobies pendant toute la puberté.

En effet, on sait que l’apparition des hormones sexuelles favorise la colonisation microbienne anaérobie dans le sulcus.

***En denture permanente :

Durant cette période, l’évolution de l’écosystème tend à se stabiliser et la plaque va devenir identique à celle de l’adulte sain. L’augmentation du nombre de dents, de sillons et de nouvelles caractéristiques anatomiques dentaires comme les bombés vont modifier les zones de développement de la plaque.

La complexité de l’écosystème et les variations hormonales donnent une flore composée de BPN et spirochètes. La prévalence de BPN est plus importante chez les filles que chez les garçons.

4- Influence de l’éruption sur l’anatomie du parodonte

C’est au moment de l’émergence dentaire que les structures parodontales se répartissent, harmonieusement ou non, autour de la dent.

Le point d’émergence détermine de façon irréversible la quantité de tissu kératinisé qui entoure la dent, sa localisation précoce permet de prévoir l’environnement parodontal. La situation de normalité est définie lorsque l’émergence de la dent s’effectue au milieu des procès alvéolaires.

Cette émergence idéale détermine une architecture dento-parodontale correspondant au type I de la classification de Maynard et Wilson (1980) et au type A de la classification de KORBENDAU et GUYOMARD (1992)

Le parodonte de l’enfant

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