PHYSIOLOGIE DE LA CICATRISATION APICALE (Cicatrisation et Potentiel apico-réparateur)
La régénération est un processus par lequel des tissus altérés sont intégralement remplacés par des tissus originels aussi bien par leur architecture que par leur fonction.
La réparation est un processus de restauration architectural incomplet des tissus altérés. C’est le comblement de la lésion par un tissu différent du tissu original c.à.d. tissu de cicatrisation (Grossman).
Cicatrisation: La cicatrisation d’une plaie est un phénomène complexe. Elle fait appel aux processus de réparation d’une lésion localisée et de la régénération d’un tissu.
- RAPPEL ANATOMIQUE ET HISTOLOGIQUE SUR LE PERI APEX
La région péri-apicale, le péri apex ou l’espace de Black
L’extrémité canalaire est constituée de 2 cônes d’un point de vue histologique, l’un dentinaire, l’autre cémentaire, opposés par leur sommet au niveau de la jonction cémento-dentinaire (ou constriction apicale).
Le cône cémentaire délimite l’espace de Black et a pour base le foramen apical.
Deux cônes inversés en forme de sablier : Cônes de KUTTLER
Le système canalaire apical communique avec le parodonte apical au niveau de l’espace de Black, par le foramen principal (issu du canal principal) et les nombreux foramina accessoires (issu des canaux accessoires).
La région péri apicale est en perpétuel remaniement et lorsque les tissus la composant sont le siège d’une agression, ils peuvent se résorber.
L’espace de Black comprend différentes structures anatomiques et histologiques:
1.1. cément : Il s’agit d’un tissu conjonctif minéralisé (à 60%) avasculaire qui recouvre la dentine radiculaire. Il sert d’ancrage aux fibres de Sharpey provenant du ligament parodontal.
Ce tissu est en perpétuel remodelage par des phénomènes d’apposition et de résorption cémentaire, effectués respectivement par les cémentoblastes et les cémentoclastes.
1.2. L’os alvéolaire péri-apical : c’est un tissu osseux spongieux tapissé par un tissu osseux fasciculé appelé paroi de l’alvéole, lamina dura ou lame criblée.
Comme pour le cément, ce tissu est en perpétuel remodelage par l’action des ostéoblastes et ostéoclastes.
1.3. Le ligament parodontal apical (ou desmodonte)
Il s’agit d’un tissu conjonctif d’interface qui permet d’ancrer la dent dans son alvéole aux moyens de fibres de collagène, tendues entre l’os alvéolaire et le cément (où elles deviennent fibres de Sharpey). De même, ce tissu, richement vascularisé et innervé, contient différents types de cellules qui participent à de nombreux événements biologiques régionaux:
- Les cémentoblastes et les cémentoclastes sont responsables du remodelage cémentaire.
- Les ostéoblastes et ostéoclastes sont responsables du remodelage osseux alvéolaires.
- Les fibroblastes sont impliqués, entre autres, dans la cicatrisation péri-apicale.
- Les cellules de la défense immunitaire (macrophages, mastocytes, lymphocytes…) participent aux réactions inflammatoires péri-apicales.
- Les cellules épithéliales (ou débris épithéliaux de Malassez) sont impliquées dans la formation de kystes dentigères péri-apicaux.
Toutes ces cellules jouent un rôle crucial dans la régénération apicale souhaitée dans les thérapeutiques des lésions péri-apicales.
Le péri apex constitue une unité fonctionnelle où toutes les composantes sont liées par des fibres et des vaisseaux, et où l’espace de BLACK (centre nourricier) assure le métabolisme des tissus durs qui l’entourent: le cément d’un côté et l’os alvéolaire de l’autre côté.
Après éviction pulpaire, la fonction dentinogenétique de cette dernière est annulée.
Cependant, l’espace de Black possède un fort potentiel de régénération que le traitement endodontique, par le biais de l’obturation canalaire, devra stimuler entraînant une cicatrisation apicale.
- PHYSIOLOGIE DE LA CICATRISATION APICALE (CICATRISATION ET POTENTIEL APICO-REPARATEUR)
Toute infection endodontique, entraîne au niveau apical une réaction inflammatoire qui aura par conséquent:
- une diminution de l’activité synthétique
- et une augmentation des phénomènes ostéoclasiques et cémentoclasiques.
Une fois que:
- 1- la phase inflammatoire préliminaire contrôlée par les cellules de défense,
- 2- et un traitement endodontique bien instauré ;
la réparation biologique peut commencer.
- L’examen histologique de la majorité des coupes tissulaires en expérimentation animale et humaine montre que la cicatrisation des lésions péri-radiculaires après un traitement endodontique est plutôt une réparation qu’une régénération des tissus péri-radiculaires.
- L’inflammation et la cicatrisation ne sont pas deux entités distinctes; en réalité, elles constituent une partie d’un processus de réponse aux agressions tissulaires. Elles sont inséparables aux niveaux cellulaires et moléculaires.
- En effet, l’inflammation domine les événements précoces succédant à l’agression tissulaire, mutant vers la cicatrisation dès que les réponses précoces ont disparu.
2.1. Composantes cellulaires :
2.1.1. Les cellules de défense :
- Elles constituent environ la moitié de la population cellulaire des lésions péri apicales.
- Cette population cellulaire est plus dense dans les granulomes que dans les kystes.
2.1.1.1. les macrophages
- Reconnaissance et présentation d’antigènes et leurs phagocytose.
- produire plusieurs types de substances (cytokines, interleukines)
2.1.1.2. les polymorphonucléaires neutrophiles (PMN)
- Les neutrophiles prédominent dans les phases aiguës (la première ligne de défense cellulaire péri-apicale)
2.1.1.3. les plasmocytes:
- Synthétisent les anticorps (Ig)
2.1.1.4. Les lymphocytes:
Les lymphocytes B et T s’accumulent dans les phases chroniques
2.1.2. Les cellules de résorption:
Ces cellules sont responsables des phénomènes de résorption.
2.1.2.1- Les cementoclastes
2.1.2.2- Les ostéoclastes
Disposés en regard des lacunes creusées aux dépens de la paroi osseuse.
2.1.3. Les cellules épithéliales de Malassez
Ces cellules normalement quiescentes peuvent être stimulées au cours du processus inflammatoire par les cytokines et les facteurs de croissance.
Elles forment alors des proliférations épithéliales qui participent à la pathogénèse des kystes péri-apicaux.
2.1.4. Les cellules de synthèse :
Ces cellules participent activement au processus de réparation.
2.1.4.1. Les fibroblastes
Sont les plus nombreux et sont concentrés dans la zone centrale du desmodonte
2.1.4.2. Les cémentoblastes
Ils sont disposés en front le long du cément.
2.1.4.3. Les ostéoblastes
Ils sont alignés le long des surfaces osseuses en construction.
2.1.5. Les cellules quiescentes ou incorporées dans les tissus durs
Ce sont essentiellement les cémentocytes et les ostéocytes.
Pris dans une gangue minérale, cémentoblastes et ostéoblastes prennent le nom de cémentocytes pour les uns et d’ostéocytes pour les autres.
2.2. Mécanismes de défense péri-apicale
Une fois que les bactéries ont infecté le système endodontique, et donc que le premier niveau de défense n’existe plus, c’est au second niveau de défense d’intervenir afin de limiter la diffusion de l’infection.
Au niveau péri-apical, c’est d’abord l’immunité innée qui intervient.
Au niveau péri-apical, c’est d’abord l’immunité innée qui intervient.
Comme les bactéries persistent au niveau intra canalaire (le seul moyen de les éliminer est le traitement endodontique), ne peuvent donc pas être éliminées par les défenses « bloquées » au niveau des tissus péri apicaux et sont incapables de pénétrer dans le système endodontique, la défense innée va faire appel à la défense adaptative.
2.2.1. L’inflammation innée :
- la pré-inflammation :
- lorsque les bactéries envahissent le tissu pulpaire, elles sont immédiatement reconnues par les macrophages résidants et par le système du complément.
- cette phase va déclencher la libération de molécules ou médiateurs de l’inflammation ;
- l’inflammation à proprement parler
- Elle, est déclenchée par la libération des médiateurs précédents.
- Elle se caractérise notamment par des changements vasculaires ;
- Cette phase a pour rôle d’amener de manière massive les cellules de défense au site d’infection.
- L’inflammation est caractérisée par quatre signes cliniques :
- douleur, chaleur, œdème, rougeur.
2.2.2. L’intervention de l’immunité adaptative:
- L’immunité adaptative est la seconde ligne de défense de l’organisme.
- Sa mise en place est retardée puisqu’elle survient seulement 4 jours après le contact avec l’agent pathogène.
- Elle fait intervenir les lymphocytes B et T qui jouent un rôle central dans cette immunité.
2.3. Potentiel réparateur du péri apex (Le remodelage apical après traitement endodontique) :
- La séquence des événements conduisant à la résolution des lésions péri-apicales n’a pas été beaucoup étudiée.
- En se fondant sur les processus participant à la réparation des sites d’extraction après l’élimination des irritants, on retrouve que:
- les réponses inflammatoires diminuent et
- la population des cellules formant les tissus (fibroblastes et cellules endothéliales) augmente; finalement,
- l’organisation et la maturation tissulaires s’ensuivent.
- L’os résorbé est remplacé par un os nouveau;
- le cément et la dentine résorbés sont réparés par un cément cellulaire.
- Le ligament parodontal, premier tissu affecté, est le dernier à être restauré dans son architecture normale.
- La première phase de cicatrisation consiste en la transformation du tissu granulomateux de la lésion en un tissu de granulation.
- Lors de la deuxième phase de cicatrisation, les médiateurs de la résorption osseuse n’étant plus sécrétés, les cellules osseuses migrent à partir des tissus des espaces médullaires pour reformer l’os qui remplace peu à peu le tissu de granulation.
- Des fibroblastes et des cémentoblastes migrent à partir du ligament pour reformer un néo cément et restaurer l’appareil d’attache apical.
2.3.1. La réparation cémentaire :
- Les fibroblastes se disposent en une seule rangée sur la surface dentinaire radicalaire puis se différencient en cémentoblastes et vont sécréter le pré cément.
- Ce dernier va se calcifier pour donner le cément pendant que la seconde couche du pré-cément s’appose en surface.
- Les couches profondes calcifiées renferment peu ou pas de cémentoblastes: on parle alors de cément acellulaire ou fibrillaire.
- Deux trames fibrillaires sont formées :
- L’une extrinsèque, produite par le desmodonte et représentée par l’insertion des fibres de SHARPEY qui se minéralisent secondairement.
- L’autre intrinsèque,
- On a donc une cémentogenèse lente tout au cours de la vie qui va brusquement devenir active lors de stimuli, jusqu’au moment où un équilibre nouveau sera retrouvé et la cémentogenèse redeviendra alors lente.
- Le cément ainsi reconstitué recouvre l’apex de la dent en tapissant les parois internes du foramen (une fermeture de l’apex).
2.3.2. La réparation osseuse :
- L’os alvéolaire est le siège de remaniements continus; par coordination d’activités destructrices et formatrices (résorption, apposition ) par des cellules tels que ostéoblastes et ostéoclastes, les phénomènes d’ostéogénèse et d’ostéoclasie se succèdent.
- Ainsi l’os congestionné par la présence d’une infection canalaire se résorbe, et à sa place, réapparaît la trame conjonctive fondamentale.
- Comme le cément, l’os d’ancrage présente deux orientations fibrillaires :
- L’une intrinsèque, produit des ostéoblastes,
- L’autre extrinsèque constituée par les fibres demodontales.
- Ces dernières réalisent l’ancrage dentaire sous la forme des fibres de SHARPEY minéralisées.
- Les ostéoblastes entourés de matrice minéralisée deviennent ostéocytes et constituent un ensemble de cellules qui participent au métabolisme de l’os.
2.3.3. La réparation desmodontale :
- Au niveau du ligament les changements observés vont dans le sens d’une augmentation de la différenciation et de l’activité cellulaire surtout pour une dent fonctionnelle par rapport à une dent qui ne l’est pas.
- Les fibroblastes assurent le remaniement des fibres desmodontales.
- En effet, leur fonction principale est la synthèse et la sécrétion des précurseurs collagéniques qui subissent ensuite leur maturation.
NB:
- Certaines lésions ne se résolvent pas par la récupération complète des structures originelles. Des variations sont observées dans des modèles différents de fibres ou d’os.
- Elles peuvent être évidentes à l’observation radiographique avec une lamina dura plus élargie ou une configuration altérée.
- Certains facteurs comme la taille d’un défaut ou l’extension de la lésion vers le stroma sous-jacent peuvent affecter la régénération complète de l’architecture du tissu originel.
- La réussite d’un traitement canalaire se traduit par une restitution « ad integrum » des tissus des structures apicales.
- CINÉTIQUE DE GUERISON ET CRITERES TÉMOIGNANT D’UNE CICATRISATION APICALE
3.1. Cinétique de guérison des lésions péri apicales
La cinétique de guérison des lésions péri apicales est variable, les jeunes patients sont d’un meilleur pronostic que les patients plus âgés:
- 89% des lésions susceptibles de guérir manifestent des signes de réparation après une année (réduction de la taille de la lésion);
- 50% de ces lésions guérissent totalement en un an;
- à deux ans, la majorité des lésions guérissent ou continuent à manifester des signes de réparation par réduction de la taille de la lésion;
- occasionnellement, cette réduction peut se poursuivre sur 4 ou 5 ans.
- Devant les cas d’échecs, le seul recours thérapeutique, après l’endodontie orthogra de correcte ent effectuée, reste la chirurgie endodontique.
3.2. Critères de cicatrisation
- Critères cliniques:
- absence de symptomatologie
- absence de fistule, ou de tuméfaction
- percussion non douloureuse
- Critères radiologiques :
- ligament régulier non élargi
- absence d’image apicale
3.3. Facteurs influençant la cicatrisation
- Généraux
- Age, nutrition, état de santé général, troubles hormonaux, vitamíniques et organiques,…
- Locaux
- infection persistante
- présence de corps étrangers (fragment de lame d’instrument, gutta,…)
- présence de canaux accessoires
Conclusion:
Aucune régénération ne se produira tant que les irritants n’auront pas été éliminé du système canalaire et tant que ce système canalaire n’aura pas été isolé du reste de l’organisme par le scellement de l’endodonte.
Bibliographie :
- Mahmoud Torabinejad, Richard E. Walton, Ashraf F. Fouad. Endodontic. Principes et pratiques. 5ème édition Gérard Levy, 2016. W.w.w.Elsevier-Masson.fr
- Pecchioni A. Endodontic: Manuel de technique opératoire. Paris ; Editions S.N.P.M.D 1987
PHYSIOLOGIE DE LA CICATRISATION APICALE (Cicatrisation et Potentiel apico-réparateur)
Voici une sélection de livres:
- Guide pratique de chirurgie parodontale Broché – 19 octobre 2011
- Parodontologie Broché – 19 septembre 1996
- MEDECINE ORALE ET CHIRURGIE ORALE PARODONTOLOGIE
- Parodontologie: Le contrôle du facteur bactérien par le practicien et par le patient
- Parodontologie clinique: Dentisterie implantaire, traitements et santé
- Parodontologie & Dentisterie implantaire : Volume 1
- Endodontie, prothese et parodontologie
- La parodontologie tout simplement Broché – Grand livre, 1 juillet 2020
- Parodontologie Relié – 1 novembre 2005
PHYSIOLOGIE DE LA CICATRISATION APICALE (Cicatrisation et Potentiel apico-réparateur)

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.