LES BIOMATERIAUX EN ODF

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LES BIOMATERIAUX EN ODF

Les Biomatériaux en Orthodontie (ODF)

Introduction

L’orthodontie, discipline dentaire dédiée à la correction des malpositions dentaires et des anomalies maxillo-faciales, repose sur le principe de déplacer les dents dans les trois dimensions de l’espace pour obtenir un alignement fonctionnel et esthétique. Ce processus est rendu possible par l’utilisation de dispositifs orthodontiques, majoritairement composés de biomatériaux, souvent métalliques, qui permettent d’exercer des forces contrôlées sur les dents. Ces dispositifs incluent des attaches (ou verrous) collées ou scellées sur les dents, des fils orthodontiques adaptés à chaque arcade dentaire selon la technique utilisée, ainsi que divers auxiliaires tels que des élastiques ou des ressorts. Ces biomatériaux, principalement des alliages métalliques, doivent répondre à des exigences strictes en termes de biocompatibilité, de résistance mécanique et de stabilité dans le milieu buccal, un environnement corrosif en raison de la salive, des variations de pH et des interactions avec les aliments.

L’évolution des biomatériaux en orthodontie a permis d’améliorer la précision des traitements, de réduire les inconforts pour les patients et de minimiser les risques d’effets secondaires, tels que les allergies ou la corrosion des dispositifs. Cet article explore en détail les différents types de biomatériaux utilisés en orthodontie, leurs propriétés, leurs applications, ainsi que les innovations récentes dans ce domaine, tout en intégrant les aspects techniques et cliniques essentiels pour les praticiens.

Les Métaux

Définition du Métal

Un métal est un matériau constitué d’une multitude d’atomes métalliques organisés selon un réseau cristallin, qui confère des propriétés spécifiques telles que la conductivité, la ductilité et la résistance mécanique. Les métaux purs, composés d’un seul type d’atome, présentent souvent des propriétés mécaniques limitées pour les applications orthodontiques. C’est pourquoi les alliages, formés par la fusion et le refroidissement de plusieurs métaux purs, sont privilégiés. Ces alliages offrent une combinaison optimisée de propriétés, telles que la résistance à la corrosion, la malléabilité et la résilience, essentielles pour leur utilisation en milieu buccal.

Acier Inoxydable

Composition et Propriétés

L’acier inoxydable est un alliage à base de fer, enrichi de chrome (généralement 10 à 30 %) et de nickel (jusqu’à 20 %), avec une teneur en carbone inférieure à 2 %. Ces éléments confèrent à l’acier des caractéristiques idéales pour l’orthodontie :

  • Chrome : Augmente la dureté et confère une brillance esthétique tout en améliorant la résistance à la corrosion.
  • Nickel : Renforce l’inoxydabilité et la résistance à l’usure, assurant une durabilité dans l’environnement buccal.
  • Faible teneur en carbone : Réduit la fragilité et améliore la malléabilité.

L’acier inoxydable est peu coûteux, facile à façonner et biocompatible, ce qui en fait un matériau de choix pour de nombreux composants orthodontiques, tels que les bagues, les fils et les attaches.

Applications en Orthodontie

Les fils en acier inoxydable sont disponibles en sections rondes ou rectangulaires, sous forme monobrin ou multibrin. Les fils monobrins offrent un faible coefficient de friction, facilitant le déplacement dentaire en réduisant les forces de frottement. Les fils multibrins, quant à eux, peuvent être torsadés (autour d’un fil coaxial ou en configuration tressée), offrant une flexibilité accrue pour des mouvements spécifiques.

Les bagues orthodontiques, souvent fabriquées en acier inoxydable, sont scellées ou collées sur les dents pour servir de support aux fils. Leur malléabilité permet de les souder ou de les braser pour assembler des dispositifs complexes, comme les arcs orthodontiques ou les auxiliaires.

Avantages et Limites

L’acier inoxydable est apprécié pour sa robustesse, sa facilité de mise en œuvre et son coût abordable. Cependant, il peut provoquer des réactions allergiques chez certains patients sensibles au nickel, bien que cela reste rare. De plus, malgré sa résistance à la corrosion, une exposition prolongée à des conditions acides peut entraîner une légère dégradation de la surface.

L’Elgiloy

Composition et Types

L’Elgiloy est un alliage de cobalt, chrome et nickel, développé dans les années 1950 par la Elgin Watch Company. Cet alliage se décline en quatre types, différenciés par leur résilience et identifiés par des couleurs distinctes :

  • Elgiloy bleu : Faible résilience, idéal pour les pliages importants ou les soudures.
  • Elgiloy jaune : Résilience modérée, adapté à des applications nécessitant plus de flexibilité.
  • Elgiloy vert : Semi-résilient, offrant un équilibre entre rigidité et élasticité.
  • Elgiloy rouge : Très résilient mais fragile, utilisé dans des cas nécessitant une forte élasticité.

Ces variations permettent aux orthodontistes de choisir l’alliage en fonction des besoins spécifiques du traitement, notamment pour les fils ou les ressorts.

Propriétés Mécaniques

L’Elgiloy peut être traité thermiquement pour augmenter sa limite élastique et sa résilience, atteignant des performances proches de celles de l’acier inoxydable. Sa biocompatibilité et sa résistance à la corrosion en font un matériau fiable pour les applications orthodontiques.

Applications

L’Elgiloy est principalement utilisé pour la fabrication de fils orthodontiques et de ressorts auxiliaires. Sa capacité à supporter des déformations importantes sans perte de forme en fait un choix populaire pour les traitements nécessitant des forces continues et contrôlées.

Les Alliages pour Brasure

Définition et Techniques

La brasure est une méthode d’assemblage conventionnelle en orthodontie, consistant à unir des éléments métalliques à l’aide d’un matériau d’apport (étain, argent ou or) dont la température de fusion est inférieure à celle des métaux de base. Les brasures à base d’argent, souvent utilisées avec un flux désoxydant et un chalumeau à gaz, sont les plus courantes.

Inconvénients de la Brasure

La brasure présente plusieurs limites :

  • Surchauffe : L’utilisation d’un chalumeau peut provoquer des déformations ou des fragilités dans les métaux.
  • Oxydation : Les joints brasés peuvent s’oxyder en milieu buccal, entraînant une libération d’ions métalliques.
  • Risque allergique : Certains matériaux d’apport peuvent provoquer des réactions chez les patients sensibles.
  • Précision limitée : La brasure ne permet pas toujours un assemblage précis, ce qui peut affecter l’efficacité du dispositif.

Soudure au Laser

La soudure au laser est une alternative moderne à la brasure. Elle utilise un faisceau laser pour fusionner localement les métaux, offrant une précision accrue et une absence de déformation des pièces adjacentes. Cette technique réduit les risques d’oxydation et de libération d’ions métalliques, améliorant ainsi la biocompatibilité et la durabilité des dispositifs orthodontiques.

Les Alliages Nickel-Titane (Ni-Ti)

Propriétés Générales

Les alliages nickel-titane, introduits en orthodontie dans les années 1970 sous le nom de Nitinol, combinent nickel (environ 55 %) et titane (environ 45 %). Ils se distinguent par leur superélasticité et leur mémoire de forme, deux propriétés qui révolutionnent les traitements orthodontiques. La superélasticité permet aux fils de subir de grandes déformations tout en exerçant des forces légères et constantes, tandis que la mémoire de forme leur permet de retrouver leur configuration initiale après déformation, souvent par réchauffement.

Le Nitinol

Le Nitinol, développé par Buehler en 1960 au Naval Ordnance Laboratory, est un alliage Ni-Ti non superélastique. Il présente un module d’élasticité faible, permettant de grandes flexions élastiques avec des forces continues et modérées. Cependant, sa surface moins lisse que celle de l’acier inoxydable augmente les frottements, et il ne peut être soudé, limitant son utilisation dans certains dispositifs.

Le Nitinol Chinois

Mis au point par l’équipe du Dr Tien Hua Cheng à Pékin, le Nitinol chinois offre une élasticité supérieure à celle du Nitinol classique, ce qui le rend adapté aux applications nécessitant une flexibilité accrue.

Les Ni-Ti à Mémoire de Forme et Superélastiques

Les alliages Ni-Ti modernes intègrent des propriétés avancées grâce à des transformations de phase à l’état solide, passant d’une structure austénitique à une structure martensitique à des températures spécifiques. Ces transformations, quasi instantanées et sans diffusion, permettent :

  • Une superélasticité : Les fils exercent des forces légères et constantes, idéales pour les premières phases du traitement orthodontique.
  • Une mémoire de forme : Les fils retrouvent leur forme initiale après déformation, par simple réchauffement (par exemple, à la température buccale).

Ces propriétés réduisent l’inconfort pour le patient et optimisent l’efficacité des déplacements dentaires.

Applications

Les fils Ni-Ti sont largement utilisés dans les arcs orthodontiques, en particulier dans les phases initiales du traitement, où des forces légères et continues sont nécessaires. Leur flexibilité permet de s’adapter aux malpositions dentaires importantes sans nécessiter de remplacements fréquents.

Les Verrous Métalliques

Rôle et Fonction

Les verrous orthodontiques, ou brackets, sont des dispositifs fixés sur chaque dent pour transmettre les forces des fils orthodontiques. Ils peuvent être collés directement sur l’émail dentaire ou soudés sur des bagues scellées autour des dents. Les brackets doivent minimiser la friction avec le fil pour faciliter les mouvements dentaires tout en assurant une fixation stable.

Matériaux Utilisés

Acier Inoxydable

L’acier inoxydable est le matériau le plus couramment utilisé pour les brackets en raison de son coût abordable, de sa résistance mécanique et de sa biocompatibilité. Il contient du fer, du chrome, du nickel, et parfois du molybdène ou du cobalt pour améliorer ses propriétés.

Titane

Les brackets en titane, fabriqués par moulage par injection, offrent une alternative sans nickel, idéale pour les patients allergiques. Leur résistance à la corrosion est supérieure à celle de l’acier inoxydable, et ils ne libèrent pas d’ions métalliques, réduisant ainsi les risques d’irritation.

Alliages Chrome-Cobalt

Les brackets en chrome-cobalt, biocompatibles et exempts de nickel, sont fabriqués en une seule pièce avec une base intégrée marquée au laser. Ils ne présentent pas de corrosion galvanique, ce qui les rend adaptés aux environnements buccaux agressifs.

Conception et Fabrication

Moyens de Fixation

  • Bagues scellées : Les attaches sont soudées sur des bagues ajustées à la morphologie de chaque dent, assurant une fixation robuste.
  • Attaches collées : Les bases des brackets sont équipées de rétentions mécaniques (grilles) ou chimiques pour un collage direct sur l’émail.

Modes de Fabrication

Les brackets peuvent être :

  • Usinés : Offrent une grande précision mais sont coûteux à produire.
  • Coulés ou injectés : Moins précis, avec une gorge moins polie, ce qui peut augmenter la friction.
  • CFAO (Conception et Fabrication Assistées par Ordinateur) : Utilisée pour les brackets linguaux (ex. : Incognito), fabriqués à partir d’empreintes numérisées pour une précision optimale.

Réduction de la Friction

Les fabricants ont modifié la conception des brackets pour réduire la surface de contact avec le fil, diminuant ainsi les forces de friction. Cela inclut des gorges plus étroites et des surfaces mieux polies.

Innovations et Perspectives

Biocompatibilité et Allergies

Les biomatériaux modernes, comme les alliages sans nickel (titane, chrome-cobalt), répondent aux préoccupations croissantes concernant les allergies. Les progrès dans les procédés de fabrication, tels que la soudure au laser, améliorent la biocompatibilité en réduisant l’oxydation et la libération d’ions.

Technologies Numériques

La CFAO et l’impression 3D révolutionnent la fabrication des brackets et des fils, permettant une personnalisation accrue et une précision inégalée. Ces technologies réduisent les coûts de production tout en améliorant l’efficacité des traitements.

Matériaux Alternatifs

Bien que les métaux dominent, des matériaux non métalliques, comme la céramique ou les polymères, sont de plus en plus utilisés pour des raisons esthétiques. Cependant, leur résistance mécanique reste inférieure à celle des alliages métalliques, limitant leur application dans certains cas.

Conclusion

Les biomatériaux constituent la pierre angulaire des traitements orthodontiques, permettant des déplacements dentaires précis et efficaces. Les alliages métalliques, tels que l’acier inoxydable, l’Elgiloy et les alliages nickel-titane, offrent une combinaison unique de propriétés mécaniques et de biocompatibilité. Les innovations, comme la soudure au laser et la CFAO, continuent d’améliorer la performance et la sécurité des dispositifs orthodontiques. Cependant, les orthodontistes doivent rester vigilants quant à la réglementation des dispositifs médicaux, à la traçabilité des matériaux et à la matériovigilance pour garantir la sécurité des patients. En tant que praticiens, ils engagent leur responsabilité dans le choix des matériaux, qui doivent répondre aux normes les plus strictes pour minimiser les risques d’allergies, de corrosion ou de réactions indésirables.

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