Les moyens d’hémostase

Les moyens d’hémostase 

Les moyens d’hémostase 

Introduction

La prise en charge de patients à risque hémorragique devient de plus en plus fréquente au cabinet dentaire, compte tenu des prescriptions actuelles d’anticoagulants et/ou d’antiagrégants plaquettaires et du fait de la fréquence des pathologies pouvant induire des saignements anormaux lors d’actes chirurgicaux.

Le médecin dentiste, confronté à ce risque, doit apprécier préalablement au geste la faisabilité de celui-ci et l’éventuelle gestion des complications per et postopératoires.

Définition

Saignement

C’est l’écoulement du sang à travers des cavités naturelles.

Hémorragie

C’est l’extravasation du sang hors de l’arbre vasculaire.

  • Le sang peut se répandre à l’extérieur du corps (hémorragie externe) ou s’épancher à l’intérieur des tissus ou entre les organes (hémorragie interne).
  • On peut dire que c’est un saignement qui ne s’arrête pas spontanément, nécessitant une intervention médicale interne ou externe.

Hémostase

C’est l’ensemble de mécanismes physiologiques qui aboutissent au maintien de la fluidité sanguine à l’intérieur des vaisseaux sanguins, de prévenir les hémorragies et de les arrêter en cas de brèche capillaire.

Hématémèse

Vomissement de sang d’origine digestive.

Hémoptysie

Rejet par la bouche de sang provenant de l’appareil respiratoire.

Épistaxis

Saignement de nez.

Rappels

Les moyens d’hémostase 

Rappel sur la composition du sang

En coupe transversale, les artères présentent de l’intérieur vers l’extérieur :

  • L’intima, couche interne de la paroi artérielle, est formée par l’endothélium vasculaire reposant sur une couche de tissu conjonctif.
  • La media, la couche moyenne de la paroi artérielle, est composée de collagène et d’élastine. Dans les artères de petit et moyen calibre, elle contient les fibres musculaires lisses permettant la vasoconstriction.
  • L’adventice, la couche externe de la paroi artérielle, est composée de tissu conjonctif et de fibres élastiques. Elle contient les capillaires vascularisant la paroi artérielle, ainsi que des fibres nerveuses du système autonome sympathique et parasympathique.
Structure de la paroi vasculaire

Hémostase

Le sang circule sous pression à l’état liquide dans le système vasculaire.

En cas de blessure d’un vaisseau, pour arrêter l’hémorragie, les plaquettes obturent la brèche en venant y agréger. Cette première phase est l’hémostase primaire. Mais cet agrégat plaquettaire est instable et perméable ; il doit être consolidé (3 à 5 minutes).

C’est le rôle de la coagulation, qui transforme, après une cascade d’activations enzymatiques, le fibrinogène soluble en fibrine insoluble qui vient consolider l’agrégat plaquettaire en le coiffant d’un fin réseau fibrineux (5 à 10 minutes).

La masse fibrino-plaquettaire qui a obturé la brèche sera résorbée les jours suivants par la troisième phase, la fibrinolyse, après réparation de la paroi du vaisseau (48 à 72 heures).

Tests d’exploration de l’hémostase

[Contenu non fourni dans le document original]

Formes cliniques d’hémorragie

Hémorragie veineuse

Quand une veine est touchée, le sang est rouge sombre et il s’écoule en nappe.

Hémorragie artérielle

C’est l’artère qui est touchée, le sang est rouge vermeil et il s’écoule en jet, comme un jet d’eau.

Hémorragie capillaire

Un saignement de faible intensité.

Selon la durée

On distingue selon la durée trois formes d’hémorragie :

Hémorragie précoce

Lors des premières heures qui suivent un geste opératoire, avec les deux types de saignement : en jet ou en nappe.

Hémorragie secondaire

Après 12 heures du geste opératoire, elle est en nappe ou en jet, à cause de : apex résiduel, caillot non stable, tissu de granulation mal curété, etc.

Hémorragie tertiaire

Arrive rarement dans le 5ème ou 6ème jour après avulsion, sous forme d’une suffusion hémorragique discrète.

Étiologies des hémorragies

Étiologies locales

Causes iatrogènes

  • Dérapage instrumental
  • Fracture osseuse, radiculaire, présence de tartre
  • Curetage alvéolaire insuffisant
  • Non-respect des conseils post-opératoires

Causes traumatiques

  • Accident de la voie publique (AVP)
  • Patient victime de coups et blessures volontaires (CBV)
  • Sports

Étiologies générales : Patient à risque hémorragique

Maladie générale

  • Hémopathies : Anémies, hémophilies, maladie de Willebrand
  • Hépatopathies : Cirrhose, alcoolisme

Médicamenteuses

  • Les anti-inflammatoires (AAP et corticoïdes)
  • Les anticoagulants chez les patients présentant des cardiopathies et des néphropathies
  • Chimiothérapie antimitotiques (thrombopénie)

Moyens d’hémostase

Compression immédiate

Ceci est assuré par la mise en place d’une compresse pliée sur la plaie et maintenue serrée sur celle-ci.

Les moyens d’hémostase 

Moyens intrinsèques

Hémostatiques locaux résorbables

Gaze de cellulose oxydée régénérée (Surgicel®, Sorbacel®)
  • Ils se présentent sous la forme de gaze souple sèche, poreuse et résorbable.
  • Permettent l’adhésion de l’hémoglobine qui sature le pansement et crée une masse solution qui provoque l’arrêt du saignement.
  • Coagulation entre 3-4 minutes.
  • Absorption complète entre 7-14 jours.

Mise en place du Surgicel après extraction
Mise en place du Surgicel après extractions multiples
Éponge hémostatique / Éponge de gélatine
  • Sous la forme d’éponges résorbables, souples, sèches et poreuses.
  • Créent un bouchon gélatineux au contact du sang qui arrête le saignement.
  • Aide à l’établissement du caillot de sang (adhésion plaquettaire).
  • Favorise la cicatrisation.
  • Se résorbe totalement en 4 à 6 semaines au sein des tissus mous.
Les moyens d’hémostase 

Colles biologiques ou colles de fibrine (Biocol®, Tissucol®)
  • Biocompatibles (dérivées de plasma).
  • Elles permettent d’obtenir un caillot adhérent à la plaie en raison de leur excellente tolérance, de leur pouvoir hémostatique et de leur résistance.
  • Elles ne possèdent aucune toxicité, le seul risque est allergique.
  • Se présentent sous forme de deux solutions : la première avec du fibrinogène, plasminogène, et l’autre avec du chlorure de calcium et la thrombine.
  • Lors du malaxage, on obtient une solution sous forme de gel élastique qui :
    • Favorise l’adhésion tissulaire.
    • Renforce la structure du caillot, donc favorise l’arrêt du saignement.
    • Permet une cicatrisation complète en deux semaines.
Colles GRF (Gélatine-Résorcine-Formol)
  • La plaie doit être asséchée, comblée par une mèche résorbable (Surgicel) que l’on recouvre par la colle préalablement réchauffée. On obtient un pansement adhérant et stable.

Hémostatiques locaux non résorbables

  • Une mèche de gaze tassée, pli par pli de 1 cm de largeur dans l’alvéole.
  • Cette mèche peut être imbibée de différents produits hémostatiques.
  • Il convient de les déposer après 3 à 4 jours, ce qui provoque des saignements et un risque de reprise de l’hémorragie, des douleurs ainsi que des retards de cicatrisation.
  • Les dispositifs médicaux non résorbables sont peu utilisés en pratique courante du fait de la surinfection et du risque de saignement lors de la dépose du produit.

Moyens extrinsèques

Moyens chirurgicaux

Sutures
  • Utilisées lorsque l’hémorragie siège au niveau des parties molles ou en cas de plaie trop béante.
  • La suture est le moyen par lequel le fil passe d’un point à l’autre, le point étant celui par lequel l’aiguille entre en rapport avec le tissu en le transperçant. Elle détermine l’acte opératoire en réadaptant le lambeau ou les berges de la plaie dans la position souhaitée.

Recommandations générales :

  • Le point de pénétration de l’aiguille sur le lambeau doit être situé au minimum à 1,5 mm du trait d’incision.
  • Le nœud ne doit jamais être situé sur le trait d’incision.
  • La suture doit rapprocher les berges en proscrivant le chevauchement, l’éversion ou l’enroulement des berges.
  • La tension du nœud ne doit pas être excessive.
  • La pince porte-aiguille peut être tenue à la manière d’un crayon.
  • Il est déconseillé de suturer des tissus de textures différentes afin de limiter le déchirement des bords des lambeaux, leur enroulement ou leur plicature.

N.B. :

  • Les plaies doivent être suturées avec mise en place de points de suture unitaires séparés, à l’aide de fils résorbables ou non résorbables.
  • Les surjets sont à éviter car le risque de saignement est plus important si un point de suture lâche.
Kit de suture

Le fil de suture :

Sertis, livrés dans des sachets stériles portant toutes les indications (courbure, section, longueur, diamètre, etc.). Ils peuvent être résorbables ou non.

Les aiguilles :

La courbure indiquée en 1/8, 3/8, 4/8 et 5/8 de cercle. Elles peuvent être de section ronde ou triangulaire.

Diamètre du filLongueur et courbure de l’aiguilleCode du produitLongueur du filSection de l’aiguille
[À compléter][À compléter][À compléter][À compléter][À compléter]
Sutures en O après extractions multiples
Mise en place de Surgicel + suture en X après extraction dentaire chez un patient à risque

Moyens prothétiques

Consistent à la mise en place de gouttières dans le but d’exercer une pression continue sur la plaie et assurer une protection optimale des tissus environnants.

Gouttières en résine

Gouttière réalisée au préalable en résine cuite (thermo-polymérisable) ou en résine acrylique (auto-polymérisable).

Renforcement de la gouttière par du Xantopren® et insertion en bouche
Gouttières thermoplastiques

Réalisées avant l’intervention à l’aide de feuilles thermoformables transparentes en Bioblaste®.

Gouttières en élastomère de silicone (Optosil, Silaplast)

Gouttière extemporanée réalisée par le praticien directement après l’acte chirurgical avec des pâtes thermoplastiques ou avec des élastomères de silicone.

Moyens médicamenteux

Utilisés lorsque les moyens locaux paraissent insuffisants.

Agents anti-fibrinolytiques

L’acide tranexamique (Exacyl®) utilisé en bain de bouche passif permet d’inhiber la fibrinolyse au niveau de la plaie en inactivant la plasmine et les enzymes salivaires.

Dicynone

250 mg/2 ml (solution).

Électrocoagulation

Appelée hémostase électrique, réalisée à l’aide d’un bistouri électrique.

Prévention d’une hémorragie

La prévention d’une hémorragie se fait tout d’abord par un bon interrogatoire, qui peut détecter une maladie à risque hémorragique, une prise de traitement modificateurs de la coagulation ou de l’agrégation plaquettaire.

En cas de présence de risque hémorragique déclaré ou suspecté, travailler en collaboration avec le médecin traitant et réaliser des examens qui permettent l’exploration des trois phases de l’hémostase.

Attitude post-opératoire et pronostic

Le pronostic est généralement bon si les conseils post-opératoires donnés au patient sont strictement respectés. Il faut éviter :

  • Les bains de bouche
  • Alimentation chaude
  • AINS
  • Antiplaquettaires
  • Mouvements d’aspiration du caillot

Une surveillance doit être mise en place jusqu’à cicatrisation complète de la plaie.

Attitude de l’odontologiste face à une hémorragie post-extractionnelle

Le praticien doit assurer l’urgence en premier lieu sans délai.

Le traitement d’urgence consiste à :

  • Mettre le patient en position semi-assise, le réconforter en lui expliquant ce qui se passe et ce que vous allez faire afin d’arrêter l’hémorragie.
  • Anesthésie locale avec vasoconstricteur, sauf contre-indication.
  • Élimination du caillot sanguin mal formé par une curette ou un bistouri électrique.
  • Révision de l’alvéole, en recherchant l’étiologie du saignement qui peut être un fragment osseux résiduel, une racine résiduelle, du tissu de granulation, etc.
  • Rinçage de l’alvéole.
  • Sutures hermétiques.
  • Compression bidigitale du site.
  • Mise en place d’une gouttière, une colle ou autre moyen.
  • Demander des bilans sanguins à la recherche de troubles pouvant expliquer l’hémorragie.
Compression manuelle bidigitale par le praticien pendant 3 minutes
Compresse mordue très fortement par le patient pendant une demi-heure
  • En cas d’une hémorragie rebelle à toute hémostase locale, il est impératif d’hospitaliser le malade dans un service spécialisé.
  • Une prise de contact à 24-48 heures est intéressante afin de s’assurer des suites opératoires et la bonne mise en application des conseils post-opératoires.
  • Un rendez-vous de contrôle sera programmé sept jours après l’intervention, pour déposer les éventuelles sutures et objectiver la cicatrisation.

Conclusion

  • La chirurgie buccale est une chirurgie à part entière dans le sens où elle présente les mêmes risques et doit répondre aux mêmes critères de vigilance et de sécurité que tout autre acte de chirurgie.
  • Le respect des règles chirurgicales, la connaissance de l’anatomie et la maîtrise des gestes et des techniques permettent au médecin dentiste de minimiser la plupart des risques au cours d’une intervention.
  • L’interrogatoire médical reste une étape très primordiale afin de prévenir le risque hémorragique chez les patients atteints d’anomalies de la crase sanguine.

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Les moyens d’hémostase 

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