les urgenes en odontologie conservatrice et endodontie :
Généralités
Selon ACHERMANN, l’urgence en odontologie conservatrice et endodontie est la survenue d’un problème diagnostic et thérapeutique dont l’examen ne peut être différé et qui nécessite une décision immédiate.
Les causes engendrant un état d’urgence sont variées, mais selon des statistiques établies par MITCHELL, ce sont les inflammations et infections pulpaires et péri-apicales qui prédominent par les phénomènes douloureux qu’elles génèrent. Cependant, un désordre inesthétique peut également amener certains patients à consulter en urgence.
La consultation en urgence
La consultation doit être sérieuse et comporter un entretien avec le patient pour bien appréhender les signes qui l’ont amené à consulter en urgence.
Un examen clinique minutieux, complété de clichés radiographiques de bonne qualité, doit permettre de poser un diagnostic précis avant d’entreprendre un traitement ou de délivrer une prescription. De même, l’état de santé du patient doit être sérieusement évalué avant tout acte.
Les urgences en odontologie conservatrice et endodontie (OC-E)
Urgences endodontiques
Pulpite réversible
Définition : La pulpite réversible, ou hyperhémie pulpaire, est un stade d’inflammation légère de la pulpe, associant une augmentation transitoire du flux sanguin et une sensibilisation nerveuse périphérique due aux molécules pro-inflammatoires.
Circonstances : La pulpite réversible s’observe à chaque fois que la pulpe est soumise à une agression. Cette dernière peut être de nature très variable :
- Bactéries : c’est le cas le plus fréquent.
- Dénudation radiculaire.
- Agressions physiques et/ou chimiques, notamment les douleurs post-opératoires après un traitement conservateur.
Signes d’appel : Douleur aiguë déclenchée par :
- Le froid ;
- Les gestes quotidiens (par exemple, le brossage des dents) ;
- Le sucre.
Signes cliniques :
- Douleurs aiguës, passagères et provoquées (notamment par le froid), jamais spontanées.
- Test électrique et au froid positif, la sensibilité cesse après l’application du stimulus.
Premier geste :
- Pulpite réversible post-opératoire :
- Rassurer le patient.
- Les douleurs disparaissent dans les 48 heures.
- S’il s’agit d’une dent mono-radiculée, la totalité du parenchyme pulpaire doit être éliminée, et le canal irrigué à l’aide d’hypochlorite de sodium.
- Si nécessité de temporisation, mise en place d’un eugénate étanche.
Prise en charge : Traitement conservateur définitif, si temporisation lors de la première séance.
Pronostic : Très favorable dans la grande majorité des cas, si le traitement conservateur définitif est correctement mené.
Pulpite irréversible
Définition : La pulpite irréversible est une inflammation sévère de la pulpe qui ne régresse pas malgré la suppression de la cause de la douleur initiale. Si l’agression dépasse le potentiel réparateur de la pulpe, une pulpite irréversible s’installe. C’est la principale cause des consultations en urgence.
Circonstances : Les agressions pulpaires responsables de l’inflammation irréversible du tissu pulpaire sont nombreuses :
- Agressions physiques (chaleur des rotatifs, traumatismes ou microtraumatismes) ou chimiques (composés de certaines restaurations).
- Dénudation radiculaire, abrasions.
- Bactéries par la progression de la carie.
- La pulpite irréversible est le plus souvent la conséquence d’une lésion carieuse.
Signes d’appel : Le patient se présente à la consultation fatigué, irritable, asthénique.
Signes cliniques : La douleur est spontanée, aiguë, pulsatile, lancinante, parfois irradiante. Elle correspond à une douleur profonde, difficilement localisable et fortement désagréable, dépressive. Cette douleur est exacerbée par le chaud et souvent atténuée par le froid. Elle est difficilement calmée par les médicaments, y compris les anti-inflammatoires non stéroïdiens.
Premier geste : En urgence, l’objectif du traitement est de réduire la pression intra-pulpaire et d’éliminer les irritants. Le diagnostic est réalisé à partir :
- De l’anamnèse (apparition de la douleur, soulagement éventuel avec le froid).
- De l’évaluation clinique (tests de vitalité pulpaire fortement positifs).
- De l’examen radiographique, qui montre dans la plupart des cas la cause (atteinte carieuse).
Le traitement est réalisé le plus rapidement possible sous anesthésie locale, une fois le diagnostic posé. Il consiste en la mise en place d’un champ opératoire :
- En l’absence de douleur ligamentaire, le traitement endodontique peut être conduit dans la séance.
- S’il s’agit d’une dent mono-radiculée, la totalité du parenchyme pulpaire doit être éliminée, et le canal irrigué à l’aide d’hypochlorite de sodium.
- S’il s’agit d’une dent pluri-radiculée, la pulpotomie (éviction de la pulpe camérale) seule est suffisante pour réduire la surpression pulpaire.
- Pour les patients à risque d’endocardite infectieuse, le traitement endodontique doit être réalisé en une seule séance. Sinon, la dent devra être extraite.
- Une restauration étanche doit être posée à la fin de la séance.
Prise en charge secondaire :
- Traitement endodontique complet si celui-ci n’a pas été réalisé lors de la séance d’urgence.
- En fonction de l’atteinte tissulaire, un traitement conservateur ou prothétique adapté sera proposé.
Pronostic :
- Généralement bon, si la thérapeutique adaptée est instaurée.
- En l’absence de traitement, la pulpe se nécrose et une infection des tissus péri-apicaux s’installe.
Que dire au patient :
- Une ordonnance de paracétamol (1 g toutes les 6 heures pendant 24 heures) suffit généralement.
- Suivi du traitement.
- Hygiène buccale.
Parodontite apicale aiguë
Définition : La parodontite apicale aiguë (PAA) est une inflammation du parodonte profond dont les causes sont très diverses. Dans de nombreux cas, la PAA correspond à un passage d’agents bactériens dans le périapex à partir du système canalaire.
Circonstances : Les causes de PAA les plus fréquentes ont pour origine :
- Un traumatisme occlusal.
- Une pulpite aiguë irréversible. La majorité des pulpites aiguës s’accompagne de signes de PAA.
- Le passage d’une parodontite apicale chronique en phase aiguë. La pulpe est alors nécrosée.
- Une procédure endodontique, soit en inter-séance, soit après un traitement.
- Une atteinte parodontale profonde.
Signes d’appel : Le patient présente la sensation subjective d’avoir une dent « longue ».
Signes cliniques : La parodontite apicale aiguë est responsable de douleurs parfois intenses. La dent est très douloureuse à la percussion, empêchant la mastication, voire la simple fermeture buccale. Un léger épaississement ligamentaire peut être visible à la radiographie.
Premier geste : Le premier geste dépend de l’origine et du type de PAA :
- Si la pulpe est vivante : pulpectomie complète et rigoureuse sous irrigation abondante visant à éliminer tous les filets pulpaires responsables de la parodontite.
- Si la pulpe est nécrosée : mise en forme canalaire sous irrigation abondante de tous les canaux.
- La cavité d’accès doit être refermée à l’aide d’une obturation étanche et résistante.
- La dent doit impérativement être mise en sous-occlusion.
Prise en charge : Traitement endodontique définitif avec obturation coronaire étanche.
Pronostic : Bon si l’étiologie est uniquement endodontique.
Abcès apical aigu
Définition : L’abcès apical aigu (AAA) est une parodontite apicale suppurée. Il y a formation de pus qui s’accumule dans le périapex. Cette surpression au niveau de la région apicale est responsable de douleurs intenses.
Circonstances : L’abcès apical aigu fait suite à une parodontite apicale non prise en charge.
Signes d’appel : Ce sont les signes de la parodontite apicale aiguë.
Signes cliniques :
- Douleur intense : la dent est particulièrement sensible à la percussion et à la mastication.
- La palpation au niveau de la lésion apicale est douloureuse.
- La présence d’un abcès gingival est possible, généralement accompagné d’une diminution de l’intensité douloureuse.
- Des signes généraux d’infection peuvent s’observer avec fièvre et malaise du patient.
- Signes radiologiques : Une lyse osseuse apicale signe la présence d’une lésion périapicale.
Premier geste : L’objectif du traitement de l’urgence est d’obtenir un drainage du pus. Il est important de considérer l’intérêt de conserver la dent, si la dent est possible :
- Si le système canalaire est accessible et perméable :
- Drainage de pus par voie intra-canalaire.
- Instrumentation et désinfection ; le pus peut remonter dans le canal, soulageant directement le patient.
- Laisser la dent ouverte pendant 48 heures.
- Si le réseau canalaire n’est pas accessible : Le drainage est recherché en trépanant la corticale osseuse.
- Si un abcès gingival est associé :
- Si le drainage est obtenu par voie intra-canalaire, aucune raison ne justifie un nouveau drainage par la voie gingivale.
- Si l’accès au canal est compromis et que l’abcès est fluctuant, incision franche avec une lame de bistouri insérée jusqu’au contact osseux.
- L’incision de l’abcès peut être décidée en complément du parage canalaire si il est décidé de ne pas laisser la dent ouverte.
- Chez le sujet présumé sain, si le drainage est obtenu par voie canalaire ou externe et en l’absence de signes généraux, une antibiothérapie n’est pas recommandée.
- Dans tous les autres cas, une prescription d’amoxicilline (2 g/jour pendant 7 jours).
Prise en charge secondaire : Si la dent est conservée, traitement endodontique définitif avec obturation coronaire étanche.
Pronostic : Bon si l’étiologie est uniquement endodontique.
Syndrome du septum
Définition : Le syndrome du septum est une forme d’ostéite alvéolaire qui touche le septum interdentaire. Il se caractérise principalement par une douleur violente, le plus souvent au cours des repas ou lors de la mastication. Les douleurs résultent de la compression mécanique, mais surtout du développement bactérien associé qui entraîne une inflammation du site.
Circonstances : Les douleurs associées au syndrome du septum s’observent au cours de la mastication, mais peuvent parfois être continues.
Terrain : Le syndrome du septum est la conséquence d’une perte d’un point de contact fonctionnel entre deux dents. Il signe le plus souvent la présence d’une lésion carieuse, d’une obturation débordante ou d’une prothèse défectueuse.
Signes d’apppel : Douleur vive et lancinante au cours des repas.
Signes cliniques :
- La papille dentaire apparaît tuméfiée.
- La pression sur la papille reproduit la douleur et signe le diagnostic.
Premier geste :
- Éviction des débris alimentaires et de tous les corps étrangers présents dans l’espace interdentaire.
- Antisepsie de la zone agressée.
- Reconstitution d’un point de contact fonctionnel : traitement restaurateur ou prothétique.
Pronostic :
- Si le traitement est relativement rapide, les pertes tissulaires seront minimes.
- Certains cas de syndrome du septum peuvent être responsables de véritables nécroses osseuses, pouvant nécessiter un traitement chirurgical.
Urgences de confort et urgences esthétiques
Définition générale : L’urgence de confort n’a pas de définition précise. Il s’agit d’une urgence qui, pour le praticien, ne revêt pas un caractère de soin immédiat, mais qui, pour le patient, peut sembler essentielle ou de grande importance.
Perte d’un amalgame
L’amalgame est généralement placé sur une dent postérieure. Dans le cadre de l’urgence, un produit d’obturation temporaire à l’oxyde de zinc/eugénol, ou IRM, ou un pansement de type aavitCavit peut être mis en place après nettoyage sous irrigation de la cavité. L’amalgame peut être refait dans la séance si le temps disponible le permet.
Perte ou fracture d’un composite
- Composite postérieur : L’attitude peut être la même que pour l’amalgame.
- Composite antérieur : Le traitement ne laisse pas d’autre solution que de le refaire si la gêne est esthétique, ou, éventuellement, de le meuler en attente d’une réfection définitive si la gêne est fonctionnelle (blessure, etc.).
Restauration en sur-occlusion
Après la réalisation d’une restauration, le patient peut décrire le fait que « la dent touche en premier ». Il est fréquent que le contrôle de l’occlusion d’une restauration dans le même temps que pendant sa réalisation ne suffise pas à résoudre le problème. Dans ce cas, un meulage avec un test au papier articulé, suivi d’un nouveau polissage, est nécessaire.
Dyschromie
La dyschromie devient une urgence si le patient est exigeant et souhaite y remédier le plus rapidement possible. Les solutions incluent :
- Éclaircissement.
- Reconstitution esthétique.
Conclusion
L’urgence en odontologie conservatrice et endodontie (O.C-E) occupe une place importante dans la pratique quotidienne.
L’objectif principal de notre traitement d’urgence est :
- De bien maîtriser le processus pathologique en cours.
- De soulager immédiatement le patient.
- D’initier un processus de cicatrisation qui favorise la mise en œuvre ultérieure des thérapeutiques habituelles.
Un diagnostic précis et une connaissance approfondie des conduites à tenir permettent au praticien de réaliser les gestes appropriés, rendant l’acte thérapeutique sûr, efficace et rapide.
Voici une sélection de livres:
- Odontologie conservatrice et endodontie odontologie prothètique de Kazutoyo Yasukawa (2014) Broché
- Concepts cliniques en odontologie conservatrice
- L’endodontie de A à Z: Traitement et retraitement
- Guide clinique d’odontologie
- Guide d’odontologie pédiatrique, 3e édition: La clinique par la preuve
- La photographie en odontologie: Des bases fondamentales à la clinique : objectifs, matériel et conseils pratique
les urgenes en odontologie conservatrice et endodontie

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.