La contention et la récidive
Introduction
L’orthopédie dento-faciale ne cesse d’évoluer, des progrès sont réalisés dans l’établissement du diagnostic, les objectifs du traitement et l’élaboration du plan de traitement, et surtout dans l’assurance de la stabilité thérapeutique et du bien-être fonctionnel.
Un des objectifs primordiaux de l’orthodontiste est d’assurer la stabilité des résultats obtenus à long terme. Pour atteindre cette perfection, il faut revenir au début et rechercher les causes de l’instabilité afin de les contrer.
I. La Récidive
1. Définition
La récidive post-thérapeutique est la réapparition d’une anomalie après sa correction, soit partiellement ou totalement, immédiatement après la contention ou à long terme.
2. Les Étiologies de la Récidive
Les causes de la récidive sont multiples et peuvent être classées en plusieurs catégories :
- Facteurs génétiques
- Facteurs acquis
- Facteurs thérapeutiques iatrogènes
- Facteurs post-thérapeutiques
- Facteurs humains
2.1 Facteurs Génétiques
En connaissant ce facteur peu ou pas modifiable, on peut au moins choisir un traitement qui s’adapte aux conditions génétiques :
- La croissance : Sa direction et son intensité obligent le praticien à orienter sa thérapeutique dans le même sens que cette dernière afin d’éviter la récidive. La prévision de la croissance est donc importante pour déterminer et éviter la croissance dite « défavorable » responsable de récidive.
- Le facteur musculaire : Les caractéristiques musculaires telles que la longueur, la tonicité et l’épaisseur, déterminées génétiquement, doivent être prises en considération lors du diagnostic (diagnostic étiologique) afin de choisir les thérapeutiques adéquates pour éviter la récidive.
Exemples : - La persistance d’une hypotonicité labiale favorise la récidive de la pro-alvéolie.
- La persistance de la macroglossie favorise la récidive des pro-alvéolies et des béances.
2.2 Facteurs Fonctionnels Acquis
La langue, que ce soit au repos ou au cours des fonctions oro-faciales, joue un rôle primordial grâce à ses appuis et sa motricité.
- La déglutition : Les appuis linguaux incorrects lors de la déglutition atypique, ainsi que la contraction des muscles faciaux, induisent un déséquilibre du couloir dentaire de Château et favorisent la récidive des béances, pro-alvéolies, latéro-déviations, etc. C’est pourquoi la rééducation de cette fonction est indispensable pour éviter la récidive.
- La respiration buccale : Elle influence non seulement la posture linguale et le développement des arcades dentaires, mais aussi la croissance maxillaire. La persistance de la respiration buccale entraîne la récidive de l’open bite, de la béance, de l’endo-gnathie maxillaire, etc.
- La phonation incorrecte : Des appuis linguaux inadéquats non corrigés sont responsables de la récidive. L’interposition latérale de la langue dans l’articulation des sons comme S, J, CH favorise la récidive de la supraclusion antérieure et de l’infraclusie postérieure.
- Les para-fonctions :
- La succion du pouce cause la récidive de la béance, de la pro-alvéolie supérieure et de la rétro-alvéolie inférieure.
- La succion des lèvres : La persistance de la succion labiale supérieure entraîne la récidive de la rétro-alvéolie supérieure et de la pro-alvéolie inférieure.
2.3 Facteurs Humains
Ce facteur vise deux éléments essentiels : l’âge du patient et sa coopération.
- L’âge : Lié directement à la croissance et au parodonte du patient, les possibilités de récidive augmentent selon que la croissance soit à son pic, avant ou après, qu’elle soit terminée ou non. C’est pourquoi on préfère un traitement précoce dans les classes II et tardif dans les classes III. Le parodonte de l’enfant est en perpétuel remaniement tissulaire, d’où la possibilité de réapparition d’encombrement après traitement. En revanche, l’os plus dense et les ligaments peu compressibles chez l’adulte empêchent la dent de se redéplacer.
- La coopération : Elle se base sur le port des dispositifs de contention, ainsi que sur l’effort fourni par le patient dans la suppression des para-fonctions et le maintien des exercices de myothérapie.
2.4 Facteurs Thérapeutiques Iatrogènes
Ces facteurs peuvent résulter de :
- Un diagnostic incorrect ou la négligence du diagnostic étiologique.
- Un mauvais choix du plan de traitement, mal adapté à la croissance.
- Une mauvaise finition du traitement.
- Une contention mal adaptée.
- Un mauvais choix du moment de traitement.
- Une mauvaise technique thérapeutique.
2.5 Facteurs Post-Thérapeutiques
Certains traitements, surtout ceux effectués précocement, sont exposés à récidiver à cause des changements du terrain, tels que :
- L’éruption de nouvelles dents, notamment les dents de sagesse, qui prennent une part de responsabilité dans la récidive des encombrements inférieurs.
- La croissance tardive des bases maxillaires, essentiellement de la mandibule, qui favorise la récidive des classes III et des supraclusions.
- Les phénomènes de vieillissement.
3. Comment Prévenir la Récidive ?
On a pris l’habitude de penser directement à la contention pour prévenir la récidive, mais en réalité, elle vient en dernier. Pour résumer, il suffit de revoir tous les facteurs étiologiques, de les contrer ou de les éviter pour assurer la stabilité des résultats.
- Prévision de la croissance : Elle permet d’apprécier la rotation mandibulaire, la quantité de croissance et son intensité.
- Réalisation des critères de fin de traitement : Occlusaux, esthétiques, fonctionnels.
- L’hypercorrection.
- Autres préventions : Stripping, équilibration occlusale post-orthodontique, corono-plastie, fibrotomie supracrestale.
- Appareillage de contention.
II. La Contention
1. Définition
La contention est un procédé destiné à maintenir ou à parfaire les résultats obtenus, afin d’éviter la survenue de récidive. Elle commence à la fin du traitement actif, lorsque l’orthodontiste juge qu’il a atteint ses objectifs.
2. Les Buts de la Contention
- Le principal but est la prévention de la récidive.
- Stabilisation des dents pendant la réorganisation tissulaire.
- Favoriser l’établissement d’une bonne occlusion.
- Contrer les effets d’une croissance résiduelle allant dans le mauvais sens des résultats obtenus.
- Maintenir la correction du décalage squelettique.
- Maintenir les conditions favorables pour le déroulement correct des différentes fonctions.
3. Quand Faut-Il Mettre ou Ne Pas Mettre une Contention ?
Certains auteurs sont en désaccord sur l’utilité de la contention, mais cela reste relatif à certaines anomalies, car il n’est plus question de douter du rôle primordial de la contention.
Cas où la contention est indispensable :
- Un nivellement avec expansion.
- Fermeture d’espaces de grandes amplitudes.
- La correction de rotations ou malpositions sévères.
- Après correction de classes III héréditaires.
- Après traitement des fentes labio-palatines.
- Traitement précoce avant la fin de la croissance résiduelle.
Cas où on peut s’en passer (contention naturelle) :
- Après la correction d’un articulé croisé incisif avec un bon recouvrement.
- Après correction d’un articulé croisé postérieur avec une bonne intercuspidation.
- Cas de classe II traité par propulsion, si la croissance mandibulaire n’est pas encore terminée (elle sert de moyen de contention).
- Cas de classe II traité par freinage extra-buccal (FEB) maxillaire, si la croissance est terminée (pas de récidive).
- Cas de repositionnement d’une dent incluse ou retenue.
- Cas d’une dysharmonie dento-maxillaire (DDM) par microdontie après traitement et mise en place d’une prothèse.
4. Moment de la Contention
Même si les auteurs diffèrent sur le moment de la contention, l’intervalle de temps entre la dépose du traitement actif et la mise en place de la contention ne doit pas dépasser une semaine pour l’ensemble des auteurs.
- Burston : Une semaine après pour observer la stabilité.
- Reitan : Le mouvement de récidive est maximal après 2 heures de la dépose du dispositif actif ; durant les 5 heures qui suivent, il faut placer la contention.
- Julien Philippe : Pour une contention immédiate.
5. Durée de la Contention
La décision de la durée dépend de plusieurs facteurs : l’âge du patient, le stade de la croissance et sa direction, la typologie faciale, le degré de complexité de l’anomalie traitée et le type de contention.
La contention peut être prolongée, semi-permanente ou permanente (portée à vie). Elle doit se prolonger jusqu’à ce que les tissus environnants et les fonctions orales soient adaptés à la nouvelle position dentaire et à la nouvelle forme et position des arcades.
- Pour une contention amovible, la majorité des auteurs préconisent un port de 3 mois jour et nuit, puis 9 mois uniquement la nuit, soit 1 an au total.
- Ce port peut être plus long, mais discontinu, dans les cas de rotations initiales importantes, de dysharmonie dento-maxillaire traitée sans extractions, ou si les deuxièmes molaires ne sont pas évoluées en début de contention.
- La contention peut être maintenue chez certains patients en cours de croissance (hyperdivergents, deep-bite, classes III), montrant un problème fonctionnel persistant, ou dont les dents de sagesse sont conservées.
- La durée augmente également lorsqu’il y a eu des mouvements importants et rapides. Les traitements longs sont généralement plus stables.
- Une contention de plusieurs années, voire à vie, est nécessaire pour les patients, surtout adultes, à parodonte fragile.
6. Les Types de Contention
6.1 Active
Elle fait partie intégrante du traitement et a pour but :
- Fermeture des espaces résiduels dus aux bagues molaires.
- Correction d’anomalies mineures non traitées pendant le traitement actif.
- Maintien de la correction du décalage antéro-postérieur.
6.2 Passive
C’est la plus fréquemment utilisée. Elle ne délivre pas d’action mécanique et ne fait que maintenir les résultats obtenus.
6.3 Fixe
Elle est généralement collée sur la face linguale des dents, reste en place en permanence et ne sera pas déposée.
6.4 Amovible
Le risque de récidive est important avec ce type d’appareillage.
7. Les Principaux Dispositifs de Contention
7.1 Amovibles Uni-Maxillaires
- Plaque de Hawley : La plus utilisée, semi-passive, elle peut fermer de petits diastèmes. Avec peu d’interférences occlusales, elle favorise l’occlusion des incisives et des canines. Elle est peu épaisse.
- Plaque avec potence de Vienne : Contention active (par la tension d’un élastique vestibulaire), indiquée en cas de persistance de diastèmes incisifs importants.
- Plaques amovibles avec accessoires (ressort, vis…) : Contentions actives pour corrections unitaires mineures.
- Plaque avec plan incliné de propulsion : Utilisée dans les classes II.
- Plaque d’Eschler pour les classes III : Plaque maxillaire avec un bandeau vestibulaire aux incisives inférieures.
- Enveloppe linguale nocturne (ELN) : Contient la langue mais n’assure pas le maintien de l’alignement.
- Plaque de Sved : Recouvre le bord des incisives maxillaires et offre une butée aux incisives mandibulaires. Indiquée pour contenir la correction d’une supraclusion initiale.
- Les gouttières :
- Retainer : Dispositif avec peu d’emprise palatine, maintient fermement les dents mais pas suffisamment pour contenir les corrections de fortes rotations. Ses crochets occlusaux peuvent interférer avec l’occlusion.
- Gouttière thermoformée : Peu encombrante, transparente, elle fixe la dent dans les trois sens de l’espace. Toutefois, elle laisse peu de possibilités de calage naturel, interfère avec l’occlusion et peut provoquer des béances si portée longuement. De petits mouvements sont possibles, en version, en intercalant une fine épaisseur de composite.
7.2 Amovibles Bi-Maxillaires
- Tooth positioner (gouttière de repositionnement) : Gouttière préfabriquée en plastique mou et transparent, adaptée à des dents de forme et de proportion habituelles et à des solutions orthodontiques classiques (avec ou sans extractions). Disponible en différentes tailles, toujours selon la même forme d’arcade, elle n’est pas individualisable. Libre en bouche, elle corrige un défaut ponctuel léger mais maintient mal la correction des rotations.
- Les activateurs : Permettent de consolider et d’améliorer les rapports maxillo-mandibulaires dans le sens antéro-postérieur et vertical.
- Tractions intermaxillaires (TMA) : Placées sur plaque amovible ou retainer, elles permettent de stabiliser les corrections des décalages sagittaux et frontaux.
7.3 Fixés Uni-Maxillaires
- Fil collé sur deux dents : Canines gauche et droite. Ce fil de section ronde (.024), poli, a une bonne longévité. Il maintient bien la distance inter-canine mais assure mal la contention des dérotations incisives ou de leur linguo-version. Il laisse une adaptation occlusale incisive possible, notamment verticale.
- Fil collé sur six dents : Canines et incisives. Réalisé le plus souvent en fil rond tressé (.0175 et .0215), ce dispositif, collé au 1/3 occlusal de la dent, contrôle mieux la correction des rotations. Intégré parfois dans des cales incisives, au maxillaire, pour la contention des supraclusions, il peut être plus étendu pour contenir la fermeture d’un espace d’extraction ou lors de la présence d’un parodonte fragile (chez l’adulte notamment). Le décollement d’une dent peut passer inaperçu.
* Attelles coulées–collées.
Gouttière thermoformée transparente Retainer maxillaire.
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Tractions intermaxillaires de classe II Plaque de Hawley
Sur retainers.
La contention et la récidive
Fil de contention tressé collé sur le groupe Arc lingual 3–3 collé
Incisivo-canin mandibulaire.
La contention et la récidive
Enveloppe linguale nocturne. Les activateurs
Tooth positionner
Voici une sélection de livres:
- “Orthodontie de l’enfant et de l’adulte” par Marie-José Boileau
- Orthodontie interceptive Broché – Grand livre, 24 novembre 2023
- ORTHOPEDIE DENTO FACIALE ODONTOLOGIE PEDIATRIQUE
- Orthopédie dento-faciale en dentures temporaire et mixte: Interception précoce des malocclusions Broché – Illustré, 25 mars 2021
- Nouvelles conceptions de l’ancrage en orthodontie
- Guide d’odontologie pédiatrique: La clinique par la preuve
- Orthodontie linguale (Techniques dentaires)
- Biomécanique orthodontique
- Syndrome posturo-ventilatoire et dysmorphies de classe II, Bases fondamentales: ORTHOPÉDIE ET ORTHODONTIE À L’USAGE DU CHIRURGIEN-DENTISTE
La contention et la récidive

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.