BIOFILM DENTAIRE, Parodontologie

BIOFILM DENTAIRE, Parodontologie

BIOFILM DENTAIRE, Parodontologie

INTRODUCTION

Le biofilm dentaire, également appelé plaque dentaire, est un sujet clé en odontologie, impliquant une communauté microbienne complexe qui joue un rôle dans les pathologies buccales telles que les caries et les maladies parodontales. Ce document explore sa définition, sa formation, sa composition, et son métabolisme bactérien.

DÉFINITION

Le biofilm dentaire est défini comme « une accumulation hétérogène, adhérente à la surface des dents ou située dans l’espace gingivodentaire; elle se retrouve aussi sur les différents matériaux de restauration dentaire ainsi que sur les prothèses. Elle est composée d’une communauté microbienne riche en bactéries aérobies et anaérobies, enrobées dans une matrice intercellulaire de polymères d’origine microbienne et salivaire » (Mouton et Robert, 1994).

Il s’agit d’un biofilm structurellement et fonctionnellement bien organisé. Cette plaque bactérienne, présente chez tous les individus dès l’apparition des dents, varie d’un sujet à l’autre. Elle se forme en quelques heures et se dépose plus facilement dans les zones inaccessibles au brossage.

Un individu ayant une bonne hygiène possède 5 à 20 mg de plaque dentaire; sans hygiène, les proportions peuvent être multipliées par 10. La plaque dentaire est composée à 80 % d’eau et à 20 % d’éléments solides (protéines, glucides, lipides et nombreuses bactéries) (Mouton et al., 1999).

Il faut distinguer la plaque dentaire de la materia alba, un dépôt mou blanc crémeux constitué d’agrégats bactériens, leucocytes, cellules épithéliales desquamées et débris alimentaires. Ce dépôt est peu adhérent et se détache facilement par un jet d’eau ou d’air.

ASPECT CLINIQUE DE LA PLAQUE DENTAIRE

La plaque dentaire n’est visible à l’œil nu que lorsqu’elle atteint une certaine épaisseur. Elle se présente comme un dépôt de couleur blanc jaunâtre, grise ou jaune grisâtre. Elle peut être mise en évidence soit en raclant la surface dentaire avec la pointe d’une sonde parodontale, soit en utilisant un révélateur de plaque.

CLASSIFICATION DE LA PLAQUE DENTAIRE

Selon la localisation

  • Plaque supra-gingivale : Située dans un environnement aérobie, en présence de salive et de ses composants. Elle est exposée aux mécanismes d’attrition (mastication, déglutition, phonation) et à la chasse salivaire.
  • Plaque sous-gingivale : Située dans un environnement anaérobie, en présence du fluide gingival et de ses composants. Elle se trouve dans un cul-de-sac, sans chasse liquidienne, avec peu de forces mécaniques gênant les bactéries. Elle est moins adhérente et moins dense que la plaque supra-gingivale.

Selon le potentiel pathologique

  • Plaque non pathogène : Compatible avec l’état de santé dentaire et parodontale, elle est contrôlée mécaniquement et n’entraîne aucune pathologie. Elle est principalement formée de bactéries Gram+ (streptocoques et Actinomyces surtout).
  • Plaque cariogène : Riche en bactéries cariogènes.
  • Plaque parodontopathogène : Riche en bactéries parodontopathogènes, favorisées par un environnement propice (raréfaction d’O2, diminution du potentiel d’oxydo-réduction, manque d’hygiène).

Actuellement, le concept de plaque écologique prévaut : les caries et les maladies parodontales sont considérées comme des maladies infectieuses dues à des bactéries opportunistes, résultant d’un déséquilibre de l’écosystème buccal. Ces pathogènes opportunistes sont présents en petit nombre chez la plupart des individus.

FORMATION DE LA PLAQUE DENTAIRE

L’élaboration de la plaque dentaire dépend de la capacité des bactéries à adhérer aux surfaces dentaires, via un film organique d’origine salivaire appelé pellicule acquise exogène (PAE). Cette pellicule se forme spontanément dès l’éruption des dents et en quelques minutes après un nettoyage prophylactique. Elle est principalement composée de glycoprotéines et de protéines salivaires qui se lient à l’hydroxyapatite de la surface amélaire. Bien qu’elle protège les dents des agressions mécaniques et acides, elle favorise l’installation de la plaque dentaire.

Étapes de la formation

  1. Association : Les bactéries se fixent sur les dents par des forces électrostatiques.
  2. Adhérence : Un petit nombre de bactéries s’ancre solidement sur les récepteurs de la PAE en tant que premières colonisatrices grâce à des molécules de surface (adhésines), principalement des streptocoques et actinomycètes. D’autres micro-organismes s’arriment à ces premiers colonisateurs.
  3. Multiplication : Les bactéries se multiplient, formant des micro-colonies.
  4. Micro-colonies : De nombreux streptocoques forment des polysaccharides extracellulaires qui protègent les bactéries.
  5. Biofilm (plaque adhérente) : Les micro-colonies se regroupent sous forme de complexes dotés d’avantages métaboliques pour les bactéries constituantes.
  6. Croissance (maturation) : Un système circulatoire se forme dans le biofilm. Les micro-organismes échangent des métabolites, des facteurs de résistance et de virulence. Les anaérobies augmentent en nombre. Les métabolites et les composants de la paroi cellulaire activent les défenses de l’hôte, mais les bactéries sont très protégées contre les polynucléaires neutrophiles (PMN) et les bactéricides.

Note : Les espèces bactériennes des complexes jaune et vert sont compatibles avec la santé parodontale, tandis que celles des complexes rouge et violet sont les plus virulentes.

Composantes du biofilm

  • X: Pellicule : Film organique initial (PAE).
  • Y: Biofilm – « attached plaque » : Plaque adhérente.
  • Z: Phase planctonique : Bactéries non attachées.

COMPOSITION, ARCHITECTURE DE LA PLAQUE DENTAIRE

La plaque dentaire est composée de :

  • Eau : 80 %.
  • Matières solides : 20 %, comprenant des éléments organiques et inorganiques.

La composante cellulaire, principalement bactérienne, représente 70 % de la masse totale, tandis que la matrice interbactérienne représente 30 %. Cette matrice, d’origine bactérienne, peut être granuleuse ou amorphe et se forme au fur et à mesure des interactions bactériennes.

Composition de la matrice

  • Partie inorganique : Minéraux (Ca++, phosphates, Fe, Mg, K, etc.).
  • Partie organique :
    • Protéines : Issues de l’activité bactérienne lors de la dégradation des glycoprotéines salivaires, des membranes et enveloppes bactériennes.
    • Lipides : Provenant des bactéries mortes, sous forme de fragments ou vésicules riches en lipides après destruction des membranes.
    • Glucides : Issus de l’activité bactérienne sur le saccharose alimentaire. Ces polysaccharides extracellulaires assurent l’adhérence et servent de réserve énergétique et nutritive aux bactéries.

Schéma : Un schéma illustre l’association plaque-bactérie entre la surface dentaire et les tissus parodontaux (non inclus dans le document fourni).

MÉTABOLISME BACTÉRIEN

Rôle de l’alimentation dans la formation du biofilm

L’alimentation joue un rôle important dans le développement du biofilm dentaire, bien que celui-ci puisse se former en l’absence d’apport alimentaire oral. L’alimentation peut modifier la quantité et la composition du biofilm. Une alimentation dure et fibreuse entrave la formation du biofilm, tandis qu’une forte consommation de protéines et de sucres fermentescibles favorise la présence de bactéries saccharolytiques et protéolytiques. La restriction de ces nutriments réduit le nombre de ces germes.

Le métabolisme bactérien

Les bactéries du biofilm métabolisent les sucres et les produits azotés pour répondre à leurs besoins cellulaires, constitutifs et énergétiques, et pour accumuler des réserves. Les produits métaboliques et déchets restent majoritairement confinés, modifiant les conditions physicochimiques du biofilm.

Métabolisme glucidique

  • Les sucres (glucose, fructose, saccharose) entrent directement dans le métabolisme bactérien.
  • Une saccharose spécifique (type invertase) a été isolée chez Streptococcus mutans et Streptococcus sanguis.
  • Le glucose peut provenir du catabolisme de l’amidon, du maltose, du lactose ou des dextranes.
  • Les lévanes fournissent du fructose.
  • En anaérobiose, le métabolisme des sucres aboutit à la formation d’acide lactique, provoquant un abaissement du pH, ce qui augmente le potentiel cariogène de la plaque.

Métabolisme des acides aminés

Les bactéries ont besoin d’ammoniaque, principalement fourni par l’urée salivaire et le fluide gingival, pour synthétiser les acides aminés nécessaires à leur croissance.

  • Activité uréase : La plaque possède une forte activité uréase, produisant des radicaux NH3. Dans une plaque mature, la production d’ammoniaque dépasse les besoins des micro-organismes, entraînant une augmentation du pH.
  • Décarboxylation : La plaque contient des bioamines issues de la décarboxylation des acides aminés par des enzymes spécifiques :
    • Acide glutamique → aminobutyrate (GABA)
    • Ornithine → putrescine
    • Lysine → cadavérine
    • Histidine → histamine Le métabolisme des acides aminés tend à augmenter le pH.

Métabolisme des acides nucléiques

Des nucléases bactériennes dégradent les acides nucléiques (phosphodiestérase, ribonucléase, désoxyribonucléase). Le catabolisme des purines et pyrimidines produit de l’urée, source d’ammoniaque, qui contribue à l’augmentation du pH de la plaque.

Métabolisme des lipides

Le métabolisme des lipides fait baisser le pH de la plaque. Les bactéries métabolisent complètement les lipides :

  • En aérobiose : La β-oxydation des acides gras alimente le cycle de Krebs via la formation d’acétyl-CoA.
  • En anaérobiose : La cétogenèse produit de l’acide hydroxybutyrique et de l’acétone.

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