Les Résines Composites, Biomatériaux Dentaire

Les Résines Composites, Biomatériaux Dentaire

Les Résines Composites, Biomatériaux Dentaire

Introduction

Les résines composites se sont considérablement développées au cours des dernières années. Actuellement, elles représentent le matériau le plus utilisé en odontologie, grâce à leurs propriétés esthétiques et leur capacité à être collées aux tissus dentaires. Cette caractéristique a permis le développement d’une dentisterie peu mutilante, respectant les tissus dentaires sains, appelée dentisterie à minima.

Définition

Un matériau composite est un matériau hétérogène associant, à l’aide d’une phase de couplage, une matrice et des charges, afin que les propriétés de l’ensemble soient supérieures à celles de chacun des constituants isolés.

Composition

Phase organique (polymère)

  • Rôle : Phase dispersante, matrice résineuse, phase continue.
  • Proportion : 25 à 50 % du volume total du matériau.
  • Composants :
    • Résine matricielle : Composant chimiquement actif, généralement un monomère fluide converti en polymère rigide par une réaction de polymérisation par addition. La plus répandue est le Bis-GMA (matrice de Bowen), obtenu à partir de bis-phénol A, d’alcool glycidique et d’acide méthacrylique.
    • Diluants (contrôleurs de viscosité) : Monomères de faible poids moléculaire ajoutés pour :
      • Réduire la viscosité et augmenter la fluidité.
      • Rendre la résine plus flexible et moins cassante.
      • Inconvénients : Réduisent la résistance à l’abrasion et augmentent la rétraction de prise, ce qui peut réduire l’adaptation marginale des composites.

Phase inorganique (charge)

  • Rôle : Renforce le matériau.
  • Composition : Charges minérales (silice, quartz, etc.) ou organo-minérales, de nature, forme et taille différentes.
  • Objectifs :
    • Réduire la proportion de résine, qui est le maillon faible du matériau.
    • Augmenter les propriétés mécaniques (résistance à la traction, flexion, compression).
    • Diminuer les contraintes dues au retrait de polymérisation.
    • Compenser le coefficient de dilatation thermique élevé de la phase matricielle.
    • Assurer la radio-opacité pour la visualisation radiographique.

Agent de couplage (liant)

  • Nature : Molécule bifonctionnelle, généralement du silane.
  • Rôle : Enrobe les particules de charge pour permettre leur adhésion à la matrice via un procédé de silanisation.

Adjuvants

  • Rôle : Agissent sur la cinétique de la réaction de prise.
  • Types :
    • Inhibiteurs : Préviennent la polymérisation spontanée pour assurer la conservation du matériau (ex. : dérivés du phénol comme l’hydroquinone). L’oxygène est également un puissant inhibiteur, car les radicaux libres réagissent avec l’O₂ de l’air.
    • Amorceurs et activateurs :
      • Chimiques : Initiateurs comme le peroxyde de benzoyle, activés par des amines tertiaires (ex. : paratoluidine) pour la chémopolymérisation.
      • Photosensibles : Initiateurs comme la camphoroquinone, activés par des photons pour la photopolymérisation.

Classification des composites

Selon la granulométrie

Composites macrochargés (depuis les années 60)

  • Taille des particules : 10 à 100 µm, forme irrégulière.
  • Présentation : Deux pâtes.
  • Avantages :
    • Génèrent peu de chaleur de prise.
    • Peu coûteux.
    • Faible rétraction de prise.
  • Inconvénients :
    • Temps de travail court.
    • Temps de prise long.
    • Surface rugueuse.
    • Faible résistance à l’usure.
    • Porosité favorisant la rétention et la discoloration intrinsèque.
  • Indications : Cavités de classes I et II.

Composites microfins ou microchargés (depuis les années 70)

  • Composition : Contiennent uniquement des charges de silice (0,04 µm).
  • Taux de charge : 30 à 52 % (faibles propriétés mécaniques).
  • Types :
    • Composites microfins homogènes.
    • Composites microfins hétérogènes.
  • Avantages :
    • État de surface poli.
    • Bonne résistance à l’usure.
    • Bonne diffusion de la lumière.
    • Moins agressifs pour les dents antagonistes.
  • Inconvénients : Très faible résistance mécanique.
  • Indications : Dents antérieures non soumises à des forces occlusales importantes.

Composites hybrides (depuis les années 80)

  • Composition : Mélange de particules macro/midi/mini de verre et de microparticules de silice.
  • Types :
    • Hybrides à midi-particules : Charges de verre de 1 à 10 µm et microcharges de silice.
    • Hybrides à mini-particules (submicronique) : Particules de verre < 1 µm et microcharges de silice.
    • Hybrides nanochargés : Charges de taille nanométrique (millionième de millimètre), issus de la nanotechnologie.
  • Propriétés :
    • Mécaniques et physiques similaires aux macrochargés.
    • Esthétique et aptitude au polissage similaires aux microchargés.
    • Faible taux de rétraction.
  • Indications : Large champ d’application.

Selon le mode de polymérisation

Composites à polymérisation chimique

  • Mécanisme : Activation par mélange de deux pâtes (une contenant le peroxyde de benzoyle, l’autre une amine tertiaire).
  • Avantages :
    • Peu de chaleur de prise.
    • Peu coûteux (pas besoin de lampe).
    • Faible rétraction de prise.
  • Inconvénients :
    • Temps de travail réduit (1 à 4 min).
    • Temps de prise long (3 à 6 min).
    • Incorporation de bulles d’air, augmentant la rugosité et réduisant les performances.
    • Discoloration à long terme.
    • Nécessité de refaire les restaurations détériorées.

Composites à photopolymérisation

  • Mécanisme : Activation par photons (lumière UV à 365 nm ou visible à 420-470 nm), formant des radicaux libres (profondeur de polymérisation : 3 mm).
  • Présentation : Une seule pâte prête à l’emploi.
  • Temps d’exposition : 20 à 40 s par couche.
  • Avantages :
    • Matériau homogène, absence de bulles d’air.
    • Propriétés physico-chimiques et dureté améliorées.
    • Économie de produit.
    • Choix de teintes.
    • Maîtrise du temps opératoire et possibilité de constitution multicouche.
  • Inconvénients :
    • Augmentation de la température pendant la polymérisation.
    • Possibilité de légère douleur.

Composites duals

  • Mécanisme : Double polymérisation (chimique après mélange, accélérée par irradiation photonique).
  • Indications : Composites de scellement.

Selon la consistance du matériau

Composites fluides

  • Présentation : Seringue.
  • Composition : Microhybrides à faible taux de charges.
  • Avantages :
    • Haute capacité de mouillabilité des surfaces dentaires.
    • Flexibilité élevée (faible module d’élasticité), absorbant les contraintes.
  • Inconvénients :
    • Retrait de polymérisation élevé (4 %).
    • Faible résistance à l’usure et dureté.
  • Indications :
    • Restaurations soumises à de faibles contraintes (microcavités, lésions cervicales).
    • Substitut dentinaire.
    • Fond de cavité (fine couche comme joint viscoélastique).

Composites de consistance traditionnelle

  • Caractéristiques : Constituent la majorité des composites utilisés, avec un large champ d’application.

Composites condensables

  • Caractéristiques :
    • Développés pour faciliter le compactage dans les cavités proximales, similaires à l’amalgame.
    • Placés en couches de 5 mm.
    • Taux de charges élevé (+2 %).
  • Limites : Échecs cliniques, disparition progressive du marché.
  • Indications : Restaurations des cavités proximales postérieures.

Réaction de prise

Définition

La polymérisation est le processus par lequel un composite pâteux se transforme en matériau solide. Elle convertit les monomères en une matrice polymérisée par des moyens chimiques ou photochimiques libérant des radicaux libres.

Mécanisme de la polymérisation

  1. Libération des radicaux libres par transformation de l’initiateur sous l’influence de l’activateur.
  2. Ouverture de la double liaison vinylique par les radicaux, formant le polymère.

Types de polymérisation

Chémopolymérisation (autopolymérisation)

  • Mécanisme : Activation chimique par mélange de deux pâtes (initiateur : peroxyde ; activateur : amine tertiaire).

Photopolymérisation

  • Mécanisme : Déclenchée par un amorçage photochimique via une lampe à lumière UV ou visible.
  • Systèmes :
    • Lumière UV : Utilisée initialement.
    • Lumière visible : Développée pour réduire les défauts du système UV.

Lampes à polymériser

Types de lampes

Lampes halogènes

  • Principe : Filament de tungstène porté à incandescence (2200 °C) émettant une lumière blanche.
  • Avantages : Faible coût.
  • Inconvénients :
    • Durée de vie limitée (50 à 100 h).
    • Spectre large nécessitant des filtres.
    • Échauffement.
    • Bruit du ventilateur.

Lampes à plasma (xénon)

  • Principe : Arc électrique entre deux électrodes dans une lampe à xénon, produisant une lumière blanche intense.
  • Avantages : Temps de polymérisation court.
  • Inconvénients :
    • Spectre continu nécessitant des filtres.
    • Échauffement des tissus.
    • Coût élevé.

Lampes à laser (argon)

  • Principe : Émission de lumière bleu-vert par atomes d’argon.
  • Avantages : Temps de polymérisation court.
  • Inconvénients :
    • Coût élevé.
    • Poids, encombrement, bruit (refroidissement).
    • Nécessité de protection oculaire.

Lampes LED

  • Principe : Dispositifs à semi-conducteur émettant une radiation électromagnétique.
  • Avantages :
    • Durée de vie presque illimitée.
    • Performances stables.
    • Basse tension (6 ou 12 V).
    • Absence de bruit.
    • Rechargeable.
  • Inconvénients :
    • Faible puissance d’émission.
    • Spectre étroit (non adapté à tous les composites).
    • Faible exothermie (limite pour le blanchiment).

Facteurs influençant la photopolymérisation

Au niveau du composite

  • Taille des particules.
  • Teinte.
  • Température du composite.
  • Épaisseur de la couche.

Au niveau de la cavité

  • Profondeur de la cavité (volume de matériau polymérisé).
  • Facteur de configuration (facteur C).

Au niveau de la lampe

  • Longueur d’onde.
  • Durée d’exposition.
  • Distance entre la source et le matériau.
  • Mode d’irradiation (soft start, pleine puissance, pulsé).

Propriétés des composites

Propriétés biologiques

  • Toxicité : Considérés toxiques pour le complexe dentino-pulpaire en raison :
    • Du pH acide (5,5 à 6,5).
    • De la toxicité directe du Bis-GMA (cétone et alcool).
    • De la toxicité indirecte liée à l’infiltration bactérienne (herméticité).
  • Tolérance parodontale : Dépend de l’état de surface du matériau.

Propriétés mécaniques

  • Résistance à la compression : Satisfaisante, particulièrement pour les composites hybrides.
  • Résistance à la traction : Bonne, environ 525 kg/cm² (comparable à la dentine, inférieure à l’émail : 1000 kg/cm²).
  • Module d’élasticité : Rapport contrainte/déformation ; plus il est élevé, plus le matériau est rigide. Les microchargés ont un module faible.
  • Dureté : Conditionne l’usure et la difficulté de finition/polissage. Plus le matériau est chargé, plus il est dur.

Propriétés physiques

  • Expansion thermique :
    • Doit être proche de celle de l’émail (11,4) et de la dentine (8,3) pour assurer l’étanchéité (idéal : ~10).
    • Élevée pour les macro- et microparticules (moins chargés), nécessitant un large biseau périphérique.
  • Rétraction de prise :
    • Inconvénient majeur, variant de 1,5 à 5 % en volume.
    • Provoque un hiatus périphérique, entraînant :
      • Douleurs postopératoires.
      • Discoloration.
      • Caries secondaires.
      • Diminution de la résistance.
    • Niveau de rétraction : Macro > Micro > Hybrides (très faible).
  • Radio-opacité : Matériau radio-opaque.
  • Solubilité : Faible (0,03 %).

Propriétés esthétiques

  • Choix de teinte : Disponibilité de matériaux d’opacités différentes (émail et dentine) pour imiter la structure histologique de la dent.
  • Polissage : Meilleure qualité avec des charges de petite taille.

Indications

  • Traumatismes des dents antérieures.
  • Cavités de classes I, II, III, IV, V (sus-gingivales).
  • Anomalies de structure (ex. : mylolyse).
  • Anomalies de forme (ex. : dent naine, diastème marqué).
  • Anomalies de coloration.
  • Collage des brackets (orthodontie).

Contre-indications

  • Mauvaise hygiène bucco-dentaire.
  • Polycaries évolutives.
  • Pathologies parodontales non traitées ou non stabilisées.
  • Parafonctions traumatogènes (ex. : bruxisme).

Protocole opératoire

  1. Polissage de la dent.
  2. Choix de la teinte.
  3. Pose du champ opératoire.
  4. Préparation cavitaire :
    • Curetage dentinaire complet.
    • Conservation de l’émail non soutenu par la dentine.
  5. Asepsie de la cavité.
  6. Biseautage :
    • Réalisation d’un biseau à 45° sur les bords de l’émail (fraise diamantée à grain ultra-fin, largeur minimale 1 mm).
  7. Mise en place du fond protecteur : Protection du complexe pulpo-dentinaire avec hydroxyde de calcium (Ca(OH)₂).
  8. Choix du moule ou strip.
  9. Mordançage (etching) : Application d’acide phosphorique à 37 % pendant 30 à 60 secondes.
  10. Lavage et rinçage de la dent.
  11. Séchage : Émail présentant un aspect blanc crayeux.
  12. Vérification du fond protecteur.
  13. Bonding : Application de l’adhésif.
  14. Insertion du composite :
    • Composites autopolymérisables : Un seul apport.
    • Composites photopolymérisables : Couche par couche (2 mm).
  15. Contrôle de l’occlusion.
  16. Finition et polissage : Utilisation de fraises en carbure de tungstène ou diamantées, meulettes et pâte à polir.

Conclusion

Les composites ont connu de nombreuses améliorations au cours des dernières années. Cependant, les échecs cliniques restent fréquents, ce qui souligne l’importance de sélectionner des composites performants parmi la large gamme de produits disponibles.

Les Résines Composites, Biomatériaux Dentaire

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