Traitement des dysmorphoses squelettiques de classe III
Définition de la classe III squelettique
Les classes III squelettiques regroupent les anomalies des bases squelettiques dans le sens sagittal, caractérisées par :
- Prognathie mandibulaire vraie : un angle SNB et des dimensions mandibulaires augmentés, alors que l’angle SNA est normal.
- Rétrognathie maxillaire : l’angle SNA est diminué ainsi que la longueur maxillaire, alors que l’angle SNB est normal.
- Association de la prognathie mandibulaire et de la rétrognathie maxillaire.
- Fermeture de l’angle de flexion de la base du crâne.
- Une anomalie cinétique peut s’ajouter, comme le proglissement mandibulaire.


Les classes III squelettiques présentent une classe III d’Angle avec des incisives en bout-à-bout ou en occlusion inversée. Elles entraînent un préjudice esthétique important. L’étiopathogénie est variée, et des anomalies associées (endognathie, face longue) compliquent la clinique.
Étiologie
Les causes des dysmorphoses squelettiques de classe III incluent :
- Hérédité
- Facteurs locaux
- Troubles endocriniens
- Environnement musculaire et dysfonctions (ex. : respiration buccale)
Facteurs influençant le traitement de la classe III squelettique
Le traitement dépend de plusieurs facteurs :
- Diagnostic étiologique : les possibilités thérapeutiques sont limitées si l’origine est héréditaire.
- Âge d’intervention : denture temporaire, mixte ou permanente, impliquant prévention, traitement orthopédique, orthodontique ou chirurgical.
- Quantité et rythme de croissance : la croissance résiduelle mandibulaire joue un rôle clé.
- Rotation antérieure de la mandibule : un traitement est plus favorable si elle n’aggrave pas le décalage des bases.
- Type et siège de l’anomalie : maxillaire, mandibulaire, mixte ou fonctionnelle.
- Anomalies associées.
Prévention et interception
La prévention et l’interception des classes III visent à :
- Normaliser la matrice fonctionnelle.
- Supprimer les interférences dentaires.
- Corriger les troubles cinétiques.
Le rétablissement précoce d’une occlusion incisive avec overjet et overbite positifs est essentiel pour normaliser la croissance ultérieure.
Action sur la matrice fonctionnelle
- Pour les bébés, éviter la position ventrale, privilégier la position latérale.
- Surveiller les voies aériennes supérieures pour qu’elles restent libres (ablation des amygdales ou végétations adénoïdes) afin d’éviter une position basse de la langue.
- Préconiser l’allaitement au sein et une alimentation non mixée dès l’établissement de la denture temporaire.
- Réaliser une frénectomie linguale avec rééducation en cas d’ankyloglossie.
- Effectuer une glossotomie en cas de macroglossie éventuelle.
- Supprimer les parafonctions favorisant les classes III, telles que :
- Onychophagie
- Attitude boudeuse
- Succion digitale avec traction sur la mandibule
Correction d’une occlusion incisive inversée
Les occlusions incisives inversées ou en bout-à-bout d’origine dentaire doivent être corrigées précocement pour éviter un verrouillage de la croissance maxillaire ou un proglissement mandibulaire. Exemples d’appareils :
- Plaque palatine avec ressort de Schwartz ou vérin à action sagittale avec surélévation.
- Plaque linguale avec arc vestibulaire actif et surélévation.
Correction du proglissement mandibulaire (Pseudo-prognathie)
Le proglissement mandibulaire est un phénomène cinétique simulant une classe III, mais pouvant évoluer en classe III squelettique. Sa correction précoce est cruciale.
- Urgence thérapeutique : non traité, ce trouble fonctionnel simple peut se transformer en classe III squelettique avec la croissance.
- Pronostic favorable : surtout chez le jeune enfant.
- Méthodes :
- Meulage des canines temporaires et équilibration précoce de l’occlusion.
- Fronde occipito-mentonnière, associée ou non à une plaque amovible de surélévation.
- Maintenir le port de la fronde comme contention pendant environ un an avec des forces réduites.
- En cas de vestibulo-version des incisives inférieures ou linguo-version des incisives supérieures, utiliser les appareils mentionnés ci-dessus.
- Autres dispositifs : enveloppe linguale nocturne (ELN) ou gouttière fonctionnelle pour classe III pour repositionner la langue et favoriser le guidage antérieur.
Traitement orthopédique de la classe III
L’orthopédie vise à corriger le décalage squelettique et à rétablir une occlusion antérieure normale en agissant sur la croissance, par :
- Stimulation de la croissance maxillaire.
- Freinage et réorientation de la croissance mandibulaire.
Indications
Le traitement orthopédique est indiqué en période de croissance chez les sujets présentant une croissance mandibulaire moyenne ou horizontale. Il est limité chez les sujets hyper-divergents en raison de sa composante d’ouverture verticale. Une surveillance de la croissance est nécessaire après correction pour éviter un rebond ou une récidive.
Appareils fonctionnels
Les principaux appareils incluent :
- Plaque de surélévation maxillaire ou plaque palatine à piste de désocclusion totale (PDT) : chez l’enfant en croissance (denture temporaire ou dès l’éruption des dents de 6 ans), l’augmentation de la dimension verticale d’occlusion freine l’avancée mandibulaire et promeut la croissance maxillaire.
- Régulateur de Fränkel type III.
- Bionateur de type III de Balters.
- Activateur d’Andresen de classe III.
Ces appareils favorisent le développement maxillaire dans les trois plans de l’espace tout en repositionnant la mandibule grâce aux stimuli masticatoires.

Activateur d’Andresen de classe III
Construit en rétropulsion, cet activateur enregistre la mandibule dans sa position la plus rétrusive forcée, augmentant la dimension verticale. Accessoires possibles :
- Arc d’Eschler pour maintenir la mandibule en rétroposition et linguo-verser les incisives inférieures après meulage de la résine rétro-incisive.
- Ressorts ou poussoirs pour vestibuler les incisives maxillaires et rétablir la clé incisive.
- Vérin médian pour une expansion maxillaire ou accompagner le développement transversal.

Effets :
- Rétropulsion de la mandibule, freinant la croissance condylienne et réduisant l’activité du ptérygoïdien latéral.
- Surélévation occlusale pour repositionner la mandibule distalement.
- Stimulation postéro-antérieure et transversale du maxillaire par le jeu musculaire.

Effets dento-alvéolaires :
- Mésialisation de l’arcade maxillaire avec vestibulo-version des incisives.
- Distalation de l’arcade mandibulaire avec linguo-version des incisives.
- Postérotation mandibulaire, contre-indiquée chez les hyper-divergents.
Indications : sujets jeunes, méso- ou hypo-divergents, sans compensations alvéolaires importantes.
Masques faciaux
Description
Les masques faciaux sont des appareils extra-oraux exerçant une traction postéro-antérieure sur le maxillaire grâce à des élastiques fixés sur :
- Un double arc scellé sur les deuxièmes molaires temporaires ou premières molaires permanentes maxillaires, avec un arc vestibulaire doté de deux éperons pour la traction élastique.
- Un disjoncteur.
- Une gouttière maxillaire scellée sur les secteurs latéraux, supprimant les verrous occlusaux et facilitant le saut d’occlusion antérieur.

Les masques les plus utilisés sont ceux de Delaire et de Verdon (à cadre ou à barre verticale). La traction, exercée au niveau des incisives latérales, est orientée vers le bas et l’avant pour éviter une rotation antihoraire du maxillaire, sauf en cas de supraclusion importante.
Forces : de 300 à 400 g chez les enfants de 6 ans, jusqu’à 800-1500 g. Port : 12 à 14 heures par jour.
Mode d’action
Le masque agit comme un « effet de tiroir », tractant le maxillaire en avant en éclatant la suture maxillo-palatine et bloquant la croissance condylienne pour créer un obstacle antérieur incisif.


Au niveau de la base du crâne
- Augmentation de la longueur antérieure de la base du crâne.
- Déplacement antérieur et supérieur du nasion.
Au niveau maxillaire
- Descente et avancement du point A de Downs (1 à 3 mm maximum).
- Mouvement vers le bas et en avant de l’épine palatine postérieure (1 mm d’avancement du point A entraîne 4 mm de descente du plan palatin postérieur).
- Augmentation de la longueur de la base maxillaire ENA-ENP de 3 mm.
- Avancée maxillaire liée à l’activité de la suture maxillo-palatine, efficace jusqu’à sa synostose.
Au niveau mandibulaire
- Compression postérieure condylienne, plus ou moins tolérée.
- Freinage de la croissance mandibulaire et rotation postérieure de la mandibule, avec possible réduction de l’angle goniaque.
Au niveau dentaire
- Glissement antérieur de l’arcade alvéolaire supérieure ou mésialisation de l’arcade maxillaire.
- Vestibulo-version des incisives supérieures.
- Mouvement vers le bas du plan occlusal antéro-supérieur.
Au niveau esthétique
- Amélioration des rapports labiaux et réduction de l’aplasie faciale.
- Freinage léger de la croissance mandibulaire par l’appui mentonnier.
- Postéro-rotation mandibulaire, entraînant abaissement et recul de la mandibule, avec augmentation de la hauteur faciale inférieure antérieure.
La disjonction transversale maxillaire potentialise l’effet de la traction postéro-antérieure.

Indications et contre-indications
Indications : particulièrement pour les classes III par rétrognathie maxillaire, ou comme appareil interceptif dans les cas de prognathie légère chez le jeune enfant.
Contre-indications : faces longues.
Masque de Delaire sur gouttière (Jean Louis Raymond)
Le meulage de la résine de la gouttière permet de réorienter le plan d’occlusion selon le plan de Camper, évitant la récidive. Utilisable dès 4 ans, préférablement avant l’éruption des deuxièmes molaires permanentes.

Mini-plaques à ancrage osseux
Utilisées pour la protraction maxillaire chez les patients en fin de dentition mixte ou permanente (10-12 ans), les mini-plaques évitent la vestibulo-version des incisives maxillaires et la rotation postérieure. Elles sont compatibles avec un masque de Delaire ou des élastiques intermaxillaires de classe III (protocoles de Gallagher, Sugawara, De Clerck).


Fronde occipito-mentonnière
Définition
Appareil extra-oral appliqué au menton, constitué d’une mentonnière (préfabriquée ou en résine) reliée à un casque par des bandes élastiques. La traction oblique au-dessus des oreilles est privilégiée.
Effets
- Freinage de la croissance mandibulaire.
- Contre l’ouverture d’articulé lors de l’utilisation des élastiques intermaxillaires.
Indication
Proglissement mandibulaire.

Avantages du traitement précoce de la classe III
Le traitement précoce est plus court, simple et facile, sans limite autre que la collaboration de l’enfant. Il prévient l’aggravation de la pathologie et :
- Les inclusions des canines dues à un manque de développement du prémaxillaire.
- Les troubles parodontaux causés par le traumatisme occlusal de l’articulé inversé.
- Les troubles temporo-mandibulaires liés à un articulé croisé, transversal ou antérieur.
- L’acte chirurgical à l’âge adulte.
Traitement orthodontique de la classe III
Sauf pour les déplacements orthodontiques précoces visant à établir la clé incisive, le traitement orthodontique est généralement réalisé en denture permanente, car la croissance résiduelle peut compliquer les cas limites, surtout avec des extractions. Il peut suivre une phase orthopédique ou être le seul traitement.
Tractions intermaxillaires de classe III
Elles permettent :
- Distalation de l’arcade mandibulaire et mésialisation de l’arcade maxillaire.
- Fermeture réciproque des espaces d’extraction par mésialisation des molaires maxillaires et rétraction du secteur antérieur mandibulaire.
Effet vertical : égression de la molaire maxillaire, pouvant entraîner une postéro-rotation mandibulaire.

Extractions dans les classes III
Les extractions sont envisagées en cas d’encombrement, de repositionnement incisif ou d’une classe III occlusale importante, réalisées en technique fixe.
Traitement chirurgico-orthodontique des classes III
La chirurgie est indiquée pour :
- Une classe III squelettique sévère non réduite pendant la croissance.
- Un préjudice esthétique important.
- Une anomalie transversale ou verticale associée.
- Des compensations alvéolaires marquées limitant le traitement orthodontique.
Elle est réalisée hors croissance pour éviter les récidives liées à une croissance mandibulaire tardive, surtout chez les garçons. L’indication chirurgicale est souvent posée précocement :
- Dès le diagnostic, en cas de décalage sévère et héréditaire.
- Après échec d’une thérapeutique orthopédique ou orthodontique.
- Après récidive.
Contention
La contention est nécessaire :
- Après la phase orthopédique, si le patient n’est pas en denture définitive et que le traitement orthodontique ne peut commencer (ex. : activateur de classe III en port nocturne, enveloppe linguale nocturne).
- À la fin du traitement orthodontique ou orthodontico-chirurgical.
Elle doit être prolongée (jusqu’à 2 ans après la fin de la croissance staturale) pour prévenir la croissance résiduelle mandibulaire et stabiliser la correction des dystopies. L’évolution des dents de sagesse doit être surveillée.
Conclusion
La classe III est un syndrome multiforme où la rétromaxillie/brachymaxillie est plus fréquente que la promandibulie. Le masque orthopédique est la thérapeutique la plus adaptée, offrant des résultats esthétiques et fonctionnels spectaculaires. Le traitement précoce est la clé du succès, évitant souvent la chirurgie à l’âge adulte. Laisser s’aggraver une pathologie curable serait contraire au rôle du thérapeute, qui privilégie la prévention, conformément aux recommandations de l’ANAES.
Traitement des dysmorphoses squelettiques de classe III
La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.
Traitement des dysmorphoses squelettiques de classe III

Dr J Dupont, chirurgien-dentiste spécialisé en implantologie, titulaire d’un DU de l’Université de Paris, offre des soins implantaires personnalisés avec expertise et technologies modernes.