Écosystème Buccal / Parodontologie

Écosystème Buccal / Parodontologie

Écosystème Buccal / Parodontologie

Introduction

La cavité buccale est notre principale voie de communication entre le milieu extérieur et l’intérieur de notre organisme par l’intermédiaire du tube digestif et de l’appareil respiratoire. Elle est le siège de nombreuses fonctions comme la respiration, l’alimentation, la communication ou l’expression. C’est un milieu complexe, et un véritable lieu d’échange et de régulation de notre santé.

Généralité sur le microbiote buccal

Le terme « microbiote » est communément utilisé. En odontologie, il n’est pas non plus récent puisqu’il est utilisé depuis les années 70-80. Les termes plus classiquement utilisés sont “plaque dentaire”, “flore”, “microflore”, ou encore “biofilm dentaire”, mais recoupent tous la même information sur la microbiologie buccale. Ce microbiote est aujourd’hui considéré comme responsable des pathologies buccales telles que la carie, la gingivite et la parodontite. Les microorganismes résidents vivent avec nous dans une relation symbiotique essentiellement harmonieuse, et ce sont les perturbations du microbiote buccal (dysbiose) qui peuvent avoir des conséquences néfastes sur les santés générale et bucco-dentaire.

Définition de l’écosystème buccal

Il s’agit d’un système d’interactions établies entre des groupes d’organismes et leur milieu physique ou inanimé. Ce système est composé de deux composantes principales :

  • Une communauté biotique : Elle comprend tous les microorganismes vivants dans l’écosystème.
  • Le milieu abiotique : Il comprend tous les éléments physiques ou chimiques de l’écosystème.

Autrefois, l’écosystème buccal était appelé le milieu buccal. Ce dernier est un environnement physico-chimique dynamique fait de constituants d’origines endogènes et exogènes, résidents ou en transit, susceptibles d’interagir entre eux et avec les entités anatomiques locales qui font partie et de contribuer à la physiologie et à la physiopathologie de la cavité buccale. Il s’agit d’une véritable niche écologique où cohabitent plusieurs éléments : les muqueuses buccales qui délimitent cette niche, la salive, les aliments, l’organe dentaire, et une flore buccale.

Constituants

Plus précisément, le milieu buccal comprend :

  • L’ensemble des structures limitant la cavité buccale (muqueuse, dent, langue et lèvres), ainsi que les éléments organiques et inorganiques qu’elles libèrent, tout le matériel biologique apporté par les différentes secrétions salivaires, les flores microbiennes commensales et pathogènes, les constituants du système immunitaire acquis ou inné, les cellules desquamées issues des muqueuses et des glandes salivaires, et les éléments apportés par le fluide gingival.
  • Les gaz ambiants plus ou moins chargés de particules en suspension pénétrant dans la cavité buccale, ainsi que les gaz expirés, les aliments, les boissons, les médicaments et les produits d’hygiène transitant par la bouche et leurs résidus retenus sur place, des traces de produits de restaurations dentaires, du sang provenant d’éventuelles hémorragies locales, parfois des mucosités provenant des secrétions nasales ou bronchiques régurgitées, ainsi que les composants apportés par de possibles reflux gastriques ou œsophagiens.

Classification des constituants

  • Éléments de transit : L’air et les aliments.
  • Éléments propres provisoires : Rapidement déglutis.
  • Éléments propres provisoires constants (éphémères) : La salive.
  • Éléments propres provisoires inconstants : Le fluide gingival, car il dépend de l’état inflammatoire.
  • Flore spécifique :
    • Flore mobile : La flore microbienne saprophyte dans la cavité buccale (la flore buccale).
    • Flore fixée : La plaque dentaire.

Flore buccale

L’homme est constitué de $10^{13}$ cellules et abrite $10^{14}$ micro-organismes. La flore résidente contribue directement ou indirectement au développement normal de la physiologie, de la nutrition et du système de défense de l’hôte. Chez l’homme, la flore buccale est très complexe et diversifiée.

Définition

Il s’agit d’un ensemble d’éléments microbiens d’espèces différentes, vivant dans un même milieu.

Composition

La flore buccale est constituée de parasites eucaryotes, de champignons, de levures, de mycoplasmes et de bactéries d’espèces différentes. La coexistence d’un si grand nombre de micro-organismes dans un même habitat dépend des relations entre eux et le milieu buccal. Elle renferme plus de 50 milliards de bactéries réparties sur plus de 500 espèces différentes, soit plus de 20 genres distincts (AFSSAPS, 2011). Ces différents groupes de bactéries colonisent les différentes surfaces buccales. Les bactéries représentent 20 mg dans la bouche. La communauté bactérienne buccale est la 2ème communauté bactérienne la plus diversifiée du corps humain (après la communauté bactérienne intestinale).

Figure 1 : Répartition et quantité des bactéries dans les différents habitats faciaux

Les bactéries peuvent adopter deux modes de vie radicalement différents, soit à l’état planctonique dans lequel les microorganismes isolés flottent dans le milieu buccal, soit dans un biofilm, où les bactéries sont attachées à une surface dentaire et vivent en communauté.

Flore commensale

Les bactéries et l’hôte vivent en harmonie, et la flore buccale dans cette situation est dite “commensale”. La flore commensale est une flore de barrière. Elle s’oppose à l’arrivée d’éventuels pathogènes exogènes et au développement de micro-organismes endogènes pathogènes opportunistes. La rupture de cet équilibre est à l’origine de maladies parodontales et de caries dentaires. La flore commensale peut rester stable dans le temps. Elle découle d’un équilibre dynamique relationnel entre l’espèce bactérienne et les interactions hôte-bactérie. Les bactéries planctoniques nagent librement dans la bouche (non fixées), et les microorganismes stagnant à la surface des dents et des tissus mous constituent la flore microbienne saprophyte, mais en équilibre avec l’hôte. Elle est relativement inoffensive dans certaines circonstances.

Adhérence bactérienne

L’adhérence bactérienne implique des mécanismes physico-chimiques spécifiques. Elle est influencée par les interactions entre les surfaces bactériennes et les surfaces colonisées. L’adhérence est un déterminant écologique primordial pour que les bactéries buccales persistent et survivent. La bouche est le site unique où la présence des dents dures permet le développement d’une flore particulière organisée en biofilm dentaire, alors que la desquamation des tissus épithéliaux favorise l’élimination bactérienne de la plupart des muqueuses.

Toutes les surfaces sont cependant recouvertes d’un film de mucines salivaires continu et fortement hydrophile. Cette mucine se présente sous forme d’un gel hydraté complexe composé de glycoprotéines salivaires appelé « la pellicule acquise exogène (PAE) ». Son rôle est la lubrification des muqueuses, l’imperméabilisation et la protection contre les changements brusques de la pression osmotique, mais elle participe également à l’adhérence bactérienne.

Figure 2 : L’attachement bactérien réversible sur la surface dentaire

Une caractéristique importante des bactéries est que ces cellules portent à leur surface une charge électrique globalement négative, elles tendent donc à se repousser électro-statiquement. La surface de la dent est également chargée négativement et repousse les bactéries. Cependant, les bactéries sont également soumises à l’influence de forces électrodynamiques (forces de Van Der Waals). Ces forces sont attractives et leur rayon d’action est supérieur à celui des forces électrostatiques répulsives. Les forces attractives et répulsives favoriseront l’éloignement des bactéries à une distance bien définie de la surface dentaire. Cet éloignement est influencé par la présence d’ions. Un pH acide ou une concentration accrue de cations feront diminuer l’écartement.

L’importance de la glycocalyx pour l’adhérence bactérienne s’explique par le fait que la glycocalyx constitue un prolongement hydrophile qui s’étend au-delà de la surface fortement chargée de la cellule bactérienne, pouvant ainsi permettre le franchissement de l’intervalle séparant les bactéries de la surface dentaire. Lorsque la glycocalyx arrive au contact de la surface de la dent, d’autres forces attractives telles que des liaisons d’hydrogène peuvent s’établir. Les pili ou fimbriae sont habituellement assez longs pour s’avancer au-delà de la glycocalyx. Ils peuvent de ce fait faciliter le franchissement de l’intervalle et l’établissement d’un contact entre les bactéries et la surface dentaire.

Figure 2 : L’adhérence bactérienne

Facteurs écologiques

Différents facteurs influencent la croissance et la compétition bactérienne au sein de l’écosystème. Ces facteurs écologiques comportent :

  • Facteurs de l’environnement : L’alimentation, le pH, O₂, CO₂.
  • Facteurs de l’hôte : La salive, le fluide gingival et les moyens de défense immunitaire.
  • Facteurs liés aux interactions microbiennes : L’adhérence inter-bactérienne et la compétition pour les substrats.

L’écologie de la plaque microbienne est un reflet des écosystèmes dynamiques complexes dans lesquels des forces sélectives patentes régulent la colonisation bactérienne. Les facteurs de virulence des bactéries englobent la capacité de coloniser des sites spécifiques, la possibilité d’esquiver les défenses de l’hôte et la capacité de léser les tissus.

Figure 4 : Les facteurs déterminant la croissance bactérienne

Biofilms dentaires

Le microbiome buccal correspond à la plaque dentaire qui est organisée en biofilm dentaire complexe. Il se compose d’une communauté microbienne formée essentiellement de bactéries. (Voir le cours de Parodontologie de 2ème année « Biofilms dentaires »).

Fluide gingival

Si le sillon gingivo-dentaire est habité par une flore microbienne agressive, une réponse inflammatoire se met en place. Cette dernière commence par une exsudation qui se produit aux dépens du liquide interstitiel appelé fluide gingival. Ce dernier est un exsudat inflammatoire qui finit par sourdre dans l’espace buccal et se mélange avec la salive. (Voir le cours de Parodontologie de 2ème année « Fluide gingival »).

Salive

Les salives sont issues des glandes salivaires (majeures et mineures). (Voir le cours de Parodontologie de 2ème année « Salive »).

Moyens de défense de l’écosystème buccal

Le milieu buccal est soumis à de multiples agressions de nature physique, chimique et biologique contre lesquelles il doit se défendre. Pour faire face à d’éventuelles agressions, il adopte une série de mécanismes innés ou acquis, spécifiques ou non spécifiques.

Moyens de défense locale et générale

  • Salive, fluide gingival.
  • Sang (Ig, PMN).

Moyens de défense non spécifique

  • Mécanismes physiologiques : La desquamation, la kératinisation, l’autonettoyage, et le pouvoir tampon salivaire.
  • Substances jouant un rôle bactéricide : La lactoferrine, les lysozymes, les leucocytes et la mucine.

Moyens de défense spécifique

  • Immuno-globulines (Ig A, Ig E, Ig G et Ig M).

Conclusion

La cavité buccale, porte d’entrée de notre système muqueux, est une véritable interface entre le milieu extérieur et le milieu intérieur. Cette dernière est le siège de multiples interactions dont les conséquences cliniques sont autant locales que distantes. Une meilleure compréhension de ces interactions biologiques permet d’éclaircir la pratique médicale et la fluidité des échanges avec les autres disciplines, ce qui améliore la démarche diagnostique et enrichit le processus de décision thérapeutique.

Références bibliographiques

  1. Bouchard P : Odontologie, Parodontologie Dentisterie implantaire, Tome 1 : Edition Lavoisier Médecine Science, Paris. 2015.
  2. Chardin H et al : Microbiologie en odontostamaologie. Edition Maloine, Paris, 2006.
  3. Lindhe J : Manuel de parodontologie clinique. Edition CdP, Paris ; 1988.

Écosystème Buccal / Parodontologie

  La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes. Les étudiants en médecine dentaire doivent maîtriser l’anatomie dentaire et les techniques de diagnostic pour exceller. Les praticiens doivent adopter les nouvelles technologies, comme la radiographie numérique, pour améliorer la précision des soins. La prévention, via l’éducation à l’hygiène buccale, reste la pierre angulaire de la pratique dentaire moderne. Les étudiants doivent se familiariser avec la gestion des urgences dentaires, comme les abcès ou les fractures dentaires. La collaboration interdisciplinaire avec d’autres professionnels de santé optimise la prise en charge des patients complexes. La santé bucco-dentaire est essentielle pour le bien-être général, nécessitant une formation rigoureuse et continue des dentistes.  

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